Patronage laïque Jules Vallès / ACTISCE / 72, avenue Félix Faure 75015 Paris
La loi républicaine prévaut sur les règles communautaires ou religieuses ;L'individu
libre en conscience prévaut sur chacune de ses appartenances sociales ou
identitaires.
Qu'est-ce qui, alors, a fait concrètement difficulté ?
Les problèmes sont venus non pas d'entraves que l'État aurait imposées de façon délibérée à
la liberté de pratiquer un culte, mais de la volonté de certains d'afficher leur appartenance
religieuse au sein de l'école publique. Comme au siècle précédent, l'école redevient un
champ de bataille entre ceux (pour l'essentiel des parents de confession musulmane) qui
pensent que le libre exercice de leur culte comprend le libre affichage, sous la forme du port
d'insignes non ambigus, de la religion familiale au sein même de l'espace scolaire ; et ceux
(pour l'essentiel des enseignants, des parents d'élèves libres d'attaches religieuses, et une
grande partie de la population française) qui pensent qu'une école accueillant tous les
enfants ne doit pas tolérer de tels signes. À leurs yeux, en distinguant (en marquant) certains
élèves, ces signes sont à la fois des facteurs de division et des instruments de prosélytisme.
Sous la forme de trois « affaires de foulards », le monde scolaire affrontera trois grandes
secousses. La première, en 1989, débouchera sur un avis du Conseil d'État estimant que, s'il
n'est pas « ostentatoire et revendicatif », le port de signes religieux à l'école « n'est pas, par
lui-même, incompatible avec la laïcité ». La deuxième, en 1994, sur la circulaire Bayrou, qui
proscrit les « signes religieux ostentatoires ». La troisième, en 2003, sur la loi du 15 mars
2004 qui, en application du principe de laïcité, interdit dans les écoles, collèges et lycées
publics « le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une
appartenance religieuse ». Dans les trois cas la leçon (de modération) est la même : on peut
montrer, mais pas trop ! Il faut rester raisonnable...
S'il s'est ainsi focalisé sur la place des signes religieux à l'école, ce combat doit son âpreté à
une question sous-jacente, qu'il est difficile de poser et d'affronter en toute clarté, tant elle
se révèle explosive : celle de la place de l'islam dans une République qui se veut laïque. Tel
est, dans ces affaires, l'enjeu essentiel. L'enracinement chrétien de la France, reconnu, de
facto, par la loi de séparation de 1905, est une réalité qui s'estompe, et perd, pour beaucoup,
son sens, alors même que s'impose sur le devant de la scène sociale une religion que
certains jugent invasive, l'islam.
Bien sûr, l'Islam ne se confond pas avec sa dérive islamiste, et seuls quelques individus
s'égareront dans le terrorisme djihadiste en se réclamant d'une religion qui ne méritait sans
doute pas une telle dérive. Mais l'irruption de l'islam, accompagnée de poussées
d'intégrisme, a été un choc d'une grande ampleur pour la société française tout entière.
L'islam ne remet-il pas en question la séparation des sphères politique et religieuse ? N'est-il
pas une religion « englobante » (Tariq Ramadan), qui concerne tous les aspects de la vie
sociale ? Peut-il cohabiter avec d'autres religions, sans avoir la tentation de les combattre, et
de les faire disparaître ?
Une double question se pose. Celle de la souhaitabilité, et des conditions de possibilité, de
l'intégration d'une forte minorité musulmane en France. Et celle de la compatibilité de
l'islam avec un État régi par des principes laïques. Il n'est pas facile de traiter ces questions
en échappant tant à l'islamophobie et à la xénophobie, qu'au déni du réel ! Aussi nous