08/12/14 ROUBIN Alexandre L2 CR : Julie Chapon Santé

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SANTE SOCIETE HUMANITE – Dimension éthique de la relation médecin malade
08/12/14
ROUBIN Alexandre L2
CR : Julie Chapon
Santé Société Humanité
Pr. P. LE COZ
12 pages
Dimension éthique de la relation médecin malade
Plan
A. Considération préliminaire sur l'éthique
B. Le principe d'autonomie
C. Le principe de bienfaisance
D. Le principe de non-malfaisance
E. Le principe de justice
Modalité de l'examen :
Épreuve rédactionnelle de deux heures (On avait 30 minutes les années précédentes)
Trois questions : une seule à traiter. Exemple :
1. La loi protège-t-elle tous les patients de l'obstination déraisonnable ?
2. Selon vous, le patient psychiatrique peut-il refuser des soins ?
3. Le médecin doit-il aider le patient atteint d'un mal incurable à accepter la mort ?
Consignes :
Nécessite impérativement de connaître ses cours
Envisager le problème sous deux angles différents (voire trois)
Utiliser des références culturelles (psychologie, philosophie...)
Articuler les idées dans une démarche progressive
Écrire lisiblement ++
Éviter les banalités (du genre « de tout temps l'homme a cherché... »)
Ne pas négliger la conclusion (environ 10-15 lignes)
Essayer d'écrire environ 3 pages ou plus
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A. Considération préliminaire sur l'éthique
Le mot éthique vient du grec « Ethos » signifiant le gîte, la demeure, le chez soi, un espace habitable...
L'éthique est donc une réflexion sur les conditions qui rendent un espace humainement habitable pour tous, où
chacun peut se sentir membre de la cité.
On distingue aujourd'hui deux courants :
• L'éthique normative qui porte sur nos devoirs à l'égard des autres.
• L'éthique appliquée qui porte sur nos devoirs envers autrui dans tel ou tel contexte particulier (ex : la
recherche biomédicale)
L'éthique normative, comme son nom l'indique, est une réflexion sur les normes qui organise la vie en société.
D'où viennent les normes ? Est ce qu'elle viennent de Dieu, de la religion, de la raison, de la société, de la
sensibilité, de l'homme ?
Existe-t-il des normes universelles ? Chacun a-t-il sa morale ? Chaque pays a-t-il sa morale ?
A-t-on des devoirs envers nous même ?
Quelles sont les attentes légitimes des autres à notre égard ?
Avons-nous des devoirs envers nous-mêmes ?
Que dois-je faire ?
L'éthique appliquée est une réflexion articulée à un contexte particulier.
Il en existe au moins 5 sous sections :
L'éthique médicale : euthanasie, refus de soin, avortement, annonce des mauvaises nouvelles...
L'éthique sociale avec des choix de société et politique : homoparentalité, circoncision, prostitution,
toxicomanie...
L'éthique environnementale : OGM, nanotechnologies, champs magnétiques, perturbateurs endocriniens...
Bioéthique : gestation pour autrui, transplantation d'organes, diagnostic préimplantatoire, recherche sur
l'humain, animal, recherche sur l'embryon...
Un événement a marqué l'émergence de la bioéthique aux États-Unis :
« Pénicilline et syphilis : les sacrifiés de l'Alabama » ou l'utilisation du vivant pour produire du savoir.
En 1972, un étude a été révélée dans le New York Times, des Noirs en Alabama ont fait l'objet d'une étude
épidémiologiste.
Ils étaient atteints de la syphilis, la pénicilline avait été découverte à la fin des années 30, la thérapeutique a été
validé et reconnu comme efficace et commercialisé, mais on a laissé malgré tout sans traitement une population
de 400 noirs pour voir comment la maladie évoluait avec le temps.
On leur a donc menti : on ne leur pas dit qu'ils étaient malades, on ne leur a pas donné de traitement, on les a
laissés se contaminer les uns les autres.
