Identification des rapaces en migration

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OBSERVER LES OISEAUX DE PROIE EN MIGRATION
Braquons maintenant les projecteurs sur une spécialité de la science ornithologique très prisée par les amateurs : l’observation
à distance des oiseaux de proie diurnes (ainsi que l’Urubu) pendant leurs migrations printanières et automnales. Un phénomène
fascinant pour le plus grand plaisir des observateurs et ce pour plusieurs raisons: ces déplacements se produisent en des lieux
d’agrégation (ou de rassemblements) situés le long de corridors migratoires, en vagues successives, impliquant de
nombreux individus, suivant un calendrier précis pour chaque espèce, conditionnés par des paramètres météorologiques
bien spécifiques et connus et souvent en après-midi. En résumé, les lieux et les périodes des rendez-vous sont connus, les
rapaces se déplacent bien en vue durant le jour. Peu d’autres groupes d’oiseaux peuvent prétendre à tant d’avantages pour
l’observation !
Lorsque l’hiver approche, les rapaces, au sommet de la chaine alimentaire, doivent quitter leurs aires de nidification pour
rejoindre des lieux qui pourront les pourvoir en nourriture disponible. C’est une règle générale, mais certaines espèces
s’amusent à défier la logique de la migration. L’Autour des palombes est classé en tant qu’espèce résidente au Québec mais
une partie de sa population hiverne au centre des USA. L’Épervier brun et l’Épervier de Cooper, normalement des nicheursmigrateurs, demeurent de plus en plus en grands nombres dans le sud du Québec pendant l’hiver. Bien entendu, les
mangeoires d’oiseaux leur offrent des proies sur un plateau d’argent. Plusieurs Buses à queue rousse demeurent jusque tard
en début d’hiver, partageant même pour un temps leurs territoires de chasse avec les Buses pattues en provenance des
régions nordiques. Pourquoi la Crécerelle d’Amérique et la Buse à épaulettes migrent sur de courtes distances (sud des Grands
Lacs), alors que le Balbuzard pêcheur se rend jusqu’au Pérou ou même plus au sud ?
Les rapaces migrent de jour, afin de suivre leurs proies (notons que plusieurs d’entre elles migrent de nuit) mais surtout, pour
une majorité de ceux-ci, afin de réduire au maximum la dépense d’énergie impliquée par le fait de voler sur de si grandes
distances. Comment ? En profitant des vents portants (qui soufflent à l’horizontale dans le sens de la migration) et de toutes
sortes de systèmes d’airs ascendants (les «thermiques») (plus présents en après-midi à cause de l’action du soleil).
Les «doigts». Plusieurs oiseaux planeurs de grandes envergures (comme
les rapaces, urubus et grues) ont de longues et étroites rémiges primaires
extérieures qui peuvent se dégager tels des «doigts» lorsque l’aile est en
pleine extension. Cela apporte un avantage aérodynamique et permet aux
oiseaux de planer à basse vitesse sans trop perdre de l’altitude. L’Autour
des palombes est ici illustré.
Le but est de s’élever en altitude sans effort (en vol plané et en effectuant des cercles) et, lorsque cette poussée devient nulle,
se diriger vers la base du prochain système d’air ascendant par un vol glissé (l’oiseau replie les ailes le long du corps et ferme
la queue) suffisamment véloce (utilisant la gravité et les vents portants, s’il y a lieu). En l’absence de vents portants adéquats
et/ou afin d’éviter l’écrasement, les migrateurs intercalent plus ou moins les vols glissés avec des vols ramés (le battement des
ailes) pour garder le cap et maintenir l’altitude désirée. Le jeu en vaut la chandelle car une élévation d’un kilomètre dans les
vents ascendants et la plongée subséquente résulteront en une avancée horizontale pouvant atteindre six kilomètres,
spécialement avec de bons vents portants. Comme on le constate, les conditions météorologiques mènent pour beaucoup la
migration. Par exemple, une migration massive survient un ou deux jours après le passage d’un front froid dans la région
concernée, suivi par au moins une journée ensoleillée avec des vents portants réguliers. Si ces conditions ne surviennent pas
dans cet ordre ou qu’une condition manque, la migration sera forcément réduite. Signalons que quelques espèces sont moins
dépendantes des thermiques que les autres. Ces exceptions font en sorte qu’en certaines périodes une activité migratoire quasi
permanente a cours en plusieurs sites, conditions de vents favorables ou non.
«Chevaucher les thermiques». Les
rapaces et d’autres migrateurs de
grandes tailles utilisant le vol plané
recherchent les colonnes d’air chaud
(thermiques) et se laissent portés sur
les courants ascendants, lesquels
les élèveront, dans un mouvement
en spirale, parfois jusqu’en hautes
altitudes. Depuis ces hauteurs, les
migrateurs glissent progressivement
dans une direction choisie, à la
recherche du prochain système
thermique qui les aidera à poursuivre
leur voyage.
Un système d’air ascendant se crée à partir d’interactions entre le soleil et la terre. Le sol se réchauffe deux fois plus
rapidement que l’air et presque trois fois plus vite que l’eau. Ceci implique que les champs ou les aires ouvertes rocheuses ou
sablonneuses se réchauffent plus vite que les forêts et, bien sûr, les étendues d’eau. Après quelques heures d’ensoleillement,
ces zones terrestres transmettent leur chaleur à l’air ambiant, ce qui est à la genèse de colonnes d’air chauds (appelés les
«thermiques») qui s’élèvent, prennent de l’expansion et tourbillonnent pour créer de vastes bulles ou toupies (de façon plus
évidente à partir de 11h00-12h00).
Un avantage additionnel vient aider nos migrateurs : le long de vastes étendues d’eau, la genèse des systèmes d’airs
ascendants augmente en nombre et en puissance à cause d’une poussée d’air froid en rase-motte en provenance de la surface
des eaux à proximité. Cet air froid exerce une poussée verticale sur l’air chaud situé à la base des thermiques en formation et
de ce fait amplifie le tourbillonnement et l’expansion de ceux-ci.
