les outils d`analyse dynamométriques

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Introduction à l’ingénierie de la réadaptation
LES OUTILS D’ANALYSE DYNAMOMÉTRIQUES
1. Introduction
Les outils d’analyse dynamométriques sont des instruments permettant la
mesure des forces de réactions externes. Dans le domaine de la biomécanique
du corps humain, les forces seront considérées externes lorsque celles-ci
s’exercent entre un segment corporel et un environnement externe, alors que ces
mêmes forces seront dites internes lorsqu’elles s’exercent entre deux segments
corporels adjacents. Un exemple de force externe est celle qui s’exerce entre le
pied et le sol durant la locomotion, ou bien entre la main et la jante (main
courante) d’un fauteuil roulant manuel durant la propulsion. La force de contact
qui s’exerce entre la surface du plateau tibial et les surfaces des condyles du
fémur sera considérée comme une force interne. Les outils dynamométriques
permettent la mesure des conditions de charge entre un segment corporel dit
terminal et l’environnement. Les instruments dynamométriques se distinguent par
le fait qu’ils mesurent les forces de réaction s’exerçant sur une plate-forme rigide,
d’où le nom parfois donné à ce genre d’outil « plate-forme de force ». Il existe
aujourd’hui plusieurs types d’outils dynamométriques : Le plus connu est la
classique plate-forme de force utilisée dans beaucoup de laboratoire d’analyse
de la locomotion ou bien en milieu clinique de réadaptation. La deuxième plateforme a été développée il y a quelques années et permet la mesure des
conditions de charge entre la main de l’usager et la main courante d’un fauteuil
roulant manuel durant l’activité de la propulsion. La plus récente ressemble
essentiellement à la plate-forme de force mais cette dernière est incorporée dans
un tapis roulant. Du fait de son coût élevée, la plate-forme intégré à un tapis
roulant ne se retrouve que dans certains laboratoires de recherches (Exemple :
le Laboratoire de recherche en imagerie et orthopédie à l’ÉTS-CHUM). Dans les
sections qui suivantes, on décrira le principe des outils dynamométriques
statique et dynamiques ainsi que leurs applications.
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2. La plaque dynamométrique de force statique type AMTI
La plaque dynamométrique de force est dite statique car elle est fixée de
manière statique sur le sol. Elle peut mesurer en temps-réel les forces et les
moments (couples) s’exerçant sur sa structure métallique rigide. Dans le
domaine de la réadaptation elle est utilisée pour mesurer les forces et moments
de réaction qui serviront à estimer la trajectoire du point d’application de ces
forces qu’on nomme plus souvent centre de pression (COP) [1].
2.1 Principe de fonctionnement
La figure 1 présente un schéma de la plaque dynamométrique AMTI (American
Mechanical Technology Industry).
Figure 1: Schéma représentatif de la plaque dynamométrique AMTI (tiré de la documentation :
site web de AMTI)
La plaque dynamométrique AMTI est composée de trois plaques métalliques (fig.
1). La plaque interne du milieu contient quatre (4) capteurs de forces triaxiaux
permettant la mesure des forces dans les trois dimensions indiquées par les
axes X, Y et Z. Chaque capteur de force est réalisé grâce à pont de Wheastone
autour d’une résistance variable qui correspond à une jauge de contrainte. Un
autre boitier (MinAmp) accompagne la plaque dynamométrique AMTI qui sert
d’amplificateur. La figure 2 montre le schéma synoptique de l’amplificateur.
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Figure 2: Schéma synoptique du boitier MinAmp de la plaque AMTI (tiré de la documentation :
site web de AMTI).
La jauge de contrainte est représentée par le pont de Wheastone qui est
généralement excité par une tension continue de ±10 Volts. La tension est
ensuite amplifiée et un filtre anti-repliement analogique « anti-aliasing » à la
fréquence de 1 kHz permet d’éviter les situations de repliement de spectre lors
de l’échantillonnage du signal. Le signal analogique amplifié se présente sous la
forme d’un port parallèle à l’arrière du boitier MinAmp. Ce port contient en
permanence les six signaux délivrés par la plaque dynamométrique à savoir les
trois forces Fx, Fy et Fz ainsi que les trois moments autour de ces mêmes axes.