On a manqué de justice, ils n'ont pas été traité à égalité en dignité.
D'où la naissance des quatre principes éthiques dans les années 70, il fallait trouver les piliers de l'éthique,
inamovible, transculturelle qui vont servir de repère des normes que l'on ne peut pas bafouer.
Les quatre principes éthiques sont donc les expressions des attentes morales d'autrui à notre égard, les valeurs
qui ont une force prescriptive :
– le principe d'autonomie
– le principe de bienfaisance
– le principe de non-malfaisance
– le principe de justice
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Qu'est ce que autrui est en droit de me demander ?
• De respecter notre liberté, donc nous laisser participer aux décisions (c'est ce qui a manqué dans l'expérience
d'Alabama)
• D'accomplir un bien en leur faveur, c'est à dire améliorer leur qualité de vie
• De ne pas leur nuire
• De les traiter à égalité en dignité, avoir l'égale considération pour tous
On ne peut pas dire que chacun a sa morale. Sinon, on a qu'à dire : « Bon, ces Noirs ont leur morale, les
scientifiques ont fait des expériences aussi ont leur morale »
Il faut trouver des points communs sur lesquels on puisse tous s'accorder.
Les quatre principes valent par tous les pays, toutes les traditions, toutes les religions. Tout le monde peut
reconnaître la valeur de ces quatre principes.
On dit tout le monde mais ce n'est pas tout à fait vrai.
Quand on entend à la télé « État Islamique, Djiad... ». On n'a pas vraiment envie de les mettre à la table de
discussion.
Il y a donc un prérequis pour aller à la table des discutions : la réflexion éthique suppose une culture laïque et
individualiste.
On demande aux gens de mettre de coté leur croyance, elles ne doivent pas interférer. On doit tous être des fils
de Descartes : « je pense donc je suis ».
Il ne peut y avoir d'éthique en dehors des pays démocratiques, car aucune discussion n'est possible.
Pour certains, les normes viennent de Dieu et les hommes n'ont pas à discuter.
Remarque : Ne pas confondre laïque et athéiste
Un laïque peut être croyant du moment qu'il ne trouble pas l'ordre public. On ne s'affiche pas de manière
ostentatoire son appartenance.
Récemment, il y a eu un débat sur la présence de crèche dans les établissements publics. Un laïque peut y être
tout à fait favorable mais le tribunal, au nom de la laïcité, a décidé qu'il n'y aurait pas de crèche.
Au CCNE, il y a des représentants de chaque religion mais s'ils argumentent, ils doivent trouver une
argumentation rationnelle (« Dieu a dit que » ne marche pas)
B. Le principe d'autonomie
Autonomie : s'engager à faire participer le patient au processus de décision.
L'autonomie peut être interprétee de différentes façons : on a une version restreinte et élargie.
• Version restreinte : l'action libre est celle qui est conforme à la raison (rationalisme). Une action est libre
lorsqu'elle est imprégnée d'intelligence, de pondération, de tempérance.
L'homme déraisonnable et irrationnel n'est pas autonome dans cette version restreinte.
Dans cette version, l'autonomie signifie auto-limitation : « je ne me permet pas n'importe quoi ». Il y a un
devoir à l'égard de soi-même, de respecter son corps.
On est la source de nos propres normes. On obéit aux normes que l'on s'est soi-même donné.
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• Version élargie : l'action libre est celle qui n'a pas été contrainte (libertarisme)
Dans cette version, l'autonomie signifie l'émancipation à l'égard des normes, « je fais ce que je veux ». Il n'y
pas de devoir à l'égard de nous même, seulement à l'égard des autres.
On a donc un spectre avec deux extrêmes et comme d'habitude, il faut trouver le juste milieu.
Ex : vaccination
Dans la version rationnelle, la vaccination est prouvée, on évite des maladies.
