Mise en page 1

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Synthèse et thèmes de débat
Le Mali est confronté à des défis structurels majeurs liés à la combinaison d’une très forte
croissance démographique et d’une économie
faiblement diversifiée, accentués par une pauvreté élevée et d’importants retards en matière
d’infrastructures, d’équipements et d’éducation.
De par son poids dans la population active et du
fait des délais nécessaires à l’émergence de véritables secteurs de diversification, l’agriculture
conservera un rôle central dans les vingt prochaines
années. C’est pourquoi les débats actuels sur l’approche
sectorielle et la relance du cadre de programmation à travers le
PNISA doivent s’inscrire dans une vision large du développement économique et
social du pays, où le secteur agricole dans son ensemble devra contribuer
à répondre aux besoins en matière d’alimentation, de diminution de
la pauvreté rurale, de gestion des ressources naturelles mais, aussi,
de création d’emplois.
Changements structurels
des économies rurales
dans la mondialisation
Quelques références...
Banque mondiale, 2009. Le Mali face au défi démographique. Rapport d’étude, 102 p.
DNSI, 2001. Recensement général de la population et de l'habitat (Avril 1998). Résultats définitifs. Tome 1, série sociodémographique. Direction nationale de la statistique et de l'informatique
du Ministère de l'économie et des finances, 732 p.
DNSI, 2003. Perspectives de la population résidente du Mali (1999-2024).
Guengant J-P., 2010. Mali : Projections 2010-2050. Annexe au rapport Banque mondiale 2009.
Le Mali face au défi démographique.
INSTAT (Institut National de la Statistique), 2009. 4e recensement général de la population et de
l’habitat du Mali.
OCDE/CAD, 2009. Rapport du Président du CAD.
2003
2007
2005
1999
2001
1995
1997
1991
1993
1987
1989
1983
1985
UNE ECONOMIE EN CROISSANCE INSTABLE…
PDDAA (Programme détaillé de développement de l’agriculture africaine), 2009
Depuis 1994, le Mali enregistre une croissance moyenne de son PIB de l’ordre
de 5 % par an. Cette situation est singulière à la fois par rapport aux décennies antérieures, marquées par une quasi-stagnation de l’activité (une croissance annuelle
moyenne de 0,8 % entre 1980 et 1986 et 2,6 % entre 1987 et 1993), mais aussi par rapport à la situation des autres pays membres de l’Union économique et monétaire ouestafricaine.
PNISA (Programme national d’investissement dans le secteur agricole), 2009.
Ratha D. and W. Shaw, 2007. “South-South Migration and Remittances.” World Bank Working
Paper No.102.
United Nations, 2009. World Population Prospects. 2008 Revision.
1979
Pour en savoir plus
1981
[email protected]
[email protected]
[email protected]
[email protected]
1975
Contacts
Depuis le début de la décennie Figure 1 – Evolution de la structure du PIB (en %)
60, la répartition des activités 100
économiques est stable, signe 90
d’absence de transition écono- 80
mique. Le secteur primaire consti- 70
60
tue le pivot de l’économie 50
malienne et est resté proche 40
jusqu’à récemment des 50 % de 30
20
la richesse totale créée : les cé- 10
réales et le coton jouent un rôle
0
majeur et le repli marqué de ce
dernier depuis 2003-2004, lié à
Source : Word Bank Indicators 2009
une dégradation de l’environneServices
ment de la filière (interne et externe, avec une baisse des
Industrie manufacturière
cours renforcée par les effets de la parité euro - dollar), exMines, BTP, énergie
plique le tassement de la place relative de l’agriculture.
Agriculture
Cette évolution s’est accompagnée du développement de l’industrie extractive, en nette croissance
depuis la fin des années 90 (la production aurifère représentait 20 % du Produit intérieur brut [PIB] en 2007), alors que la production manufacturière
voyait sa contribution au PIB diminuer régulièrement depuis 1997. Quant au
secteur tertiaire, qui oscille entre 35 et 40 % du PIB, il est principalement
constitué d’activités informelles (commerce, transport), les télécommunications, en croissance forte depuis le début de la décennie 2000, étant une
modeste exception.
1977
Synthèse n° 2
UNE FORTE INERTIE STRUCTURELLE
1971
MALI
http://www.worldbank.org/
afr/ruralstruc
http://www.ier.gouv.ml
Samaké A., Bélières J.-F., Bosc P.-M., et O. Sanogo, 2007. Les implications structurelles de la libéralisation sur l’agriculture et le développement rural au Mali. Première phase du programme
Rural Struc – Synthèse nationale. CEPIA - Banque Mondiale & Coopération française, Bamako,
227 p.
face aux défis de la transition démographique
et économique au Mali
1973
Quelles sont les filières agricoles à même d’offrir une croissance inclusive, pour le plus grand nombre ? Et quelles sont les
opportunités de développement d’activités liées, en amont et
en aval de la production agricole (transformation, services) ?