Ces signaux pourront être colligés grâce à une carte d’acquisition et de
numérisation des signaux analogiques. Par ailleurs, le boitier MinAmp permet
aussi de numériser à l’interne grâce à un convertisseur analogique numérique les
six signaux ainsi que de les sérialiser en utilisant le protocole standard RS-232.
Ce standard se présente sur le port série DB-9 présent à l’arrière de l’appareil.
Grâce à la numérisation interne fournit par le boitier MinAmp la plaque
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dynamométrique peut être utilisée avec n’importe quel ordinateur muni d’un port
série RS-232.
2.2 Transformation force-tension
Dans cette section, nous allons décrire la transformation permettant de générer
la tension représentant le signal de force ou le moment appliqué sur la plaque
analogique. Le signal analogique de sortie dépend de plusieurs facteurs : la
sensibilité du capteur, la tension d’excitation du pont de Wheastone ainsi que le
gain de l’amplificateur. Si une force FN en Newtons est appliquée sur un axe
particulier de la plaque dynamométrique la tension analogique de sortie
correspondant à cet axe sera calculée de la manière suivante :
VO = 0.000001× S × Vexc × G × FN
(1)
La valeur de 0.000001 exprime un facteur d’échelle en microvolts/Volts et
représente une unité de sensibilité. S représente la valeur de la sensibilité, Vexc la
tension d’excitation en Volts, G le gain de l’amplificateur et FN est la force
appliquée.
Exemple 1
Calculer la tension de sortie du capteur dans les conditions suivantes :
Fy =200 N; S = 0.67 µV/V; Vexc = 10 volts; G =4000;
La tension de sortie sera calculée par l’équation (1).
Vo = 0.000001 x 0.67 x 10 x 4000 x 200 = 5.36 volts
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2.3 Conversion analogique numérique
Dans l’exemple précédent, la tension de recueillie par le capteur est exprimée en
Volts. Ce signal peut être visualisé facilement grâce à un oscilloscope ou un
voltmètre. Néanmoins pour sauvegarder la donnée dans un ordinateur, il est
essentiel de convertir ce signal analogique en signal numérique. Cette
conversion est réalisée grâce à un convertisseur analogique numérique qui
transforme un signal analogique en un nombre entier variant entre une valeur
minimale et maximale. L’étendue de cet intervalle dépend de la résolution du
convertisseur. La résolution du convertisseur du MinAmp est de 12 bits. Ce
codage signifie qu’il existe 212 = 4096 niveaux possibles. Ainsi si la tension
d’excitation du pont est de ±10 Volts alors la conversion entre la tension mesurée
et la tension numérisée sera de :
5.36 ×
212
= 5.36 × 204.8 = 1097.7 bits
20
Néanmoins comme le convertisseur ne fournit que des nombres entiers la valeur
numérisée qui correspond à l’application des 200 N sera de 1097. Il est parfois
possible de calculer la valeur du plus petit incrément en N/ bits. En d’autre terme
que vaut la valeur d’un bit. Supposons que la force appliquée sur le capteur est
de 1 N, alors la valeur électrique du signal sera de :
VO = 0.000001× 0.67 × 10 × 4000 × 1 = 0.0268 volts
La valeur de 0.0268 volts sera convertie en valeur numérique via un
convertisseur à 12 bits en 0.0268 volts x 204.8 bits/volts = 5.489 bits. Dans ce
cas la valeur de un bit vaut l’inverse du dernier résultat c’est-à-dire de 1N / 5.489
bits = 0.182 N/bit. Alors la force Fy de 200 N appliquée précédemment a une
résolution de 0.182 N/bit. Pour déterminer la résolution d’un capteur vous devez
connaître la capacité de votre convertisseur analogique numérique. Car les
résultats précédents varieront si à la place de 12 bits vous avez choisi un
convertisseur à 16 bits tout en gardant toujours ±10 volts comme valeur de
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tension d’excitation du pont. Ce dernier aura un facteur de conversion de 3276.8
bits/volt qui est plus que 10 fois plus grand que la valeur de 204.8 bits/ volt pour
le cas d’un 12 bits. Dans l’exemple précédent nous avons déterminé que 1 N
valait 0.0268 volts. Dans le cas d’un convertisseur de 16 bits alors :
0.0268 volts x 3276.8 bits/volt = 87.82 bits
La résolution sera de 1/87.82 = 0.011 N/bit.