Dans une version élargie, je fais ce que je veux, si je ne veux pas me vacciner, c'est mon problème, comme pour
les témoins de Jéhovah avec le refus de transfusion sanguine. Pour Kant, un témoin de Jéhovah ne serait pas
libre car il n'est pas rationnel.
• Qu'est ce qu'une conduite rationnelle ?
Pour KANT, une conduite est libre quand elle est conforme à la raison. Elle est conforme à la raison quand elle
est universalisable (rationalisme moral), c'est à dire que je peux vouloir que tout le monde adopte la même
conduite que moi.
Quand je fais quelque chose, je dois me demander « Et si tout le monde faisait la même chose que moi ? », si la
réponse est « Ce serait bien si tout le monde faisait comme moi. », cela veut dire que mon action est
universalisable donc conforme à la raison.
Exemples de conduites qui trahissent un défaut d'autonomie selon le rationalisme moral :
– refus idéologique d'un soin vital
– manquement aux promesses (trahison)
– gloutonnerie
– ivrognerie
– servilité (soumission)
– prostitution
– consommation de drogues
– mutilation corporelle
– location d'utérus
– ...
Pour les libertariens, on éliminerait trop d'action, ça n'irait pas.
Hayek et Nozick sont des théoriciens des années 70 d'un courant qui consiste à dire que l’État ne doit pas
intervenir dans la morale et dans les relations entre les individus mais aussi dans l'économie.
Les libertariens sont pour la liberté des mœurs (l’État n'intervient pas sauf lorsqu'il y a des violences) mais ils
ne sont pas anti-capitaliste (à la différence des anarchistes).
Les tenants du libertarisme pensent que si l’État était moins envahissant avec ses lois et ses impôts, les
individus auraient plus de possibilités de créativité.
Il faut faire la différence entre le libertarien et le libertaire :
– Libertaire : libération des corps de la sexualité mais très opposé à la religion
– Libertarien : vous êtes libre d'aller vers n'importe quelle religion
Ex : si on voit quelqu'un dans la rue avec un accoutrement religieux. On se demande si cette personne est libre ?
Cela dépend on est sur quel coté du spectre : pour le rationaliste, non ; mais pour le libertarien, oui
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Point de vue du rationalisme critique : l'esprit de la philosophie des Lumières (avec Kant) qui appelle au
développement de son esprit critique, de cultiver sa raison et contester ceux qui ne veulent pas que l'on
raisonne.
CR : Pour Kant, l'autonomie suppose de « penser par soi-même ». Pour lui être libre signifie être raisonnable
et rationnel.
L'autonomie est un objet de conquête.
''L'officier dit : « Ne raisonnez pas, exécutez ! »
Le percepteur dit : « Ne raisonnez pas, payez ! »
Le prête dit : « Ne raisonnez pas, croyez ! »
Je réponds : « L'usage public de notre propre raison doit toujours être libre, et lui amener les lumières parmi les
hommes ».''
Dans le domaine de l'éthique médicale, une implication du principe d'autonomie : « je dois être informé sur la
nature exacte de ma maladie » car plus j'en sais, plus je peux me décider librement :
– je peux choisir de régler ma succession
– choisir une personne de confiance
– rédiger mes directives anticipées
– réaliser un dernier voyage
– revoir des proches pour leur dire adieu
– me suicider (mais Kant considérerait que le suicide n'est pas universalisable donc que ce n'est pas une
attitude rationnelle).
Mais j'ai aussi le droit de ne pas être informé, sinon ce n'est plus de la liberté.
Le médecin est confronté a un dilemme face au patient :
– Je dois l'informer pour qu'il puisse exercer son autonomie
– Mais le patient a aussi le droit de ne pas savoir.
La solution serait de donner aux patients des perches, des pistes...
Ex : Lui dire : « certaines cellules ne sont pas bonnes », « l'examen m'inquiète » et on observe comment le
patient réagit. S'il se rétracte, il ne veut pas savoir.
