
Charles GUEPRATTE - Mémoire de l’École Nationale de la Santé Publique – 2002
Introduction
Depuis une dizaine d’années, l’hôpital est revenu au centre des préoccupations de
l’opinion publique. Quelle autre institution publique a mérité une telle couverture politique ou
médiatique ? Il ne se passe plus un mois sans que l’on évoque les problèmes techniques,
logistiques, administratifs, financiers ou éthiques que rencontrent les hôpitaux. Sous la
pression extérieure, l’hôpital a été contraint de s’ouvrir sur la société en médiatisant ses
erreurs et ses dysfonctionnements, en communiquant ses principales données à la presse,
pour que cette dernière puisse établir des indices de performance et des classements. Au
nom de la sécurité sanitaire et le plus souvent à la demande des juridictions judiciaires et
administratives.
La sécurité sanitaire, dont le concept est apparu au début des années 1990 et qui s’est
imposé avec l’affaire du sang contaminé, a dynamité ses bornes originelles. Dans le système
de santé contemporain, tout concourt à la sécurité sanitaire, et chaque niveau de la chaîne
de décision, qu’il soit ou non placé au contact du malade, peut être mis en cause pour
manquement à cette obligation devenue quasi absolue. La légionellose et les infections
nosocomiales hier, la problématique de la stérilisation aujourd’hui, demain le vieillissement
des bâtiments du patrimoine hospitalier français… L’exigence de sécurité est partout, et se
disperse dans l’ensemble de la réglementation : combien dénombre-t-on de circulaires,
décrets ou directives portant amélioration ou extension de la sécurité sanitaire ? L’inflation
normative est telle que les établissements de santé ont été contraints de différer d’ambitieux
projets de rénovation pour parer aux obligations réglementaires les plus urgentes, au nom du
principe de précaution. Dans une situation de pénurie médicale, paramédicale et budgétaire,
et face à une demande sociale accrue, il est devenu nécessaire de s’orienter vers de
nouveaux axes de progrès. La réorganisation de la structure des hôpitaux et de leurs
services s’impose aujourd’hui comme une piste de travail pouvant mener à des résultats
satisfaisants. L’organisation et la bonne entente entre services sont devenus des éléments
majeurs de la performance hospitalière. Les juges ne s’y sont pas trompés, puisqu’ils
condamnent de plus en plus les établissements dont l’organisation défaillante, gage de non
qualité, est responsable des dysfonctionnements pour lesquels ils sont saisis.
L’activité d’anesthésie réanimation se trouve au cœur de cette problématique. En
vingt ans, cette discipline s’est affranchie de la tutelle chirurgicale et a acquis une
indépendance forte, en même temps que le statut du médecin anesthésiste réanimateur,
doté d’une formation indépendante, s’affirmait. Les exigences de sécurité se sont renforcées