2.4 Détermination du centre de pression (COP)
Après avoir collecté les forces et les moments appliqués sur la surface de la
plaque dynamométrique, il est parfois très utile de calculer le point d’application
de cette force sur la surface extérieure de la plaque. Au fait les forces de réaction
mesurées par la plateforme sont situées à l’origine de la plateforme qui se situe
au centre de sa surface de contact mais légèrement en-dessous de celle-ci à une
distance (z0). En tenant compte de cette information et en utilisant les valeurs
obtenues pour les moments et les forces de réaction, on peut calculer le centre
de pression à l’interface objet-plateforme ([xcp, ycp]). Ce centre nous renseigne
sur l’emplacement du point d’application de l’objet en question sur la plateforme
de force. Pour le trouver, il suffit d’utiliser la deuxième loi de Newton qui régit
l’équilibre des forces et des moments appliqués à un corps. L’équilibre des
moments en x et en y fournit les équations suivantes :
M x = Fz ⋅ ycp − Fy z0
M y = − Fz ⋅ xcp − Fx z0
Les valeurs des forces et des moments de réaction en x, y et z sont obtenues
pendant l’acquisition des données et la distance z0 est donnée par le fabricant. Il
est donc facile de résoudre ces équations pour xcp et ycp. En isolant chacune de
ces variables, on obtient les expressions suivantes :
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xcp = −
ycp =
( M y + Fx × z0 )
Fz
( M x + Fy × z0 )
Fz
2.5 Paramètres calculés à partir du COP
Plusieurs paramètres peuvent être extraits de la trajectoire du COP. On peut citer
d’abord les étendues maximales lors de déplacement rapide du COP. On peut
estimer la surface engendrée par le COP, ainsi que le diagramme de phase c’est
la représentation de la distance parcourue par le COP versus la vitesse linéaire
du COP. Ces paramètres permettent de décrire des phénomènes de stabilité
statique et dynamique dans des situations de handicap. Le COP peut servir
comme signal de biofeedback pour améliorer l’équilibre postural debout.
2.5.1 Étendue maximale du COP
À partir de la trajectoire du COP nous pouvons extraire rapidement l’étendue
maximale selon les deux axes orthogonaux de la plate-forme de force. En
ajustant ces deux axes selon les orientations antéropostérieure(AP) et médiolatérale (ML) de la personne assise ou debout : nous pourrons déterminer
l’étendue maximale AP et ML pour une situation ou une activité particulière. La
figure 3 nous montre un exemple d’étendue dans les 2 directions. Ces étendues
sont respectivement égales à la largeur et longueur du rectangle dans lequel est
inscrit le contour polygonale du COP.
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TRAJECTOIRE DU CENTRE DE PRESSION
DIRECTION ANTERO-POSTERIEUR Y (cm)
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20
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0
-10
-20
-30
-40
-50
-50
-40
-30
-20
-10
0
10
20
DIRECTION X MEDIO-LATERAL (cm)
30
40
50
Figure 3 : Trajectoire du COP et étendue maximale en AP et ML.
2.5.2 Surface engendrée par le COP
Parfois il est intéressant de mesurer la surface engendrée par le contour
polygonal du COP lors de son déplacement. Pour cela nous devons d’abord
transformer le contour initial polygonal qui peut comporter des concavités et
convexités qui représentent ainsi le déplacement du COP. Le contour
convexe maximale (convexe de Hull) est celui qui relie dans l’espace
bidimensionnel les parties convexes du contour initial. Les connections entre
ces contours sont réalisés par des droites comme le montre la figure 4. Cette
dernière représente le même contour polygonal de la figure 3 mais dans un
système de coordonnées polaire. Ce qui permet de connaître les orientations
majeures du centre de pression. Bien sur plus le contour est bruité plus le
contour convexe varie, d’où la nécessité de filtrer les bruits lors du calcul des
paramètres. Nous reviendrons sur le filtrage vers la fin de ce chapitre.