En général, on peut considérer que les informations ou la connaissance favorise la liberté, mais, depuis le
développement de la génétique, parfois, on peut se demander s'il y a des éléments de connaissance qui ne
favorise pas la liberté.
Ex : savoir par un test génétique que l'on est susceptible d'avoir telle ou telle maladie incurable, à quoi bon ?
• Problème des tests génétiques (ex : tests de paternité)
Ai-je le droit de savoir si je suis le père ou non ?
D'un coté, j'ai le droit de savoir, pourtant le test de paternité est interdit en France. En effet, avec un test négatif,
cela porterait atteinte à l’intérêt supérieur de l'enfant.
Que fera-t-il de l'information ? Va-t-il renier sa paternité ? Cependant, la paternité ne se réduit pas à une
ascendance biologique. Pour le législateur c'est le fait de s'investir, d’éduquer, de ce qui se construit dans le
temps.
Le test pourrait désengager le père dans l'éducation et expose l'enfant à subir le traumatisme que son père n'est
pas son géniteur.
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En France, le test est interdit. C'est un choix dans la conception de la liberté qui est plutôt une auto-limitation,
qu'une émancipation.
C. Le principe de bienfaisance
Bienfaisance : accomplir au profit d'autrui un bien qu'il puisse reconnaître en tant que tel.
Le bien du patient n'est pas identique selon le médecin ou selon la famille.
• Version restreinte (somatique/corporelle)
Le médecin ne s'intéresse qu'à la souffrance somatique du patient et délaisse la souffrance morale. Son objectif
est de corriger des anomalies de type organique/physique.
• Version élargie (holistique)
Dans cette version, le médecin prend aussi en compte la souffrance psychique du patient. Il prend en charge la
totalité de la souffrance du malade (« holos » : le tout)
Selon l'OMS, la santé est un état de complet bien être physique mental et social et ne consiste pas seulement en
une absence de maladie ou d'infirmité.
Exemple : Un couple apparaît dans les médias dont l'enfant est né très prématurément avec des problèmes sur le
plan neurologique avec une hémorragie et ils pressentent que cet enfant sera handicapé. Et ils ne veulent pas
d'un enfant handicapé. Les parents veulent la fin des soins et les médecins réfutent tout acharnement.
Si le médecin prend en compte la souffrance psychique, faut il qu'il intègre aussi les proches dans la décision en
tant que « patients » ?
Dans une démarche holistique, on écoute les parents car ils souffrent également et ils peuvent être considérés
comme patient. Et en tant que médecin, je devrai apaiser leur souffrance.
Dans une démarche somatique, c'est l'enfant qui est en difficulté et il faut l'aider. On ne prend pas en compte la
souffrance des parents.
Remarque : l'opinion s'est rangée du coté des parents
• La circoncision relève-t-elle de la bienfaisance ?
La circoncision est un acte médical dans certains cas. Cependant, dans le cas où il n'y a pas d'anomalie,
l'ablation du prépuce peut il être considéré comme un acte de bienfaisance ?
Si c'est un acte religieux et donc qu'il n'y a pas de nécessité médicale, cela devient une infraction du code de
santé publique puisque le médecin ne doit opérer qu'en cas de nécessité thérapeutique et avec l'accord du
principal intéressé, mais là le bébé ne peut rien dire et il n'y a pas de nécessité thérapeutique.
Du coup, on a un dilemme puisque l'enfant sera élevé comme étant membre du groupe, il ne se sentira pas
exclus lorsqu'il sera en âge de comprendre mais cela cause un problème dans l'autonomie puisqu'il n'aura pas le
choix de sa religion (ou de ne pas en avoir).
• Des indications « sociétales » pour la procréation assistée ?
Allons-nous utiliser des techniques d'assistance médicale à la procréation pour les couples de même sexe ? Ils
ne peuvent pas avoir d'enfant naturellement mais ils ne sont pas infertiles comme les couples hétérosexuels.