L’air chaud s’élève
thermique
brise du lac
L’air froid remplace et pousse l’air chaud
Donc, les oiseaux de proie voyagent généralement au-dessus des terres, évitant de traverser de vastes étendues d’eau: les
thermiques y sont rares et faibles puisque, comme nous l’expliquions, l’eau se réchauffe presque trois fois moins rapidement
que la terre et ne peut réchauffer suffisamment l’air ambiant pour générer la formation de thermiques. Sans ces derniers, ce
serait pour les rapaces une aventure épuisante et périlleuse que de tenter de telles traversées. Mais ils longeront volontiers les
vastes étendues d’eau (côtes, larges cours d’eau, grands lacs) puisque, comme énoncé ci-haut, les systèmes d’airs ascendants
sont plus nombreux et puissant au-dessus des terres riveraines. Les migrateurs parcourront ainsi les zones côtières jusqu’à
converger à un point de constriction (ou d’étranglement) (ex: Cap Tourmente, Qc. / Holiday Beach Conservation Area,
rivière Detroit, sud de Windsor, Ont. / Derby Hill, sud du Lac Ontario, NY) où un vol glissé sur des vents portants leur permettra
finalement de franchir ce qui reste de l’obstacle sans trop d’effort. D’autre part, des espèces au vol puissant et/ou équipées
d’ailes aérodynamiques et longues, comme le balbuzard, le busard, la Buse pattue et les faucons de moyenne ou grande taille,
traversent à n’importe quelles heures du jour de vastes étendues d’eau, bien que certains jours de vents portants favoriseront
des déplacements massifs de leur part.
Les vents portants qui frappent des obstacles comme des falaises, des chaines de montagnes ou des zones côtières escarpées
produisent une déflexion qui engendre un autre type de vents ascendants utilisés par les rapaces planeurs. Les obstacles
orientés dans un axe nord-sud sont particulièrement propices à la création de tels systèmes et ce sont justement ceux-là que
les voyageurs sont enclins à exploiter, car cela va dans le sens de leur migration. C’est pourquoi plusieurs corridors migratoires
suivent en fait les chaines de montagnes orientées nord-sud (ex : Hawk Mountain, Penn.) ou les rives escarpées de la côte
atlantique ou du golfe du St-Laurent (avec des lieux d’agrégation comme New Horton Ridge, N.B. (Baie de Fundy) /
Tadoussac ou St-Fabien-sur-mer, Qc.). Le long des côtes, les vents optimaux sont ceux qui repoussent les oiseaux vers le
rivage. Même lors de rafales de neige ou d’embruns, ces vents favorables engendreront une migration significative. Par ailleurs,
signalons que les migrateurs ne sont pas en reste non plus de thermiques puisque, près des obstacles géographiques dont on
fait mention ici, les surfaces inclinées des lieux escarpés, dénudées et rocheuses, génèrent encore plus de chaleur que celles
des terrains plats !
En fonction des vents dominants qui changent tout au long de l’année, les corridors migratoires et les lieux de rassemblement
qui leur sont associés sont différents au printemps et à l’automne. Ex: au printemps: New Horton Ridge, N-B / St-Fabien-surmer, Bas St-Laurent, Qc. / vallée de la rivière Carp, à l’ouest d’Ottawa, Ont. / Niagara Peninsula Hawkwatch, ouest du Lac
Ontario, Ont. / Derby Hill, est du Lac Ontario, NY. À l’automne : Tadoussac, Haute Côte-Nord, Qc. / escarpement d’Eardley,
Outaouais, Qc / Hawk Cliff, nord du Lac Érié, Ont. / Holiday Beach, ouest du Lac Érié, Ont. / la célèbre Hawk Mountain, Penn. /
Pointe Cape May, NJ. / et le long du golfe du Mexique: Corpus Christie, Tx. / Veracruz, Mexique. Il existe plus de mille sites
migratoires de rapaces en Amérique du Nord et de nouveaux sont découverts chaque année avec la montée en popularité de
l’observation des oiseaux de proie. Consulter le site web de la Hawk Migration Association of North America pour voir les
renseignements à ce sujet de même que de nombreuses données pertinentes à tous les aspects importants de cette activité.
Voici quelques sites migratoires majeurs.
printemps
automne
Évidemment, que les corridors de migration survolent les terres exposées, les rives de grandes masses d’eau ou les chaines de
montagnes (ou un amalgame de ces types de reliefs), le fait que l’observateur ait la chance d’être placé plus en hauteur le
rapprochera des oiseaux et lui procurera une meilleure appréciation des caractéristiques recherchés, et ce dans un plus vaste
choix d’angles de vue. Que ce soit frontal, ventral, latéral, caudal ou même dorsal. Pour les observateurs moins chanceux qui
se situent au niveau de la mer, les angles de vue sont plus limités : frontal, ventral ou caudal.
Types de vol et angles de vue
Vol plané
Vol glissé
Vue frontale
Vue latérale
Vue caudale
Vol ramé
Vol sur place
Vol en plongée
L’IDENTIFICATION
L’éloignement de l’objet ciblé, de très courts temps d’observation (assez souvent), les conditions de lumière, les plumages
similaires entre espèces, les variations entre juvéniles, adultes femelles et mâles, les motifs de coloration du plumage chez les
différentes races, sont autant de contraintes pour les observateurs.
forme foncée
forme claire
Variation du plumage. Quelques espèces de buses nous montrent des variations considérables de
leur plumage. La Buse à queue rousse en est une des plus notables. Les différences géographiques
constatées dans l’aire de répartition de l’espèce vont de la race «Harlan» très foncée à la race
«Krider» très pâle. Au sein même d’une population locale, on peut même dénoter des phases de
coloration radicalement différentes, comme ici (à droite) pour une seule sous-espèce de l’Ouest avec
des adultes de forme foncée ou claire.
On pourrait dire que l’observation des migrateurs dans de telles conditions fait appel tout à la fois à des impressions (subjectif)
et des indices (objectif) dont certains sont parfois évidents (mais une personne débutante les remettra quand même en
question). C’est un mélange de science et d’intuition qui ne se raffinera et ne s’assumera que grâce à de nombreuses heures
passées sur le terrain ou dans les bouquins à étudier descriptions et illustrations. Sur le terrain, dès l’apparition d’un rapace
dans le ciel, une première étape consistera en un processus d’élimination, qui doit s’enclencher rapidement chez l’observateur,
afin d’orienter sa recherche parmi un minimum d’espèces répondant aux caractères observées. D’autres importants critères,
comme le type de vol, s’appliqueront alors que l’oiseau s’approche et/ou modifie son comportement (postures, etc) ou se laisse
voir sous différents angles. Certes, lorsque l’oiseau demeure dans le champ de vision pendant 40 secondes, il sera bien difficile
de composer avec tous les critères à surveiller. Mais avec le migrateur suivant et la somme de tous les autres voyageurs, on
pourra additionner les temps d’observation et isoler chez-eux des caractères à retenir ou non. À la longue, on constatera que
chaque espèce a sa propre «personnalité» en matière de traits physiques et de comportements. Avant de décrire et de
comparer très succinctement chacune des espèces, essayons d’abord de discriminer certains critères et d’en dégager les
caractéristiques générales.
