Pacioli N° 410 IPCF-BIBF / 21 septembre - 4 octobre 2015
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– Couvertures, sûretés ou garanties : comment la banque
pourra-t-elle récupérer son argent si l’entrepreneur ne
tient pas ses engagements ?
– Fonds propres : quel capital propre l’entrepreneur est-
il prêt à investir dans son projet ?
Le crowdfunding permet de rassurer le banquier sur
deux de ces éléments. L’un financier – celui relatif aux
fonds propres injectés dans le projet – l’autre, plus sub-
jectif, le « capital confiance » que le banquier attribuera au
projet et à ses protagonistes.
Le niveau des fonds propres est un élément crucial pour
le banquier. Pas seulement parce qu’il permet de diminuer
le montant du financement – et par là le risque de crédit
– mais surtout car il permet de jauger l’implication et la
confiance de l’entrepreneur dans son propre projet ainsi
que de voir dans quelle mesure il est littéralement « prêt à
se mouiller » pour son idée. La norme moyenne en termes
de fonds propres pour un starter est de l’ordre de 25 % du
montant global du projet, mais de multiples paramètres
interviennent dans cette exigence du banquier et la ré-
alité d’un dossier pourra dès lors significativement l’en
éloigner (à la hausse comme à la baisse).Pour la raison
invoquée plus haut, l’organisme financier souhaitera tou-
jours un minimum de fonds propres venant du porteur
de projet lui-même. Il diminuera son exigence normative
du fait d’apports en fonds propres issus d’autres origines :
– les « 3 F »pour« Family, Fools and Friends » : l’entourage
proche qui souhaite aider au lancement du projet;
– les Business Angels : les investisseurs privés qui inves-
tissent une partie de leur patrimoine, pour des montants
souvent importants, dans le capital d’une entreprise;
– les organismes publics ou Invests : la prise de partici-
pation ou les prêts subordonnés via Sowalfin, Brustart,
SRIB, Participatiefonds Vlaanderen, Invests régionaux;
– et… le crowdfunding.
Le financement participatif doit donc plutôt être considé-
ré comme une source complémentaire de fonds qui para-
chève le budget pour atteindre le minimum de capitaux
propres souhaité par le banquier. Le terme « parachever »
est consciemment choisi ici étant donné que le banquier
validera un apport de fonds propres externes complé-
mentaire mais pas exclusif. L’exigence du banquier vis-à-
vis des fonds propres s’explique par le fait que son métier
principal est celui de gérer l’épargne de ses clients et de
la transformer en crédits en « bon père de famille ». Son
rôle n’est pas d’investir dans du capital à risque ni d’être
intéressé aux bénéfices des entreprises.
Quant au « capital confiance » vis-à-vis du projet, le crowd-
funding apportera une plus-value certaine et d’une autre
ampleur encore que ne peuvent l’être les apports via un
Business Angel ou via les « 3F ». En effet, cette technique
permet de mettre en exergue de façon visible et tangible
l’intérêt du produit/projet pour un public souvent très
large. Cet avantage joue indubitablement sur la percep-
tion et la crédibilité que le banquier pourra donner au plan
financier qui sera avancé par le starter et son comptable.
Pré-sélection et accompagnement
des bons projets
La plupart des plateformes de crowdfunding – et plus spé-
cifiquement celles qui proposent des solutions via apport
en capital ou sous forme de prêts –, analysent de façon ap-
profondie les projets qui leur sont présentés. Elles doivent
apporter une valeur ajoutée réelle d’autant plus qu’elles
seront souvent associées indirectement à la gestion des
entreprises qu’elles auront sélectionnées. Les projets mis
à disposition sur la plateforme sont donc souvent plus
aboutis dans leur réflexion que beaucoup d’autres dos-
siers qui arrivent, parfois « bruts de décoffrage », entre les
mains du banquier. Il s’agira en général de projets « best in
classes » sélectionnés sur base de diagnostics stratégiques
et financiers. Ils ont souvent fait l’objet d’une phase de
« crowdvoting » pour déterminer le potentiel commercial
du projet. A côté de cette phase de présélection, l’accom-
pagnement que le starter pourra recevoir de la part des
membres du comité de la plate-forme et le feed-back qu’il
pourra recevoir de la part d’un large public sont égale-
ment des gages de qualité et de levier commercial.
Le plus souvent, le crowdfunding sera donc un outil com-
plémentaire au financement bancaire. Pour preuve, les
récentes initiatives dans les domaines bancaires visant
soit à intégrer une plateforme de crowdfunding (Bolero
KBC), privilégier des partenariats exclusifs (BNP Paribas
et MyMicroInvest) ou en recommander l’une ou l’autre en
fonction des spécificités de l’entreprise et de son projet
(Belfius Banque).
Le crowdfunding pourra être un outil de financement
purement alternatif dans le cadre de levées de fonds pour
de la R&D, ou pour financer la phase d’industrialisation
d’un produit. Le banquier ne rentrera en général pas
dans un processus de financement avant le stade de la
commercialisation.
Plusieurs modèles de Crowdfunding2
Le crowfunding sous forme de dons avec
contreparties non financières (reward-
based crowdfunding) ou sans contrepartie
(donation-based crowdfunding)
Le retour sur investissement s’effectue dans ce cas sous
la forme d’une compensation du type bon de réduction,
exclusivité sous forme de préachat, réception d’échantil-
2 Les diverses formes de crowdfunding et les données chiffrées dans cet
article sont basées sur une étude réalisée par KPMG.