Rev Med Liege 2008; 63 : 5-6 : 231-237 231
I
ntroductIon
A l’heure actuelle, les méthodes de neuro-
imagerie fonctionnelle sont largement utilisées
à travers le monde, tant au niveau clinique que
dans la recherche scientifique. Si le développe-
ment de ces techniques a commencé il y a seule-
ment quelques dizaines d’années, les bases sur
lesquelles elles reposent sont bien plus ancien-
nes. D’un point de vue historique, la première
manière d’explorer le fonctionnement du cer-
veau était de le disséquer en post-mortem et de
réaliser des corrélations anatomocliniques. Grâce
aux avancées technologiques, il est désormais
possible d’étudier in vivo le fonctionnement du
cerveau dans des conditions physiologiques ou
pathologiques.
A la fin du 19
ème
siècle, le physiologiste italien
Angelo Mosso observa fortuitement une rela-
tion entre le débit sanguin cérébral et l’activité
neuronale en étudiant les pulsations cérébrales
chez un traumatisé crânien (1). Lorsque Mosso
demanda au patient d’effectuer une tâche de
calcul mental, il observa une augmentation des
pulsations cérébrales et du débit sanguin. Cette
observation a été la première à suggérer que la
mesure du flux sanguin cérébral pouvait être un
moyen d’évaluer la cognition humaine.
Plus tard à l’Université de Cambridge, Char-
les Roy et Charles Sherrington ont précisé cette
relation entre activité neuronale et flux sanguin
cérébral. Se basant sur des expériences animales,
ils ont suggéré que le cerveau possède un méca-
nisme intrinsèque par lequel le débit sanguin
peut varier localement en fonction des variations
locales de l’activité neuronale (3). Un des plus
extraordinaires exemples de cette relation a été
observé chez Walter K, un marin qui se plaignait
d’entendre un bourdonnement. Le médecin qui
l’examina confirma la présence de ce bruit anor-
mal en plaçant un stéthoscope à l’arrière de la
tête du patient. Walter K. présentait en fait une
O. GO s s e r i e s (1), A. De m e r t z i (1), Q. NO i r h O m m e (1), J. ts h i b A N D A (6), m. bO l y (1), m. Op D e be e c k (2),
r. hu s t i N x (3), p. mA Q u e t (4, 5), e. sA l m O N (4, 5), G. mO O N e N (5), A. lu x e N (4), s. lA u r e y s (1, 4, 5),
x. De ti è G e (2)
RÉSUMÉ : Les techniques d’imagerie fonctionnelle cérébrale
(IFC) étudient in vivo le fonctionnement du cerveau humain
dans des conditions physiologiques ou pathologiques. Elles
permettent d’identifier les réseaux neuronaux impliqués dans
diverses tâches psychomotrices. Cet article décrit trois tech-
niques d’IFC fréquemment utilisées en recherche en neuro-
science et en clinique : l’imagerie par résonance magnétique
fonctionnelle (IRMf), la tomographie par émission de positons
(TEP) et la magnétoencéphalographie (MEG). L’IRM et la TEP
mesurent les changements hémodynamiques régionaux induits
par les variations de l’activité neuronale. Ces deux techniques
possèdent une haute résolution spatiale (quelques millimètres),
mais une résolution temporelle relativement médiocre (quel-
ques secondes à plusieurs minutes). L’électroencéphalogramme
(EEG) et la MEG mesurent l’activité électromagnétique neuro-
nale avec une très haute résolution temporelle (de l’ordre de la
milliseconde), mais avec une résolution spatiale plus faible (de
quelques millimètres à un centimètre). L’intégration de ces dif-
férentes techniques d’IFC permet, en combinant ces différents
aspects (couplage neurovasculaire, activité électromagnétique),
d’étudier le fonctionnement cérébral avec une haute résolution
temporelle et spatiale.
M
o t s
-
clés
: Neuro-imagerie fonctionnelle - Imagerie par
résonance magnétique - Tomographie par émission de positons -
Magnétoencéphalographie - Intégration multimodale
F
u n c t i o n a l
n e u r o i M a g i n g
(
F
Mri, Pet
a n d
Meg) :
w h a t
d o
w e
M e a s u r e
?
SUMMARY : Functional cerebral imaging techniques allow
the in vivo study of human cognitive and sensorimotor func-
tions in physiological or pathological conditions. In this paper,
we review the advantages and limitations of functional magne-
tic resonance imaging (fMRI), positron emission tomography
(PET) and magnetoencephalography (MEG). fMRI and PET
measure haemodynamic changes induced by regional changes
in neuronal activity. These techniques have a high spatial reso-
lution (a few millimeters), but a poor temporal resolution (a
few seconds to several minutes). Electroencephalogram (EEG)
and MEG measure the neuronal electrical or magnetic acti-
vity with a high temporal resolution (i.e., milliseconds) albeit
with a poorer spatial resolution (i.e., a few millimeters to one
centimeter). The combination of these different neuroimaging
techniques allows studying different components of the brain’s
activity (e.g., neurovascular coupling, electromagnetic activity)
with both a high temporal and spatial resolution.
K
eywords
: Functional neuroimaging - Magnetic resonance
imaging - Positron emission tomography - Magnetoencephalo-
graphy - Multimodal integration
QUE MESURE LA NEURO-IMAGERIE
FONCTIONNELLE :
IRMf, TEP & MEG ?
(1) Coma Science Group, Centre de Recherches du
Cyclotron, Université de Liège.
(2) Unité de Magnétoencéphalographie, Hôpital Erasme,
Université Libre de Bruxelles.
(3) Service de Médecine Nucléaire, Centre Hospitalier
Universitaire de Liège.
(4) Centre de Recherches du Cyclotron, Université de
Liège.
(5) Service de Neurologie, Centre Hospitalier Universi-
taire de Liège.
(6) Service de Radiologie, CHU Sart Tilman, Liège.