L’identification à distance des rapaces repose avant tout sur quatre différents aspects de l’observation. En ordre d’importance,
nous parlons d’abord de l’allure de la silhouette (en vue ventrale), puis du comportement de vol et l’utilisation des différents
types de vol, suivi des dimensions relatives (on considère surtout l’envergure) et finalement d’une panoplie de marques,
formes, zonations et tonalités ou dégradés (foncé, pâle) des noirs, blancs et gris sur les structures anatomiques de l’oiseau. Il
faut signaler qu’implicitement, les traits recherchés pour l’identification à courte distance s’avèrent pratiquement inutiles pour
des oiseaux en mouvement et à grande distance : couleur et longueur des pattes et leurs coussinets, dimensions et forme du
bec, bandes étroites sur les rectrices, croupion, scapulaires, épaules, et de manière générale la coloration (et son intensité et
nuances) de certaines parties de l’anatomie. En ce qui a trait à ce dernier point, songeons seulement aux distorsions et illusions
d’optique occasionnées par l’intensité et l’angle de la lumière.
D’autres moyens de déterminer les espèces, indirects ceux-là, se rapportent à la prise en compte des pics des vagues
migratoires et les dénombrements historiques des migrateurs, et ceci pour chacune des espèces.
Silhouettes. Les spécialistes des oiseaux de proie connaissent par cœur leurs silhouettes typiques et les aspects à y dénoter. Ici, on se
réfère principalement à l’angle de vue ventral (l’oiseau vu par en-dessous). Les formes et les dimensions relatives (largeurs et longueurs) des
ailes et de la queue (ex : les «biceps» de la Buse à queue rousse ou de l’Autour), leurs contours lisses ou échancrés, les aspects du bord
d’attaque ou du bord de fuite de l’aile (ou du «bras») ou des rémiges primaires (ou la «main» et les «doigts»), dégagées ou non. La projection
de la queue ou de la tête par rapport au reste du corps, l’extrémité de l’aile qui semble être carrée, acuminée, émoussée ou biseautée (ex :
Petite Buse), etc. Aussi, chez un oiseau en vol plané, l’aspect non perpendiculaire du croisement entre la ligne du corps et des ailes est un
détail révélateur (ex : les ailes projetées vers l’avant de la Buse à épaulettes). Pour consulter un document très bien conçu pour l’identification
des oiseaux de proie et dans lequel, entre autres, les silhouettes sont abondantes et bien illustrées, télécharger le texte en PDF «Learning
eastern hawk flight identification» sur le site du Holiday Beach Migration Observatory au http://hbmo.ca/
Types de vols, postures et comportements utilisés pour l’identification. Assurément, une étude de tous les détails du comportement de vol
est un apprentissage essentiel. Il faut aussi observer la manifestation de toute la variété des types de vol : ramé, plané, glissé, en plongée et
en surplace, s’il y a lieu. De même que les modalités avec lesquelles les différentes espèces intercalent les divers types de vol. Un battement
des ailes s’articulant (ou semblant s’articuler) à partir du poignet ou de l’épaule. Un autre aspect fort utile : la valeur de l’angle dihédral. En
vue frontale, c’est l’angle (au-dessus de l’horizontale) que fait le bras (qui porte l’aile) avec le corps. Cet angle peut être plus ou moins
prononcé selon les espèces et les types de vol concernés.
Dimensions relatives. Sur de courtes ou moyennes distances et en disposant d’éléments du paysage qui permettent des mesures
comparatives, il peut s’avérer fructueux d’estimer la longueur totale d’un oiseau de proie pour son identification. Mais ce n’est pas le contexte
qui nous concerne le plus ici. Plus spécialement à grandes distances et même de façon plus générale, le trait le plus distinctif d’un oiseau en
vol, qui frappe la mémoire visuelle et demeure en tête, c’est définitivement l’envergure des ailes. Mais avant d’utiliser cet outil, nous devons
considérer une spécificité des rapaces (qu’ils partagent avec les strigidés); le dimorphisme sexuel, où les femelles sont plus grandes que les
mâles. De surcroit, ce dimorphisme peut être plus ou moins prononcé d’une espèce à l’autre. Exemples : les éperviers et le Faucon pèlerin
affichent le plus grand dimorphisme sexuel. Chez l’épervier brun, champion de cette catégorie, l’envergure du mâle est en moyenne 73 % de
celle de la femelle (et son poids seulement 54 % de celui de la femelle !). En contrepartie, chez d’autres espèces le dimorphisme est quasi
nul. Beaucoup de documents accolent aux descriptions d’espèces un indice de dimorphisme sexuel (exprimé en pourcentage) mais cela
donne une grande masse d’information pour les débutants qui voudraient tout mémoriser.
femelle
mâle
Dimorphisme des tailles. Les oiseaux de proie sont
bien connus pour leur dimorphisme sexuel, où les
femelles sont plus grandes que les mâles, une
particularité partagée par les strigidés. Les hypothèses
émises pour expliquer ce phénomène tournent autour
du fait que les deux membres d’un couple sont aptes à
exploiter des sources d’alimentation différentes et que
la grande masse de la femelle lui permet de pondre des
œufs plus gros et de pouvoir les incuber lors de temps
froids. L’Épervier de Cooper est montré ici.
