Bâle III, le multiplicateur du crédit et la politique monétaire

D
éce
m
b
r
e
2
0
1
3
C
onjoncture
3
B
âle III, le multi
p
licateur du
cr
é
dit et la politique mon
é
taire
Laurent
Q
ui
g
no
n
L
’introduction de normes internationales de liquidit
é
,
en ré
p
onse à la crise
f
inancière de 2007, constitue l’une
es
rinci
ales avancées de Bâle III. A court terme, le
L
iquidit
y
Coverage Ratio
(
LCR
)
détermine la
q
uantité
m
inimale d’actifs li
q
uides dont les ban
q
ues doivent
d
is
p
oser
p
our faire face à des sorties de trésorerie
p
rovoqu
é
es par une crise de liquidit
é
s’
é
tendant sur
30
jours. A long terme, l’application d’un Net
S
table
Funding Ratio
(
N
S
FR
)
im
p
ose désormais l’adossement
aux em
p
lois bancaires à
p
lus d’un an, de ressources
suff
i
sa
mm
e
nt
s
t
ab
l
es
ou
de
m
a
t
u
rit
é
au
m
o
in
s
é
q
uivalente.
L
e ratio de liquidité à court terme, ob
j
et du présent
article, vise à maîtriser le ris
q
ue de li
q
uidité des
établissements de crédit. Il limite leur exposition
(
baisse
d
e la transformation des maturités, moindre
d
épendance au
f
inancement de marché à court terme
)
,
et augmente leur capacité à
f
aire
f
ace au risque de
l
iquidit
é
,v
ia
la constitution d’un matelas d’acti
f
s liquides
d
e haute qualité. Au-delà de l’ob
j
ectif ultime d’une plus
g
rande résilience du s
y
stème bancaire face à un choc
d
e liquidité, cette nouvelle norme intera
g
it avec la
p
olitique monétaire et le financement de l’économie.
Elle constitue donc un nouvel en
j
eu pour le banquie
r
central.
L
e L
C
R vise tout d’abord à rendre le système
b
ancaire moins d
é
pendant
à
la banque centrale en
t
em
p
s de crise, mais il accroît
p
aradoxalement cette
d
épendance en temps normal
(
Première partie
)
. La
t
héorie économique su
gg
ère, en outre, que le LCR
p
ourrait entraîner une baisse du multi
p
licateur du crédit
et une certaine éviction des financements
p
rivés
(
Deuxième partie
)
. Enfin, le fonctionnement du marché
m
onétaire et la transmission de la
p
oliti
q
ue monétaire
p
ourraient s’en trouver é
g
alement perturbés
(
Troisième
p
artie
)
.
Du prêteur en dernier ressort au
prêteur en premier ressort
Dans la litt
é
rature
é
conomique, la gestion de la
liquidité bancaire est par
f
ois vue comme une
r
esponsabilité parta
g
ée entre les banques
commerciales et la banque centrale
(
Goodhart, 2008
)
.
L’introduction de normes prudentielles de liquidit
é
r
evient, sous cet an
g
le,
à
privil
ég
ier la
g
estion
i
ndividuelle du risque de liquidité par les banques a
f
in
d
e réduire la probabilité d’une intervention en urgence
d
e la banque centrale. A l’inverse, le Liquidity
C
overage
Ratio tend à ren
f
orcer le rôle de prêteur en premier
r
essort de cette dernière en tem
p
s normal.
Une dépendance à la banque centrale structurellement
accrue en temps normal
L
e nouveau ratio de li
q
uidit
é
à
court terme contrain
t
les banques
à
s’assurer individuellement contre le
r
isque de liquidité. En raison de la définition du ratio,
l’objecti
f
est poursuivi, dans une très large mesure, avec
le concours de la banque centrale. En p
é
riode de crise
a
i
g
u
ë
, le soutien discr
é
tionnaire de la banque centrale
a
u système bancaire est moins marqué, mais cet e
ff
et
d
e
li
ssage n
est ren
d
u poss
ibl
e que par une
d
é
p
endance accrue de ce dernier à la li
q
uidité de la
b
anque centrale en ré
g
ime de croisière.
