III – VERS UN NOUVEAU TYPE DE CIBLAGE A- Des cibles plus difficiles à atteindre que jamais. Connaître le public pour atteindre sa cible est une condition nécessaire mais non suffisante. En effet, bon nombre de cibles restent hors de portée du message publicitaire et par ailleurs certains messages se révèlent incapables d’inciter à l’achat certaines cibles. Car pour atteindre une cible, il faut certes réaliser un message publicitaire précis mais surtout le diffuser largement. Or ce matraquage de messages publicitaires génèrent des phénomènes de rejets individuels ou collectifs, véritables « dégâts collatéraux » de l’action publicitaire. 1- La cible et son environnement Face à une débauche de créativité publicitaire, le consommateur est devenu de plus en plus exigeant face à la publicité. Déjà largement bombardé de messages publicitaires quotidiens, il effectue sa propre sélection des publicités en évacuant d’emblée celles qui ne sont pas novatrices (techniquement ou artistiquement) ou ne constituent pas un agrément voire une source de plaisir. Car le jugement critique de la cible (surtout jeune et urbaine) s’est largement aiguisé pour devenir un véritable rempart à l’agression publicitaire. Cette disposition mentale alimente ainsi les stratégies d’évitement et de résistance que la cible publicitaire met en œuvre pour échapper à la publicité. Les messages publicitaires anodins ne sont alors même pas perçus et encore moins mémorisés. La nature du medium utilisé est aussi important que le message lui-même pour espérer atteindre une cible. Ainsi, la télévision est le support privilégié pour les cibles jeunes alors que le cinéma est plutôt destiné à un public plutôt urbain vivant audessus du seuil de pauvreté. Certaines créations publicitaires ne parviennent pas à éviter les phénomènes de dissonance cognitive source de rejet d’un message. Elles se heurtent alors aux représentations et aux modes de vies de la cible et se traduisent par une rejet systématique (cas des sandwichs DONNAT). La publicité concurrente perturbe la trajectoire d’un message publicitaire en offrant littéralement une échelle de valeur qui permet au consommateur de juger de l’acuité d’une publicité. La conjoncture évènementielle constitue parfois de véritables trous d’air qui annihilent l’action des messages publicitaires. Ainsi une grande marque s’associant à un sportif suspecté de dopage aura beaucoup de mal à rétablir la trajectoire de son message publictaire. 2- L’opposition sociétale à la publicité Le poids de la publicité dans les medias alimente des critiques de principe voire une réelle opposition à celle-ci. Le consommateur s’approprie ces idées comme mode de défense face à la publicité. D’une part, disposant de peu de temps pour agir, la publicité ne peut faire l’économie d’une vision schématique et cloisonnée de la société. Elle contribue à « uniformiser le corps social autour d’une culture commune » (F. TRISTANI-POTTEAUX) et catégorise les individus feignant d’ignorer les particularismes et la complexité du tissu social. Le consommateur est alors nié comme individu. La publicité fait souvent appel à nos pulsions de base pour accroître son efficacité. Elle nous renvoie alors une image négative de nous mêmes et perd ainsi de son pouvoir de persuasion. En faisant appel à la nouveauté pour la nouveauté, la publicité se vide de son sens et accentue la dimension artificielle qui la décrédibilise un peu plus même chez les plus jeunes ou les plus crédules. En cherchant à coloniser nos cerveaux, la publicité fait œuvre de tentative de manipulation qui est de moins en moins efficace à mesure que notre sens critique se développe ( cas des cigarettes de l’American Tobacco Company d’Edward Bernays en 1928). Parfois, elle pousse le vice encore plus loin en jouant sur ce fameux sens critique (publicité contre le tabac) pour mieux flatter notre ego. D’autre part, la publicité a généré des formes d’opposition structurées qui s’appuie sur l’idée que la publicité est mauvaise en soi. Ainsi, le mouvement des « Adbusters » ou anti-pub mènent des actions concrètes qui ont pour but de montrer que : - la publicité fait perdre de vue les choses importantes - elle conduit à considérer comme mineure ce qui n’est pas martelé - elle cherche à manipuler notre cerveau en le colonisant - elle donne l’avantage au commanditaire aux dépens du consommateur Enfin, la publicité génère des abus contre laquelle la société a bien du mal à lutter. Ces abus renforcent l’idée que la publicité est néfaste et rend la cible moins réceptive. En effet, si il existe une protection juridique contre le harcèlement (délit reconnu), il n’en existe pas contre le matraquage publicitaire qui pourtant est beaucoup plus insidieux. En outre, certains organes publics ou privés se sont constitués pour faire respecter certaines règles notamment celles concernant l’extension de la publicité dans nos campagnes (Paysages de France). 