1 Approximation des fonctions
De façon générale, nous considérons dans ce cours l’approximation de fonctions définies sur un do-
maine, c’est à dire un ouvert connexe, Ω⊂IRd. On considérera par exemple des fonctions appartenant
à l’espace de Lebesgue Lp(Ω) pour un p≥1, ou à l’espace des fonctions continues, ou à des espaces de
fonctions plus régulières.
Les procédés généraux consistant à approcher des fonctions arbitraires de dvariables par des fonctions
particulières sont utiles au delà du domaine du calcul numérique. En effet, un grand nombre de résultats
fondamentaux sur les fonctions sont prouvés en se ramenant par densité à des fonctions plus simples.
Rappelons trois résultats de densité fondamentaux :
1. Les fonctions constantes par morceaux, sur un nombre fini de sous-domaines, sont denses dans
Lp(IRd)pour 1≤p≤ ∞ : pour tout f∈Lp(IRd)et ε > 0, il existe une fonction de la forme
g=Pm
i=1 ciχAioù les Aisont des ensembles mesurables et χAileurs fonctions indicatrices, telle
que kf−gkLp≤ε. Une manière simple de construire gest de prendre pour nsuffisament grand
une suite croissante de valeurs de la forme ci=−n+i/n, pour i= 1, . . . , m = 2n2, et de définir
Aipar
Ai={x∈Ω : ci≤f(x)< ci+1}.(1.1)
L’approximation par les fonctions constantes par morceaux est à la base de la construction de
l’intégrale de Lebesgue et des espaces Lp.
2. Les fonctions continues à support compact sont denses dans Lp(IRd)pour 1≤p < ∞: pour tout
f∈Lp(IRd)et ε > 0, il existe une fonction g∈Cc(IRd)telle que kf−gkLp≤ε. C’est un résultat
fondamental de la théorie des espaces Lp.
3. Les fonctions infiniment dérivables sont denses dans Lp(IRd)pour 1≤p < ∞: pour tout f∈
Lp(IRd)et ε > 0, il existe une fonction g∈C∞(IRd)telle que kf−gkLp≤ε. Une manière de
construire gconsiste à régulariser fpar convolution : pour ϕune fonction C∞à support compact
telle que Rϕ(x)dx = 1, et nsuffisament grand, on définit
g(x) = f∗ϕn(x) = ZIRdf(x−y)ϕn(y)dy, ϕn(x) := ndϕ(nx),(1.2)
En utilisant la densité des fonctions continues à support compact rappelée ci-dessus, on montre
aussi que l’espace D(IRd)des fonctions C∞à support compact est dense dans Lp(IRd)pour 1≤
p < ∞. Ce résultat est bien sûr faux pour l’espace l’espace L∞(IRd), mais vrai pour l’espace des
fonctions continues qui tendent vers 0à l’infini muni de la norme L∞.
Les mêmes résultats sont vérifiés lorsqu’on remplace IRdpar un domaine Ω.
Dans la pratique du calcul numérique, on cherche à approcher des fonctions arbitraires par des fonc-
tions plus simples pouvant être représentée par un nombre fini nde paramètres, c’est à dire typiquement
appartenant à un espace de dimension n. Ce n’est pas le cas pour les résultats d’approximation qu’on
vient de citer. Un exemple élémentaire d’approximation par des espaces de dimension finie est fourni par
le théorème de Weierstrass : si Iest un intervalle fermé borné, pour tout f∈C(I)et ε > 0, il existe
n > 0et g∈Pntelle que kf−gkL∞(I)≤ε.
Ce type de résultat est insuffisant dans la pratique du calcul numérique car il ne fournit pas une
estimation quantitative de la précision εen fonction n. L’un des objectifs de la théorie de l’approximation
est de fournir de telles estimations. De façon générale, étant donné un espace de Banach X(typiquement de
fonctions définies sur un domaine Ω⊂IRd), et une famille (Xn)n≥1de sous-espaces tels que dim(Xn) = n,
on s’intéresse à l’approximation de f∈Xpar g∈Xn. L’erreur de meilleure approximation de fest alors
définie par la valeur
σn(f)X:= min
g∈Xnkf−gkX.(1.3)
Une observation importante est que le minimum est toujours atteint, c’est à dire qu’il existe un élément
gn∈Xn, appelé meilleure approximation de fdans Xn, tel que
kf−gnkX=σn(f)X.(1.4)
2