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Synchro et supervision
le qui fait quoi de la musique à l’image
Compte-rendu de la Rencontre débat
Du 25 octobre 2010
L’utilisation de la musique dans l’audiovisuel (cinéma, publicité, télévision…) serait
la dernière valeur refuge dune industrie en crise. Lintérêt pour ces formes
d’exploitation s’intensifie au rythme des réussites, des envies suscitées et des
débouchés possibles. Mais en réalité :
Que recouvrent ces concepts de synchro et de supervision ?
Comment "placer" sa musique ?
Quels sont les différents intermédiaires ?
Comment fonctionnent-ils ?
Quels sont les contrats ?
Qu’est-ce que cela rapporte ?
Quelles retombées médiatiques peut-on en espérer ?
Forts de leurs expériences, quatre intervenants différemment positionnés dans cet
univers (éditeur, responsable synchro, music supervisor, agence de communication)
ont témoigné pour aider à son décryptage.
Intervenants :
Christophe Caurret, music supervisor chez BETC Euro-RSCG
Rodolphe Dardalhon, cofondateur et gérant de Roy music
Pascal Mayer, music supervisor et gérant de Noodles
Eric Michon, directeur Universal Music Vision
Rencontre-débat présentée et modérée par Jean-François Bert1 et Jean-Noël Bigotti2, avec le
concours de Pierre-Marie Bouvery3, avocat.
1 Business conseil, auteur de
L'Édition musicale,
Irma éditions, 2006.
2 Responsable du centre de ressources de l'Irma, auteur de
Je monte mon label
, Irma éditions, 2008.
3 Avocat, auteur de
Les Contrats de la musique
, Irma éditions, 2008.
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Les intervenants
Christophe CAURRET
Au début des années 90, Christophe Caurret combinait études de droit et organisation de
rave parties. Après un passage chez Virgin, puis dans l’organisation de festivals, il entre
chez BETC Euro RSCG en 1999. Il y occupe aujourd’hui les fonctions de music supervisor
et dirige BETC Music, département dédié au développement des associations musique et
marque.
Il a notamment synchronisé de la musique pour des grandes marques (Orange, SFR,
Peugeot…) et est en charge de la programmation à bord des avions Air France. Il a co-
produit avec Fabrice Brovelli le single
We will rock you
pour la campagne "Voices" d’Evian
et a produit la bande originale du film
Les Chevaliers du ciel
. Il est également directeur artistique de Panik,
événement musical dédié aux musiques électroniques à Paris depuis 2000, ainsi que manager de l’artiste
électro Yuksek.
Rodolphe DARDALHON
Éducateur de formation, il a d'abord travail dans plusieurs institutionsdico-sociales.
Particulièrement intéressé par les notions d'accueil et d'accompagnement, il se tourne
ensuite vers le management d'artistes. Secrétaire du Music Manager Forum France
pendant plusieurs années, il créé en 2003 l’association Kulturart (développement de
projets musicaux). En 2005, il créé avec Olivier Chini, producteur audiovisuel, le label
Roy Music et la société d'édition Roy Music Publishing avec lesquelles il signent Jérôme
Attal, Mademoiselle K, Néry, Jean Racine, puis Jill is Lucky, Izabo, Oldelaf et Monsieur D, Make The Girl
Dance, Toxic Avenger, Vismets, Hangar, Star My Name... Le label propose également 2 soirées mensuelles,
produit l’ensemble de ses documents audiovisuels avec la société 10H08 et a créé Blue Roy avec Studio
Bleu, un lieu composé de 19 locaux de répétition à Pantin.
Pascal MAYER
Diplômé du Celsa et titulaire d’un DESS en droit et administration de l’audiovisuel, Pascal
Mayer a travaillé pendant 12 ans en major à différents postes : chef de produit chez Virgin
et Sony Music, directeur marketing chez Universal, directeur du label Vogue BMG Music
et directeur Marketing et promotion chez Eastwest Warner Music Group. Il monte ensuite
son propre label, The Perfect Kiss (Nouvelle Vague, Birdpaula, Phoebe Killdeer, Marina,
Olga K…) il commence à faire de la supervision musicale. L’aventure dure 5 années. En
2008, il crée Noodles (Supervision), entreprise spécialisée en supervision musicale. En
deux ans, Noodles supervise la musique de plus de 20 longs métrages et séries télévisées.
