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Action et Recherche Culturelles
Google,
Le géant à double face
Analyse
2013
Google, le géant à double face
Action et Recherche Culturelles - Analyse 2013
1
2013 : plus de 2 milliards d’internautes. Google, leur plus petit dénominateur commun.
En effet, si des milliards d’individus surfent sur la toile, la majorité d’entre eux ont un
repère commun. Plus que Facebook, Amazon, Yahoo! ou encore MSN (Microsoft
Network), c’est Google et ses nombreuses divisions qui constituent le site le plus utilisé
de l’Internet. Google, Gmail, YouTube, Picasa, Blogger, Google Drive, Android, Chrome,
DoubleClick, Motorola Mobility, Zagat : tous ces géants du web appartiennent à
l’entreprise Google. Ce mastodonte des TIC, né en 1998 dans la Silicone Valley, est actif
dans la recherche sur Internet, dans les réseaux sociaux, le clouding, l’hébergement de
photos et de vidéos, les blogs, la téléphonie mobile, et bien entendu, la publicité. La
majorité de ces services sont gratuits, souvent utiles et efficaces.
Mais à défauts d’être payant, comment les personnes travaillant pour ces services sont-
elles rémunérées? Cette gratuité est-elle bien réelle ou masque-t-elle une face cachée
de l’iceberg? Quels sont les coûts indirects de tels services ?
Cette apparente gratuité soulève des questions d’ordre éthique, sur la liberté, la vie
privée et une certaine morale commerciale. Quelles précautions le citoyen internaute
peut-il prendre? Comment tendre vers une utilisation saine de ces outils?
En 2010, Eric Emerson Schmidt, alors PDG de Google, affirmait : « Avec votre
permission, vous nous donnez tant d'informations sur vous, sur vos amis, que nous
pouvons améliorer la qualité de nos recherches. Nous n'avons même pas besoin que
vous écriviez. Nous savons où vous êtes. Nous savons où vous avez été. Nous
pouvons plus ou moins savoir ce que vous pensez »
1
. Cette allocution a le mérite
d’être claire et elle justifie à elle-seule le questionnement citoyen soulevé ci-dessus.
Histoire et évolution
Pour comprendre le fonctionnement de Google, il n’est pas inutile de remonter aux
sources de l’histoire de sa création. Celle-ci débute, en quelque sorte, à l’Université de
Standford, aux Etats-Unis. En 1996, deux étudiants, Larry Page et Sergey Brin,
1
Lors d’un entretien pour le journal américain « The Atlantic » en octobre 2010.
http://www.theatlantic.com/technology/archive/2010/10/googles-ceo-the-laws-are-written-by-lobbyists/63908/ 3ème
vidéo, 16’25’’
Google, le géant à double face
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travaillent sur un projet de bibliothèque digitale pour l’université. Larry Page crée alors
un moteur de recherche nommé BackRub, qui analyse les relations entre les sites web.
A cette époque, Altavista et Yahoo! sont les leaders de la recherche Internet. BackRub
utilise PageRank, dont le système utilise un algorithme qui permet de trouver et de
classer les sites web à partir d’un mot-clé, en fonction des critères de pertinence
2
.
Ceux-ci se basent sur la popularité des pages (nombre de visites, liens de redirection à
partir d’autres sites). Cette logique part d’un postulat arbitraire qui admet que la
pertinence d’un site web, par rapport à une recherche, est proportionnelle à sa
popularité.
Après avoir peaufiné leur moteur, trouvé d’abord 100 000$ et du soutien auprès
d’Andy Bechtolsheim, l'un des fondateurs de Sun Microsystems
3
, puis récolté 1 000
000$ auprès d’amis et de leurs familles, Larry Page et Sergey Brin lancent leur
compagnie, Google Inc., en septembre1998. Leur mission : organiser les informations à
l'échelle mondiale, dans le but de les rendre accessibles et utiles à tous. En février,
alors que le moteur de recherche n’est encore qu’en version beta
4
, il totalise 10 000
requêtes par jour. Un an plus tard, on en compte 500 000 et au mois d’août 1999, 3
000 000. En septembre 1999, la phase de test est terminée. Quelques mois plus tard,
en 2000, Google devient le moteur de recherche le plus utilisé au monde avec 100 000
000 requêtes par jour, soit 1150 recherches par seconde. La machine est lancée et ne
s’est plus arrêtée depuis !
La publicité, la fin ou le moyen ?
En octobre 2000, le géant de Mountain View
5
lance AdWords. AdWords recence tous les
mots-clés introduits par un internaute et fonctionne comme une bibliothèque
d’informations rassemblées à son sujet. Le système oriente la recherche de l’internaute
en fonction des affinités dont il a pu témoigner dans ses recherches précédentes. Le
système cible, à partir des informations recensées, des résultats de recherche ou des
publicités qui pourront intéresser l’internaute. Résultats de recherche et publicités
sont donc mises au même niveau. Ils s’affichent, indistinctement, ensemble.
