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VARIABILITÉ DU CLIMAT
Caroline NORRANT
1
VARIABILITE CLIMATIQUE
PASSEE, CHANGEMENT
CLIMATIQUE FUTUR :
QUE PEUT-ON REELLEMENT OBSERVER ?
RÉSUMÉ
Le changement climatique est analysé au travers de
l'évolution des températures de surface mais également d'autres paramètres, comme les précipitations ou la banquise marine. Il est également tenu
compte de la variabilité naturelle du climat, qui se
distingue du changement climatique lorsque l'on
s'intéresse à des échelles de temps beaucoup plus
longues. Afin d'expliquer ces modifications, les causes naturelles et anthropiques des variations climatiques sont également traitées, à différentes échelles de temps et d'espace. Pour terminer, leurs
conséquences sur l'augmentation globale des températures attendue pour la fin du XXIe siècle sont
envisagées.
INTRODUCTION
1 Université des
Sciences et
Technologies de Lille.
EA 4019 TVES.
UFR de Géographie
et Aménagement. Av.
Paul Langevin.
59655 Villeneuve d'Ascq
France
Tél : +33 3 20 33 70 55
Fax : +33 3 20 33 60 74
Mél : Caroline.Norrant
@univ-lille1.fr
Dans le contexte actuel de changement climatique, même si l'ensemble de la communauté
scientifique s'accorde sur la réalité d'une modification de climat et sur un réchauffement global à
venir (IPCC, 2007), il reste encore parfois malaisé de faire la part entre une réelle modification
qui serait en train de se produire et la variabilité
naturelle du climat. En effet, il est coutumier
d'entendre, lorsque se produisent des événements extrêmes, qu'il est encore trop tôt pour les
imputer au changement climatique, et qu'il est
plus prudent à l'heure actuelle de les considérer
comme de la variabilité interannuelle naturelle
au climat. C'est pourquoi cet article se propose
d'appréhender la modification du climat à différentes échelles temporelles, mais également spatiales. Dans un premier temps, l'analyse portera
sur la variabilité naturelle du climat, dans laquelle sera replacée le changement climatique, selon
différents paramètres climatiques. Puis les causes
des variations climatiques, aussi bien naturelles
que d'origine humaine, seront étudiées. Enfin,
l'évolution future du système climatique jusqu'en
2100, telle que présentée par les modèles, sera
envisagée.
I - LA VARIABILITE CLIMATIQUE A
PLUSIEURS ECHELLES DE TEMPS
1 - L'évolution des températures
moyennes de surface
Les variations depuis le milieu du XIXe siècle
A partir de 1854, suite à la conférence internationale de Bruxelles qui établit un protocole de
mesure des données océaniques par les navires
marchands, il est possible de représenter les températures moyennes de surface pour les deux
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hémisphères et pour la totalité du globe (Fig.1).
Des enregistrements continentaux ont débuté
avant cette date, mais il est impossible de créer
une moyenne globale. Il faut tout de même préciser que ces séries, même si elles sont admises
comme valides par la communauté scientifique,
restent quand même incertaines, surtout au début
de la période.
- une phase stationnaire de 1856 à 1920 environ,
avec entre ces dates des phases plus ou moins
froides ;
- une première hausse entre 1920 et 1940 environ, lors de laquelle les températures moyennes
de surface augmentent de près de 0,5°C ;
- une nouvelle phase de stagnation entre 1940 et
1980 ; il est même possible d'y discerner une faible diminution dans l'hémisphère nord ;
- une seconde phase de hausse à partir de la fin
de la décennie 1970.
Cependant, en s'intéressant à des échelles de
temps plus brèves, des variations importantes des
températures moyennes de surface peuvent également se produire. Par exemple, à l'échelle globale, la température moyenne de surface diminue
de 0,3°C (soit environ la moitié de la variation
observée sur l'ensemble de la période) entre 1998
et 2000, ou bien encore elle augmente de
presque 0,4°C entre 1876 et 1878. Cela montre
qu'une grande prudence est de mise lorsqu'un
nombre réduit d'années est analysé.