Les objecti
f
s micro et macroprudentiels du L
C
R
L
e
C
omité de Bâle assigne d’abord au ratio de
liquidité à court terme un ob
j
ectif microprudentiel :
«
cette norme vise à faire en sorte qu’une banque
qq
dispose d’un encours suffisant d’actifs liquides de haute
qualité
(
HQLA, high qualit
y
liquid assets
)
non grevés,
D
éce
m
b
r
e
2
0
1
3
C
onjoncture
4
sous forme d’encaisses ou d’autres actifs,
p
ouvant être
convert
i
s en
liq
u
idi
t
é
s sur
d
es marc
s
p
r
i
v
é
s sans
p
er
d
re – ou en
p
er
d
ant tr
è
s
p
eu –
d
e
l
eur va
l
eur
p
ou
r
couvrir ses besoins de liquidité, dans l’h
y
pothèse d’une
crise de liquidité qui durerait
30
jours calendaires.
»
1
.
Ce n’est que par extension que l’ob
j
ectif devient
é
galement macroprudentiel : «
I
l <Le L
C
R> accroîtra la
c
apac
i
t
é
d
u secteur
b
anca
i
re
à
a
b
sor
b
er
l
es c
h
ocs
g
énérés par des tensions
f
inancières et économiques,
q
ue
ll
e
q
u
en so
i
t
l
a source, ce
q
u
i
r
éd
u
i
ra
l
e r
i
s
q
ue
d
e
r
é
p
ercussions de tensions financières sur l’économie
réelle
. »
(
BCBS 238,
j
anvier 2013
)
.
La définition du ratio remaniée en janvier 2013
L
e ratio de liquidité à court terme vise à véri
f
ier que
l
a ban
q
ue détient su
ff
isamment d’acti
f
s hautement
l
iquides
(
HQ
LA
)
pour
f
aire
f
ace aux sorties nettes de
t
résorerie (net cash outflows) à trente jours qui
sulteraient d’une crise de li
q
uidit
é
. Leur
é
valuation se
f
onde sur un scénario de flux de trésorerie
p
rédéfini
p
a
r
le r
é
gulateur. Le ratio r
é
glementaire rapporte l’encours
es acti
s liquides aux sorties nettes de trésorerie et
d
evra, en vertu du calendrier r
é
glementaire publi
é
par le
Comité de Bâle en
j
anvier 2013, s’élever à au moins
60
%
en 2015 puis à 100
%
à compter de 2019, à l’issue
d
’une incrémentation annuelle de 10
%
entre 2016 et
2018. Les
p
remières Quantitative Impact Studies
(
QIS
)
menées par l’EBA et le BCBS ont conduit le ré
g
ulateur à
revoir la définition du LCR en
j
anvier 2013. Outre
l’
é
talement du calendrier de mise en œuvre, les
principaux amendements ont consist
é
à
é
largir le
périmètre des acti
f
s liquides éligibles et à abaisser le
t
aux de non-renouvellement
(
ou de «
f
uite »
)
de
ce
rt
ai
n
es
r
essou
r
ces
2
.
-
L
es High
Q
uality Liquid Assets
(
numérateur
)
L
e ré
g
ulateur classe les actifs hautement liquides en
d
eux
g
randes caté
g
ories. Les actifs dits « de niveau 1 »,
com
p
rennent le cash, les r
é
serves au
p
r
è
s de la ban
q
ue
centrale
3
e
t de titres
é
ligibles, d’emprunts d’Etat pour
l
’essentiel 4
.
Le manque d’harmonisation quant au
t
raitement des réserves obligatoires donne lieu à des
i
nter
p
rétations variée
s
5
.
S
i certains su
p
erviseurs
(
Bel
g
ique
)
semblent considérer qu’elles doivent être
i
ncluses dans les H
Q
LA, d’autres
(
France, Luxembourg
)
est
i
ment, au contra
i
re, qu
’il
conv
i
ent
d
e ne pas
l
es
comptabiliser comme telles. Les acti
f
s dits « de niveau
2
», qui ne doivent pas représenter plus de 40% de
l’ensemble des HQLA, se répartissent à leur tour e
n
d
eux sous-caté
g
ories d’instruments éli
g
ible
s
6
.
