les musiciens. Ils peuvent souffrir également de névralgie
cervicobrachiale (NCB), en particulier les violonistes. La
NCB peut être liée soit à une pathologie discale, soit à une
sténose du trou de conjugaison favorisée par des lésions
dégénératives du massif vertébral postérieur.
•Syndrome du défilé cervicothoracique [2, 12, 52]
Ce syndrome canalaire est à l’origine de la compression
des vaisseaux sous-claviers et de certains éléments du
plexus brachial lors des mouvements d’abduction du
bras, isolés ou associés à une rétropulsion de l’épaule ou
rotation de la tête. Les symptômes sont majorés par
l’élévation du bras.
•Au niveau du coude,le nerf cubital peut être com-
primé au niveau de la gouttière épitrochléo-olécra-
nienne. Le nerf radial peut l’être au niveau de l’arcade
fibreuse du muscle rond pronateur et du deuxième
radial. [2, 12]
•Syndrome du canal carpien [7, 11,12,24]
Une inflammation même minime d’un tendon ou de sa
gaine va engendrer une compression du nerf médian
entraînant son cortège de symptômes.
Le diagnostic en est difficile car la symptomatologie
peut être fruste et n’apparaître que lors du jeu. La confir-
mation diagnostique par l’électromyographie n’est réa-
lisée souvent qu’en préopératoire à un stade évolué. Les
problèmes de poignets concernent de 22 à 50 % des
musiciens selon les études.
Il faut mentionner également l’existence de syndromes
canalaires au niveau des doigts ou des genoux, chez les
harpistes notamment. [36]
•La dystonie de fonction
Ce trouble fonctionnel est également surnommé
"crampe du musicien" ou encore "dystonie focale". Elle
touche essentiellement la main des musiciens jouant
d’instruments à cordes ou à clavier mais survient égale-
ment chez les instrumentistes à vent au niveau de la
bouche.
Duchenne de Boulogne individualisa le premier cette
pathologie en 1883 chez des pianistes. Oppenheim en
1911 introduisit l’appellation de dystonie. [10,29,39]
Elle est caractérisée par un trouble de la coordination
manuelle, indolore, survenant au cours d’un geste pro-
fessionnel, répétitif, hautement technique, occasionnant
un dérèglement de la coordination, une perte de rapidité,
voire un blocage d’un ou plusieurs doigts d’une main au
cours du geste. Le tableau clinique peut être très varié
mais la caractéristique commune aux différents modes
d’expression de cette entité pathologique est d’appa-
raître uniquement lors du geste professionnel et, quel-
quefois, uniquement lors d’un passage particulièrement
technique. En dehors de ces circonstances particulières,
aucun dysfonctionnement n’est constaté. En consé-
quence, devant ce problème très technique et spécifique,
le musicien va intensifier sa pratique musicale et accen-
tuer le problème et ainsi consolider un schéma neuro-
musculaire inapproprié. [10,29,39]
Le manque d’information dans le milieu musical et
médical sur ce trouble associé à l’absence de douleurs,
de signes physiques ou électriques (en effet, les examens
complémentaires médicaux et en particulier l’EMG sont
absolument normaux) expliquent que cette pathologie,
hautement invalidante pour le musicien professionnel,
est très souvent diagnostiquée très tardivement et fré-
quemment qualifiée de trouble psychique. [33]
Selon Tubiana et Chamagne, la dystonie est l’aboutisse-
ment et l’extériorisation de dérèglements plus profonds.
Il s’agit d’une perturbation de la commande neuromus-
culaire centrale " automatique ". [14,60,61]
L’entraînement crée, sélectionne et renforce les circuits
cérébraux qui permettent le jeu automatique des mains,
le musicien pouvant alors se focaliser uniquement sur
l’interprétation. Mais cet équilibre entre la main auto-
matique centrale et la main périphérique peut être détruit
par un dérèglement organique ou psychologique: pos-
ture, changement de technique, d’instrument, trauma-
tisme psychologique. Ce déséquilibre s’exercera alors
sur le maillon le plus faible.
En outre, il semble admis par tous les auteurs que les
personnes concernées présentent un profil psycholo-
gique particulier. Elles seraient particulièrement émo-
tives et sensibles, avec un grand désir de perfection et de
dépassement.
Tubiana et Chamagne [13,60] ont élaboré une prise en
charge des musiciens souffrant de ce trouble. Il s’agit
d’une rééducation spécialisée du schéma fonctionnel.
Elle est basée avant tout sur une déprogrammation des
gestes nocifs, suivie d’une rééducation posturale avec
ré-apprentissage tout d’abord de l’équilibre et de la sta-
tique axiale puis de la ceinture scapulaire, du membre
supérieur et finalement de la main et des doigts. Le port
d’une orthèse, la technique de biofeedback et quelque-
fois le recours à des injections de toxines botuliniques
sont des adjuvants utiles. C’est, dans tous les cas, un
traitement intensif et long (1 ou 2 ans), d’autant plus
long que la prise en charge est tardive.
3. Facteurs de risque des troubles
musculosquelettiques
•Facteurs de risque professionnels
Nous avons vu que la haute répétitivité du geste alliée à
une technicité extrême et à une force certaine expliquent
le contexte prédisposant à l’apparition de TMS. Mais
ces conditions sont inhérentes à la pratique instrumen-
tale et pourtant tous ne développent pas de TMS.
Le plus fréquemment, l’anamnèse exhaustive seule peut
mettre en évidence une corrélation entre l'apparition de
troubles et une modification d'ordre professionnel: un
changement de technique ou d’habitude de travail, une
intensité de travail accrue en vue d’un concours ou d’un
concert, l’acquisition d’un nouvel instrument… .
•Facteurs de risque individuels
D’autres facteurs favorisants sont liés à des particulari-
tés individuelles. Des antécédents traumatiques, une
pathologie préexistante, un trouble métabolique, des
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