Dans l’intention de simplifier ce concept de la mesure de l’envergure, d’en faire un outil pratique et de bénéficier d’une vue d’ensemble des
oiseaux de proie, les différents auteurs ont pris le partie d’établir pour chaque espèce, à partir d’un grand nombre de spécimens, la médiane
(meilleure indication que la moyenne, car elle écarte les valeurs extrêmes) de toutes les mesures d’envergure, femelles et mâles inclus. Puis,
on compare ensuite cette envergure médiane avec celles d’une douzaine d’oiseaux bien connus de tailles diverses : Grand Héron, Goéland
argenté, Grand Corbeau, Goéland à bec cerclé, Corneille d’Amérique, Canard colvert, Grand Pic, Pigeon biset, Pluvier kildir, Pic flamboyant,
Geai bleu, Merle d’Amérique. Ces données comparatives reportées sur des illustrations, où rapaces et oiseaux connus sont placés côte-àcôte, nous donnent un coup d’œil très instructif où les proportions deviennent plus évidentes. Voici quelques exemples (ici, les mesures pour
les deux sexes sont isolées): le mâle Aigle royal (envergure de 1,85 m) est légèrement plus grand que le Grand Héron (1,83 m) , tandis que la
femelle Urubu à tête rouge est légèrement plus petite avec ses 1,81 m. Le mâle du Busard St-Martin et de l’Autour des palombes (98 cm) ont
une envergure médiane très comparable à celle de la Corneille d’Amérique (99 cm). La femelle du Faucon émerillon et le Pigeon biset ont
tous deux une envergure de 68 cm. De même pour la femelle de la Crécerelle d’Amérique et le Pluvier kildir, avec leurs 61 cm. Les mâles de
l’Épervier brun et de la Crécerelle d’Amérique, avec 52 cm d’envergure, ne sont pas beaucoup plus grands que le Pic flamboyant (51 cm). Le
plus large rapace de notre avifaune est la femelle Pygargue à tête blanche (2,30 m) et le record pour le plus étroit est partagé entre les mâles
Épervier brun et Crécerelle d’Amérique (52 cm).
La nomenclature de traits anatomiques (ou topographie) d’un rapace en vol (vue ventrale). Plusieurs traits s’avèrent des plus utiles. Les
diverses marques, une couverture sous-caudale ou sous-alaire plus foncée ou pâle, le ventre, les flancs, la poitrine et la gorge. Certains
marqueurs révèlent même souvent l’identité des espèces : « fenêtres ou croissants des ailes translucides» (Buse à épaulettes), «bande
patagiale foncée» ou «virgule foncée» (Buse à queue rousse), «taches proéminentes aux poignets ou à la main» (Balbuzard, Buse pattue),
etc.
Topographie d’un rapace (nomenclature)
Primaires dégagées
(Sibley)
«fenêtre»
bord de fuite
de l’aile
bord d’attaque
de l’aile
Couverture
sous-caudale
Couverture sous-alaire
flancs
ventre
gorge
poitrine
Bande patagiale
pieds
Région carpienne ou poignet
virgule
Sommets des vagues migratoires. Si on connait le calendrier migratoire des différentes espèces pour une région donnée, on peut
déterminer ce à quoi on peut s’attendre à y rencontrer. Les espèces suivent un calendrier quasi invariable, tant au printemps qu’à l’automne.
Le passage des effectifs de certaines espèces peut se dérouler presque tout au long de la saison (Buse à queue rousse) alors que chez
d’autres il se concentre dans un intervalle de temps relativement court (Petite Buse). Au site de Derby Hill (NY), le mouvement migratoire
printanier s’étend de la fin février au début de juin, mais la grande majorité des effectifs passe en mars, avril et première moitié de mai (sauf la
Buse pattue, plus hâtive en mars et avril, et la Petite Buse, plus tardive en avril et mai). Notons que le sommet de vague migratoire de plus de
la moitié des espèces, a lieu en avril. Quant à la migration automnale au site de Holiday Beach (Ont.), elle s’étire de la fin août au début
décembre, mais la grande majorité des effectifs passe en septembre, octobre et première moitié de novembre. Encore ici, vous apprendrez
quelles espèces divergent de ce modèle; les hâtives et les tardives. Mais le pic migratoire de plus de la moitié des espèces a lieu de la miseptembre à la mi-octobre.
Dénombrement des populations des différentes espèces vues en migration. Les oiseaux de proie de l’Est du continent se répartissent au
sein de cinq catégories d’abondance, allant d’abondant à rare. Avec l’expérience, l’observateur deviendra familier avec ces classements.
Abondant : Petite Buse, Urubu à tête rouge, Buse à queue rousse et Épervier brun. Très commun : Balbuzard pêcheur, Buse à épaulettes et
Busard St-Martin. Commun : Épervier de Cooper, Crécerelle d’Amérique (en baisse) et Buse pattue. Peu commun : Pygargue à tête blanche
(en hausse). Rare : Autour des Palombes, Aigle royal, Faucon émerillon, Faucon pèlerin (en hausse) et Faucon gerfaut (accidentel). La
migration des faucons est plus discrète et diffuse : ils sont moins dépendants des vents ascendants, se déplacent à toutes heures du jour et
ne se limitent pas aux corridors migratoires. On aura de bonnes chances de voir de bons nombres d’individus des espèces abondantes en
dehors de leurs pics migratoires; il y a bien sûr un étalement plus ou moins marqué du passage des effectifs de part et d’autre de cette
période optimale calculée. Mais pour observer les espèces plus rares, la connaissance du calendrier des vagues migratoires et de leurs pics
est primordiale. On tiendra compte aussi qu’au printemps les femelles et les mâles migrent en groupes séparés dans le temps et qu’en
automne les juvéniles migrent dans des vagues différentes de celles des adultes. Si on combine les informations amassées à propos du
calendrier migratoire et du dénombrement des espèces, nous obtenons des indications très éclairantes sur les espèces escomptées selon la
date de l’observation. Plusieurs tableaux et graphiques présentent clairement ces informations pertinentes pour chaque site d’observation
majeur et les données y sont souvent compilées depuis des décades.
Autres oiseaux accompagnant et ressemblants parfois aux oiseaux de proie. Certains indices permettent de repérer ces
oiseaux en vol parmi les rapaces en migration. Exemples : le Grand Corbeau (la main poussée vers l’arrière en vol plané,
comme s’il glissait), les grues et les cormorans (surveiller le cou !), les goélands (bout uni des ailes, c’est-à-dire qu’il est
impossible de distinguer individuellement les primaires).
Traitement des différentes espèces (16)
Petite
Buse
Busard
St-Martin
Pygargue à
tête blanche
Balbuzard
pêcheur
Autour
des
palombes
Diversité des oiseaux de proie. Les rapaces sont divisés en huit groupes bien définis, à partir de leur
apparence générale. Les buses, comme la Petite Buse, sont compactes et ont des queues courtes. Les
éperviers (comme ici l’Autour), principalement des chasseurs de petits oiseaux, sont plus élancés et sont munis
de longues pattes et longues queues. Le Busard est très efflanqué, pourvu de longues pattes, d’une longue
queue et de disques faciaux comme les strigidés. Le Pygargue est membre d’un groupe de rapaces piscivores.
