le judaïsme en israël aujourd`hui

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Le défi du fondamentalisme
au coeur des trois religions abrahamiques
PROF CLAUDIO MONGE
Université de Fribourg
Faculté de Théologie
SP. - AA. 2013-2014
LE JUDAÏSME EN ISRAËL AUJOURD’HUI
Le choc est d’autant plus rude lorsqu’il devient clair que l’oppression officielle et la haine se
généralisent en Europe de l’Est, et que l’antisémitisme prend également de l’ampleur en
Occident. Les penseurs juifs affichent alors un sens toujours plus aigu du tragique de la vie
humaine.
Quant à la tendance nationaliste juive, elle se concrétise dans le sionisme, dérivé de « Sion »,
qui désigne à la fois Jérusalem, la terre et le peuple d’Israël. Contesté, à l’origine, par de
nombreux chefs religieux de toutes tendances et par les socialistes juifs, le sionisme trouve
dans le cours des événements la justification de son projet.
En revenant au cadre général, les sociologues israéliens, en regardant à la diversité complexe
du monde juif, font souvent une distinction entre les laïcs (peu intéressés par la religion, mais
pas forcément antireligieux), les traditionalistes ou conservateurs (pratique religieuse
partielle), les orthodoxes (pratique religieuse stricte, mais immersion dans le monde
moderne) et les ultra­orthodoxes (pratique religieuse stricte, large refus de la modernité,
volonté forte de séparatisme social : vêtements spécifiques, quartiers spécifiques, institutions
religieuses spécifiques).
À noter que les ultra­orthodoxes ne se définissent pas eux­mêmes comme tels, mais comme des
juifs Haredim (« les trembleurs », au sens de « ceux qui tremblent devant Dieu », ou « les
craignant­Dieu »). Les orthodoxes et les Haredim ne diffèrent pas d’un point de vue
théologique, mais dans leur mode de vie et leurs orientations politiques.
Vers le début du XXe siècle, la distinction entre juifs orthodoxes « modernes » (vivant dans le
monde moderne) et juifs orthodoxes Haredim (refusant de s’y compromettre) étaient en cours
de constitution. Et tant les Mitnagdim (ou « opposants ») que les Hassidim (deux groupes qui,
au début, étaient complètement opposés) se trouveront dans le même camp Haredi. Leur idéal
commun reste une vie juive centrée sur les rabbins, refusant beaucoup d’aspects du monde
moderne (on rejette en particulier les moyens de communication de masse, comme la
télévision), regroupée dans des quartiers séparés, tant des non­juifs que des autres juifs.
Physiquement, leurs vêtements noirs (les « hommes en noir » selon l’expression israélienne)
les font remarquer facilement. Le degré de séparatisme social et de refus de la modernité
varient selon les communautés.
Certaines ailes, comme la Edah Haredit, sont particulièrement strictes dans leur rejet. Ainsi,
les membres de la Edah prient pour la destruction de l’État d’Israël, un état impie, refusent de
pratiquer l’hébreu moderne parlé en Israël, vivent de façon strictes dans des ghettos, ont leurs
propres tribunaux rabbiniques et évitent même, quand cela est possible, la nourriture cachère
des autres communautés, qu’ils suspectent volontiers de laxisme dans le respect des rituels.
L’usage de la télévision est totalement banni.
À l’inverse, les Hassidim de Loubavitch, tout en respectant scrupuleusement le mode de vie
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ultra­orthodoxe, ne rejettent pas totalement les apports du monde moderne. En particulier, si
l’utilisation de la technologie reste très contrôlée, les Loubavitchs l’acceptent s’ils estiment que
cela peut embellir leur service de Dieu, y compris en apparaissant parfois à la télévision pour
y prêcher leurs positions religieuses. Les Hassidim de Loubavitch ont aussi des pratiques
professionnelles plus diversifiées que celles d’autres communautés, du moins tant que ces
métiers n’entrent pas en contradiction avec leurs convictions religieuses. Cette position
originale dans le monde ultra­orthodoxe a des racines spirituelles mais aussi pratiques. Au
plan spirituel, les Loubavitchs considèrent que l’objectif de la création est de créer une
résidence pour Dieu ici­bas. En s’engageant dans le monde, les Loubavitchs entendent
sanctifier celui­ci au nom de Dieu. Au plan pratique, cet engagement permet aux Loubavitchs
d’être en contact avec des Juifs très éloignés des pratiques religieuses, en vue de les ramener
vers ces pratiques.