On peut donc dire que ce n'est pas dans le giron de la médecine puisque la médecine s'intéresse aux maladies et
au handicap. Donc s'il n'y a pas d'infertilité médicale, ils ne peuvent pas accéder à cette demande.
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Actuellement, le législateur s'en tient uniquement aux infertilités médicales. Mais les couples homosexuels
peuvent faire valoir la définition de la santé de l'OMS comme quoi ils n'ont pas le bien être social et moral. Cela
devient alors une indication sociétale.
On a également un dilemme entre faire un bien pour un couple qui veut un enfant et celui de l'enfant qui
demandera, un jour, sa mère ou son père.
Implications du principe de bienfaisance en médecine : le temps de l'écoute est un temps de soin.
Le CCNE a mis en garde contre une vision du bien qui serait calculée en fonction d'une tarification à l'activité,
c'est à dire, combien rapporte le fait de faire tel ou tel soin, et du coup, on ne prend plus compte du temps
d'écoute parce que cela ne rapporte rien.
Si on discute avec un patient pendant 30min, le directeur risque de nous faire des reproches sur l'absence de
trace mécanique ou prescriptive.
A l'hôpital, une femme battue arrive aux urgences, on la soigne et elle repart. Or il y en a tellement dans le
même cas que s'il fallait faire un signalement à chaque, ça prendrait trop de temps.
L'hôpital n'est pas une usine de production de soin et on doit s'attacher à donner du temps aux patients.
Relève du soin : « La prise en charge aux urgences d'une femme battue, le temps passé à réfléchir à un
diagnostic difficile, à convaincre une personne âgée de l'opportunité d'un traitement, ou encore l'éducation aux
soins d'un patient et de sa famille » (CCNE, Avis n°101 p.11)
D. Le principe de non-malfaisance
Non-malfaisance : Épargner à autrui des préjudice ou des souffrances qui ne feraient pas de sens pour lui.
C'est une version négative de la bienfaisance.
• Différence entre ne pas nuire et faire du bien :
Ex : un motard voit une personne âgée sur le point de traverser la route :
Soit il s’arrête et ne lui nuit pas (il ne lui vole pas son sac à main, il ne lui fait pas peur en accélérant juste
moment où il passe, il ne la renverse pas) => non-malfaisance
Soit encore mieux, il descend de la moto pour l'aider à traverser => bienfaisance
Ce principe de non-malfaisance gagne en degré de pertinence lorsque le patient n'est pas conscient ou en état de
dire ce qui est bon pour lui. C'est le cas des fœtus, nouveaux-nés, personnes atteintes de troubles
psychologiques, cognitifs, neurodégénératifs...
Par conséquent, accomplir un bien en leur faveur est parfois impossible, du coup on essaye au moins de ne pas
leur nuire, « réduisons la souffrance ».
• Version restreinte (somatique) : éviter la souffrance physique donc éviter l'obstination déraisonnable
• Version élargie (holistique) : limiter la souffrance psychique, on tient compte des souffrances morales, donc
dans l'annonce des mauvaises nouvelles, on fait mal sans faire très mal.
Les implications du principe de non-malfaisance : pour éviter de faire trop mal, on va éviter les mots trop
brusques, c'est la règle de la progressivité de l'information, (on ne dit pas « vous allez mourir ») et utiliser
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des euphémismes c'est la règle de l'euphémisation (on dit « votre enfant aura un retard mental », c'est à dire
sous-entendu qu'il pourra peut être rattraper le chemin et pas « votre enfant sera un légume toute sa vie » !).
Mais il faut faire attention de ne pas non plus donner de faux-espoirs.
E. Le principe de justice
Principe de justice : C'est avoir une égale considération pour toutes les personnes
Traiter tous les hommes avec dignité leur accorder un égal accès au soin.
On a deux interprétations de la justice :
• Version restreinte (égalité)
• Version élargie (équité) : on prend en compte le mérite
ex : on en en P2 parce qu'on a affronté la PACES et qu'on a souffert !