Les dix années les plus chaudes depuis 1856 se
produisent toutes depuis 1989. Cependant, cette
évolution est un peu abstraite et masque notamment d'importants écarts dans l'espace (Fig.2).
Figure 1 : Evolution des températures
de surface hémisphériques et globales
(d'après IPCC, 2007)
Nous remarquons toutefois que la température
moyenne de surface a augmenté de près de 1°C
depuis la fin du XIXe siècle jusqu'à la fin du XXe siècle. La valeur admise par la communauté scientifique est de +0,6°C, avec une marge d'erreur de
±0,2°C, de 1856 à la fin du XXe siècle. Cette
hausse n'est cependant pas régulière, et quatre
phases peuvent être distinguées :
Ainsi, la tendance observée lors de la phase de
hausse thermique de la fin du XXe siècle montre
que la température augmente presque partout
excepté sur quelques secteurs très précis dans les
océans de l'hémisphère sud et en quelques points
de l'hémisphère nord. La hausse est particulièrement marquée sur le centre de l'Amérique du
Nord, le nord-est de l'Europe et l'est de l'Eurasie,
mais moins importante dans la zone tropicale.
Ceci signifie que l'augmentation moyenne observée au niveau planétaire est à nuancer dans l'espace, et qu'elle ne représente pas parfaitement l'évolution thermique de chaque région du globe, puisqu'il existe des différences aux échelles spatiales
plus fines.
Figure 2 : Tendances des températures en points de grille (d'après IPCC, 2007)
6 - Air Pur N° 72 - Deuxième semestre 2007
Les variations thermiques sur le long terme
Lorsque l'analyse tente de replacer l'évolution
contemporaine dans un contexte plus vaste (Fig.3),
il apparaît que la température moyenne de surface
a augmenté de 0,8°C environ depuis la fin du
XIXe siècle, avec deux phases de hausses plus
importantes (entre 1920 et 1940 et depuis 1975
environ). Sur une période plus longue, la température moyenne de surface est relativement stable,
avec toutefois une diminution notable entre 1600
et 1900 environ (cette baisse est appelée le « petit
âge glaciaire »). Ainsi la période actuelle ne semble
pas beaucoup plus chaude que celle dite de « l'optimum médiéval », entre 1100 et 1350 environ.
tions entre les périodes glaciaires (les températures
sont 6 à 10°C inférieures à celles d'aujourd'hui) et
interglaciaires (les températures oscillent entre
±2°C par rapport à aujourd'hui).
C'est dire donc s'il faut nuancer l'augmentation
observée des températures au cours du XXe siècle,
puisque remises dans un contexte beaucoup plus
large, les quantifications de la hausse correspondent à des valeurs déjà observées à d'autres
époques. Cependant, ce n'est pas pour autant qu'il
faille nier l'actuelle modification du climat, dont la
hausse des températures représente une des facettes les plus visibles.
2 - Evolution contemporaine d'autres
paramètres climatiques
C'est pourquoi après la hausse constatée des températures moyennes de surface qui, même si elle
est constatée globalement, observe tout de même
des nuances dans le détail régional, d'autres paramètres climatiques peuvent également refléter le
changement climatique global qui est en train de
se produire. Parmi les plus visibles et accessibles,
les précipitations seront analysées dans un premier temps, puis la banquise et les glaciers continentaux.
Figure 3 : Evolution des températures globales
depuis l'an 1000 (d'après Petit et al., 1999)
Sur une période encore plus longue, la température moyenne de surface a varié sans doute de
moins de 2°C depuis presque 10 000 ans (Fig.4).
Elle peut donc être considérée comme stable à
cette échelle de temps. La principale modification
se situe vers 10 000-12 000BP, avec la fin de la
dernière glaciation (appelée le Würm en Europe) :
la température moyenne de surface varie alors de
6 à 10°C entre une période glaciaire et interglaciaire. La Figure 4 présente ainsi l'évolution des
températures reconstruites à partir du carottage de
Vostok en Antarctique oriental, qui permet de
remonter jusqu'à 420 000 ans avant le présent.