In
s
tit
uée
p
ar la révision de
j
anvier 2013, la sous-caté
g
orie 2B
comprend des titres de dette et actions de soci
é
t
é
s non
f
inancières éli
g
ibles ainsi que des titres adossés à des
créances immobilières résidentielles
(
RMB
S)
. Au regard
d
es r
é
sultats du
M
on
i
tor
i
n
g
exerc
i
s
e
publi
é
s par l’EBA
e
n septembre 2013, l’incidence de l’élargissement
d
emeure re
l
at
i
vement mo
d
este,
p
u
i
s
q
ue
l
a sous
-
caté
g
orie 2B ne représentait qu’entre 4%
(
banques
m
o
y
ennes ou non internationales du
g
roupe 2
)
et 5%
(
grandes banques du groupe 1
)
de l’encours des H
Q
LA
a
u 31 d
é
cembre 2012.
-
L
es net cash out
f
lows
(
dénominateur
)
Les
cas
h
ou
t
f
l
o
w
s
so
nt
co
n
s
tit
ués
des
fu
it
es
su
r
d
é
p
ôts et du non-renouvellement des autres ressources
à
court terme. Exprimés en pourcentage de l’encours, ils
s
ont définis par le ré
g
ulateur. Les inflows corres
p
ondent
au
x t
o
m
bées
e
t int
é
r
ê
t
s
co
ntr
ac
t
ue
l
s
a
tt
e
n
dus
à
tr
e
nt
e
j
ours sur les seuls actifs performants. Ils viennent en
duction des out
f
lows théoriques dans la limite de 75
%
d
e ces derniers. En d’autres termes, la banque devra
t
oujours détenir une proportion d’actifs liquides
r
eprésentant 25
%
au moins des out
f
lows simulés en
p
ériode de crise.
Afin de tenir com
p
te du renouvellement des
p
rêts, le
comité de Bâle recommande d’a
pp
li
q
uer un abattement
(
par la suite, ce terme est utilisé indifféremment avec
ceux de d
é
cote, ou d
h
aircu
t
)
de 50
%
aux in
f
lows
contractuels relati
f
s aux prêts accordés à la clientèle de
ban
q
ue de détail et aux sociétés non
f
inancières. Pour
les o
p
érations de
re
v
erse
repo
(
prise en pension,
revente à terme de titres
)
, la part des
f
lux entrants pris
e
n compte correspond à la proportion de la li
g
ne dont le
g
ulateur considère qu’elle ne sera pas reconduite en
cas de crise de li
q
uidité, la
p
robabilité de reconduction
é
tant d’autant plus faible que la
g
arantie est de bonne
q
ualité. Ainsi, le taux d’abattement a
pp
li
q
ué aux flux est
identique au taux de d
é
cote qui serait appliqu
é
aux
a
cti
f
s si ceux-ci n’étaient pas mobilisés et constituaient
d
es H
Q
LA. Les lignes garanties par des level
1
asset
s
sont su
pp
osées être renouvelées et ne
p
as donner lieu
à
des entrées de trésorerie ; la décote a
pp
li
q
uée est de
15
%
lorsque l’opération est garantie par des
l
evel
2
A
asse
t
s
, de 25
%
lorsqu’il s’agit de RMB
S
éligibles
(
de niveau 2B
)
, de 50
%
pour les autres acti
f
s de
niveau 2B et à 0%
p
our les actifs autres
q
ue ceux
pr
é
cit
é
s.
D
é
cembre 2013
C
onjoncture
5
    
  


L
es besoins de l’analyse nous am
è
nent
à
introduire
une distinction
p
lus économi
q
ue entre, d’une
p
art, les
H
Q
LA détenus sous
f
orme de réserves excédentaires
a
uprès de la banque centrale
(
une partie des acti
f
s de
niveau 1
)
et, d’autre part, ceux détenus sous forme de
créances sur l’économie (qui sont donc des
contreparties de la masse monétaire
)
sous
f
orme de
titres éli
g
ibles
(
actifs de niveau 1 autres que les
réserves excédentaires, i.e. titres d’em
p
runts d’Etat et
l’ensemble des titres de niveau 2
)
assortis de di
ff
érents
hai
r
cu
t
s
. Les études d’im
p
act
q
uantitati
f
successives
conduites par l’EBA montrent que la premi
è
re
composante des HQLA
(
cash et réserves
e
xcédentaires
)
n’a cessé de croître depuis la fin de
2010.
C
elle-ci repr
é
sentait, au 31 d
é
cembre 2012, pr
è
s
d
e la moitié des HQLA des
g
randes banques
e
uropéennes
(g
roupe 1
)
(
cf.
g
raphique 1
)
.

