LA NOUVELLE ÉCONOMIE : DU MYTHE À LA ALITÉ
qLa construction d’un mythe
La notion de nouvelle économie est plus une expression diffusée et popularisée par les
médias quun concept scientifique défini par les économistes.
Apparue dans la deuxme moitié des années quatre-vingt-dix, la nouvelle économie a
été, le plus souvent, assoce au développement d’Internet et à la mondialisation de léco-
nomie. Mais, surtout, après vingt ans de crise, et à partir de lexemple aricain, la nou-
velle économie a é analysée comme le fondement dune nouvelle période de croissance,
identique à celle des Trente Glorieuses.
qLa critique du mythe
Si le mythe sest répandu aussi rapidement, cest sans doute parce que les populations
des pays développés étaient ptes, après
plus de deux décennies de crise, à accep-
ter un discours qui leur laissait entrevoir la
renaissance d’une société capitaliste à
bout de souffle malgré leffondrement du
bloc communiste. La nouvelle économie a
également donné lieu à des analyses
scientifiques qui, à partir d’enquêtes et
de débats, ne contestent pas le rôle crois-
sant des nouvelles technologies dans
lactivité économique, mais remettent en
cause lidée de la diffusion dun nouveau
modèle économique et social capable de
soudre tous les maux connus par les
socs dévelopes depuis la premre
révolution industrielle.
Leffondrement du cours des valeurs
boursières liées à la nouvelle économie,
depuis 2000, témoigne de son aspect
mythique. Ainsi, l’indice du NASDAQ, aux
États-Unis, qui correspond à la cotation
des principales entreprises du secteur des
nouvelles technologies, a-t-il chu de plus de 70 % entre février 2000 et septembre 2002.
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LA NOUVELLE ÉCONOMIE
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L’expression « nouvelle économie » désigne l’entrée dans un âge nouveau
les TIC (technologies de l’information et de la communication) prennent une
part prépondérante dans la croissance économique. Mais cette nouvelle éco-
nomie n’est-elle pas un mythe ?
Les contours de
la nouvelle économie
Pour définir le contenu de la nouvelle
économie, on peut s’inspirer des tra-
vaux de l’OCDE qui retient trois grands
secteurs liés aux TIC :
les secteurs producteurs de TIC (fabri-
cation d’ordinateurs et matériel infor-
matique, de TV, de radios et de lé-
phones, d’appareils d’instrumentation et
de mesure, de connectique);
les secteurs distributeurs de TIC
(commerce de gros de matériel informa-
tique, y compris les importateurs);
les secteurs de services de TIC (ser-
vices des télécommunications, services
informatiques, y compris la location de
matériel informatique et les services
audiovisuels).
NOUVELLE ÉCONOMIE ET CROISSANCE
qNouvelles technologies et productivité
Les nouvelles technologies permettent-elles une accélération de la productivité du tra-
vail? Jusquau milieu des années quatre-vingt-dix, l’économie américaine na pas connu
une relance de ses gains de productivité. Un économiste, Robert Solow, asu ce para-
doxe de la manre suivante : « On voit des ordinateurs partout, sauf dans les statistiques
de productivité. »
Perplexes, les économistes ont recherché les causes de ce paradoxe, ce qui a don lieu
à de nombreux bats, notamment sur la fiabilité des statistiques. Mais, depuis 1995, les
gains de productivité sont plus importants aux États-Unis et on peut faire l’hypothèse que
ce redressement a comme origine les TIC. Cependant, les gains de productivité restent
encore inférieurs à ceux dus aux « anciennes technologies » pendant la période 1960-1973.
qNouvelles technologies et emploi
Les dones statistiques, notamment aux États-Unis, ne montrent pas une forte crois-
sance des emplois liés aux TIC. Si linformatique et Internet semblent susciter beaucoup
dembauches, cest essentiellement parce que, à lorigine, le nombre des emplois dans ces
domaines était très faible. Ainsi, entre 1986 et 1996, aux États-Unis, 618000 emplois ont
été cés dans le secteur des services contre 2,94 millions dans celui de la santé. En outre,
les études réalisées par les institutions américaines montrent que, sur les 30 professions
en tête des créations demplois sur la période 1996-2006, trois seulement correspondent à
une scialisation dans les TIC.
Les effets des TIC sur lemploi concernent surtout les conditions de travail. Ainsi, on peut
constater que les entreprises adoptent de nouvelles pratiques, caractérisées par une plus
grande flexibilité, remettant en cause
lorga nisation taylorienne du travail.
La flexibilité peut s’analyser de deux
manières. La première consiste à considé-
rer que la volonté dune meilleure réponse
à une demande plus exigeante impose une
plus grande autonomie des salariés. Mais,
derrière cette responsabilisation des tra-
vailleurs regroupés en équipes autonomes,
on trouve de nouvelles contraintes : tâches
très spécialisées, délais très courts, etc.
De plus, le monde doré dInternet a son
revers. Les « petits génies » ne travaillent
pas seuls. Ils sont assistés de nouveaux
salariés qui réalisent des travaux répétitifs
et connaissent une forte précarité de lem-
ploi et des salaires. Les TIC ont également
leurs ouvriers spécialisés qui sont peu pro-
tégés par la législation du travail qui, dans
ce secteur, reste très incertaine.
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La revanche de la nouvelle
économie
Google, c’est pour l’instant l’entreprise
qui réconcilie les marchés financiers
avec la nouvelle économie. Lentreprise a
mobili 2,3 milliards de dollars lors de
son introduction en Bourse et la presse
financière n’a eu que louanges pour sa
stratégie depuis. Depuis ses débuts au
Nasdaq, le marché des valeurs des nou-
velles technologies à New York, à l’été
2004, l’action de Google a vu son cours
grimper de plus de 160 %. C’est aujour-
d’hui la
Net company
la mieux valorie,
avec une capitalisation boursière de près
de 63 milliards de dollars.
Source :
Alternatives Économiques
, 237,
juin 2005.
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