Les températures montrent de très fortes varia-
L'évolution des précipitations
Les mesures de précipitations sont dans l'ensemble de moins bonne qualité que celles des données thermiques : ceci s'explique par le fait que les
précipitations sont un champ discontinu dans
l'espace, contrairement aux températures.
L'observation en est donc plus incertaine.
La tendance générale est plus difficile à décrypter
(Fig.5), cependant il est possible de déterminer :
- l'augmentation la plus forte au cours du XXe siècle concerne les précipitations des moyennes et
hautes latitudes en automne et en hiver ;
- les latitudes subpolaires sont plutôt le siège d'une
diminution des précipitations ;
- dans la zone tropicale les variations des pluies
sont plutôt disparates.
Cependant, tout comme pour les températures,
ces variations des précipitations masquent de fortes disparités locales.
La banquise et les glaciers continentaux
Figure 4 : Evolution des températures depuis
400 000 BP (d'après Petit et al., 1999)
Cet exemple est traité car le bilan glaciaire dépend
à la fois des températures et des précipitations,
deux paramètres qui viennent d'être examinés.
Globalement, l'extension des glaciers a diminué
depuis la fin du XIXe siècle, tout comme la banquise marine arctique (Fig.6a), suivie par satellite
depuis la décennie 1970. Cependant pour cette
dernière, la diminution s'est faite rapidement en
1979-1980, puis après cette date la diminution
s'est poursuivie, mais plus faiblement, avec même
un léger gain entre 1996 et 1999. L'évolution de
la banquise marine antarctique montre le même
Air Pur N° 72 - Deuxième semestre 2007 - 7
Figure 5 : Tendances des précipitations au XXe siècle (d'après IPCC, 2007)
profil (Fig.6b) avec une diminution brutale de son
extension entre 1973 et 1977, suivie d'une phase
de stabilité, voire une légère augmentation à partir de la décennie 1990.
II - LES ORIGINES DES VARIATIONS DU CLIMAT
1 - Les causes de la variabilité climatique
La constante solaire
Les variations de la constante solaire existent sur
quasiment toutes les échelles de temps. Leur
influence la mieux connue se produit aux échelles
de 10 à 100 ans, et est liée à différents cycles ;
tout d'abord le cycle des tâches solaires, zones
sombres sur le soleil associées à des facules, c'est-
à-dire des tâches plus claires émettant plus d'énergie : l'apparition et la disparition de ces tâches,
se produisant sur une période de 11 ans, entraîne
de faibles variations de l'émission d'énergie par le
soleil (modification de 1 W.m2 environ). Une
seconde variation est un cycle plus lent, d'échelle
séculaire (90 à 100 ans), entraînant des variations
de l'énergie émise par le soleil de 3-4 W.m2.
Toutefois, ces modifications restent faibles et n'ont
que peu de conséquences sur l'évolution des températures de surface, si ce n'est parfois dans le cas
des cycles séculaires, le climat ayant le temps de
réagir à la modification du rayonnement solaire.
Les paramètres orbitaux
Les paramètres orbitaux sont au nombre de trois,
il s'agit de l'obliquité (l'angle formé entre le plan
équatorial et le plan de l'écliptique), l'excentricité
Figure 6 : Evolution de la banquise marine arctique (a) et antarctique (b) (d'après IPCC, 2007)
8 - Air Pur N° 72 - Deuxième semestre 2007
Figure 7 : Les paramètres orbitaux (d'après ENS, 2007)
(l'orbite de la Terre autour du soleil se fait selon
une ellipse dont le soleil est un des foyers) et la
précession (le lent changement de direction de
l'axe de rotation de la Terre) (Fig.7). Leurs variations ne modifient pas la quantité de rayonnement
solaire qui arrive sur Terre en moyenne annuelle,
mais elles modifient sa répartition spatiale et saisonnière, créant ainsi une alternance entre périodes glaciaires et interglaciaires. En effet, le pointclé pour que commence une glaciation est la
quantité d'énergie solaire arrivant aux hautes latitudes de l'hémisphère nord en été (au-delà de
65°N), car seul cet espace peut supporter une
grande extension des inlandsis : ce qui est important n'est pas tant que la neige tombe en hiver,
mais surtout qu'elle ne fonde pas en été (elle se
transformera alors en glace l'hiver suivant, et s'épaissira au fil du temps). Les conditions les plus
favorables à l'enclenchement d'une glaciation sont
alors une Terre la plus éloignée du soleil lors de
l'été boréal associée à une faible obliquité, favorisant ainsi un été frais et long ; inversement, les
conditions les plus favorables à une déglaciation
sont une forte obliquité et une distance Terresoleil minimale lors de l'été boréal.