Entre l’appui aux exploitations agricoles familiales au cœur
de la Loi d’orientation agricole (LOA) et l’émergence d’une
agriculture d’entreprise à grande échelle, quel modèle agricole privilégier ? Quelles complémentarités et quelles tensions
entre ces deux modèles (notamment pour l’accès aux ressources en terres et en eau) ? Quelles conséquences en termes
d’emploi et de besoins en capital (humain, technique, financier) ?
Quels sont les investissements et les systèmes techniques nécessaires
pour gérer l’impact de la croissance démographique sur les ressources naturelles ? Comment anticiper les risques de blocage et quels sont les besoins en termes
d’inventaire, d’information, de cadre juridique et de politique foncière, etc. ?
Le rôle de l’agriculture
1967
15:31
1969
28/05/2010
Programme
Fiche2_validation27:Mise en page 1
Édition : Christine Rawski
Maquette et mise en page : Cathy Rollin
© IER-MSU-CIRAD 2010
.../...
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Cette poussée démographique a des conséquences directes en matière de demande de
création d’emplois et l’économie devra absorber un nombre croissant de jeunes actifs :
selon la dernière projection de la Banque
mondiale, la cohorte annuelle de nouveaux
actifs entrant sur le marché du travail est
estimée aujourd’hui à 300 000 en
valeur absolue (sans référence
au taux de chômage existant),
dont 180 000 ruraux ; elle
devrait doubler d’ici 2025
pour atteindre 520 000 actifs dont près de 240 000
ruraux (voir figure 3). Ainsi,
selon cette estimation,
l’économie malienne devrait absorber 6,2 millions
de nouveaux actifs dans les
quinze prochaines années,
dont 3,3 millions pour le milieu
rural.
La conjonction d’un changement de régime politique, des effets positifs de la dévaluation du franc
CFA, et la croissance de l’exploitation aurifère contribuent à expliquer cette tendance. Toutefois,
malgré cette augmentation récente du rythme de croissance globale, l’activité économique du Mali
reste vulnérable car soumise à une volatilité interannuelle largement expliquée par le poids du secteur agricole (pluviométrie, prix internationaux), ainsi que par la parité euro/dollar et les incertitudes institutionnelles. Cette croissance globale de l’économie malienne depuis 1994 intervient
dans un contexte de forte croissance démographique, qui se traduit par une croissance du PIB par
habitant de 2 %. En 15 ans (1995-2009), le PIB par tête est passé de 85 000 FCFA à 106 325 FCFA
constants (279 000 FCFA courants en 2008). La pauvreté monétaire reste élevée, avec 67 % de la
population totale considérée comme pauvre en 2001 ; cette proportion atteint 79 % dans les zones
rurales. Dans ses aspects non-monétaires, la pauvreté se manifeste par une proportion élevée de la
population n’ayant pas accès aux services publics de base.
Quant à la contribution de l’investissement à la création de richesse, il se situe selon les années
entre 15 et 27 % du PIB, avec une légère tendance à la baisse depuis le début de la décennie 2000.
Cet investissement est concentré dans l’extraction aurifère et le bâtiment-travaux publics (BTP), l’agriculture n’en recevant qu’une part modeste (PNISA, 2009). Alors que le financement par le secteur
bancaire privé national est extrêmement limité, l’investissement public dans l’agriculture est largement financé par l’aide extérieure (environ 80%), en baisse continuelle depuis le milieu de la décennie 1980 et par nature soumise aux aléas des politiques des bailleurs de fonds (PDDAA, 2009 ;
OCDE/CAD, 2009). Toutefois, suite à la crise des prix alimentaires de 2007-2008, les nouveaux engagements internationaux devraient redresser cette tendance et faciliter une remobilisation dans le
cadre du Programme national d’investissement dans le secteur agricole (PNISA) qui prévoit un montant d’investissement de 2 356 milliards de FCFA sur la période 2009-2015.
500,00
UN DEFI DEMOGRAPHIQUE INCONTOURNABLE
A l’horizon 2025, soit dans quinze ans, la population totale du Mali devrait se situer selon
les scénarios entre 19 et 25 millions de personnes (projection des Nations Unies dans le
premier cas, largement sous-estimée ; projection de la Banque mondiale dans le
second cas). L’urbanisation se poursuivra à un
rythme soutenu ; mais la population rurale,
estimée à 64 % de la population totale en
2010, devrait rester majoritaire jusqu’en 2030.
Ces tendances indiquent que le taux de dépendance (inactifs/actifs) restera élevé, du fait
du maintien d’une forte fécondité. Il impliquera des gains de productivité accrus par
actif pour assurer la redistribution intergénérationnelle des revenus ; et le dividende démographique (la diminution du rapport de
dépendance liée à la croissance relative de la
population active suite à la baisse de la fécondité) ne sera pas perceptible avant 2050.