Eric MICHON
Dans les années 1980, Éric Michon cofonde le label indépendant Contorsion et la société
de distribution de labels indépendant "E.M.DIS".
Chef de projet pour Mercury puis Barclay / Universal, il devient ensuite superviseur
musical indépendant pour le cinéma. Il occupe ensuite plusieurs postes chez BMG Music
Publishing France (directeur film & TV, directeur des départements créatifs et
marketing…) Depuis 2007, il est directeur d'Universal Music Vision, département
synchro d'Universal Music France.
************
Jean-François BERT
Auteur de
L'Édition musicale
, Irma éditions. Président fondateur de Transparency Publishing, société qui
administre les éditions de ses clients dans le monde entier. Il a été consultant en rights management,
dirigé Tokata, un label indépendant, travaillé en major et à la Sacem.
Jean-Noël BIGOTTI
Auteur de
Je monte mon label
, Irma éditions. Responsable du centre de ressources de l’Irma, il collabore à
des journées d’information et de conférences sur des thématiques professionnelles et/ou réglementaires.
Pierre-Marie BOUVERY
Auteur de
Les Contrats de la musique
, Irma éditions. Titulaire d’un DEA en propriété littéraire et artistique,
après avoir été membre de la direction juridique d’une société de gestion de droits voisins, il est
désormais avocat à la Cour de Paris au sein du cabinet Orsay.
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Jean-Noël Bigotti - introduction liminaire
Le contexte actuel est difficile : on recherche forcément des débouchés financiers
complémentaires voire palliatifs pour les exploitations de ses phonogrammes. Ces exploitations
secondaires, comme on les qualifie dans les contrats d’artiste, ne sont peut-être plus aussi
secondaires que cela… Car l’espoir de "breaker" un artiste sur une synchro reste l’un des derniers
eldorados de la plupart des producteurs phonographiques et une lutte âpre pour bon nombre
d’éditeurs.
Ce qui donne encore plus de poids à la profession ou à la fonction de responsable synchro et de
superviseur musical. Fanny Dupé, responsable synchro chez Chrysalis music France l’indique :
"C’est une activité qui a explosé, comme en témoignent la mise en place et la structuration des
départements synchro dans les labels ou chez les éditeurs, qui cherchent de nouveaux débouchés
commerciaux. Ce sont des postes et des services qui prennent de plus en plus d’importance."
Quels catalogues musicaux sont concernés ?
On distingue la musique préexistante de la musique d’illustration ou de commande.
Dans le cas de la musique préexistante, l’exploitation principale de cette musique n’est pas la
synchro, mais la réalisation de l’objet du contrat, cadre dans lequel l’enregistrement et la
commercialisation de l’œuvre ont été prévus.
Exemple : j’enregistre un album avec un producteur parce que je suis artiste, une
opportunité se présente d’utiliser mon œuvre en support d’une œuvre audiovisuelle (peu
importe sa finalité, que ce soit une pub, un film ou autre), on négocie pour moi, je dis oui
et je gagne des sous (d’ou la dénomination d’exploitation secondaire). Reste que la
négociation peut être longue pour les superviseurs musicaux, puisque côté musique on a
des auteurs et des compositeurs, des interprètes ou des ayants droit, des éditeurs, des
producteurs…
La musique d’illustration ou de commande correspond à des catalogues précis, puisque l’essence
même du propos de l’œuvre est alors dillustrer une autre œuvre (film, émissions,
documentaires). Le compositeur, l’auteur et l’interprète savent pertinemment que leur travail
sert dans ce contexte bien spécifique.