Le Pygargue et l’Aigle, de grande taille, sont assez semblables superficiellement, malgré leur éloignement
taxonomique. Le Balbuzard est une espèce distinctive, également piscivore.
La famille des Falconidés est représentée en
Amérique du Nord par deux sous-familles très
dissemblables : les caracaras et les faucons. Le
faucon des prairies est ici représenté à droite.
Crécerelle d’Amérique
Épervier de Cooper
Épervier brun
Autour des palombes
Faucon gerfaut
Faucon pèlerin
Faucon émerillon
Buse à queue rousse
Busard
St-Martin
Balbuzard
pêcheur
Buse à épaulettes
Petite Buse
Buse pattue
Urubu à tête rouge
Aigle royal
Pygargue à tête blanche
Groupe 1 : Les espèces de grandes tailles, brunâtres ou noirâtres
PYGARGUE
Envergure (E) femelle : 2,30 m E mâle : 1,79 m (Grand Héron 1,83 m)
La «planche volante» à cause de ses ailes de largeur uniforme et de son allure rigide en vol. Tête et cou proéminents. Ne
craint pas de traverser les grandes étendues d’eau en migration, contrairement à l’Aigle et l’Urubu. Le pygargue ne bat
pratiquement pas des ailes, en migration. Sur les courants ascendants, les virages sont larges et lents, en maintenant toujours
le vol plané, qui s’effectue les ailes à plat (à l’horizontale) ou légèrement arquées vers le bas, mais toujours avec le bout des
doigts distinctement tombant. Le battement des ailes est lent, comparable à celui du Grand Héron. Le reste du corps reste tout
à fait stable. Le vol ramé est souple, mesuré, peu prononcé (un arc de cercle d’environ 40 degrés). Il est, tout comme chez
l’Aigle, symétrique : les ailes s’élèvent ou s’abaissent selon la même distance vers le haut et vers le bas. Par contraste, chez la
plupart des rapaces, les ailes s’élèvent à peine et la poussée semble principalement dirigée vers le bas.
AIGLE
E femelle : 2,25 m E mâle : 1,85 m (Grand Héron 1,83 m)
Une silhouette sombre dans le ciel avec des ailes de largeurs irrégulières, plus près d’une grande buse que d’un pygargue. En
conséquence, les mains semblent plus larges que chez le pygargue (aspect d’avirons). En migration, il suit une ligne très de vol
très directe. C’est nettement le rapace qui dépense le moins d’énergie en vol. Il préfère le vol plané et glissé, il aime prendre
beaucoup d’altitude en planant sans effectuer de virages. Sans arrêt sur place comme la Buse pattue. Le vol plané est le plus
souvent légèrement dihédral. En vol glissé, les ailes sont à l’horizontale en vue frontale. Dans tous les cas, les doigts sont
retroussés vers le haut. Les battements d’ailes est de plus faible amplitude mais plus souple que celui du pygargue. À noter que
le vol ramé est souvent interrompu par de courts glissés, alors que chez le pygargue, le vol ramé est incessant.
URUBU
E femelle : 1,81 m (Grand Héron 1,83 m) E mâle : 1,75 m
Un oiseau «sans tête», les doigts presque toujours étalés, qui ont une bordure rectangulaire. Il n’étale presque jamais la queue.
Il effectue souvent un faux battement d’aile, en abaissant la main à partir de l’articulation du poignet, sans aucun mouvement de
du bras à partir de l’épaule. Très grégaire, les plus grands groupes de migrants au printemps en Am. du Nord sont enregistrés à
Braddock Bay et Derby Hill, sur la rive sud du Lac Ontario. C’est un maître planeur et il le fait dans une position nettement
dihédrale, les ailes très fermes, en élevant de surcroit les rémiges primaires à la verticale. Son vol glissé est dihédral modifié (la
main est placée à l’horizontale). Il utilise rarement le vol ramé, qui est erratique, acrobatique (il décroche souvent), raide,
hésitant. Le battement d’aile est lourd, laborieux, exagéré en amplitude. Son corps est instable, il se balance au gré des vents
latéraux, avec de brusques changements d’altitude. À distance, le vol chaloupé cause un effet de miroitement de par les sousalaires argentées qui reflètent la lumière. Parfois, l’urubu change subitement son «plan de vol» et se déporte latéralement,
comme aspiré de côté.
Groupe 2 :
BALBUZARD
E femelle : 1,81 m (Grand Héron, 1,83 m) E mâle : 1,52 m (Goéland argenté, 1,45 m)
Allure générale de goéland. Les ailes dominent la silhouette entière, la tête en semble très petite. C’est un vrai migrateur de
longue distance : il se rend jusqu’en Argentine et au Chili, rivalisant avec le Faucon pèlerin et la Buse de Swainson pour les plus
longues migrations chez nos rapaces. Il ne craint pas de traverser les grandes étendues d’eau. Elle n’est pas stoppée par les
journées pluvieuses ou brumeuses. Il se déplace en solo, en paires ou en petits groupes lors des journées avec des vents
favorables. Les juvéniles demeurent dans l’aire d’hivernage jusqu’à leur second printemps, lorsqu’ils acquièrent leur plumage
adulte. De sorte que l’on ne voit pratiquement toujours que des adultes lors de la migration printanière. Il utilise à profusion les
vents ascendants pour planer et glisser mais a recours au vol ramé direct à l’approche des secteurs de traversées. En vol
plané, l’allure du «M» (ou «W») apparait soit en vue frontale ou ventrale. Phénomène encore plus évident lors du vol glissé. Le
vol ramé du balbuzard est puissant et constant mais raide et arthritique, lent, entrecoupé de glissés. Les ailes parcourant un
cercle restreint. Le mouvement du vol ramé semble provenir uniquement de la flexion horizontale du poignet : en vue ventrale
on dirait le «M» qui s’ouvre et se ferme comme un accordéon. En vue frontale et en pleine vitesse ce vol ramé puissant fait en
sorte que le corps (et particulièrement la tête) oscille de haut en bas, en contretemps avec les battements. Le battement d’aile
de la femelle est plus lent que celui du mâle et les ailes sont plus fortement arquées. Également, elle effectue beaucoup moins
de changements subits de direction que le mâle. Sans commentaires !