3- Les faiblesses des outils de mesure de l’efficacité publicitaire Mesurer l’efficacité de la publicité et sa capacité à atteindre ses cibles pose indubitablement la question de la fiabilité des outils de mesure. Or, les principaux outils de mesure sont loin d’être infaillibles. - les protocoles utilisés en psychologie cognitive sont lourds d’emploi. Leurs codifications sont longues et surtout sujettes à caution car étroitement liées à la subjectivité du codificateur. - Les jugements globaux ne permettent pas de diagnostiquer ou d’expliquer un résultat donné et fournissent une information incomplète - Les listes d’adjectifs posent la question de la standardisation des choix et excluent toute possibilité de situations plus complexes. B- Le ciblage comportemental : frappe chirurgicale du ciblage publicitaire Internet offre des opportunités novatrices pour pousser la traque publicitaire jusqu’aux limites du déontologiquement acceptable. En effet, puisque le matraquage publicitaire de masse n’offre pas la garantie absolue d’atteindre une cible quelle qu’elle soit autant aller la chercher là où elle se trouve, c’est-à-dire sur les sites qu’elles utilisent. Parmi toutes les possibilités de ciblage qu’autorise internet (ciblage sur le site local, sur le site déclaratif ou par le protocole IP) le ciblage comportemental constitue la à lui une révolution majeure dans l’univers de la publicité sur Internet. Son marché devrait éclore en 2007 pour atteindre une part de marché significative en 2010. 1- Principes du ciblage comportemental C’est une technique de publicité basée sur le comportement des consommateurs et l’identification de leurs centres d’intérêt. Jusqu’à présent, les internautes voyaient défiler des publicités au gré des campagnes des annonceurs et de leurs budgets. Un constructeur automobile pouvait ainsi arroser tous les sites liés de près ou pas à l’automobile quels que soient les centres d’intérêt de l’internaute. La révolution du BT (behavioral targeting) est que cette solution permet d’afficher des publicités relatives aux centres d’intérêt des internautes quels que soient les sites consultés. (ex : un joueur de golf en consultant le cours de la bourse pourra recevoir des publicités sur le dernier parcours à la mode). Le visiteur est attaché à un segment comportemental à partir de son historique de visites sur le site support. Les segments et profils d’audience créés à travers ce type d’offre de ciblage correspondent naturellement à ceux qui les plus recherchés et les plus valorisés par les annonceurs (produits hi-tech, finance, automobile, santé, de la mode et des voyages). L’avantage pour l’annonceur est de cibler avec une extrême précision le profil des internautes susceptibles de s’intéresser à leurs produits. Les agences media interactives les plus innovatrices ne manqueront pas de proposer ces solutions à ses clients. Ainsi, YAHOO vient de lancer aux USA SMART ADS qui permet de définir l’affichage d’une pub sur un site web en fonction du ciblage socio-démographique du visiteur. Les informations viennent des cookies installés sur le PC de l’internaute mais également des données fournies par exemple lors de la création d’un compte. Le ciblage comportemental peut être combiné à un ciblage basé sur le déclaratif ce qui rend théoriquement possible de cibler des individus de plus de 50 ans s’intéressant fortement aux questions de santé. 