LE JUDAÏSME EN AMÉRIQUE
Le premier groupe est arrivé à New York en 1654. Au moment de la Révolution
américaine, il n’y avait moins de 1000 Juifs et aucun rabbin. Au 19ème siècle, sont
arrivés les Ashkénases d’Allemagne, qui étaient surtout des commerçants et des
colporteurs et quelques Sépharades d'origine Hispanique, qui étaient surtout des
marchands et des commerçants. De 1880 à 1920, deux millions de Juifs sont venus
aux ETATS-UNIS, surtout de Pologne et de Russie, la plupart d’entre eux étaient
Orthodoxes.
En 1972, pour la première fois dans l’histoire du judaïsme, une femme, Sally Preisand,
a été nommée rabbin.
Les Juifs aux Etats-Unis à nos jours : le 2 % de la population.
Entre 7% et 10% des juifs se reconnaissent comme orthodoxes aux États-Unis, mais ils
sont 14% à New York. 42,4% des juifs américains et 34,2% des juifs new-yorkais se
définissent comme réformés.
En 1997, il y en avait 6,9 millions, avec 4 branches principales :
("l’Annuaire Juif américain" 1990) :
- Orthodoxe : 1 million, 1,200 congrégations.
- Reformé : 1.3 millions, 848 congrégations.
- Conservateur : 2 millions, 800 congrégations.
- Reconstructioniste : fondé en 1922, ce courant typiquement américain, ne
représente, lui, que 1% du judaïsme américain (50,000 membres).
1- Orthodoxes :
C’est la forme la plus ancienne du Judaïsme aujourd’hui. Ils affirment leur fidélité
inébranlable aux traditions de l’Europe centrale et orientale et manifestent une forte
résistance à l’intégration, pure et simple, dans la société américaine. Plus que d’un
courant, il s’agit d’un ensemble de mouvements ayant résisté aux idées d’assimilation
prônées par les Lumières juives. Chaque groupe se dit héritier de la tradition de la
théologie juive, mais tous reconnaissent de façon générale, plus ou moins littérale, les
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principes de Maïmonide (1135-1204). Ils suivent la Loi de la Torah et les 613
commandements de l’Halakah. Ils prient 3 fois par jour, mangent seulement
l’alimentation casher, observent le Shabbat, s’abstiennent de relations sexuelles
pendant 2 semaines chaque mois, évitent le mariage interreligieux et consacrent
beaucoup de temps à l’étude de l’Ecriture sainte. Les femmes sont exclues du
rabbinat, de la lecture de la Torah dans la Synagogue et empêchées de contribuer au
quorum exigé de dix personnes pour une réunion de prière. La place de la femme est
à la maison. Les Orthodoxes attendent l’arrivée du Messie.
Ils sont venus en Amérique en 1625 suivant le Sépharadisme. En 1831 à Philadelphie,
a pris l’essor aussi le rite Ashkénaze. Des institutions orthodoxes incluent les
Séminaires YESHIVOS d’Étude de la Torah; l’université Théologique hébraïque à
Chicago et le Conseil Rabbinique d'Amérique.
En 1898 est fondée l’Union des congrégations juives orthodoxes d’Amérique. Plusieurs
séminaires orthodoxes sont créés dans le pays. Cependant, face aux conservateurs et
aux réformés et malgré la vitalité des Loubavitch et d’autres rebbe, le monde
orthodoxe connaît en Amérique un relatif affaiblissement.