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40
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20
10
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180 0
0
-10
-20
-30
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Figure 4 : Détermination de la surface engendrée par le contour du polygone convexe nommé
convexe de Hull (en tiret); trajectoire du COP (trait plein). Représentation cartésienne et polaire
du COP en haut. En bas, calcul de l’orientation du tracé du COP par le vecteur en trait plein.
Parfois dans le cas d’étude stabilométrique, on est intéressé à mesurer
l’orientation du nuage de point représenté par le centre de pression. Il existe une
méthode
simple
pour
calculer
la
direction
de
l’orientation
du
tracé
stabilométrique. Cette est basée sur la régression linéaire. Il s’agit de déterminer
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la dispersion de l’axe X_COP et la covariance du nuage de point (X_COP,
Y_COP). Si x et y représente l’abscisse et l’ordonnée du COP on définit l’angle
de direction du contour par :
tan α y , x
σ x2, y
= 2
σ x, x
Ou l’angle de direction est le rapport entre la covariance du couple (x,y) et la
variance de x. La covariance du couple (x,y) est définit par :
σ x2, y =
x=
1
N
1
N
∑ ( x − x )( y − y )
i
i
i
∑x
y=
i
i
1
∑ yi
N i
Dans l’exemple de la figure 4 l’angle de direction est de 44.97 degrés.
2.5.3 Diagramme de phase du COP
La trajectoire du COP est la représentation de l’évolution des efforts internes de
la chaîne corporelle sur le segment terminal en contact avec le la plate-forme de
force. Dans les exécutions de mouvements rapides, telle que le pointage ou la
saisie en position assise ou debout en dehors du champ de préhension, il est
parfois utile de représenter le COP sur un diagramme de phase. On entend par
ce dernier la représentation de l’amplitude de la vitesse linéaire du COP en
fonction de l’amplitude de la distance parcourue par celui-ci. Grâce à cette
représentation on est capable de quantifier la stabilité dynamique des coussins
de siège (Fig. 5).
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Figure 5 : Diagramme de phase du COP lors d’un mouvement de pointage en position assise. La
distance parcourue par le COP est représenté par l’axe horizontal, alors que l’axe vertical
représente la vitesse de déplacement du COP. Le gros trait représente le COP lorsqu’on utilise le
coussin à relief ischiatique, le trait plein représente le coussin plat en mousse polyuréthane alors
que le coussin à air est représenté par le trait pointillé. (Tiré d’Aissaoui et coll., 2001).
2.6 Application de la plate-forme de force statique AMTI
2.6.1 Analyse de la démarche
Il existe plusieurs applications pour les plates-formes statiques, mais celle qui est
la plus répandue est l’analyse de la locomotion. La plaque dynamométrique ne
date pas d’aujourd’hui, en effet la première plaque dynamométrique date aux
environs de 1907 à la station physiologique de Paris (Fig. 6). Cette plaque était
relié à des ressorts qui en se déformant fournissait un signal électrique
proportionnel à la charge sur la plaque. Jules Marey et Georges Demeny ont été
parmi les précurseurs de l’analyse du mouvement humain en général et de
l’analyse de la locomotion comme en témoigne la figure 7. Ces deux pionniers
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ont été les premiers à introduire un système de chronophotographie dans un
contexte hospitalier à Paris.
Figure 6 : le dynamographe, la première plate-forme biomécanique. (Tiré de Georges Demeny,
Mécanisme et éducation des mouvements, 1907).
Figure 7 : Analyse d’un mouvement de chute sur les talons. (Tiré de Georges Demeny,
Mécanisme et éducation des mouvements, 1907).
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Depuis lors la locomotion humaine n’a cessé d’être explorée. De nos jours les
plates-formes de force sont devenues un outil essentiel dans presque tous les
laboratoires d’analyse de la locomotion. La figure 8 montre un kinogramme
bilatérale de la locomotion humaine sur le plan sagittal de la démarche. Un
kinogramme est une représentation filaire de l’individu obtenu en reliant un
certains nombre de marqueurs sur le corps humain par des droites et ce à
chaque instant de prise de vue. Dans la figure 8, l’abscisse représente l’axe
antéropostérieur (en mètre) alors que l’ordonnée représente l’axe vertical (en
mètre). Les triangles obtenus représentent la cinématique tridimensionnelle des
segments corporels.
