L`Ethique pour le XXIe siècle, 21-22 septembre 2001, Maison de l

L'ETHIQUE POUR LE XXIe SIECLE
21-22 septembre 2001
Maison de l'UNESCO, Paris
Organisé par la Division des sciences humaines, de la philosophie
et de l'éthique des sciences et des technologies
RAPPORT
(i)
Rapport
L'ETHIQUE POUR LE XXIe SIECLE
21-22 septembre 2001
Siège de l'UNESCO, Paris
Table des matières
1. Introduction et séance inaugurale
2. Séance I : Un cadre commun pour l'éthique du XXIe siècle : point de départ d'un
dialogue éthique - Commentaires et critique
3. Séance II : Le rôle de l'éthique au XXIe siècle
4. Séance III : Les différentes approches de l'éthique
5. Séance IV : L'avenir de l'éthique
Annexe I : Programme de la réunion
Annexe II : Liste des participants
Annexe III : Discours inaugural du Sous-Directeur général pour les sciences sociales et
humaines
(SHS-2001/WS/14)
L'éthique pour le XXIe siècle
Réunion d'experts
Siège de l'UNESCO
21-22 septembre 2001
1. Introduction et séance inaugurale
Les défis soulevés par le monde du XXIe siècle, avec un ensemble de problèmes et de
situations nouveaux, sont de plus en plus complexes dans leur nature et multiples dans leurs
dimensions. La menace qui pèse sur l'environnement, la diminution constante des ressources,
le fossé toujours plus profond entre riches et pauvres, les changements sociétaux liés au
progrès scientifique, le processus de mondialisation économique, culturel et politique, toutes
ces caractéristiques de la société contemporaine ont en commun leur portée planétaire.
Ce contexte, associé au degré sans précédent d'interrelations et d'interdépendance entre
habitants de toutes les régions, est qualifié d'état "d'incertitude" ou de "crise" dans les
croyances et les valeurs qui fondaient jusque là nos sociétés. L'humanité est loin d'avoir
trouvé les réponses aux problèmes transfrontières qui accompagnent l'apparition d'une
communauté planétaire. Il est certain toutefois que l'existence d'une telle communauté appelle
une réflexion sur les bases qui lui permettront de rester pacifique et productive.
Comme dans toute communauté, un minimum de compréhension et d'accord est
nécessaire sur les politiques ou les normes qui régissent l'ordre planétaire, et celles-ci doivent
s'appuyer sur un ensemble de principes fondamentaux susceptibles de guider un tel processus.
A la différence cependant d'autres collectivités, la communauté planétaire ne possède ni
constitution, ni tradition pour lui servir de référence. Elle manque d'une part de structures de
gouvernance, d'autre part d'un cadre éthique auquel se référer. Ce lien entre éthique et
gouvernance à l'échelle planétaire trouve une forte résonance à l'Organisation des
Nations Unies. Selon les mots de leur Secrétaire général, M. Kofi Annan, sous la pression des
événements actuels, "plus que jamais, nous avons ressenti les douleurs de la mondialisation
et la nécessité de sous-tendre le marché mondial par l'acceptation du monde entier"1. Or,
comment mener la quête de telles valeurs, et comment assurer son efficacité au regard de la
gouvernance planétaire ?
Une chose est claire. S'il doit y avoir quête par la communauté internationale d'un
terrain d'entente, il lui faut un espace pour engager un dialogue interculturel sur l'éthique. La
communauté internationale doit s'employer activement à ouvrir ce processus de dialogue et de
compréhension et à offrir un tel espace au sein duquel puissent s'opérer des échanges entre
civilisations.
La nécessité d'une coopération et d'une action internationales sur les réponses éthiques
appelées par les problèmes actuels transparaît dans les divers projets menés en matière
d'éthique par les grandes institutions internationales. Des efforts sans précédent sont déployés
aujourd'hui dans le monde pour promouvoir la réflexion sur les dimensions éthiques de la
société contemporaine. Ces efforts, conduits au sein et à l'extérieur du système des
Nations Unies, invitent la communauté internationale à se responsabiliser et à réfléchir
ensemble sur des valeurs communes.
1 Discours prononcé à l'Organisation des Nations Unies le 14 décembre 1999.
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La grande majorité de ces efforts portent sur des domaines spécifiques et spécialisés, de
la biologie, des affaires et de l'environnement à l'informatique, à l'économie et au
développement. Ils abordent les problèmes d'éthique dans un contexte particulier. Ils se
préoccupent des profondes ramifications sociétales et éthiques des mutations et des progrès
qui se produisent notamment dans le secteur des sciences et des technologies, et qui
nécessitent des penseurs pour chercher des solutions à des problèmes et des situations
jusqu'alors inconnus. Mais ils ne sont pas forcément prévus pour couvrir dans son ensemble le
champ de l'éthique. De fait, on imagine mal qu'une éthique sectorielle puisse servir de
parapluie à d'autres branches de l'éthique, ni jeter les bases d'une réponse aux problèmes
d'éthique planétaires auxquels est confrontée la société contemporaine.
Ce qui fait défaut aux différents appels à la réflexion éthique, c'est de poser des
questions fondamentales : qu'est-ce que la responsabilité ? qu'est-ce qui constitue des
valeurs ? qu'est-ce que la notion de communauté ? qu'entraînent, supposent et projettent ces
notions ? Il manque un organisme coordonnateur qui offre un lieu où résoudre les difficultés
conceptuelles sous-jacentes à ces appels. Il faut un agent capable d'instituer un dialogue et une
interaction fructueux entre les intéressés et d'amener les différents groupes concernés à
aborder et débattre les aspects fondamentaux de l'éthique. A cet égard, l'UNESCO doit jouer
un rôle de premier plan.
