4 – AVIS DU CONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL
CONSÉQUENCES ÉCONOMIQUES, FINANCIÈRES
ET SOCIALES DE L’ÉCONOMIE NON DÉCLARÉE1
Avis
Introduction
Dans son acception la plus large, l’économie informelle concerne tous les échanges de
biens et services. Phénomène croissant et préoccupant, elle touche aussi bien les personnes
physiques que les personnes morales (sociétés et même associations). Elle touche tous les
secteurs (bâtiment, commerce, industrie, santé, loisirs, culture, sport, éducation, formation,
services à la personne...) et constitue une atteinte aux principes qui sous-tendent notre
modèle économique et social. Elle ne doit cependant pas être considérée comme un monde
clos, déconnecté de l’économie formelle; les deux économies - formelle et informelle - sont
liées: des entreprises dans le champ de l’économie formelle sous-traitent parfois une partie
de leurs activités auprès d’entreprises faisant travailler des employés non déclarés etc.
L’économie informelle peut revêtir plusieurs formes: fraude ou évasion scale,
détournement ou abus d’avantage scal, travail au noir, paradis scaux, blanchiment,
argent de la drogue et des activités criminelles, shadow banking2, centres o-shore, comptes
numérotés: pour le grand public, ces vocables sont l’illustration d’un monde qui triche ou
joue avec la légalité dans le but de s’aranchir de l’impôt, des taxes ou cotisations sociales,
ou de maximiser son prot; ils nourrissent vis-à-vis du monde de l’économie et de la nance
une suspicion qui ne tient pas que du phantasme, d’autant que les montages frauduleux
sont de plus en plus complexes, comme le rappelle la circulaire interministérielle relative à la
mise en œuvre du plan national de lutte contre le travail illégal 2013-2015.
Elle peut être simplement locale, organisée au niveau national ou s’appuyer sur
des réseaux internationaux lui conférant parfois une dimension mondiale. Protéiforme,
l’économie non déclarée, représente une part variable -mais jamais négligeable- du PIB
selon les pays.
Les conséquences qu’elle engendre sont aussi qualitativement et quantitativement
variables en fonction des structures économiques et nancières qui prévalent: ainsi, par
exemple, dans les pays où la collecte d’impôt est peu eciente ou la protection sociale
inexistante ou embryonnaire, les eets ne sont pas les mêmes que dans ceux où les recettes
de l’Etat reposent sur l’impôt ou ceux à niveau élevé de protection sociale. Dans les pays
d’Europe, qui relèvent de cette deuxième catégorie, avec des variantes certes notables,
l’économie souterraine prive les comptes publics (Etat, Sécurité sociale) de recettes en
réduisant l’assiette scale, crée des situations de concurrence déloyale pour les entreprises,
provoque une insécurité individuelle et une perte de droits ainsi qu’une insécurité juridique
1 L’e n s e mb l e d u p r o j e t d ’a v i s a é t é a d o p t é a u s c r u ti n p u b l i c p a r 1 4 5 v o i x e t 1 3 a b s t e n ti o n
(voir le résultat du scrutin en annexe).
2 Le Conseil de Stabilité nancière le dénit comme « un système d’intermédiation de crédit auquel concourent des
entités et activités extérieures au système bancaire régulé.»