2- Réformés (ou libéraux) :
Ce judaïsme représente la branche libérale, qui adapte la religion aux changements du
monde (voir FOCUS 14_ Déclaration de principes pour le judaïsme réformé).

Le judaïsme réformé ne croit pas en un Messie personnalisé.

La Bible hébraïque et le Talmud sont des textes fondateurs, mais s’ils sont
d’inspiration divine, ils sont de rédaction humaine, et il est admis de pratiquer la
lecture critique.

L’histoire du judaïsme connaît une évolution de la tradition dans le temps et la
Halakha (loi juive) doit être adaptée aux normes et valeurs des différentes
époques

Les Synagogues sont appelées des Temples et ils favorisent l’égalité des sexes.

Ils suivent l’esprit, mais pas la lettre des pratiques Orthodoxes.
Ce mouvement a commencé en Allemagne dans les années 1800 et a été apporté aux
ETATS-UNIS par la Société de Réforme Israélites, à Charleston, en Caroline du Sud.
L’université d’Union hébraïque à Cincinnati, dans l'Ohio, a été fondé par le Rabbin
Wise en 1875. En Israël ce groupe représente l’aile la plus ouverte aux demandes des
Palestiniens, avec le groupe des Ashkénazes. Aux Etats-Unis, en 1842, Baltimore prend
l’initiative en fondant la congrégation réformée Har Sinaï. New York, Chicago, Albany
suivent l’exemple. D’éminentes personnalités prennent la tête du mouvement dont le
rabbin Isaac Meyer Wise (1819-1900) qui frappe un grand coup en 1857 en publiant
Minhag America, livre de prière à l’usage des réformés.
En 1885, les réformés adoptent la déclaration de Pittsburgh. "Le judaïsme et une
religion en création constante, s’efforçant toujours d’être en accord avec les postulats
de la raison."
Le judaïsme libéral est l’un des courants héritiers du judaïsme progressiste apparu
en Allemagne avec les Lumières. Mais, en réalité, est un terme utilisé par certaines
communautés, notamment en France, en Angleterre et aux Pays-Bas, pour désigner ce
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qui est connu par d’autres comme le « judaïsme réformé » ou le « judaïsme
progressiste ».
3 - Conservateurs :
Ce groupe rejette, comme les orthodoxes dont il ne se distinguait pas originellement,
la Réforme et ses excès. Il se démarque néanmoins de l’orthodoxie, prônant une
méthode de critique historique "positive", selon laquelle la Loi juive a toujours
composé avec son époque, et devait continuer à évoluer, sans besoin d’attendre le
rétablissement du Sanhédrin.
Bref, les Conservateurs réagissent à ce qu’ils jugent être les excès des réformés et des
orthodoxes. Ils sont partisans du juste milieu. Pour répondre à la déclaration de
Pittsburgh, ils créent, en 1886, le séminaire de théologie juive.
Les rabbins conservateurs recommandent des pratiques rigoureuses dans le total
respect de la Halakha. Cependant, selon eux, la Bible dictée aux prophètes par Dieu
peut être soumise à l’analyse critique.
En 1913 est fondée l’United Synagogue of Conservative Judaism.
En 1985, l’Association Rabbinique Conservatrice a approuvé des femmes dans le
clergé. En Amérique les conservateurs se regroupent dans la Synagogue Unie de
l’Amérique. L’expression la plus importante de ce groupe en Israël est le mouvement
Massorti : rejetant les idées de "gauche" (la réforme) comme de "droite"
(l'orthodoxie), ce mouvement s’abstint originellement de publier des principes écrits,
encourageant le pluralisme dans les croyances.