Figure 8 : Kinogramme bilatérale de la démarche. (Cette figure a été obtenue par un système
Motion Analysis © à 8 caméras vidéo à la fréquence de 90 Hz)
À chaque fois que le pied droit touche le sol, la plate-forme de force enregistre
ainsi les forces et les moments de réactions au sol. Dans la figure 8 le pied droit
touche le sol à l’abscisse de 1m et retouche à nouveau le sol à environ 2.5m plus
loin. Durant la phase d’appui au sol les forces de réactions selon les trois axes
AP, V, et ML ont un patron spécifique et très stable.
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1000
ML
AP
VERT
800
Newtons
600
400
200
0
-200
0
0.5
1
1.5
2
secondes
2.5
3
3.5
4
Figure 9 : Forces de réactions au sol durant le mouvement de la démarche naturelle.
La figure 9 montre les forces de réactions enregistrées par une plate-forme
dynamométrique de type AMTI lors de la locomotion. La phase d’appui dure
moins d’une seconde pendant laquelle la force verticale atteint un premier
maximum d’abord autour de la valeur de 900 N qui dépasse la valeur du poids du
corps qui se situe à 750 N. Un deuxième maximum est atteint vers la fin de la
phase d’appui pour une valeur proche de 1000 N. Les autres axes enregistrent
aussi des efforts de freinage et de poussée dans la direction antéropostérieure et
des efforts latéraux dans la direction ML. Ce patron est typique d’une démarche
naturelle valide, à l’instar d’une démarche pathologique qui peut être causée par
une hémiplégie partielle, une amputation du membre inférieure ou bien par un
cas d’infirme moteur cérébral. Grace au graphique de la figure 9 plusieurs
paramètres temporels peuvent être analysés. La durée de la phase d’appui la
durée de la période de double support, la trajectoire du centre de pression, etc.
Par ailleurs, les forces et les moments enregistrés sur la plaque dynamométrique
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peuvent nous permettre de mesurer les efforts à d’autres articulations telles que
le genou ou la hanche en utilisant des modèles biomécaniques. Le modèle le
plus répandu est celui dit de la dynamique inverse (Dumas et coll., 2004).
2.6.2 Analyse de la performance du saut vertical
Il arrive parfois qu’on s’intéresse à mesurer la hauteur du saut maximal que le
centre de gravité atteint en sautant les pieds joints. Cela représente un test de
performance que ce soit dans le domaine de la performance sportive ou dans le
cas du retour au sport après avoir subi une chirurgie ligamentaire (exemple
rupture du ligament croisé antérieure). Il y a deux méthodes simples pour
déterminer la hauteur du saut grâce à la plate-forme de force. La première
dépend du temps de vol et la deuxième fait intervenir l’impulsion qui représente
la quantité de mouvement au décollage :
2.6.2.1
Méthode du temps de vol
La méthode du temps de vol permet l’estimation de la hauteur du centre de
masse en mesurant le temps entre le décollage et l’atterrissage à nouveau sur la
plate-forme de force. Le schéma de la figure 10 montre un saut vertical la
représentation à été décomposée sur l’axe horizontal à des fins de visualisation.
La figure 11 montre le résultat de la force de réaction vertical lors d’un saut
vertical. Il y généralement deux phases durant le vol, la phase de poussée et la
phase d’envol lorsque le contact avec les pieds a cesser d’exister. À partir du
temps d’envol, on peut déterminer la hauteur maximale en considérant que le
corps n’est soumis qu’à la force gravitationnelle du poids et suit un mouvement
uniformément accéléré :
⎛ g Tvol2 ⎞
H MAX = ⎜
⎟
⎝ 8 ⎠
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Où g représente la valeur de l’accélération gravitationnelle (9.81 m/s2) et Tvol
représente le temps de vol (Fig. 10).
Figure 10 : Saut vertical maximum.