0%
1
0
%
20%
30%
40%
50
%
60
%
D
éc. 2009
*
Juin 2011
**
Déc. 2011
**
D
éc. 2012
***
(*) Banques du groupe 1 uniquement
(
**
)
Toutes banques
(***)
Banques du groupe 1 uniquement et proportion recalculée hors acti
f
s de niveau 2 B
introduits par la révision du LCR en janvier 2013
Pa
r
t
des
r
ése
rv
es
e
x
céde
n
ta
ir
es
et
du
cash dans les H
Q
LA
G
ra
p
hi
q
ue
1
S
ource : EBA
en % des HQLA
L
e L
C
R pourrait ainsi entraîner une allocation
ine
ff
icace de la liquidité, ajoutant encore à la
f
ra
g
mentation des marchés interbancaires au sein de la
zone euro. Destin
é
es
à
att
é
nuer les cons
é
quences
potentiellement d
é
stabilisatrices de chocs s
y
st
é
miques
rares, des exigences excessives pourraient, en e
ff
et,
conduire
à
un « gaspillage » de liquidit
é
, d
è
s lors que le
matelas n’a vocation
à
ê
tre utilis
é
que dans des
circonstances très exce
p
tionnelles.
L
es ressources garant
i
es o
b
tenues
d
e
l
a
b
anque
centrale ne suscitant
p
as d’outflow
s
r
ég
lementaires, une
ban
q
ue
p
eut am
é
liorer son ratio de li
q
uidit
é
à
court
terme par une augmentation de ses réserves en banque
centrale
(
le carry trade vers les titres d’emprunt d’Etat
constitue une autre voie emprunt
é
e principalement par
les banques d’Europe du
S
ud, c
f
. page 18
)
en se
r
efinançant auprès de cette dernière contre des actifs
n
on constituti
f
s de H
Q
LA
(
ceci, a
f
in de préserver le
n
umérateur dudit ratio
)
. Le déficit de liquidité du
sy
stème bancaire vis-à-vis de la banque centrale, défini
c
omme
l
e montant que
l
es
b
anques ont
b
eso
i
n
d
e
r
efinancer sur une base ré
g
ulière
v
ia des o
rations
d’emprunt
g
aranties par des collatéraux, s’en trouvera
accru de mani
è
re structurelle, selon le principe m
ê
me
des r
é
serves obligatoires.
I
l convient, toutefois, de noter
q
ue le besoin de
l
iquidité du système bancaire vis-à-vis de la banque
c
entrale est en partie exog
è
ne, d
é
pendant des
c
om
p
ortements financiers du secteur dit « non
m
onétaire »
(
ménages, entreprises, administrations
p
ubliques, mais aussi secteur financier non bancaire
)
.
L
ors
q
ue ce dernier arbitre
p
ar exem
p
le en faveur de
p
ôts bancaires, il accroît l’assiette de calcul des
serves obli
g
atoires et, partant, le besoin r
ég
lementaire
des ban
q
ues commerciales en li
q
uidité ban
q
ue centrale.
C
om
p
te tenu du traitement
f
avorable des dé
p
ôts de la
c
lient
è
le de d
é
tail, une substitution de d
é
p
ô
ts
r
etai
l
à
l
des ressources courtes de marché
p
ourrait, en
r
evanche
,
entraîner une baisse des réserves à
c
onstituer au titre du « L
C
R », partiellement compensée
p
ar la hausse des réserves obli
g
atoires. Cet exemple
m
ontre que liquidit
é
banque centrale et liquidit
é
au sens
du LCR sont donc
p
arfois exclusives l’une de l’autre.
Conséquence sur le rôle de prêteur en dernier ressort
L
a r
è
glementation ex ant
e
de la liquidit
é
bancaire et
la
f
ou
rnit
u
r
e
e
x
p
os
t
de liquidités en urgence par les
t
ban
q
ues centrales en
p
ériode de tensions se ré
p
ondent
mutuellement. En th
é
orie, le recours, par les banques,
au matelas de sécurité constitué au titre du LCR, devrait
c
ontribuer à limiter les interventions de la ban
q
ue
c
entrale en sa qualit
é
de pr
ê
teur en dernier ressort. En
p
rati
q
ue, toutefois, les ban
q
ues
p
ourraient se révéler
peu enclines à
f
aire usage de ce matelas.
