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Pendant un temps, par faute d’une réserve en dollars trop faible, la masse de
monnaie en circulation dans le pays ne suffit plus à faire tourner normalement
l’économie. Des systèmes de troc voient le jour et les provinces, ainsi que la
capitale Buenos-Aires, émettent leur propre devise, les « patacones », pour
payer leurs fonctionnaires et les impôts. Durant ses sept jours de règne (du
23 décembre au 31 décembre 2001), le Président Adolfo Rodriguez Saá
prend alors une décision qui préfigurera la future politique de l’Argentine :
il suspend le remboursement de la dette extérieure aux créanciers privés.
Son successeur, Eduardo Duhalde, décidera de supprimer la parité entre le
peso et le dollar et, à la fin de l’année 2002, lèvera les restrictions de retrait
bancaire.
nÉstor Kirchner, la Politique De la ruPture
Mais c’est avec l’accession à la plus haute fonction de Néstor Kirchner,
gouverneur de la province de Santa Cruz, que le pays entamera son vrai
redressement économique. Nationaliste social-démocrate, se revendiquant
du péronisme, il va mener de 2003 à 2007, une politique économique fondée
sur deux axes : la rupture avec les organismes prêteurs internationaux et
une économie régulée par l’État. Dès le départ, il va décider de ne pas
rembourser les emprunts d’États en possession de milliers d’épargnants
étrangers, surtout Italiens, et de banques. Au bout d’un long bras de fer,
il aboutira à un accord en février 2005 selon lequel ¾ des ces détenteurs
d’obligations accepteront d’échanger leurs titres non-payés contre de
nouvelles obligations de moindre valeur, aux taux d’intérêt plus faibles et
aux échéances plus longues. Pour un dollar investi, les détenteurs se verront
rembourser au final 0,32$. En septembre 2003, il refuse également d’obéir
au FMI qui demande de nouvelles mesures d’austérité et de nouvelles
privatisations. En décembre 2005, il se tourne même vers le Venezuela de
Hugo Chávez qui lui accorde un prêt de 2 milliards grâce auquel il peut
rembourser la dette de presque 10 milliards que l’Argentine doit toujours
au FMI. Économisant au passage 900 millions d’intérêts que le pays aurait
dû payer. L’objectif avoué est évidemment de diminuer très sensiblement
l’influence du Fonds néo-libéral, et des États-Unis qui surveillent de près
la situation en Amérique du Sud, sur l’économie argentine. Cette politique
de rupture des relations financières internationales ne lui vaut pas que des
compliments mais permettra notamment à son pays d’échapper à la crise
globale de 2008. En effet, désormais paria des marchés internationaux,
l’Argentine a pu éviter la spéculation sur ses titres et sa monnaie.
C’est même un pays qui jouit d’une santé économique insolente qui peut
se permettre de regarder de loin ses anciens créanciers s’engluer dans la crise