D'autre part, des boucles de rétroaction internes
au système climatique peuvent amplifier la réponse du climat, le stabilisant alors dans un état glaciaire ou interglaciaire.
Les autres facteurs naturels
D'autres facteurs naturels sont susceptibles d'intervenir dans les variations du climat, comme par
exemple le volcanisme : celui-ci produit un important forçage radiatif dans le sens d'un refroidissement, mais qui est très bref dans le temps (2 à 3 ans
au maximum). Cette influence nécessite l'injection
d'une grande quantité de soufre dans la stratosphère, qui constitue alors une sorte de « voile »
qui augmente l'albédo planétaire. La température
baisse donc en surface (de -0,2° à -0,4° en général), mais cette action est limitée dans le temps.
Sur des échelles de temps beaucoup plus importantes (à l'échelle de millénaires), d'autres facteurs
naturels peuvent encore modifier le climat,
comme par exemple la tectonique des plaques,
qui modifie la répartition des terres et des mers et
peut fermer des bassins océaniques, l'orogénèse
qui peut agir sur l'écoulement de l'air et donc sur
la circulation atmosphérique générale, ou encore
certains phénomènes cosmiques (collision avec un
astéroïde, passage dans un nuage de poussières
stellaires…) qui peuvent modifier radicalement le
climat.
2 - Les activités humaines et leur
influence sur le climat
L'action de l'homme sur le climat se manifeste par
la modification des états de surface continentaux
(défrichement et début de l'agriculture), mais surtout par la modification de la composition chimique de l'atmosphère. Il a ainsi été découvert
dans les glaciers alpins des preuves de pollution de
l'air au plomb datant de l'époque romaine…
Cependant, ces modifications sont restées locales
et assez insignifiantes jusqu'au XXe siècle, pendant
lequel l'influence anthropique est devenue massive, surtout lors de la seconde moitié de ce siècle.
Une autre modification fondamentale récente est le
changement d'échelle spatiale : en modifiant la
composition chimique de l'atmosphère avec des
gaz y résidant longuement (au moins 10 ans), les
Air Pur N° 72 - Deuxième semestre 2007 - 9
conséquences de cette modification sur le climat
seront mondiales (en effet, les gaz résideront dans
l'atmosphère plus longtemps que le temps nécessaire à un brassage de la totalité de l'atmosphère 6 mois pour un hémisphère et un an pour le globe).
L'évolution des gaz à effet de serre
Depuis le début de l'industrialisation, les concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère ont
augmenté (Fig.8). Certains de ces gaz existaient
dans la nature avant l'intervention de l'homme
(CO2, CH4, O3, N2O…); d'autres en revanche sont
synthétiques et ne se rencontrent pas à l'état naturel (comme par exemple les CFC, HCFC, HFC etc.).
Certaines mesures ont débuté dès le XIXe siècle,
mais les mesures directes et continues ne commencèrent qu'après la seconde guerre mondiale.