    
 


L
a constitution d’un matelas d’actifs liquides ne
p
résente d’intérêt
q
u’autant
q
ue ce matelas
p
eut être
a
ff
ecté à la couverture de sorties de trésorerie
,
en cas
de di
ff
iculté à se procurer de nouvelles lignes de
financement ou de l’absence de li
q
uidité de certains
actifs,
q
ui ne
p
euvent
p
lus être réalisés au
p
rix
escompté. Le
C
omité de Bâle a donc prévu le
r
e
l
âc
h
e
m
e
nt
de
l
a
co
ntr
a
int
e
de
L
C
R
e
n
cas
de
c
ri
se
D
éce
m
b
r
e
2
0
1
3
C
onjoncture
6
1
2
3
4
5
6
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 201
3
T
aux Re
f
i de la B
C
E
Fed Funds ob
j
ecti
f
de la FE
D
T
aux directeur de la B
O
E
T
aux directeur de la B
OJ
Tau
x
di
r
ecteu
r
s
G
raphique
2
S
ources : Banques centrale
s
%
0
1
2
3
4
5
6
99
00 0
1
0
2
03 0
4
05 06 0
7
08 09
1
0
11 12 1
3
T
aux de d
é
p
ô
t
Taux Re
fi
T
aux mar
gi
na
l
Eo
ni
a
Zone euro : taux directeurs et du march
é
mo
n
éta
ir
e
G
ra
p
hi
q
ue
3
S
ource : B
C
E
%
afin de
p
ermettre aux ban
q
ues d’utiliser le matelas,
q
uitte à
p
asser tem
p
orairement sous le seuil
rég
lementaire
7
. Cet assou
p
lissement momentané de la
contrainte nous apparaît d’autant plus justi
ié que le
L
C
R devient excessivement sévère et ne constitue pas
un bon barom
è
tre de la li
q
uidit
é
bancaire dans un
contexte de crise de li
q
uidité, du
f
ait de l’a
pp
lication des
h
a
i
rcuts à des acti
f
s déjà dévalorisés pour le calcul des
H
QLA. A l’a
pp
ui d’un
p
etit exem
p
le numéri
q
ue, Bindseil
t Lamoot
2011
mettent é
alement en exer
ue le
caractère per
f
ectible du L
C
R en qualité d’indicateur en
cas de crise de li
q
uidité et la su
p
ériorité d’une mesure
d
e type Distance to Fire
S
ales
(
DF
S)
q
u
i
s
i
mu
l
e
l
a
p
erte
m
aximale de ressources
à
court terme
à
laquelle une
b
an
q
ue est en mesure de résister.
I
l convient, à notre sens, de s’interroger sur les
cons
é
quences op
é
rationnelles d’une telle mesure d’assou
-
p
lissement. Ainsi, une banque en proie à des difficultés de
t
résorerie, mais
q
ui conserverait du
p
a
p
ier mobilisable,
p
ourrait tout aussi bien pré
f
érer emprunter davantage
a
uprès de la banque centrale plutôt que de laisser son L
C
R
d
iminuer, ce
q
ui
p
ourrait finalement tem
p
érer la
p
ortée de
cette
f
aculté de relâchement de la contrainte.
