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Argentine, un modèle
de redressement
économique
2012/10
Siréas asbl
        Analyses & 
      Études
Économie
par Pascal De GenDt
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Avec le soutien
de la Fédération
Wallonie-Bruxelles
Nos analyses et études, publiées dans le cadre de l’Education permanente, 
sont rédigées à partir de recherches menées par le Comité de rédaction de 
SIREAS sous la direction de Mauro Sbolgi, éditeur responsable. Les ques-
tions traitées sont choisies en fonction des thèmes qui intéressent notre pu-
blic et développées avec professionnalisme tout en ayant le souci de rendre 
les textes accessibles à l’ensemble de notre public.
Ces publications s’articulent autour de cinq thèmes
MonDe et Droits De lhoMMe
Notre société à la chance de vivre une époque les principes des Droits de l’Homme
protègent ou devraient protéger les citoyens contre tout abus. Dans de nombreux pays ces
principes ne sont pas respectés.
ÉconoMie
La presse autant que les publications officielles de l’Union Européenne et de certains
organismes internationaux s’interrogent sur la manière d’arrêter les flux migratoires. Mais
ceux-ci sont provoqués principalement par les politiques économiques des pays riches qui
génèrent de la misère dans une grande partie du monde.
culture et cultures
La Belgique, dont 10% de la population est d’origine étrangère, est caractérisée, notamment,
par une importante diversité culturelle
MiGrations
La réglementation en matière d’immigration change en permanence et SIREAS est
confronté à un public désorienté, qui est souvent victime d’interprétations erronées des
lois par les administrations publiques, voire de pratiques arbitraires.
sociÉtÉ
Il n’est pas possible de vivre dans une société, de s’y intégrer, sans en comprendre ses
multiples aspects et ses nombreux défis.
Toutes  nos  publications  peuvent  être  consultées  et  téléchargées  sur  nos  sites 
www.lesitinerrances.com et www.sireas.be, elles sont aussi disponibles en version 
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Siréas asbl
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Récession, coût de la vie qui augmente, pays qui survit uniquement
grâce aux crédits extérieurs, classe moyenne faisant connaissance
avec la pauvreté parfois extrême : ce sort peu réjouissant est celui de
la Grèce actuelle. Et peut-être également celui qui attend, dans un premier
temps, d’autres pays du Sud de l’Europe. La situation de ces populations
peut sembler sans espoir. Pourtant, il y a un peu plus de dix ans, les Argentins
sont aussi passés par là et ont fini par s’en sortir. Et si, actuellement, ce pays
doit à nouveau faire face à des difficultés économiques mais qui n’en a
pas ? –, le spectre de la faillite nationale s’est bel et bien éloigné. Réalisé en
tournant le dos aux dogmes de l’économie ultralibérale, et aux institutions
les représentant, le redressement économique argentin est même devenu un
modèle d’école. Est-il pour autant transposable à l’Europe de 2012 ? Et,
quand bien même ce serait le cas, est-ce souhaitable ?
la crise De DÉceMbre 2001
Lorsque le 5 décembre 2001, le Fonds Monétaire International (FMI)
refuse une aide de 1,3 milliards de dollars au gouvernement argentin,
entraînant dans la foulée une suspension du versement de 1,1 milliards
de dollars par la Banque Mondiale et la Banque Interaméricaine de
Développement, le pays est en sursis. Quelques années plus tôt, l’Argentine
était pourtant encore considérée comme le pays le plus riche d’Amérique du
Sud et un des meilleures élèves du FMI.
En ce début de XXIe siècle, le tableau est bien différent : les banques
s’effondrent, les investisseurs étrangers fuient et le pays sombre dans le chaos
économique, politique et social. Des émeutes, accompagnées de pillages,
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éclatent aux quatre coins du territoire. Elles seront durement réprimées,
occasionnant des dizaines de morts, et le 19 décembre, l’état de siège est
déclaré. Cette colère d’une population, dont les difficultés économiques
n’ont cessé de croître depuis la fin des années 80, est attisée par l’interdiction
de retirer plus de 250 dollars par semaine sur son compte bancaire. De quoi
freiner d’urgence la fuite des capitaux mais aussi tirer une épine hors du pied
des banques qui ne peuvent faire face à cette demande massive de retraits.
C’est une des conséquences de la loi de convertibilité inscrite, en avril
1991, dans la Constitution par le président Carlos Menem. Cette disposition
instaure la parité peso-dollar : chaque peso créé doit avoir sa contrepartie
en dollar. Conséquences : le pays devient fort dépendant des dollars
provenant des crédits accordés par les organismes internationaux mais aussi
des investisseurs étrangers. D’autant que cette mesure gâche également la
compétitivité des produits argentins à l’exportation. Des pans entiers de
l’économie argentine sont ainsi privatisés, pour favoriser l’entrée des devises
étrangères, et des dizaines de milliers de fonctionnaires perdent leur emploi.