Le dioxyde de carbone est mesuré directement
à effet de serre (CH4, N2O et CFC) ont également
augmenté depuis le XIXe siècle (Fig.8). Les taux
enregistrés n'ont jamais été aussi élevés. Le cas des
CFC est toutefois particulier : les principaux CFC
(CFC-11 et CFC-12) ont théoriquement été éliminés par les protocoles de Copenhague (1992) et
de Montréal (1987). Cependant, même si la production a été stoppée, leur concentration dans
l'atmosphère restera stable encore de nombreuses
années en raison de la durée de vie de ces composés dans l'atmosphère (de 50 à 100 ans).
La modification des états de surface :
l'exemple de la déforestation
Figure 8 : Evolution de différents gaz
à effet de serre (IPCC, 2007)
Les grands massifs forestiers des zones tropicales
(bassin de l'Amazone, du Congo, Indonésie et
Nouvelle-Guinée) jouent un rôle fondamental du
point de vue climatique : elles représentent des
lieux d'ascendance majeure quasi-permanente de
la circulation atmosphérique tropicale.
Or, ces zones forestières subissent une forte pression anthropique, notamment la déforestation économique pour la vente du bois ou la culture de
palmiers à huile. Certains feux qui s'y développent
sont attribués aux variations climatiques (à cause
d'une grande sécheresse liée au phénomène El
Niño), mais d'autres sont le fait d'allumage volontaire et qui peuvent s'étendre en dehors de tout
contrôle du fait des conditions météorologiques.
L'extension actuelle de la forêt tropicale primaire
est estimée à 57 % de son extension d'origine
(FAO, 2007), la diminution ayant été la plus forte
dans les zones de plus intense pression démographique : Amérique centrale, Afrique de l'ouest,
Inde et Asie du sud-est. En Amazonie et sur le bassin du Congo l'extension de la forêt reste encore
assez forte mais la dynamique actuelle de déforestation engendre une diminution sensible des
surfaces forestières.
Les conséquences climatiques attendues sur le
lieu même de la déforestation sont une désertification, entraînée par un assèchement des sols. En
effet, enlever les arbres change les conditions
radiatives régionales et diminuent le recyclage de
l'eau in situ, augmentant ainsi sur place les températures au niveau du sol. Les nouvelles conditions
depuis 1957 au pôle sud
et 1958 à Hawaï (à
Mauna Loa) : ces deux
sites étant éloignés des
sources majeures d'émission de CO2, ils permettent de mesurer la « pollution de fond » de l'atmosphère en dioxyde de
carbone (Fig.9). En 1958,
la concentration en CO2
atteignait 315 ppm avec
un taux d'accroissement
de 0,6 ppm/an. La
concentration actuelle est d'environ 380 ppm.
Les concentrations atmosphériques des autres gaz
Figure 9 : Evolution de la concentration
atmosphérique de CO2 à Mauna Loa
et au Pôle sud (d'après IPCC, 2007)
10 - Air Pur N° 72 - Deuxième semestre 2007
qui se mettent en place entretiennent alors des
conditions de sécheresse.
D'un point de vue global, les conséquences climatiques de la déforestation sont plus difficiles à
appréhender, les conséquences exactes d'une
modification du cycle de l'eau sur les continents et
la circulation atmosphérique générale étant encore mal connues. Cependant, ces régions ayant un
rôle important du point de vue climatique, ce ne
serait pas trop s'avancer de supposer que si elles
sont atteintes d'une modification majeure, le reste
du climat terrestre, qui n'est pas indépendant de la
région tropicale, risque de réagir en réponse à
cette modification.
III - L'EVOLUTION FUTURE
DU SYSTEME CLIMATIQUE
AU XXIe SIECLE
Il a été vu précédemment que l'évolution des températures contemporaines comporte essentiellement deux phases de hausse : à partir de 1920
jusqu'en 1940, puis depuis 1975. Cette évolution
est partiellement reproduite par les modèles climatiques : en effet, les paramètres naturels de
variabilité climatiques, une fois pris en compte
dans les modèles climatiques, sont capables d'expliquer à eux seuls la première phase de hausse
des températures.