0
500
1
000
1
5
00
2
000
2
500
3
000
3
500
A
utres acti
f
s
*
T
itres de dette émis
p
ar les résidents de la zone euro et libellés en eur
o
A
utres créances sur les E
C
libellées en euro*
*
L
TR
O
MRO
C
réances sur les non-résident
s
Or et assimilé
s
mds euro
s
*
Y compris créances sur la zone euro libellées en monnaie étran
g
ère et créances en euros sur les APU
**
Y compris cessions temporaires de ré
g
la
g
e
f
in, cessions temporaires à des
f
ins structurelles et appels de
marge vers
é
s
Bilan consolid
é
de l'Eurosyst
è
me - Acti
f
G
raphique
4
S
ource : B
C
E
0
500
1
000
1
500
2
000
2
5
00
3
000
3
500
Capital et réserves
Com
p
tes de réévaluatio
n
A
utres
p
assifs*
C
ontrepartie des DT
S
alloués par le FM
I
E
ngagements envers les non-résidents
E
ngagements envers les résidents
R
e
p
rises de li
q
uidité en blanc*
*
Facilit
é
de d
épô
t
s
E
x
cès
de
r
ése
rv
es
R
éserves obligatoire
s
B
ill
e
t
s
e
n
c
ir
cu
l
a
ti
o
n
* Y compris autres engagements envers les EC résidents et libellés en euro
** Y compris cessions temporaires de réglage fin et appels de marge reçu
s
mds
eu
r
os
B
ilan consolid
é
de l'Euros
y
st
è
me - Passi
f
G
raphique
5
S
ource : B
C
E
L
e rôle de la BCE en
q
ualité de
p
rêteur en
de
rn
ie
r r
esso
r
t
L
a BCE a bel et bien revêtu les habits du prêteur en
d
ernier ressort dans la crise. Elle a, dans le silla
g
e de la
Fed et de la Banque d’Angleterre, massivement abaissé
ses taux directeurs
(
c
f
. graphiques 2 et 3
)
, introduit une
procédure d’allocation illimitée et à taux fixe de liquidités
à
u
n
e
se
m
a
in
e
e
t
à
u
n m
o
i
s
au
l
e
n
de
m
a
in
de
l
a
f
a
illit
e
d
e Lehman en octobre 2008 et élargi, à plusieurs
reprises, la
g
amme de collat
é
raux
é
li
g
ibles. Ses
concours au secteur bancaire, qui n’avaient jamais
e
xc
é
d
é
le seuil de 800 milliards jusqu’en novembre
2007, ont culminé à
p
rès de 3 700 milliards à l’été 2012,
a
vant de re
f
luer, au gré des remboursements anticipés
d
e la première LTR
O
à 3 ans, vers 2 400 milliards en
octobre 2013. Initialement prévue
j
usqu'en
j
uillet 2014,
la
rocédure d’allocation en
uantité illimitée et à taux
f
ixe sera poursuivie au moins jusqu'au 7 juillet 201
5
8
.
C
es opérations ont considérablement gon
f
lé le bilan de
l
’Euros
y
stème
(g
raphiques 4 et 5
)
et contribué à apaiser
l
es tensions sur le marché monétaire
,
en assurant une
l
iquidité su
ff
isante aux intervenants.
D
éce
m
b
r
e
2
0
1
3
C
onjoncture
7
L
’ex
p
ression «
p
r
ê
teur en dernier ressort » est
s
ouvent entendue dans une acce
p
tion
p
lus étroite.
L’économiste britannique Walter Ba
g
ehot est à l’ori
g
ine
d
e la r
èg
le canonique selon laquelle le soutien des
autorit
é
s mon
é
taires n’est l
é
gitime qu’autant que
l
’établissement qui en béné
f
icie demeure solvable. Dès
l
a
f
in du XIX
e
siècle, il avait, toute
f
ois, pressenti la
di
ff
iculté qu’éprouveraient les banques centrales à
di
st
i
n
g
uer,
e
x
a
n
te
, illi
q
uidité et insolvabilité. D’où la
p
réconisation suivante : la ban
q
ue centrale doit
p
rête
r
s
ans limite mais à un taux
p
énalisant les ban
q
ues
s
olvables et en mesure de mobiliser du collat
é
ral.
Pour le r
é
gulateur, «
l
’encours de H
Q
LA non grevés
d
evra
i
t au mo
i
ns
p
ermettre
à
l
a
b
an
q
ue
d
e surv
i
vre
j
usqu’au
30
e
jour du scénario de tensions, date à
laquelle la direction de l’établissement et les
r
esponsa
bl
es pru
d
ent
i
e
l
s auront
c
id
er
d
es act
i
ons
c
orrect
i
ves appropr
es ou
l
e pro
blè
me
d
e
l
a
b
anque
a
ura pu
f
aire l’ob
j
et d’une résolution ordonnée ».
L
e
Comité de Bâle se montre, en revanche,
p
eu disert sur
l
e rôle de
p
rêteur en dernier ressort de la ban
q
ue
centrale, se contentant d’affirmer
q
ue le ledit encour
s
«
donne
(
)
à la banque centrale plus de temps pour
prendre des mesures appropriées, si elle les juge
nécessai
r
es
»
9
.
D
eux
i
nterro
g
at
i
ons
d
emeurent cepen
d
ant.