Dans la musique d’illustration, Juliette Metz d’Encore merci éditions nous rappelle que cette
musique est spécialement conçue pour sonoriser publicités, documentaires, émissions de télé,
sites Internet… en fournissant aux professionnels de l’audiovisuel et des médias :! rapidité de
négociation (en quelques heures), interlocuteur unique, choix, répertoire varié et prix
accessibles…
La musique de commande s’explique par elle-même : Que ce soit dans la pub un certain
Gotainer a pu s’illustrer aux côtés de Claude Engel et marquer à jamais les années 80 de ce genre
sous-estimé (Lire son interview sur le site de We are Musik : http://wearemusik.com/) ; comme
dans le cinéma l’on se rappellera des bandes originales de films et des compositeurs tels que
De Roubaix, Magne, Schiffrin, Elfman et bien d’autres (se rapporter au travail éditorial de Stéphane
Lerouge pour en savoir plus).
Cinéma ou publicité : une différence de taille
Ces deux grandes familles d’exploitation pour la synchro correspondent à des pratiques bien
différentes : "par nature, ce sont des formats qui nont rien à voir" souligne Matthieu Chabaud,
responsable éditorial du groupe MVS.
Fabrice Dikoumé Kédé, chef de projet synchro chez Wagram le rappelle également : "La publicité
est un secteur très ouvert, avec des interlocuteurs facilement identifiables, et des budgets parfois
très conséquents. Ce secteur a aussi une approche très marketing des œuvres de musique. Le
cinéma est une économie plus fragile, un secteur plus opaque, qui demande de la patience à se
laisser révéler. L’expression la "grande famille du cinéma" n’est pas galvaudée, en ce sens il
s’agit d’un milieu sa place se mérite, en quelque sorte. Les choix de musique s’y font moins
dans l’urgence et sont le fruit d’un échange plus long avec le réalisateur, dont le rapport à la
musique peut être plus affectif."
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Le processus du choix des titres
"
Le superviseur musical est au service du film. On n’est pas pour placer ce que l’on aime mais
pour trouver ce dont le film à besoin. Il faut comprendre l’esprit du film, ce que veut le réalisateur,
et après pour chaque scène, essayer de trouver LA bonne musique."
(Pascal Mayer, superviseur
musical, gérant de Noodles).
La demande concerne-t-elle des musiques de commande ou des musiques préexistantes ? Auquel
cas, le processus de choix diffèrera. Dans le cadre d’une réalisation audiovisuelle, le superviseur
musical rencontrera l’équipe de production ou l’agence de communication et se verra remettre soit
un brief (indications et liste de recommandations), soit un montage temporaire du film (appelé
animatic
ou
mood film
: film monté avec différentes musiques).
Charge à lui de trouver les titres les plus adaptés selon différentes contraintes : !
- de temps car l’urgence peut faire que l’on privilégiera des titres sur lesquels les demandes
d’autorisation sont déjà négociées, sans compter les délais liés à des changements de
choix stratégiques de la part des clients ; !
- de conception des réalités du marché musical et audiovisuel par les différentes parties
concernées. Les ayants droit sont souvent persuadés qu’il y a beaucoup d’argent à
récupérer. Ce qui est parfois vrai mais souvent irréaliste ; !
- de limites de l’offre car il a accès à un catalogue bien défini (ce qui le différencie du
superviseur musical indépendant qui peut piocher bon lui semble en fonction de ses
choix artistiques et de ses contraintes) ;
- de budget : sauf exceptions, la musique est souvent le budget le plus faible de la
production : on privilégie l’image au lieu de s’interroger sur le choix en amont des titres.
En outre, on raconte souvent que les "clients" souhaitent des titres très connus sans
envisager les sommes à verser pour l’utilisation des œuvres… D’où parfois le
réenregistrement de morceaux, voire l’utilisation abondante de titres tombés dans le
domaine public (pour diminuer les coûts et ne pas avoir à payer les droits
phonographiques, l’agence et son client se décidant alors à réenregistrer l’œuvre). !
Pour faire une bonne synchro
"Il faut être en capacité d’apporter une vraie expertise et un conseil en matière artistique au sens
large : sur la musique et la faculté à comprendre le réalisateur, son travail, pour l’emmener là où il
veut aller. Il faut également être complet et pouvoir gérer toutes les problématiques : artistiques,
juridiques, commerciales. Il faut être rapide, savoir frapper aux bonnes portes. C’est un travail de
décathlonien."