Les deux interprétations ne sont pas faciles à combiner :
La parabole des ouvriers de la onzième heure : tension entre les deux sens du principe de justice :
Des gens travaillent à la vigne depuis l'aube et d'autres ouvriers arrivent en fin de journée. Au moment de la
paye, le maître de la vigne donne la même somme à tout le monde. Alors ceux qui étaient là depuis le matin
trouvent que c'est injuste.
« Ces derniers n'ont travaillé qu'une heure et tu les traites à l'égal de nous qui avons supporté la fatigue du jour
et de la chaleur [...]
Je veux donner à ce dernier autant qu'à toi. Ne m'est il pas permis de faire de mon bien ce que je veux ? Ou
vois-tu de mauvais œil que je sois bon ? »
Évangile selon Matthieu, chapitre 20, versets 1 à 16
Selon la version restreinte, on est tous à égalité devant la faim et soif, on a tous autant besoin d'argent.
Mais selon la version élargie, avec l'équité, c'est injuste de ne pas avoir pris en compte leur mérite.
On a deux version de l'égalité qui vont entrer en contradiction : Version égalitariste/déontologiste versus version
distributive/utilitariste :
Kant => Déontologisme
Jeremy Bentham => Utilitarisme
• Version déontologiste : « Je ne refuserai pas mes soins à l'indigent » Hippocrate
Même si la personne n'a pas d'argent et que l'on perd du temps à la soigner, on ne doit pas refuser le soin à
l'indigent selon le principe de justice (dans le serment d'Hippocrate : « je ne refuserai pas mes soins à
l'indigent »).
Moins de 3% des médecins renoncent au soin faute de financement.
Hippocrate ne demande pas que le médecin s'occupe de justice sociale (il n'a pas de solution face à la pauvreté)
mais au moins ne pas ajouter à la misère économique la précarité sanitaire. On évite la double peine.
La personne est déjà défavorisée sur le plan socio-économique, alors toi médecin, ne vas pas encore aggraver
cette injustice.
Selon le dernier code de déontologie, « être juste »c'est traiter tout le monde à égalité.
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La déontologie « le médecin doit écouter, examiner, conseiller ou soigner avec la même conscience toutes les
personnes quels que soient leur origine, leurs mœurs et leur situation de famille, leur appartenance ou leur nonappartenance à une ethnie, une nation ou une religion déterminée, leur handicap ou leur état de santé, leur
réputation ou les sentiments à leur égard » (Code de déontologie médicale, article 7)
Le CCNE a considéré que toutefois si on était toujours seulement égalitaire, on deviendrait injuste car les
ressources en bien de santé sont limitées.
Ex : une personne âgée de 100 ans nécessitant beaucoup de soins coûtant 50 000 euros par mois à la société.
Dans une société d'abondance où les ressources seraient illimitées, on peut l'accepter. Mais dans une société où
les ressources sont restreintes, on va essayer de les distribuer de façon optimale avec un risque sacrificiel.
L'avis n°101 du CCNE propose un juste équilibre entre égalité et équité :
« Ne pas tenir compte du caractère fini des ressources disponibles entraînerait forcement une restriction de
l'accès aux soins qui serait aléatoire ou discriminatoire pour certaines populations de patient avec des
conséquences éthiques majeures » CCNE, Avis n°101
Le médecin est aussi un acteur de santé publique et il doit tenir compte du fait que les biens et les ressources
sont limités. Et si on ne réfléchit pas au coût des thérapeutiques, il faudra récupérer cet argent quelque part donc
dé-rembourser des médicaments, fermer des services, restreindre le personnel...
Donc tôt ou tard, les patients seront pénalisés notamment les plus pauvres.
La justice distributive : optimiser les ressources disponibles (équité).
• La transplantation d'organe :
On a trop de demande d'organes et pas assez de donneur, du coup on va établir un classement.
On passe d'une justice égalitaire à une justice distributive.