Figure 11 : courbe de la force de réaction verticale lors d’un saut vertical.
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2.6.2.2
Méthode de l’impulsion
La méthode de l’impulsion permet de calculer la quantité de mouvement entre
l’initiation du mouvement du saut et le décollage lui-même. On calcule d’abord la
vitesse du décollage par la relation suivante :
t = decollage
vdecoll =
∫
( Fz (t ) − P)dt
t =0
M
Où Fz(t) est la force de réaction verticale, P le poids du corps et M la masse du
corps. L’instant t=0 représente l’initiation du mouvement du saut et t =decollage
l’instant ou effectivement les pieds ont quitté la plate-forme de force. La quantité
vdecoll représente la vitesse de décollage verticale à l’instant du décollage. La
hauteur maximale est déterminée à partir de la relation suivante :
H MAX
2
⎛ vdecoll
= ⎜⎜
⎝ 2g
⎞
⎟⎟
⎠
3. Plate-forme dynamique
3.1 Principe de fonctionnement
Pour mesurer les efforts appliqués sur la main courante (jante) d’un fauteuil
roulant à propulsion manuelle, il est nécessaire de mesurer les forces et les
moments de réactions sur la main courante. La première équipe de recherche à
parvenir à mesurer ces efforts est celle de l’université libre d’Amsterdam. En effet
Niesing et coll. (1990) on développé un ergomètre pouvant mesurer les efforts à
la propulsion (Fig. 12). Cet ergomètre est très complexe lorsqu’il s’agit de
calibrage. Par ailleurs, il est aussi stationnaire. Depuis une décennie un autre
instrument a vu le jour permettant aussi bien la mesure des forces et des
moments de réactions sur la main courante ainsi que la possibilité d’être nonstationnaire (Asato et coll, 1993). Ce dernier système existe sous une forme
commerciale (www.3rivers.com). La figure 13 montre le principe de base de la
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plate-forme dynamique Smartwheel. Elle est construite autour de trois tubes
symétriques à 120 degrés. Chaque tube contient deux ponts de Wheastone
permettant de transformer les efforts mécaniques en signaux électriques.
Figure 12 : Ergomètre de Niesing et coll. (1990).Plusieurs capteurs de force (5, 10, et 12) sont
insérés pour quantifier les efforts sur la main courante.
Figure 13 : Plate-forme de force dynamique Asato et coll. (1993).
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La figure 14 montre la disposition des ponts de Wheastone sur chacun des bras
(tube) de la roue smartwheel. Chaque bras est donc le support de deux ponts de
mesure, si une composante d’une force est appliquée sur la jante dans le plan de
la roue, elle produit une extension des capteurs 5 et 7 et en même temps une
compression des capteurs 6 et 8 appartenant au pont 2, les capteurs du pont 1
réagissent à une déformation minime comparée au pont 2. Les résistances R5 et
R7 vont croître d’où ΔR5 et ΔR7 sont positives de même que les résistances R6
et R8 vont diminuer d’où ΔR6 et ΔR8 sont négatives.
Vue de face du bras (Plan de la roue)
5
7
1
3
6
8
Vue de Dessus
2
4
5
7
1
3
Pont 2
Pont 1
Figure 14 : Disposition des gauges de contraintes sur chaque bras de la roue. Les jauges 1,2,3,4
forment un pont et 5,6,7,8 le deuxième pont.
La figure 15 montre l’exemple d’un pont de Wheastone. La tension de sortie d
pont est fournit par l’équation suivante :
Vs =
R1 R3 − R2 R4
V
( R1 + R2 )( R3 + R4 )
-ε
+ε
R1
R4
Pont 1
R3
R2
Vs1= Canal1
-ε
+ε
V
Figure 15 : Pont Wheastone
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Introduction à l’ingénierie de la réadaptation
À l’équilibre lorsqu’aucune force ne s’applique à la main courante alors Vs=0. Si
une force es appliquée sur la main courante dans la direction principale d’un pont
alors les gauges se déforment et une tension Vs apparaît. Pour chaque bras il y
a 2 ponts opérant dans le plan frontal et le plan sagittal fournissant ainsi un
voltage indiquant la déformation dans les 2 plans orthogonaux. Le tableau 1
montre la répartition des canaux dans chaque plan et pour chaque bras.