Groupe 3 :
BUSARD
mâle
femelle
E femelle : 1,22 m (Goéland à bec cerclé 1,20 m) E mâle : 98 cm (Corneille 99 cm)
C’est le «funambule» qui se balance au-dessus de nos champs. Une allure très élancée, un oiseau maigre, efflanqué. On peut
parfois apercevoir ses disques faciaux, à l’instar de ceux portés par les hiboux. Cette espèce a le calendrier de migration
printanier le plus étendu de tous les rapaces : les mâles adultes commencent leurs mouvements fin février tandis que les subadultes gagnent le nord jusqu’en début de juin. Ils peuvent traverser de grandes masses d’eau (moins de 65 km) grâce à un
battement d’aile plus ample et plus souple que lorsqu’il chasse. Ce fait ne l’empêche pas d’emprunter en grands nombres les
corridors migratoires le long de ces étendues d’eau, possiblement parce ces zones lui offrent les systèmes d’air ascendants et
les aires ouvertes qui sont d’autant d’habitats de chasse. Il peut voyager sous toutes conditions qui décourageraient maints
rapaces : brume, neige, pluie et même grêle. Mais leur faible poids relatif et leurs grandes ailes les empêchent de migrer dans
les turbulences (vents violents et/ou tourbillonnants). Autre particularité, ils peuvent se déplacer tant le matin que le soir et
même la nuit. Son comportement grégaire est semblable à celui du balbuzard, mais, à noter, les individus de groupes
migratoires se suivent souvent à la file indienne. La migration s’effectue à moyenne altitude et plus en ligne droite :
comportement évidemment différent de celui rencontré sur le territoire de nidification. Mais il demeure que lors de ce vol
migratoire, on le reconnait car le corps continue de se balancer. Il plane moins souvent que d’autres espèces pour s’élever dans
les vents ascendants, préférant utiliser le vol ramé. De même, il semble se fier un peu plus à sa propre propulsion pour passer
d’un système à l’autre. En vue ventrale, c’est une combinaison unique de longues ailes portées vers l’avant et d’une très longue
queue (toutes proportions gardées, la plus longue de tous les rapaces), au bout rectangulaire lorsque fermée. Elle apparait
longue même lorsque, rarement, elle est étalée. En vue ventrale, le busard a presque l’allure d’un épervier (en vol plané) ou
d’un faucon (en vol glissé). Mais, en vue frontale, la position en «V», (les ailes bien droites) presque aussi fortement dihédrale
que chez l’urubu, est caractéristique. De plus, l’allure de faucon est contredite par la main assez large et les doigts bien en
évidence. Il lui arrive de placer les ailes à plat pour s’élever rapidement dans les vents ascendants, ses glissades sont
invariablement placées dans une séquence typique : une série de 4 à 6 battements d’aile souples, lents, mesurés et en forme
de boucles, en alternance avec une glissade. La poussée des ailes vers le bas est prononcée et précise. Le dernier battement
d’une série a souvent plus de force et le corps remonte avant la glissade qui suivra. Peu importe le type de vol utilisé, les vents
le font tanguer et il tente de se ramener dans sa ligne de vol par de légers ajustements, un peu comme un fil-de-fériste.
Groupe 4 : Les buses. Rapaces au corps massif et à la queue courte, faisant montre d’une grande maîtrise pour utiliser les
vents.
BUSE PATTUE
E femelle : 1,44 m (Goéland argenté, 1,45 m) E mâle : 1,24 m (Goéland à bec cerclé, 1,20 m)
Elle migre par tous les temps et n’emprunte pas nécessairement les courants d’air ascendants pour voyager, se fiant à ses
propres moyens et progressant surtout par le vol ramé quasi continuel. C’est pourquoi, en un site donné, elle est la première à
apparaitre le matin et la dernière aperçue en fin d’après-midi. La seule buse qui peut aussi traverser aisément de vastes
étendues d’eau. Un rapace d’allure élancée mais avec un corps robuste. La tête est large et ronde, proéminente, le bec est
disproportionnellement petit, mais ce critère n’est pas des plus évidents au premier abord. Ses ailes longues et étroites sont
d’une largeur à peu près uniforme d’un bout à l’autre. Au battement des ailes, celles-ci parcourent un arc de cercle prononcé; on
dirait le mouvement d’un rameur de drakkar. Son vol méthodique, lent et détendu dénote tout à la fois grâce et puissance. La
ligne de vol est plus erratique et déportée que chez la Buse à queue rousse, le corps est aussi plus titubant ou instable face aux
vents latéraux, mais jamais autant que chez le Busard. La séquence des battements d’aile est irrégulière, à la différence des
autres buses. En effet, on compte des séries de battements très longues ou très courtes entre les glissés, lesquels sont plutôt
sporadiques. Son vol plané est moyennement dihédral, les ailes et la queue sont déployées au maximum, cinq primaires (les
doigts) s’écartent et se courbent vers le haut. Les ailes sont projetées légèrement vers l’avant. Le vol glissé nous montre, vue
de face, une configuration «en toit», un dihédral modifié ou le bras est placé à 45 degrés par rapport à l’axe du corps, la main
bien à l’horizontale et les doigts relevés. Au sommet des bulles d’air ascendants ou en chasse, elle s’active beaucoup pour
maintenir des vols stationnaires qui durent parfois quelques minutes.
BUSE À QUEUE ROUSSE
E femelle : 1,32 m (Corbeau 1,35 m) E mâle : 1,10 m (Goéland à bec cerclé 1,20 m)
La silhouette de référence des buses. Les lignes de contour de la forme sont nettes, dénuées d’échancrures. En vue ventrale, le
bord de fuite est arrondi et on dénote même des biceps assez importants. D’allure massive, voici le maître planeur des rapaces.
Les jours de vents ascendants constants, on la voit demeurer immobile ou presque pendant plusieurs minutes en vol plané,
sans aucun battements d’ailes, comme un cerf-volant au bout de sa corde ou comme si elle était épinglée dans le ciel. Sa
position très légèrement dihédrale lui est particulière : toute l’aile forme un arc courbé vers le haut ; en vue frontale la main et
les doigts incurvés donnent une forme de «u» aplati. Comme les buses à épaulettes et les petites buses, elle est assez
dépendante des conditions climatiques pour sa migration et elles voyagent fréquemment en groupes. Parfois en compagnie des
Petites Buses, on les distingue par leur vol plané qui décrit de bien plus larges cercles que ces dernières, allant en diminuant
lorsqu’elles s’élèvent dans les systèmes thermiques. Le corps demeure toujours très stable et lorsque cette buse est bousculée
par un vent latéral violent, elle ajuste sa position en fléchissant ses ailes et en se laissant déportée, et non pas en battant des
ailes. Le vol ramé est lourd et rectiligne. Le battement d’aile est lent, puissant et court. Il implique toute l’aile, le mouvement
semblant s’articuler autour de l’épaule. Entrainée par son poids relativement élevé, elle glisse très longuement (quelques
secondes) et à bonne vitesse. Elle utilise par conséquent moins le vol ramé que les autres buses. Elle effectue en effet moins
de dix battements d’ailes avant d’exécuter son long glissé.
