3
Secrétariat général du club Hippocrate : Péniche « La Rafale », face au 52 quai Le Gallo - 92100 Boulogne-Billancourt
produit, avec de fait une différentiation selon les marchés,
en fonction de leurs objectifs de chiffres d'affaires, mais en
tenant également compte des conditions d'accès à chaque
marché.
Comment les prix sont-ils élaborés en
pratique ? On présente ici en termes
généraux et de façon statique un
processus de décisions séquentielles
d'allocation internes de ressources entre
différents projets et la construction
progressive d'hypothèses de prix.
Comme dans toute entreprise, la
direction générale d'un laboratoire
pharmaceutique doit répartir son
budget annuel prévisionnel de
dépenses entre les différentes fonctions
de l'entreprise. Les fonctions principales
sont la R&D, la direction générale (et les
fonctions d'analyse stratégique), la
production, la fonction commerciale
(marketing/vente), les fonctions
supports (assurance qualité,
réglementaire, affaires publiques,
finance). Le budget R&D est lui-même décomposé entre la
fonction " découverte ", la phase pré-clinique, et les trois
phases cliniques. Ce budget inclut également un financement
prévisionnel pour des acquisitions de brevets ou de start-ups,
pour développer des produits qui n'auraient pas été
découverts par la R&D maison. Chacun de ces budgets donne
lieu à des moments d'arbitrage, pour éliminer des projets qui
n'auraient pas montré une probabilité suffisante de succès.
Le critère principal d'arbitrage entre les projets est leur valeur
actualisée nette (VAN), égale à la somme actualisée sur la
durée de vie estimée de chaque projet des dépenses
envisagées et des recettes prévisionnelles. Très en amont,
l'analyse est fortement entachée d'incertitude, sur le
positionnement futur de la molécule, la taille de marché
attendue, le positionnement
concurrentiel. Il est alors difficile de
formuler des hypothèses de prix. Les
facteurs déterminants de choix sont
alors le risque technique, la probabilité
de montrer un rapport bénéfice/risque
positif. Plus on descend vers la
commercialisation, plus les hypothèses
de calcul peuvent être affinées et
précisées, en particulier les hypothèses
de prix. Cependant, le risque technique
perdure jusqu'à la présentation d'un dossier à
l'enregistrement auprès des autorités d'autorisation de mise
sur le marché.
Trois principaux facteurs seront pris en compte dans la
détermination d'un prix.
• Le premier est une estimation de l'investissement réalisé en
R&D et en coûts prévisionnels de production du produit, en
relation avec la contribution attendue du produit au profit
futur de l'entreprise, en fonction des attentes des
actionnaires.
• Le second est la taille attendue du marché : plus le marché
est petit, plus le prix demandé sera élevé.
• Le troisième est une appréciation de l'élasticité de la
demande des différents marchés. Cette
appréciation est fonction des résultats
attendus : quel apport de la molécule
par rapport aux traitements existants ?
Comment ce bénéfice sera-t-il évalué
par les principaux payeurs ? Elle est
aussi fonction du niveau de prix
observables dans la même aire
thérapeutique.
Cette réflexion sur le niveau de prix
acceptable court pendant toute la phase
de développement clinique de la
molécule. Elle devient intensive à partir
des essais de Phase II. Elle aboutit in fine
à l'élaboration d'une stratégie globale
de prix, qui prend comme point de
départ le marché américain, encore le
plus important pour les firmes. Dans
cette stratégie, il est usuel pour les
firmes de tenter le prix maximum dans les limites connues de
l'acceptabilité par les payeurs, car en tout état de cause ce
prix ne pourra que baisser une fois confronté à la demande.
Les prix sont ensuite déclinés pays par pays, en fonction de la
connaissance acquise sur les mécanismes d'accès au
remboursement et de fixation des prix dans chaque pays.
Cette connaissance détermine aussi de façon pragmatique la
séquence de lancement dans chaque pays, qui est déterminée
par les facteurs suivants.
Sur le marché européen, la séquence usuelle commence par
l'Allemagne et le Royaume-Uni, deux pays au sein desquels les
laboratoires peuvent fixer librement leurs prix. Les laboratoires
intègrent cependant que leur prix d'entrée sera plus bas que
celui affiché aux États-Unis. Cela permet d'aborder les autres
marchés européens avec un niveau de
base élevé. L'accès aux autres marchés
se fait généralement en fonction de leurs
tailles respectives, les trois autres grands
marchés européens étant la France,
l'Italie et l'Espagne. Le marché européen
présente deux caractéristiques
importantes : la pratique par les payeurs
du référencement externe - la
détermination du prix dans un pays en
fonction des prix observés sur les autres
marchés- et l'existence du commerce parallèle. De ce fait, les
laboratoires adoptent ce qu'ils appellent une stratégie de
corridor de prix, de façon à prévenir les écarts de prix trop
importants entre les pays, ouvrant des opportunités au
commerce parallèle et de façon à diminuer les effets du
référencement externe. Dans cette stratégie, un autre facteur
joue un rôle important. Sur la plupart des marchés majeurs, les
laboratoires sont obligés de négocier soit des accords de type
prix-volume, soit des accords de rabais. Ces accords sont
confidentiels, car il est primordial pour les firmes que seul le
prix officiel accepté, dit " prix facial ", soit connu d'un marché
à l'autre. Ceci permet également de limiter la portée du
référencement externe et les risques de commerce parallèle.
“ Sur le marché européen, la
séquence usuelle commence par
l'Allemagne et le Royaume-Uni,
deux pays au sein desquels les
laboratoires peuvent fixer
librement leurs prix. L'accès
aux autres marchés se fait
généralement en fonction de
leurs tailles respectives, les trois
autres grands marchés
européens étant la France,
l'Italie et l'Espagne. ”
“ Sur la plupart des marchés
majeurs, les laboratoires sont
obligés de négocier soit des
accords de type prix-volume, soit
des accords de rabais. ”