2- Avantages ►Un ciblage plus précis car basé sur un historique Comparé au ciblage contextuel classique, le ciblage comportemental est naturellement plus précis car il est basé sur un historique de comportement. L’intérêt pour un domaine n’est pas déduit d’un comportement ponctuel qui donne lieu à un ciblage en temps réel mais d’une observation effectuée sur une période passée. Plus l’éditeur est exigeant dans son critère de rattachement d’un individu à un segment (nombre de visites sur la rubrique donnée) plus le profil déterminé est fiable. ►Une augmentation du taux de clics La précision accrue du ciblage permet d’obtenir un taux de clics plus élevé. C’est du moins le constat fait dans le cadre d’une étude menée en 2006 par la société BLUE LITHIUM. En d’autres termes, un passionné de voitures cliquera plus facilement sur un objet publicitaire d’un annonceur automobile si cet objet ne se situe pas sur un site consacré à la voiture. ►L’accroissement de l’espace cité disponible Cette possibilité est particulièrement importante depuis la reprise du marché publicitaire, car certains sites ont parfois des espaces publicitaires saturés sur certaines thématiques. ►Valorisation de l’espace pour le site support Le fait que le ciblage soit plus performant et qu’il y ait plus d’espace disponible pour certains annonceurs se traduit naturellement par une augmentation potentielle des revenus publicitaires. Nul n’est besoin de souligner l’agrément que procure la publicité à un visiteur de site dans le cadre d’une activité professionnelle, cet agrément incitant naturellement le consommateur à un comportement d’achat. . 3- Nouveaux acteurs Les fournisseurs de technologie WUNDERLOOP équipe les régies de ses technologies (ORANGE, ADLINK, LYCOS, AOL, TELECOM ITALIA etc…). Créée il y a 7 ans en Allemagne, l’entreprise désormais internationale est dirigée par MICHAEL KLEINDL fondateur de ADLINK, financée par les fondateurs de SKYPE. Elle est gagnée des prix prestigieux et a fait du ciblage comportemental intégré sa spécialité. Régies utilisant sa propre technologie ADVIVA : avec son produit ADVIVA RED la société britannique a été la première à proposer le ciblage comportemental en 2006 avec plus de 120 critères de sélection de l’audience. ADCONION MEDIA GROUP : société internationale achète son trafic à des sites éditeurs pour le revendre à des annonceurs. Elle dispose d’une technologie de ciblage comportemental avec des options de re-targeting. ADVERTISING.COM : filiale d’AOL, cette société très diversifiée dans les solutions de marketing à la performance propose aussi des prestations avec du ciblage comportemental. Régie utilisant une technologie tierce C-MARKETING : régie leader dans la publicité par ciblage socio-démographique sur la base de la technologie par WEBORAMA. Elle a été la première à proposer du ciblage socio-démographique aux annonceurs ce qui est devenu plus tard du ciblage comportemental par ajout des centres d’intérêts des internautes Fournisseurs de données socio-démographiques : NIELSEN, COMSCORE Solutions décisionnelles 1024 DEGRES : société française est une jeune société innovante française qui propose des services d’analyse des internautes visitant les e-commerces afin de développer les ventes. Basse de données e-mail profilées : MILLEMERCIS, AXCIOM Outils de mesure et d’analyse d’audience : XiTi, WEBORAMA, MEDIAMETRIE etc… Conclusion Bon gré mal gré, chacun est donc bombardé de publicités diverses et variées à longueur de journée. Face à cette agression permanente, le public est devenu averti, expert, il se laisse de moins en moins berner par des images ou des slogans accrocheurs, pour ne retenir que ce qui le concerne ou l’émeut. Il se renseigne, compare les marchandises, condamne sans appel les publicités et les produits qui l’ont déçu, et exprime même parfois une aversion qui lui fait tout rejeter en bloc. Publicistes et commerçants ont bien compris cette nouvelle donne et tentent désormais de « tracer » les habitudes d’achat du client et de ne lui adresser que les publicités susceptibles de l’intéresser et de déclencher une réaction de plaisir et d'acquisition. Pour autant, la ration publicitaire que chacun de nous devra ingurgiter demain sera-t-elle plus modérée ? Rien n’est moins sûr… Bibliographie -150 ans de publicité (Collections du musée de la publicité – Réjane Bargiel) -100 ans de publicité industrielle (Dunod – Véronique Puvilland) -Sociologie des médias - PUBLICITOR ( Jacques LENDREVIE et Arnaud de BAYNAST – DALLOZ) -Le Marketing, (Dunod – Denis Lindon, Frédéric Jallat) -La publicité (Quesaisje – Armand Dayan) Webgraphie www.tpe-pme.com/entreprendre/marches-porteurs/supports-de-pub-jouez-la-sur.. www.sgebois.com/mediaplaq.htm www.daici.com/pic/pic/285/faire-sa-publicite-sans-se_ruiner.aspx www.teleregard.net/film/film/pub.htm www.nouveau-marketing.com/2007/07/ http://perso.orange.fr/art-deco.france/publicite.htm www.accenture.com www.journaldunet.com www.ipsos.fr www.tns-sfres.com www.abc-netmarketing.com www.efficacitepublicite.com www.iabfrance.com www.neteco.com www.lesinfos.com www.journaldunet.com