BUSE À ÉPAULETTES
E femelle : 1,07 m E mâle : 94 cm (Corneille, 99 cm)
C’est la buse qui se prend pour un épervier. Apparait au premier abord comme plus élancée et découpée que la buse à queue
rousse (moins compacte, quoi), avec un corps tubulaire (aspect renforcé par la queue longue, et large même lorsque fermée).
La silhouette ressemble vaguement à un rectangle étiré. En migration, tout en suivant de très larges virages, elle plane souvent
en plus haute altitude que la Buse à queue rousse. Elle le fait les ailes à plat avec de petits ajustements vers le haut ou le bas.
En vue frontale, elle glisse en formant un arc prononcé avec ses ailes. Que ce soit dans les vents ascendants ou en suivant les
vents portants, cette buse est très active, alternant continuellement 3 ou 4 coups d’ailes rapides avec un vol plané ou avec de
courtes glissades (comparer avec la Buse à queue rousse). Lorsque déstabilisée par des vents latéraux, elle exécute des
battements d’ailes frénétiques. Ce battement est par ailleurs centré au poignet; il apparait laborieux comme si l’oiseau battait
l’air à vide. Ceci donne un vol bafouillant, moins fluide que celui des éperviers. En vue ventrale, noter que la projection typique
des ailes vers l’avant n’est pas toujours constatée.
PETITE BUSE
E femelle : 92 cm E mâle : 82 cm (Canard colvert, 88 cm)
C’est une buse trapue qui voyage en très grands groupes, surtout à l’automne. À Veracruz au Mexique, on a déjà compté un
record de 776,000 individus en une seule journée de migration. Elles recherchent activement les zones d’air ascendant et
passent de l’une à l’autre. Elles s’élèvent en très haute altitude en planant et en pratiquant d’abord de courts et brusques
cercles, puis des virages de plus en plus grands à l’approche du sommet des systèmes. Les multitudes de Petite Buses à tous
les étages d’un système d’air ascendant, font songer à de petites bulles d’air s’échappant d’une bouilloire en ébullition, d’où le
nom anglais de kettle ou boils (bouilloires) pour décrire ce phénomène. L’écho de tels attroupements peut même être perçu sur
les radars météo. Elle a des ailes courtes, larges et relativement pointues (coupe en biseau). Elles ont l’aspect d’une flamme
vacillante de chandelle en vol plané et de couteau à éplucher les légumes en vol glissé. La queue est très large lorsqu’étalée
pour le vol plané, mais semble étonnamment longue (comme un épervier) lorsqu’elle se referme pour le vol glissé. Elle semble
posséder une grosse tête en proportion du reste du corps. En vol plané, les ailes sont tenues à l’horizontale et 3 ou 4 doigts se
détachent un peu. En vue ventrale, le bord d’attaque est alors rectiligne et le bord de fuite arrondi. Mais en vol glissé, les ailes
sont portées vers l’arrière, le bord d’attaque devient incurvé et le bord de fuite rectiligne, les doigts sont rentrés et le bout de
l’aile est une pointe uniforme. Lorsque l’activité «thermique» est faible et que les oiseaux doivent battre des ailes plus souvent
pour passer d’un système à l’autre, cela se fait à un rythme rapide (mais pas autant que la Buse à épaulettes), ferme, de peu
d’amplitude. Toute la longueur de l’aile est impliquée dans le battement qui s’articule autour de l’épaule.
Le rêve de l’amateur devenu réalité : des Petites Buses planant au-dessus de Veracruz au Mexique, en
octobre. Dans cette immense «kettle» ou «bouilloire», trouver les Urubus à tête rouge devraient s’avérer
facile, au contraire des quelques Buses de Swainson, que l’on mettra plus de temps à repérer.
Groupe 5 : Les éperviers. Les maîtres de l’esquive.
AUTOUR
E femelle 1,18 m (Goéland à bec cerclé, 1,20 m) E mâle : 98 cm (Corneille, 99 cm).
Le «tube volant». L’épervier qui se prend pour une buse : silhouette massive, style culturiste avec de gros «biceps». Il migre en
solitaire, rarement en compagnie d’autres oiseaux de proie. Il plane beaucoup plus qu’il n’utilise le vol ramé, lequel est laborieux
et calme (on pourrait presque compter les battements), suivi d’un vol glissé. Les ailes sont larges dès l’insertion de celles-ci sur
le corps, donnant une allure musclée. La queue aussi est large, même lorsque fermée, elle présente un renflement arrondi à
l’extrémité. Ce qui fait qu’en vue latérale, le bout parait taillé en biseau. Elle semble aussi longue en proportion de l’oiseau, mais
moins que chez l’Épervier de Cooper. En vol plané, qui s’effectue les ailes bien à plat incluant les doigts, on dénote parfois des
caractéristiques de vol déporté (tangage), que l’on ne voit pas chez le Cooper. Si on a la chance de profiter d’une vue frontale à
faible distance, on notera souvent que le dos est bombé. En vol glissé, cet épervier a une allure de faucon, à cause des
poignets qui sont fortement repliés.
ÉPERVIER DE COOPER
E femelle : 93 cm (Canard colvert, 88 cm) E mâle : 72 cm (Grand Pic, 74 cm)
La «croix volante». En vue ventrale, le bord d’attaque des ailes en vol plané est à angle droit avec le long corps tubulaire. Très
longue queue, toutes proportions gardées. Il migre en solitaire et rarement en paires ou en petits groupes, quoiqu’il peut arriver
que des oiseaux qui se suivent en solitaire se retrouvent dans le même système d’air ascendant par des bonnes journées de
migration. Il est d’ailleurs plus dépendant de ces systèmes que l’Épervier brun et lorsque les deux cousins se retrouvent dans la
même bulle, le petit épervier brun se tiendra en plus haute altitude. L’Épervier de Cooper plane presque toujours avec une
position légèrement dihédrale, en parcourant de larges cercles, sans battre des ailes ou alors très rarement (les éperviers bruns
qui plane battent des ailes compulsivement). En vol glissé et en vue ventrale, la tête émerge davantage devant les poignets que
c’est le cas pour l’Épervier brun. Le vol ramé est fait de coups d’ailes lents, toutes ailes rigides, alternés de vols glissés.