(Pascal Mayer)
1. Don't tell us you only have one day to clear the use. And don't call us every two days to see if we
have an answer yet. We will contact you as soon as we know if the requested use has been approved.
2. Don't tell us how low your budget is. If your request is approved, we will quote based on our
perception of the fair market value.
3. Don't expect us to educate you in the clearance process or copyright law because you've never
cleared anything before. You should know what you're doing before you contact us. Consider hiring
a clearance professional (see links).
4. Don't expect approval on a request just because you're a bona fide good-deed-doing charity. Many
of our clients get dozens of charitable requests per week and they cannot all be approved.
5. Don't ever send us a letter stating that if you don't hear from us, you will assume that the use has
been approved. This will prompt an immediate and permanent denial.
6. Don't change our forms or the terms of a license unless you have sent us a written request asking to
do so, and we have approved such request.
7. Please don't chat-up our telephone receptionist. It has zero bearing on whether your request will be
approved, or the speed in which it will be considered.
8. No means no. It is not an invitation to appeal a decision or send further information that you meant
to send in your original request. If you call our client or his or her manager or attorney directly to
appeal their decision after they have already denied the request through this office, or if you waste
our time arguing a quote or usage decision, we may take that into consideration when considering
any future requests you might make.
Source : www.wixenmusic.com
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Quelques chiffres
Que ce soit du point de vue des producteurs phonographiques !comme de celui des éditeurs
musicaux, vous retrouverez des éléments chiffrés dans le focus de l’Irma d'octobre 2010 :
Synchro et supervision, la seconde vie des phonogrammes : http://www.irma.asso.fr/Synchro-
et-supervision-la-seconde.
La fixation du "prix"
Plusieurs éléments sont à prendre en compte : la notoriété de l’artiste ou de l’œuvre, le nombre de
diffusions, les territoires concernés par les diffusions et les médias concernés : TV, cinéma,
Internet.!
Difficile alors de déterminer le tarif de base pour une publicité pour une grande marque de lessive
ou pour un film d’auteur… Pourtant l’utilisation d’un titre de Dalida pour un documentaire diffusé
dans quelques pays d’Europe se serait négocié 10 000 euros. Interrogés sur l’existence d’une
grille tarifaire, il s’avère que ce type de pratique n’existe pas, même s’il existe des usages : la
publicité TV coûte plus cher que le cinéma. !
Pour Matthieu Chabaud, "l’une des problématiques de la gestion d’une demande de
synchronisation est son chiffrage. […] la demande ne peut être chiffrée de manière purement
arbitraire. Nous pourrons la chiffrer en ayant une connaissance d’éléments concrets, quand ils
sont accessibles : le budget du format, la notoriété du réalisateur et de la production, la notoriété
de l’œuvre demandée, la durée de l’œuvre utilisée, le placement de l’œuvre dans le film
(générique, etc.), la durée d’exploitation, le territoire d’exploitation, les moyens d’exploitation (TV,
cinéma, DVD, web, festivals, etc.), œuvre accordée à titre exclusif ou non…"
Le faisceau d’indices qui doit servir à établir un prix correct se fonde ainsi sur des estimations
comme la présence forte (ou pas) de la musique, la longueur de la campagne de pub, la qualité du
film, ses budgets… Selon Musiquedepub.com : "les tarifs doivent démarrer à 40 000 euros (20 000
pour le master, 20 000 pour l’édition pour une campagne TV d’un an en France et pour 30
secondes (pour des titres préexistants)".
Combien ça gagne ?
En général, les superviseurs musicaux touchent un honoraire fixe (ou
flat fee
en anglais) sur un
projet. On dit qu’aux États-Unis, la plupart gagnent quelques milliers de dollars par épisode dans
des séries, alors que les plus grosses pointures peuvent toucher 200 000 dollars pour un gros
budget de film. !On parle aussi de royalties sur la BOF et de bonus en cas de dépassement de seuil
de gains. Mais comme le rappelle Jean-François Bert : "S’ils n’atteignent pas les montants connus
aux USA ou en Angleterre, (où le système du copyright, moins protecteur pour les œuvres lors de
leur exploitation, incite les artistes à demander plus de cash), les budgets consacrés à la musique
en France sont en hausse régulière."
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