400,00
300,00
Totale
200,00
100,00
24
21
18
15
12
9
6
3
1960
65
70
75
Totale (NU)
80
85
90
(BM)
95
2000
Source : United Nations 2009 (NU) et Guengant 2010 (BM)
05
10
Rurale (NU)
15
20
(BM)
2025
20
25
20
15
10
05
20
00
95
90
85
80
0,00
ource : Guengant 2010 et calculs des auteurs
Figure 2 – Evolution de la population 1960-2025 (en millions)
0
Rurale
19
60
Dans cet espace économique, financier et monétaire «contraint», où la modification
de la structure de l’économie malienne ne pourra être que très
progressive, le défi consiste à
trouver des sources de croissance économique qui
soient suffisamment inclusives pour absorber les effets d’une croissance
démographique qui s’accélère depuis 2000 et qui est
l’une des plus élevées du
monde (Banque mondiale,
2009). En effet, avec 14,5 millions de personnes selon les premiers résultats du Recensement
général de la population et de l’habitat d’avril
2009, cette croissance de la population est
beaucoup plus forte que prévue avec 3,6 % annuels en moyenne entre 1998 et 2009 (DNSI,
2001 et 2003 ; INSTAT, 2009). La population
malienne a quadruplé depuis l’indépendance
mais, selon la nouvelle projection de la Banque
mondiale basée sur le RGPH 2009 (Guengant,
2010), elle pourrait presque quadrupler encore
d’ici 2050 avec 56 millions d’habitants au milieu du siècle (hypothèse tendancielle). Il n’y a
pas encore d’analyse disponible, mais cette
forte croissance s’explique par le maintien
d’une fécondité élevée, une diminution de la
mortalité plus rapide que prévue, le retour
probable de migrants de longue durée de Côte
d’Ivoire, mais aussi le tassement d’une émigration devenue plus difficile.
Une politique de planification familiale vigoureuse est absolument nécessaire pour permettre une amélioration significative du taux de
dépendance, même si elle n’a pas d’effets immédiats sur la question de l’emploi, puisque les
actifs des vingt prochaines années sont déjà
nés. Parallèlement, une stratégie ambitieuse
d’éducation est essentielle pour répondre dès
maintenant aux besoins d’aujourd’hui mais
aussi anticiper ceux de demain. Car, pour pouvoir bénéficier pleinement à terme du dividende démographique, il faudra une
main-d’œuvre qualifiée à même de soutenir la
croissance économique.
Le Mali devra développer des secteurs d’activité nouveaux par des politiques structurelles
volontaristes. Mais il est probable, vu sa trajectoire historique de développement, que l’émergence de nouvelles activités industrielles et de
services à forte intensité de main-d’œuvre restera limitée dans les 20 prochaines années. Parallèlement, un ajustement par une migration
massive au sein de la région
Figure 3 – Croissance annuelle de la population active 1960-2025 (en milliers)
Afrique de l’Ouest et/ou vers
500
l’Europe n’apparaît pas comme
une option réaliste dans l’environnement
géopolitique actuel :
400
en 2005, le Mali comptait,
selon les données officielles, 1,2
million d’émigrés, dont 65 % en
300
Côte d’Ivoire et au Burkina Faso
et 6% en Europe (Ratha & Shaw,
Totale
200
Rurale
2007), soit 9,5% de la population totale (d’autres sources
donnent des estimations beau100
coup plus élevées, comprises
entre 2 et 4 millions - cf. Sa0
maké et al., 2007). L’émigration
1960
65
70
75
80
85
90
95
2000 05
10
15
20
2025
progressera probablement, mais
Source : Guengant 2010 et calculs auteurs
celle-ci restera forcément modeste.
Ainsi, à l’horizon 2025, la population sera encore
majoritairement rurale et agricole, avec un
UN SECTEURAGRICOLE DETERMINANT
taux de dépendance élevé ; et c’est cette base
POUR L’AVENIR DU PAYS
agricole qui va devoir jouer un rôle accru qui
La combinaison des variables démograsera déterminant pour les équilibres éconophiques et économiques fait apparaître des
miques, politiques et sociaux des deux prorisques de très fortes tensions pour le dévechaines
décennies.
La
croissance
loppement économique et social du Mali.
démographique et urbaine offre des perspecQuels seront les secteurs d’activité à même
tives de marché soutenues pour les productions
d’accueillir tous ces jeunes et de leur offrir des
agricoles d’une économie sous-régionale en
emplois et des revenus ?
voie d’intégration, qui sont autant d’opportunités en termes de transformation agro-indusIl n’existe évidemment pas de solution puretrielle à même d’amorcer un changement
ment démographique ou de solution purement
structurel. Et, malgré des contraintes accrues, le
économique à ces problèmes et il est indisMali dispose encore de ressources naturelles
pensable d’adopter une vision stratégique
importantes. Ce sont ces atouts qu’il faut transbasée sur l’identification des principales opformer par le choix de politiques sectorielles
portunités et contraintes.
adaptées.
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28/05/2010
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