4- Reconstructionistes :
Le judaïsme reconstructionniste est le courant progressiste le plus tardif et aussi celui
qui compte le moins d'adhérents officiels. Il est fondé en 1968 aux États-Unis par le
rabbin Mordechai Kaplan et Ira Eisenstein, sur une base idéologique élaborée entre les
années 1920 et les années 1940. Le mouvement reconstructionniste définit le
judaïsme comme la culture religieuse en constante évolution du peuple juif. En effet, il
accorde une grande importance à tous les aspects de la culture juive. La langue,
l'histoire, la philosophie, la littérature sont aussi importantes que la religion au sens
strict. Cette culture est néanmoins définie comme religieuse car le divin est considéré
comme central. Le judaïsme reconstructionniste est un courant quasi-exclusivement
américain basé sur une variante théologique du naturalisme de John Dewey
(1859-1953 US). Elle combine des convictions athées avec une terminologie religieuse,
de façon à construire une sorte de philosophie de la religion pour ceux qui ont perdu
foi dans la religion traditionnelle.
Dans cette théologie, Dieu n’est ni personnel, ni super naturel, Il est l’ensemble des
procédés naturels permettant à l’homme de s’accomplir. Selon le Rav Mordechaï
Kaplan : « croire en Dieu signifie tenir pour acquis que la destinée de l’homme est de
s’élever au-dessus de la brute et d'éliminer toute forme de violence et d'exploitation
de la société humaine. »
Beaucoup de Juifs reconstructionnistes rejettent le théisme, se définissant plutôt
comme naturalistes ou humanistes. Des critiques se sont élevées, accusant le
reconstructionnisme de « rendre l’athéisme plus acceptable aux Juifs en en réécrivant
tout simplement le vocabulaire». Une minorité significative au sein du mouvement
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reconstructionnisme a néanmoins rejeté la théologie naturaliste pour revenir au
théisme.
Il y a un consensus sur les croyances actuelles :
 Le judaïsme est le résultat d'un développement humain naturel, n'ayant pas eu
recours à une intervention divine.
 Le judaïsme est une civilisation religieuse qui évolue.
 Le sionisme et la aliyah (immigration en Israël) sont encouragés.
 La congrégation des fidèles peut prendre part aux décisions, autant que les rabbins.
 La Torah n’a pas été inspirée par Dieu, elle n’est que le fruit du développement
socio-historique du peuple juif.
 Dieu est l’ensemble des forces et processus naturels permettant à l'humanité de se
développer pleinement et de s’améliorer moralement.
Le judaïsme humaniste (ou « Hassidisme moderne ») est un mouvement au sein du
judaïsme qui s’attache particulièrement à la culture juive et privilégie les
connaissances historiques à la croyance en Dieu comme fondements de l’identité
juive ; il a des similarités avec le judaïsme reconstructionniste, avec une emphase sur
l’identité Juive qui accepte les apports scientifiques variés et une éthique humaniste.
Cependant, le judaïsme humaniste représente un détachement radical vis-à-vis de la
religion juive, car le théisme est remplacé par l’humanisme… En 1969, Wine a fondé
la Société pour le Judaïsme Humaniste à New York.
Ses rituels et cérémonies n’incluent aucun rabbin ni aucune invocation divine. Ses
vues philosophiques dérivent de l’humanisme, et ses croyances peuvent être décrites
par les affirmations suivantes :
 Un juif est une personne qui s’identifie à son histoire, à sa culture, et croit dans
le futur du peuple Juif
 Le judaïsme est la culture historique du peuple Juif, et la religion n’est qu’une
petite part de cette culture
 Le peuple possède le pouvoir et la responsabilité de conserver sa liberté par
une indépendance marquée vis-à-vis d'une autorité supra-naturelle et de ceux qui
s'en affirment les représentants ;
 L’éthique et la morale doivent servir les intérêts des hommes, et les choix
doivent être fondés sur la considération de la conséquence des actions, plutôt que
sur des lois ancestrales ou des commandements,
 L’histoire juive, comme toutes les histoires, est un phénomène purement
humain et naturel. Les textes bibliques et traditionnels sont le produit de l’activité
humaine et sont mieux compris grâce aux apports de l’archéologie et d’autres
approches scientifiques.
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