Cette convertibilité devient ainsi le fer de lance de la politique
économique préconisée par le FMI. Elle permet notamment à l’inflation
de chuter. C’était un des plus gros problèmes de l’Argentine depuis la fin
de la dictature militaire en 1983. En sept ans d’une politique néo-libérale
acharnée, la junte laisse le pays dans un état lamentable. La dette extérieure
du pays est passée de 8 à 43 milliards de dollars et l’inflation est galopante.
Et cela ne s’arrangera pas avec le retour à la démocratie. Pour l’année 1989,
l’inflation atteint un taux hallucinant, et intenable pour la population, de
3000% ! En juillet de cette année-là, Carlos Menem commence son règne
de dix ans de présidence.
Sa politique économique sera marquée du sceau du FMI : politique
de privatisation, dont la compagnie pétrolière nationale YPF, réduction
des dépenses publiques, hausse des recettes fiscales et succession de plans
d’austérité, qui lui attire les bonnes grâces des marchés internationaux et
des organismes internationaux qui soutiennent le pays à coups de prêts
se comptant en milliards de dollars. Son successeur Fernando de la Rúa
empruntera la même voie, en faisant passer notamment une loi de déficit
zéro. C’est d’ailleurs le non-respect de celle-ci qui entraînera le refus d’un
nouveau prêt par le FMI en décembre 2001. Juste avant la crise, l’économie est
en récession depuis trois ans, la dette extérieure du pays est de 132 milliards
de dollars, 1 Argentin sur cinq est au chômage, 14 millions d’habitants
sur 36 vivent dans la précarité et un septième plan d’austérité en trois ans
entre en vigueur. Ex-pays le plus riche d’Amérique Sud, l’Argentine affiche
désormais un bilan de pays du Tiers-Monde.
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Pendant un temps, par faute d’une réserve en dollars trop faible, la masse de
monnaie en circulation dans le pays ne suffit plus à faire tourner normalement
l’économie. Des systèmes de troc voient le jour et les provinces, ainsi que la
capitale Buenos-Aires, émettent leur propre devise, les « patacones », pour
payer leurs fonctionnaires et les impôts. Durant ses sept jours de règne (du
23 décembre au 31 décembre 2001), le Président Adolfo Rodriguez Saá
prend alors une décision qui préfigurera la future politique de l’Argentine :
il suspend le remboursement de la dette extérieure aux créanciers privés.
Son successeur, Eduardo Duhalde, décidera de supprimer la parité entre le
peso et le dollar et, à la fin de l’année 2002, lèvera les restrictions de retrait
bancaire.
nÉstor Kirchner, la Politique De la ruPture
Mais c’est avec l’accession à la plus haute fonction de Néstor Kirchner,
gouverneur de la province de Santa Cruz, que le pays entamera son vrai
redressement économique. Nationaliste social-démocrate, se revendiquant
du péronisme, il va mener de 2003 à 2007, une politique économique fondée
sur deux axes : la rupture avec les organismes prêteurs internationaux et
une économie régulée par l’État. Dès le départ, il va décider de ne pas
rembourser les emprunts d’États en possession de milliers d’épargnants
étrangers, surtout Italiens, et de banques. Au bout d’un long bras de fer,
il aboutira à un accord en février 2005 selon lequel ¾ des ces détenteurs
d’obligations accepteront d’échanger leurs titres non-payés contre de
nouvelles obligations de moindre valeur, aux taux d’intérêt plus faibles et
aux échéances plus longues. Pour un dollar investi, les détenteurs se verront
rembourser au final 0,32$. En septembre 2003, il refuse également d’obéir
au FMI qui demande de nouvelles mesures d’austérité et de nouvelles
privatisations. En décembre 2005, il se tourne même vers le Venezuela de
Hugo Chávez qui lui accorde un prêt de 2 milliards grâce auquel il peut
rembourser la dette de presque 10 milliards que l’Argentine doit toujours
au FMI. Économisant au passage 900 millions d’intérêts que le pays aurait
payer. L’objectif avoué est évidemment de diminuer très sensiblement
l’influence du Fonds néo-libéral, et des États-Unis qui surveillent de près
la situation en Amérique du Sud, sur l’économie argentine. Cette politique
de rupture des relations financières internationales ne lui vaut pas que des
compliments mais permettra notamment à son pays d’échapper à la crise
globale de 2008. En effet, désormais paria des marchés internationaux,
l’Argentine a pu éviter la spéculation sur ses titres et sa monnaie.
C’est même un pays qui jouit d’une santé économique insolente qui peut
se permettre de regarder de loin ses anciens créanciers s’engluer dans la crise
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