E
n cas
d
e choc de liquidit
é
entra
î
nant le rel
â
chement de la
contrainte prudentielle de liquidit
é
, dans quelle mesure
les ban
q
ues recourront-elles e
ff
ectivement au matelas
d
’acti
f
s li
q
uides
p
our couvrir leurs sorties de trésorerie
?
S
ous la
p
ression de leurs créanciers, ne
p
f
éreront
-
elles
p
as
p
réserver leurs ratios de li
q
uidité et se
efinancer au
rès de la ban
ue centrale ? Cette
uestion renvoie
la deuxi
me interro
ation, qui a trait
au comportement de cette derni
è
re en pareilles
circonstances. Le propre d’une banque centrale
é
tant de
cultiver « l’ambiguïté constructive », rien ne permet
d
’a
ff
irmer
a
prior
i
que la BCE ou une autre banque
i
centrale jouerait une partition di
ff
érente en présence, ou
en l’absence, de LCR. Par exemple, si un système
b
ancaire fonctionne avec un excédent de réserves
,
il
existe
p
eu de raisons
p
our
q
ue la ban
q
ue centrale
d
éfinisse un champ élar
g
i de collatéral. Or, comme
l’illustrent les donn
é
es r
é
centes, un exc
é
dent de liquidit
é
au sens de la politique monétaire
403,5 milliards
d
eu
r
os
de
r
ése
rv
es
e
x
céde
nt
a
ir
es
au
3
1
déce
m
b
r
e
2
012
)
peut dissimuler un déficit de
l
i
q
uidité au sens du
L
C
R
(
225 milliard
s
1
0
)
. La question revient à savoir si la
B
C
E appréhendera à l’avenir la position de liquidité du
sy
stème bancaire dans une acception étroite
(
au-de
d
es seules réserves obli
g
atoires
)
ou lar
g
e
(
au re
g
ard
d
es exi
g
ences du LCR
)
. La BCE semble encore
a
u
j
ourd’hui attacher une
g
rande importance
à
la notion
d
e r
é
serves exc
é
dentaires
s
tricto sensu lorsqu’elle
commente les
é
volutions mon
é
taires.
Décidée pour endiguer la contraction des
f
lux de
crédit depuis l’été 2011, la baisse du coe
ff
icient des
r
éserves obli
g
atoires de 2% à 1% à compter du
18
j
anvier 2012 n’avait de sens que dans le cadre de la
p
remi
è
re approche, d
é
sormais caduque. La hausse des
r
éserves excédentaires
q
ui a suivi montre, s’il était
b
esoin,
q
u’elle n’a
p
as eu les bénéfices escom
p
tés. La
B
C
E sera, toute
f
ois, amenée à prendre en considération
la n
é
cessit
é
pour les banques de constituer des
serves en monnaie centrale en endossant la
r
es
p
onsabilité de su
p
erviseur uni
q
ue à
p
artir de
l’
au
t
o
mn
e
201
4.
Les effets macroéconomiques du
LCR
Une lecture théorique du L
C
R suggère qu’il réduit le
m
ulti
p
licateur du crédit
p
our la
p
artie des acti
f
s li
q
uides
constituée sous forme de réserves au
p
rès de la ban
q
ue
centrale, tandis
q
ue le renforcement des
p
ortefeuilles de
t
itres
é
ligibles est susceptible de se substituer au
f
inancement bancaire du secteur privé.
Baisse du multiplicateur (ou diviseur) de crédit
L
e ratio LCR
p
eut être, au moins
p
our
p
artie,
a
pparenté à un coefficient de réserves obli
g
atoires, en
vertu du
q
uel les ban
q
ues commerciales doivent
constituer des r
é
serves aupr
è
s de la banque centrale
d
ans une proportion de leurs d
é
p
ô
ts, et auquel une
a
bondante litt
é
rature a
é
t
é
consa
c
e. Le prem
i
er e
ff
et
d
u
n
e
h
ausse
du
coe
ffi
c
i
e
nt
de
r
ése
rv
es
es
t l
a
ba
i
sse
a
rithmétique du multiplicateur du crédit
(
ou de la
m
onnaie comme l’
é
crivent plus
j
ustement les An
g
lo-
S
axons, c
f
. encadré
)
.
1 / 22 100%

Bâle III, le multiplicateur du crédit et la politique monétaire

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