L’ÉTHIQUE ET LE SUJET 3
L’étymologie (Vocabulaire de la philosophie de Lalande)
La philosophie, champ de questionnement fondamental auquel se rattache principalement
l’éthique, renvoie à trois dimensions principales :
A/ ensemble des prescriptions admises dans une société et à une époque déterminée :
éthique de prescription = morale ;
B/ la « science » ayant pour objet la conduite (le comportement) des hommes, abstraction faite
des jugements de valeurs : éthique de comportement = éthologie ;
C/ La « science » qui prend pour objet immédiat les jugements des actes qualifiés :
éthique de conscience = « science » des valeurs.
Éthique vs morale – déontologie – axiologie
Morale, déontologie, axiologie apparaissent dans le voisinage linguistique immédiat du mot
éthique ; essayons de les différencier.
La morale a, au fond, la même signification étymologique, référée au latin mores (coutumes) — qui
renvoie aux mœurs — que ethos s’enracinant lui dans la culture grecque. Pour notre part il nous
semble justifié de voir dans l’idée d’éthique une acception de questionnement plus manifeste et
une visée plus universelle que dans le terme de morale renvoyant, lui, plutôt à la dimension
prescriptive ou interdictrice et à l’adhésion à un système de valeurs plus dogmatique. De là
d’ailleurs l’une des causes probables d’un certain discrédit attaché aujourd’hui à une morale
perçue comme « moralisatrice » (souvent qualifiée péjorativement de « judéo-chrétienne » ou
« bourgeoise »), supposée plus située du côté du conformisme, de l’inhibition et de la « fermeture
dogmatique » que du côté d’une vision évolutive des mœurs et de l’humanité vivante et
questionnante.
La déontologie renvoie actuellement à des pratiques professionnelles et concrètement à un certain
nombre de codes, de chartes, de règles, issues et applicables principalement à tel ou tel secteur
professionnel ou telle ou telle entreprise. Le mérite évident de ces codifications est de favoriser
une certaine clarification des problèmes et questions pratiques, définissant ainsi des droits et des
devoirs. Mais deux écueils se dessinent d’emblée, le premier tient au caractère local, voire
corporatiste, en tout cas assez strictement orienté vers des situations concrètes qui évacuent de
facto deux types de questionnements : d’abord ceux qui renvoient à des perspectives plus larges
et plus complexes et d’autre part l’évitement de la question des fondements. Ainsi le
renouvellement de l’éthique se réduirait, selon la logique instrumentale dominante, à une pluralité
de « contrats déontologiques », qui au mieux garantiraient le respect minimal des règles de l’art et,
au pire, dans une forme pervertie, deviendraient un simple argument de marketing. Cette pluralité
de déontologies n’est pas problématique par elle-même ; elles le deviennent dans cette quasi
absence généralisée de réflexion fondamentale propre à l’époque contemporaine, laquelle, au
contraire, en prise à une complexité croissante exigerait simultanément une intelligence plus large
et plus globale des situations critiques, auxquelles les « codes locaux » sont incapables de faire
face. On voit qu’à l’évidence il ne s’agit pas dans notre esprit de critiquer a priori le bien-fondé de
ces codes déontologiques spécifiques actuellement florissant dans tous les secteurs, mais de
veiller d’une part à laisser ouvert le champ de leur questionnement en amont vers une vision des
valeurs morales impliquées et en aval vers les entrelacements de la complexité des situations.
Le troisième terme convoqué à la discussion est celui d’axiologie qui appartient plus au
vocabulaire philosophique, venant du grec axios qui signifie « qui vaut, qui mérite », donnant
également sens au terme d’axiome, comme position fondamentale ; de plus, si le terme d’axe n’est
pas relié directement à la même étymologie, il permet, par analogie, de donner un surcroît de