rétribuera tous les hommes ressuscités ». Malgré leur différente façon de les interpréter, cette notion commune
au judaïsme, au christianisme et à l'islam distingue les trois religions monothéistes des autres grandes religions.
Leur vie morale est présentée comme une conséquence de leur doctrine : « Aussi ont-ils en estime la vie
morale ». Sans donner une descriptions complète des pratiques musulmanes, le texte mentionne trois des cinq
piliers de l'islam : la prière, l'aumône et le jeune.
Dans ce paragraphe, tout n'est pas dit, mais, avec une concision remarquable, l'essentiel est dit, permettant le
dialogue et la collaboration qui ne seront possibles que si chrétiens et musulmans s'efforcent d'oublier un passé
dont le Concile reconnaît qu'il fut tissé de « nombreuses dissensions et inimitiés ».
−La religion juive
C'est dans le cadre de sa réflexion sur l'Eglise que le Concile situe ce paragraphe sur la religion juive : »Scrutant
le mystère de l'Eglise, le Concile rappelle le lien qui relie spirituellement le peuple du Nouveau Testament avec
la lignée d'Abraham ».
Dans une première partie, « l'Eglise du Christ reconnaît » tout ce qui l'attache à Israël , et que c'est par lui qu'elle
a « reçu la révélation de l 'Ancien Testament ». Cette partie fait appel à des textes clés de saint Paul, en
particulier les chapitres 9 à 11 de l'épître aux Romains. L'Eglise « reconnaît » que le « mystère divin du salut »
trouve son origine dans les patriarches et les prophètes tandis qu'elle « confesse » que « tous les fidèles du
Christ sont fils d'Abraham selon la foi » (cf Ga 3,7).
Du fait de cette parenté commune, « spirituellement, nous sommes des sémites », comme le rappelait Pie XI, en
1938, face à l'antisémitisme nazi. Enfin le texte rappelle que Jésus, de même que sa mère, les apôtres et les
premiers disciples étaient juifs.
La deuxième partie de ce paragraphe porte sur le contentieux entre l'Eglise et les juifs.. Si aux yeux de la foi
chrétienne, au dire de Paul, Israël a fait un faux pas (Rm 11,11), il n'est pas pour autant réprouvé, comme cela a
été soutenu au long de l'histoire. Tout en admettant que « les juifs en grande partie n'acceptèrent pas l'Evangile »
ou s'opposèrent à sa diffusion, le Concile souligne que « selon l'apôtre, les juifs restent encore, à cause des
pères, très chers à Dieu, dont les dons et l'appel sont sans repentance » (cf Rm 11,28, déjà cité en LG§16).
Evoquant « le patrimoine spirituel commun aux chrétiens et aux juifs, le Concile recommande « la connaissance
et l'estime mutuelle, qui naîtront surtout d'études biblique et théologiques ainsi que d'un dialogue fraternel ».
Le Concile aborde ensuite la question de la responsabilité des juifs dans la mort de Jésus. C'est toute la question
du « déicide ». La liturgie et une catéchèse remontant parfois aux Pères de l'Eglise ont longtemps soutenu que
l'ensemble du peuple juif était coupable de « déicide », notion qui alimentait l'antisémitisme et servait à justifier
les persécutions contre les juifs. Au Concile, le débat était de savoir si on pouvait sans contredire les
témoignages de l'Evangile, professer que la mort du Seigneur ne doit pas être attribuée au peuple juif comme
tel ? Sans nier la faute de ceux qui, selon les Evangiles, décidèrent de la mort du Christ, on ne pouvait attribuer
cette faute à l'ensemble du peuple et encore moins à leurs descendants vivant aujourd'hui. Pourtant, certains
Pères de la minorité maintenaient cette accusation de déicide que le Concile a rejetée.
Finalement, sans nier la responsabilité du petit groupe des »autorités juives avec leurs partisans », le texte
rappelle que les juifs dans leur ensemble « ne doivent pas pour autant être présentés comme réprouvés par Dieu,
comme si cela découlait de l'Ecriture ».
Rappelant à nouveau le « patrimoine commun » avec les juifs, et donc la parenté qui en résulte : « L'Eglise,
poussée non par des motifs politiques, mais par l'amour évangélique religieux, déplore les haines, les
persécutions et toutes les manifestations d'antisémitisme , qui, quels que soient leur époque et leurs auteurs, ont
été dirigé contre les juifs ». Une version antérieure du texte indiquait que l'Eglise « déplore et condamne ». Suite
aux difficultés du débat, le « condamne et déplore » a été supprimé de la version promulguée, mais le texte a
perdu de sa vigueur.
Quant à la mort du Christ, le Concile souligne que « le Christ, en vertu de son immense amour, s'est soumis
volontairement à la Passion et à la mort à cause des péchés de tous les hommes et pour que tous les hommes
obtiennent le salut ». Plus que les juifs, ce sont les péchés des hommes qui crucifient Jésus.
−La fraternité universelle excluant toute discrimination
En conclusion, « l'Eglise réprouve donc, en tant que contraire à l'esprit du Christ, toute discrimination ou
persécution opérée envers les hommes en raison de leur race, de leur couleur, de leur classe ou de leur
religion » . La déclaration emploie le verbe « réprouver » (reprobare ) là où on attendait le verbe « condamner ».
Mais l'intention du texte est claire et la constitution pastorale dur l'Eglise dans ce temps, Gaudium et spes, ainsi
que la Déclaration sur la liberté religieuse, Dignitatis humanae, ne laissent aucun doute sur la position de
l'Eglise en ce domaine.
III – Après Nostra Aetate : des réalisations et des débats
La déclaration Nostra Aetate a fait couler beaucoup d'encre aussi bien du côté de ses contradicteurs que de ses
défenseurs. Qu'en est-il des développements des relations avec les autres religions depuis la fin de ce Concile ?