Si on considérait que tout le monde était à égalité en valeur absolue, on utiliserait le tirage au sort. Mais le
tirage au sort, on l'accepte pour les jeux et non pas pour des questions de vie ou de mort.
Mais du coup, est ce qu'on va utiliser le mérite ?
On va utiliser des critères mais pas forcément le mérite (comme l'âge).
L'affaire Gary Reinbach (2009)
A 13 ans, les parents de Gary divorcent et Gary sombre dans l'alcoolisme. Par conséquent, à 22 ans, il est
atteint d'une cirrhose, le seul moyen de le sauver, c'est une greffe de foie. Il est finalement décédé.
Certain on dit : il n'a pas prouvé qu'il était capable de se remettre, statistiquement, on a un manque de
compliance... C'est pourquoi il est mort, malgré sa mère qui a lancé un appel dans les médias pour une
certaine miséricorde de la médecine pour lui donner sa chance même si la greffe aurait pu échouer et qu'il y
avait des indications plus rentables que la sienne.
La justice distributive qui calcule selon la rentabilité, le retour sur investissement, le mérite... va rencontrer , à
un moment donné, un problème du principe Hippocratique « Ne pas refuser des soins à indigent ».
Il peut y avoir un risque à toujours donner aux plus compliants, ceux qui suivront leur traitement, ceux qui ont
la meilleure situation familiale, on peut devenir plus sacrificiel pour les plus fragilisés.
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On va donc avoir deux raisonnements par rapport à cette situation :
Le raisonnement utilitariste qui porte sur le calcul du plus grand bonheur du plus grand nombre d'individus
possibles. Dans le cas de la transplantation d'organe, ce serait de sauver les personnes ayant la plus grande
espérance de vie en priorité. Néanmoins, l'espérance de vie ne suffit pas, survivre pour l'homme n'est pas un
but. Il faut intégrer la qualité de vie. Une bonne qualité de vie favorise la durée de vie mais on peut vivre
longtemps sans avoir une bonne qualité de vie.
Dans notre calcul utilitariste, il faut ajouter le critère la qualité de vie à l'espérance de vie.
« L'idéal utilitariste n'est pas le plus grand bonheur de l'agent lui-même, mais la plus grande somme de bonheur
totalisée » John Stuart Mill
• Risque de pandémie virale : comment réagir ?
Le temps d'identifier la souche et de mettre au point les vaccins, il va falloir établir des priorités.
Qui va bénéficier des ressources préventives et thérapeutiques en priorité ?
Réponse : les médecins, donc ceux qui ont les moyens de faire fonctionner la société. Par conséquent, ceux qui
sont handicapés, qui sont atteints d'un cancer et ceux qui ne sont pas utiles à la société que deviennent-ils ?
Ils seront isolés, mis en quarantaine... Mais on retrouve alors le principe de la double peine.
A la différence de la transplantation d'organe, on est tous candidats. Donc il faut savoir qui va passer avant les
autres. Mais à partir de là, les électriciens vont dire : « si on est pas là, vos machines ne marchent pas donc on
passe avant ».
Tout le monde va vouloir être prioritaire, même les vieux vont dire : « on est très utile, on va chercher les
enfants à la sortie de l'école, on leur donne le goûter, on leur fait faire les leçons et les enfants représentent les
générations futures ».
Il est très difficile de savoir qui est rentable ou non. C'est la raison pour laquelle le CCNE a estimé que pour
éviter ce risque sacrificiel, il faudrait être présent aux deux bouts de la chaîne.
D'un coté, on a la justice distributive, on l'on maximise les ressources en les donnant à ceux qui sont rentables,
performants...
Mais on évite aussi d'être sacrificiel en administrant aussi des soins et en considérant comme urgent ceux qui
sont en bas de l'échelle.
On est donc présent aux deux bouts de la chaîne. Il ne faut pas perdre de vu que être juste, c'est aussi être
égalitaire.