Tableau 1 : répartition des tensions
Plan de la roue (sagittale)
Plan Orthogonal
Bras 1
Pont 1 (Canal 1=v1)
Pont 2(Canal 2=v2)
Bras2
Pont 3 (Canal 3=v3)
Pont 4(Canal 4=v4)
Bras3
Pont5 (Canal 5=v5)
Pont 6(Canal 6=v6)
À partir des voltages nous pouvons calculer les forces et les moments grâce à
l’angle relatif entre le bras numéro et l’axe horizontal.
2π
4π ⎤
⎡
Fx = K11 ⎢v1 sin(φ ) + v3 sin(φ + ) + v5 sin(φ + ) ⎥ + K12
3
3 ⎦
⎣
2π
4π ⎤
⎡
Fy = K 21 ⎢ v1 cos(φ ) + v3 cos(φ + ) + v5 cos(φ +
) + K 22
3
3 ⎥⎦
⎣
Fz = K 31 [ v2 + v4 + v6 ] + K 22
2π
4π ⎤
⎡
M x = K 41 ⎢v2 sin(φ ) + v4 sin(φ +
) + v6 sin(φ + ) ⎥ + K 42
3
3 ⎦
⎣
4π ⎤
2π
⎡
M y = K 51 ⎢v2 cos(φ ) + v4 cos(φ +
) + K 52
) + v6 cos(φ +
3 ⎥⎦
3
⎣
M z = K 61 [ v1 + v3 + v5 ] + K 62
Les coefficients Ki,j sont obtenues par calibrage, c’est-à-dire en effectuant un
chargement connu sur la plate-forme.
3.2 Point d’application des forces (PFA)
Il existe deux manières de déterminer le point d’application de la force sur la
main courante.
20
G
G
T
S
GT
TS
S---
Introduction à l’ingénierie de la réadaptation
3.2.1 Méthode des moments
La position du PFA peut être déterminée en utilisant les moments que génère la
plate-forme selon les axes horizontal (Mx) et vertical (My)
La figure 16 montre la position du PFA dans le plan sagittal a un point particulier
spécifique définit par l’angle polaire φ. Les forces peuvent être décomposées
selon les axes x et y ou bien selon les axes radial et tangentiel.
y
Fx
φ1
Fr
t
Ftot
φ
0
Ft
φ2
x
Fy
Déplacement
r
Figure 16 : Représentation des forces dans le plan sagittal. Ft et Fr représentent les
composantes tangentielle et radiale de la force Ftot.
Les moments Mx, My selon l’axe x et y sont donnés par :
M y = − Fz R cos φ + Fx z PFA + my
M x = Fz R sin φ + Fy z PFA + mx
R représente le rayon de la roue, Mx, My, Fx, Fy, et Fz sont mesurés par la
plate-forme de force. zPFA est la position du PFA selon l’axe z et par conséquent
sur la roue cette valeur vaut zéro. Les deux équations suivantes indiquent que
les moments mesurés par la plate-forme sont égaux à la somme des moments
des forces appliqués sur la main courante plus la somme des couples générés
21
G
G
T
S
GT
TS
S---
Introduction à l’ingénierie de la réadaptation
par le poignet mx et my. Néanmoins les couples mx et mz ne sont pas connus.