ÉPERVIER BRUN
E femelle : 70 cm (Pigeon, 68 cm) E mâle : 52 cm (Pic flamboyant, 51 cm)
La silhouette typique de l’épervier : ailes larges arrondies et longue queue élancée. Bien qu’il migre seul ou en groupe de 2 à 8
individus, le fait qu’il profite certains jours de bonnes conditions climatiques pour poursuivre son voyage provoque des ruées
assez remarquables. Il manifeste régulièrement un comportement agressif envers les autres oiseaux de proie migrateurs. Il
plane les ailes à plat, et en vue ventrale les poignets sont légèrement projetés vers l’avant, le bord d’attaque des ailes est en
angle de 70 degrés avec le corps. La tête, petite, n’émerge pas de la silhouette de l’oiseau, elle semble enfoncée. Cet effet est
accru lors du vol glissé, alors que la main se projette vers l’avant. Il plane en décrivant de courts cercles avec des virages
brusques. On note un battement d’aile énergique et rapide (même nerveux), impossible à compter. Chaque série de battements
suivie d’un court glissé. Le mouvement des ailes semble provenir des extrémités seulement, ce qui donne une impression de
légèreté.
Groupe 6 : Les faucons. Tout droit vers l’horizon.
FAUCON GERFAUT
E femelle : 1,30 m (Corbeau, 1,35 m) E mâle : 1,10 m (Goéland à bec cerclé, 1,20 m)
On dirait un ballon de football avec des ailes. Comme tous les faucons, en vue frontale il plane les ailes à l’horizontale, les
épaules sont fortes, les pointes des ailes très acuminées, avec aucun doigts libres flottants. En vue ventrale, les ailes sont
larges au niveau du bras et de la main, ce qui nous éloigne dans ce cas de l’aspect typique du faucon et nous fait penser plutôt
à l’Autour, bien que les doigts soient moins proéminents. La pointe de l’aile semble «émoussée» et ronde, moins parfaitement
pointue que chez les autres faucons. Le vol ramé est cependant celui d’un faucon : direct, puissant, rapide et avec peu
d’amplitude. Le mouvement provient du bout des ailes. Il utilise surtout le vol glissé en migration et ne plane pas souvent. Il lui
arrive d’effectuer des vols sur place.
L’alimentation chez les faucons : Le succès de chasse dépend largement de l’effet de surprise et celle-ci se base sur la
grande vitesse en vol. Quelques espèces plongent de très haut dans les airs et fondent sur de s proies inconscientes à des
vitesses pouvant atteindre plus de 160 km/h. D’autres espèces, comme le Faucon gerfaut (ci-haut), s’approchent à grande
vitesse de leurs proies (par derrière), au niveau du sol, en se dissimulant jusqu’au dernier moment derrière de petites crêtes,
rochers ou buissons.
FAUCON PÈLERIN
E femelle : 1,16 m (Goéland à bec cerclé, 1,20 m) E mâle : 91 cm (Canard colvert, 88 cm)
Il migre seul à faible altitude, surtout le long des côtes, où il suit les bécasseaux et les anatidés. Rare oiseau de proie à voler
par vents contraires ou peu portants. En vue ventrale, en vol plané ou glissé, sa silhouette est un triangle à large base, avec
des ailes et une queue longues en proportion. En planant, les virages sont larges et lents et parfois on le surprend à utiliser une
position dihédrale pour une aile seulement. En vol ramé, la séquence des battements est très fluide, sans coupure de rythme
apparente entre chacun d’eux.
FAUCON ÉMERILLON
E femelle : 68 cm (Pigeon, 68 cm) E mâle : 54 cm (Pic flamboyant, 51 cm)
Un triangle isocèle en vol. Il migre seul, en moyenne altitude et en vol direct, sans vagabonder. Soudainement, il effectue un
glissé et passe en basse altitude comme un missile comme pour effectuer une reconnaissance du terrain. Il surgit vraiment
sans que l’on ait eu la chance de le voir approcher. Les faucons émerillon planent bien, mais ils le font très rarement. Leurs vols
glissés sont brusques (chez la crécerelle, le glissé est comme au ralenti, flottant) et on les voit perdre de l’altitude promptement.
Il a le vol ramé fluide du pigeon avec emphase sur la poussée de l’aile vers le bas. Ce faucon est le «mauvais garçon» des
rapaces, agressif et pugnace, en plus d’être très expressif vocalement. En migration, il a peu de tolérance pour les autres
rapaces (incluant ceux de sa propre espèce). Les juvéniles, en particulier, harassent les oiseaux qui osent traverser leur espace
immédiat. De vrais caractériels ! Même comportement avec les autres groupes d’oiseaux : alors que les passereaux de taille
moyenne ignorent ou houspillent la Crécerelle, ils fuient les émerillons. Par exemple, l’approche d’un de ceux-ci fera un trou
béant dans une nuée d’hirondelles bicolores.
CRÉCERELLE
E femelle : 61 cm (Pluvier kildir, 61 cm) E mâle : 52 cm (Pic flamboyant, 51 cm)
La «banane volante». Elle migre à basse altitude comme le Faucon pèlerin, seule ou en groupes lâches (surtout à l’automne)
de 2 à 10 individus. Battements d’aile agités et nerveux, la main effectuant un mouvement vers l’arrière. Le vol ramé est léger et
allègre (vagabondant), sans véritable puissance. Il est suivi de vols glissés intermittents plus fréquents que chez les autres
faucons. L’oiseau monte et descend en vol, tandis que le corps se balance aussi latéralement, tel un bouchon de liège flottant
au gré des flots. Puis soudainement il s’arrête pour s’élever et effectuer un assez long vol stationnaire. Bingo ! C’est la marque
de l’espèce !
Finalement, pour une information très complète au sujet de la migration des rapaces, je ne peux que vous suggérer de
consulter Oiseaux de proie du Québec et de l’est du Canada (Harnois et Turgeon), Hawks in flight (Dunne, Sibley & Sutton),
Hawks at a distance et Hawks from every angle (Liguori).
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