Le but de cette réunion d'experts était d'achever le Projet d'éthique universel en
abordant certains problèmes et en analysant la contribution qu'un tel projet peut apporter au
discours international sur l'éthique (Annexe I - Programme de la réunion). De par son mandat,
l'UNESCO doit être le point de convergence de tous les efforts entrepris en matière d'éthique
à l'échelon national et international, avec la participation de penseurs, de décideurs et de
représentants de la société civile (Annexe II - Liste des participants).
Au nom du Directeur général, le Sous-Directeur général de l'UNESCO pour les sciences
sociales et humaines a prononcé un discours de bienvenue dans lequel il a souligné
l'importance de la réflexion éthique dans la sphère internationale (Annexe III).
S. E. M. R. Carazo Odio, ancien président du Costa Rica, a pris la parole ensuite pour affirmer
la nécessité de l'éthique sur le chemin de la paix mondiale. Il a insisté sur le fait que le
désarmement ne suffit pas pour construire la paix. Une société pacifique repose sur des
valeurs telles que le respect et la tolérance et doit être motivée par un sens de la responsabilité
partagé par la communauté mondiale. "L'ère planétaire" a besoin d'une "foi commune" édifiée
sur la solidarité et le pluralisme.
Un message du Secrétaire général du HCR a été lu, dans lequel le professeur Lubbers
soulignait la nécessité d'un dialogue sur l'éthique au regard de l'avenir de la démocratie
mondiale et d'une société durable et participative, et présentait la Charte de la Terre comme la
volonté de réaliser "une vision commune de valeurs fondamentales qui donneront une base
éthique à la nouvelle communauté planétaire".
Le Dr Muller, président honoraire de l'Université pour la Paix au Costa Rica, a fait
observer la portée de la réflexion éthique dans la résolution de différentes "catégories de
problèmes humains" affrontées par le monde du XXIe siècle. Il a évoqué sa propre expérience
de la guerre et de la violence, ainsi que sa croyance dans la capacité de l'être humain à trouver
des voies pour la paix et la solidarité.
Le Dr Eide, ancien président de la Commission nationale norvégienne pour l'UNESCO,
a mis l'accent sur l'importance d'un dialogue libre et ouvert en matière d'éthique et sur la
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nécessité d'un lieu où échanger librement ses points de vue dans un esprit de diversité
culturelle.
Séance I
Un cadre commun pour l'éthique au XXIe siècle :
point de départ d'un dialogue éthique
La première séance était présidée par le professeur F. Dallmayr. La parole a été donnée
tout d'abord au professeur Y. Kim, ancien directeur principal de la Division de la philosophie
et de l'éthique de l'UNESCO et actuel secrétaire général de la Commission nationale coréenne
pour l'UNESCO. Le professeur Kim a rappelé que la société contemporaine soulève des
problèmes communs, tels que les questions environnementales liées au progrès technologique
et scientifique. Devant ces problèmes communs, les solutions traditionnelles échouent à
donner des réponses valables. Les solutions aux problèmes contemporains doivent passer par
l'éthique ou, plus exactement, par une "éthique civile planétaire". L'orateur a expliqué que
telle était la raison initiale pour laquelle il avait, en tant que Directeur principal de la Division
de la philosophie et de l'éthique, lancé le "Projet d'éthique universel" et publié le Cadre
commun pour l'éthique au XXIe siècle, marquant le début des activités de l'UNESCO pour la
promotion du dialogue international sur des valeurs communes.
Table ronde
Les participants ont admis en nombre la nécessité d'une éthique à l'échelle planétaire,
tout en posant diverses questions sur l'autorité dont pourrait se réclamer un document comme
le "Cadre commun". Un tel document peut-il changer quelque chose dans le monde ? Certains
jugent déjà problématique en soi la "définition" de valeurs générales communes. Définir des
valeurs est un processus de longue haleine qui ne peut se borner à leur simple sélection. La
façon de procéder la plus raisonnable semble être la démarche empirique, c'est-à-dire la
résolution de problèmes dans un contexte donné. S'il peut y avoir divergence d'opinions et
d'interprétations sur une valeur générale, il peut également se produire une forte convergence
entre diverses valeurs. Il est nécessaire que ce document intègre la place des religions. Il
importe de faire participer les populations du monde entier au dialogue sur l'éthique, car on ne
peut imposer des doctrines en la matière.
De façon générale, deux grands problèmes ont été notés concernant ce document. L'un
porte sur ses prémisses, l'autre sur son application. Le second point se révèle particulièrement
important, et il convient d'en distinguer les différents aspects. Le premier a trait à la
"traduction". Comment traduire des valeurs ou des normes dans la langue de cultures
différentes ? Le deuxième concerne la nature des principes normatifs. Quelle est la
signification de tels principes au regard de problèmes spécifiques ? Le troisième, enfin, est
celui de la dimension pratique du document. Comment l'éducation à l'éthique peut-elle aider à
résoudre des questions de comportement liées aux responsabilités ?
Un autre problème relatif au "Cadre commun" concerne la distinction à faire entre
morale, éthique et droit. Ce point appelle une analyse non seulement du fondement des
normes éthiques, mais aussi de leur spécificité épistémologique et axiologique. Aucun texte
d'éthique ne devrait être définitif. Il devrait constituer un "travail en cours" susceptible
d'intégrer les fruits de la discussion ouverte et de la réflexion. Par ailleurs, la question des
destinataires d'un tel document n'est pas claire. En conclusion, il a été pris acte avec
satisfaction du rôle de l'UNESCO dans la promotion de la réflexion éthique.
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