On peut alors estimer la position du PFA en déterminant simplement l’angle φ :
⎛ M x − mx
⎜ M y − my
⎝
φ = tan −1 ⎜ −
⎞
⎟⎟
⎠
Si on pose que mx et my sont des portions de Mx et de My alors
mx = α M x
my = β M y
−1 ≤ α < 1 − 1 ≤ β < 1
Alors l’angle φ
⎛ M x (1 − α ) ⎞
⎜ M y (1 − β ) ⎟⎟
⎝
⎠
φ = tan −1 ⎜ −
Dans le cas général et si le paramètre r est fonction de plusieurs variables
r = r ( X 1 , X 2 ,.... X j )
Alors l’incertitude sur le paramètre est donnée par :
2
Ur
2
⎛ ∂r
⎛ ∂r ⎞
⎟⎟ U X 1 2 + ⎜⎜
= ⎜⎜
⎝ ∂X 2
⎝ ∂X 1 ⎠
2
⎛ ∂r
⎞
⎟⎟ U X 2 2 + "" + ⎜⎜
⎠
⎝ ∂X J
2
⎞
⎟⎟ U X J 2
⎠
Dans le cas du PFA par la méthode des moments, l’incertitude absolue sur
l’angle φ est donnée par la différentielle totale :
1/ 2
⎛ ∂φ
⎞
∂φ
Uφ = ⎜ (
UM x ) 2 + (
UM y ) 2 ⎟
⎜ ∂M
⎟
∂M y
x
⎝
⎠
1/ 2
⎛
⎞
(1 − α ) 2 (1 − β ) 2
2
2
2
2 ⎟
+
Uφ = ⎜
M
UM
M
UM
( y x x y )⎟
⎜ ⎡ M 2 (1 − β ) 2 + M 2 (1 − α ) 2 ⎤ 2
y
x
⎦
⎝⎣
⎠
Où la pramètres UMx et UMy représentent les incertitudes absolues sur le
moment Mx et My. On remarque que lorsque les moments sont faibles alors
l’incertitude tend vers des valeurs très grandes indiquant peu de fiabilité pour ce
paramètre. Les incertitudes absolues sur Mx et My ont été calculés de la même
22
G
G
T
S
GT
TS
S---
Introduction à l’ingénierie de la réadaptation
manière que celle de l’angle φ. Les valeurs de UMx et UMy sont égales à 0.2 Nm
et 0.18 Nm en valeur rms (c’est-à-dire la variation de la moyenne quadratique)
pour des essais de propulsion réalisés en laboratoire.
3.2.2 Méthode des forces et des moments
Grâce à la figure 16, nous pouvons établir la relation suivante entre les forces Fx,
Fy d’une part et les forces Ft et Fr d’autre part :
⎡ Fr ⎤ ⎡ − cos φ
⎢ F ⎥ = ⎢ sin φ
⎣ t⎦ ⎣
− sin φ ⎤ ⎡ Fx ⎤
⎢ ⎥
− cos φ ⎥⎦ ⎣ Fy ⎦
Alors l’angle φ peut être calculé par
cos φ = −
Fx Fr + Fy Ft
Ftot 2
La force tangentielle est estimée par la relation suivante :
Ft =
(Mz − Mh )
R
Où Mh est le couple généré par le poignet. En posant
Mh = γ Mz
0 ≤ γ ≤1
On peut estimer l’angle de position du PFA par
2
cos φ = −
Fx
Mz
⎛M
⎞
( Fx + Fy + Fz ) − ⎜ z (1 − γ ) ⎟ − Fz 2 + Fy
(1 − γ )
R
⎝ R
⎠
Fx 2 + Fy 2 + Fz 2
2
2
2 2
23
G
G
T
S
GT
TS
S---
Introduction à l’ingénierie de la réadaptation
Références
•
•
•
•
Aissaoui R, Boucher C, Dansereau J, Lacoste M, Bourbonnais D. (2001).
Effect of seat cushion on dynamic stability in sitting during a reaching task in
paraplegic subjects. Archives of Physical Medicine & Rehabilitation, vol. 82,
pp. 274-281.
Asato KS, Cooper RA, Robertson RN, Ster JF. (1993). SMARTWheels
development and testing of a system for measuring manual wheelchair
propulsion dynamics. IEEE Transactions on Biomedical Engineering, vol. 40,
pp. 1320-1324.
Dumas R, Aissaoui R, de Guise JA. (2004). A 3D generic inverse dynamic
model using wrench notation and quaternion algebra. Computer Methods in
Biomechanics and Biomedical Engineering, vol. 7, no. 3, pp.159-166.
Niesing R, Eijskoot F, Kranse R, den Ouden AH, Storm J, Veeger HEJ, van
der Woude LHV. (1990). Computer-controlled wheelchair ergometer. Medical
& Biological Engineering & Computing, vol. 28, pp. 329-338.
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