Cependant pour expliquer la seconde phase de
hausse, après 1975, il faut également tenir compte des forçages liés aux activités humaines, c'est-àdire à l'augmentation de la concentration
atmosphérique des gaz à effet de serre. Cela constitue une preuve indirecte mais hautement probable que l'homme et ses activités ont une influence
sur l'évolution constatée des températures, du
moins depuis la fin du XXe siècle.
L'évolution du système climatique au cours du
XXIe siècle ne peut être abordée qu'au travers de
simulations, c'est-à-dire en utilisant des modèles
climatiques. Il n'est pas possible de faire une analogie avec une situation à peu près similaire ayant
déjà eu lieu, étant donné qu'une élévation des
concentrations de gaz à effet de serre telle que
celle qui risque de se produire au cours du XXIe
siècle n'a jamais été rencontrée jusqu'à présent.
Toutefois, il est possible d'affirmer que les forçages
« naturels » (les paramètres orbitaux et les éruptions volcaniques) vont continuer d'influencer le
climat, mais les prévisions sont incertaines pour
ces paramètres, si ce n'est concernant une élévation de la constante solaire jusqu'en 2040 environ,
puis suivie d'une diminution.
Les forçages liés aux activités anthropiques sont
théoriquement plus contrôlables, malgré un degré
d'incertitude. C'est pourquoi ils sont évoqués sous
la forme de divers scénarios, qui représentent chacun différentes hypothèses d'émission de gaz à
effet de serre par nos sociétés. Le point commun
à tous ces scénarios d'émission est une augmentation de la concentration atmosphérique de gaz à
effet de serre, qui sera plus ou moins importante
en fonction des choix qui seront effectués à l'échelle planétaire (Fig.10).
Dans le cadre de cette augmentation de la
concentration atmosphérique de gaz à effet de
serre, la température moyenne devrait augmenter
de près de 3°C d'ici 2100, avec de fortes modulations temporelles et spatiales (Fig.11). En effet, l'élévation des températures sera plus importante
dans les hautes latitudes de l'hémisphère nord,
Figure 10 : Les différents scénarios d'émission de l'IPCC (d'après IPCC, 2007)
Air Pur N° 72 - Deuxième semestre 2007 - 11
Figure 11 : Evolution modélisée des températures de surface mondiales pour 2100
(d'après IPCC, 2007)
alors que certaines zones du Pacifique sud risquent de ne pas connaître d'évolution des températures. Cependant, la réponse de l'ensemble du
système climatique et du cycle hydrologique en
particulier est plus difficile à déterminer que l'évolution des températures.
CONCLUSION
Par conséquent, le changement climatique observé
et à venir reste à appréhender avec de nombreuses précautions, non seulement du fait des diverses
marges d'incertitudes liées à la reconstitution des
données du passé et à la modélisation des données
du futur, mais également à cause de l'échelle spatiale qui, si elle est trop fine, est difficile à reconstruire avec précision. Toutefois, il est un fait certain : c'est qu'un changement climatique, dû à
l'homme et à ses activités, est en train de se produire. Ses premières traces sont visibles sur l'évolution des températures du XXe siècle, mais également sur d'autres paramètres, comme les précipitations ou la régression des calottes arctique et
antarctique. De plus, cette modification du climat
va se poursuivre sur l'ensemble du XXIe siècle et audelà, entraînant une hausse globale des températures. Toutefois, ce réchauffement ne sera pas
homogène à l'échelle de la planète, et pourra se
traduire par des augmentations plus ou moins fortes de la température, voire même des diminutions, selon les régions considérées. Il est donc particulièrement important de préciser l'échelle spatiale et temporelle sur laquelle porte l'analyse, le
changement climatique déjà observé et attendu
s'interprétant différemment selon l'échelle envisagée.
12 - Air Pur N° 72 - Deuxième semestre 2007
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SIGLES
IPCC : Intergovernmental Panel on Climate Change
CO2 : dioxyde de carbone
CH4 : méthane
O3 : ozone
N2O : protoxyde d'azote
CFC : chlorofluorocarbure
HCFC : hydrochlorofluorocarbure
HFC : hydrofluorocarbure
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