La solution de soigner au cas par cas est sacrificielle (c'est un bon moyen de se débarrasser des pauvres).
Heureusement que de temps en temps Hippocrate nous rappelle que « je ne refuserai pas mes soins à
l'indigent » pour maintenir l'équilibre entre égalité et équité.
Quand il y a une situation d'incertitude, pour garder notre humanité, on peut prendre le risque de perdre un
greffon, même si c'est quelqu'un de fragile (pas si elle n'a que quelques mois à vivre). On va lui laisser une
chance.
• Exemple : La greffe du visage
Le CCNE est d'accord pour une greffe partielle (nez-bouche-menton) mais pas pour les suicidaires car ils sont
fragiles psychologiquement et ils doivent prendre leur traitement immunosuppresseurs. Il faut donc des
personnes moralement fortes. Or, la 1ère greffe de visage, a été faite sur une suicidaire, par conséquent, le
chirurgien a eu raison de ne pas tenir compte du CCNE puisque actuellement, cette personne n'est plus du tout
suicidaire.
Donc de temps en temps, oubliez les critères de rentabilité, d'espérance de vie, de qualité de vie et prenez
parfois un risque.
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On ne peut jamais calculer scientifiquement les conséquences, c'est pourquoi le déontologiste a raison de se
méfier du calcul des conséquences.
On ne trouvera peut être jamais un receveur d'organe qui serait rationnel, raisonnable, sans addiction, sans
tabac, sans alcool, suivant son traitement, ayant une bonne espérance et qualité de vie.
• Il y a une différence de sensibilité au niveau de la recherche :
Comment va réagir un déontologiste lorsque l'on va tenter une recherche d'un nouveau vaccin contre la maladie
d’Alzheimer (en 2005) ? Peut on respecter de la dignité de la personne de la personne atteinte ?
Ceux qui n'ont pas accepté, les déontologistes vont mettre en avant le fait qu'on a pas leur consentement, on
prend des risques sur eux, on les sacrifie sur l'autel collectif. C'est le point de vue de Kant.
Par contre, l'utilitariste acceptera. Il y a des attentes sociales très considérables. L'idéal n'est pas le plus grand
bonheur de l'agent lui même mais la plus grande somme de bonheur totalisée. On va donc prendre le risque peut
être que ce patient va souffrir, qu'il va peut être être sacrifié mais c'est comme ça que la recherche avance. C'est
le point de vue de Bentham.
Il ne faut pas prendre parti pour l'un ou l'autre mais il vaut mieux les jouer l'un contre l'autre.
Lorsque l'on fait des études sur la qualité de vie, pour faire des publications, il faut l'aval du CCNE.
• Exemple de recherche en qualité de vie centrée sur le bien être du groupe :
Un psychologue veut faire une enquête auprès des frères et/ou sœurs de patients souffrant de schizophrénie.
Il y a une vingtaine de participants pour cette étude.
On peut résonner de deux manières :
– Soit le plus grand bonheur du plus grand nombre, la fratrie qui souffre d'avoir un frère ou une sœur
schizophrène. Donc du point de vu utilitariste, on valide la recherche.
– Le CCNE n'a pas validé l'enquête (point de vu déontologiste) car il manque le consentement du
schizophrène, on ne sacrifie pas l'individu sur l'autel du bien collectif sachant aussi que si on met trop de
verrous, on ne fait plus de recherche. Du coup, les laboratoires risquent d'aller en Afrique car là-bas, ils
ont une population captive.
D'où la nécessité de maintenir une voie médiale entre déontologiste et utilitariste, un juste milieu entre les
deux versions des principes.
11/12
SANTE SOCIETE HUMANITE – Dimension éthique de la relation médecin malade
Un merci à Jiji qui est venue prendre les photos et à Marine pour son dictaphone.
Mais aussi une petit pensée pour Nana qui était à l'agonie dans son lit
Et bien sûr, grosse dédicace au Car Pearl (meilleur bus !)
12/12
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