« Pour utiliser ce service, les annonceurs paient dès qu’un internaute clique sur une
publicité, selon un système d'enchère et de qualité : plus l'annonce sera pertinente
pour l'utilisateur, plus le prix au clic sera bas et l'annonce en évidence. Ceci afin
2
Voir : http://www.scriptol.fr/seo/brevet-google-pagerank.php
3
Société américaine d’informatique ayant lancé le célèbre langage de programmation Java.
4
Beta version : Version non-finie d’un logiciel destinée à être testée pour amener les dernières modifications
avant la sortie officielle
5
Municipalité californienne faisant partie de la Silicon Valley.
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d'inciter les publicitaires à fournir des renseignements pertinents par rapport à la
demande de l'utilisateur. »
6
Ainsi, plus les annonces publicitaires susciteront des clics chez l’internaute plus le profit
pour Google sera grand et le profil de l’internaute déterminé.
En 2003, Google Inc. lance Adsense, sa régie publicitaire. Google va étendre son système
de ciblage de données à d’autres sites qu’au moteur de recherche Google. In fine, des
publicités ciblées figureront aussi sur les sites partenaires de Google
7
.
Ce service est proposé aux éditeurs de sites web, pour afficher dans des bannières des
publicités issues des bases de données AdWords. Ces publicités sont générées par un
algorithme, en fonction du site visité et du profil du visiteur, ce qui permet aux sites
web les hébergeant de recevoir une rémunération de la part de Google. Cette
rémunération est donc indirectement issue des annonceurs.
Les services gratuits de Google tels Gmail, YouTube, Googlemaps et bien d’autres encore,
ne fonctionnent donc qu’au travers du placement de bannières publicitaires et du
prélèvement d’informations
8
d’internautes (contenu de courriels, géolocalisation,
affinités culturelles, habitudes de consommation …) afin d’augmenter les bases de
données Adwords.
En 2012, la somme de ces clics pèse près de 43 milliards de dollars et constitue 87% du
chiffre d’affaires de Google
9
, soit la moitié du marché mondial de la pub en ligne. Il
semble donc clair qu’il ne s’agit pas d’une société de services gratuits, mais bien d’une
entreprise publicitaire. On peut donc inverser l’idée communément admise, en
affirmant que Google n’est pas au service des internautes, mais que ces
derniers sont au service de Google !
6
http://fr.wikipedia.org/wiki/AdWords
7
Pour en savoir plus sur les principaux partenaires de Google, consultez :
http://www.google.com/intl/fr/enterprise/gep/featured.html
8
Selon les dires d’un porte-parole de Google « Gmail - comme la plupart des fournisseurs de webmail -
utilise un scan automatique pour combattre le spam et les virus. Nous utilisons une technologie similaire
pour afficher des publicités qui aident à garder nos services gratuits. C'est de cette façon que Gmail a
toujours fonction".
9
http://lexpansion.lexpress.fr/high-tech/resultats-de-google-vrais-points-forts-et-petites-faiblesses_369782.html
En cette période de crise les budgets des ménages sont malmenés, les pertes
d’emplois atteignent des taux dramatiques, avec une sécurité sociale qui s’effrite, le
tout paupérisant une partie croissante de la population, est-il juste qu’une
entreprise tire profit des comportements numériques des citoyens, tout en
organisant des montages fiscaux qui lui permettent de ne payer que très peu
d’impôts1Ce n’est certes pas la seule entreprise qui développe ce type de
pratiques, mais il est utile de le souligner, puisque c’est notamment grâce aux
mêmes citoyens que Google peut s’enrichir.
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Condition d’utilisation et règles de confidentialité
Lorsqu’un internaute décide de s’inscrire comme utilisateur d’un service Google (Gmail,
YouTube, Google Drive …), il est obligé d’accepter toutes les règles de confidentialité
10
et toutes les conditions d’utilisation
11
. En plus d’être particulièrement longues (environ
18 000 caractères pour les règles de confidentialité et 15 000 pour les conditions
d’utilisation), ce qui peut sembler paradoxal pour des services visant la rapidité et
l’efficacité, ces règles s’avèrent volontairement complexes et peu explicites.
Assurément, ces informations ne sont pas facilement compréhensibles pour un
utilisateur lambda. De plus, certaines notions laissent place à l’interprétation et ne
permettent pas vraiment à l’utilisateur de comprendre comment ses données sont
réellement utilisées par Google et « toutes personnes travaillant avec Google ». Voici ce
que l’on peut notamment lire dans les conditions d’utilisation de Google :
« Certains de nos services vous permettent de soumettre des contenus. Vous
conservez tous vos droits de propriéintellectuelle sur ces contenus. Ce qui est à
vous reste à vous. En soumettant des contenus à nos services, par importation ou par
tout autre moyen, vous accordez à Google (et à toutes personnes travaillant avec
Google) une licence, dans le monde entier, d’utilisation, d’hébergement, de stockage, de
reproduction, de modification, de création d’œuvres dérivées (des traductions, des
adaptations ou d’autres modifications destinées à améliorer le fonctionnement de vos
contenus par le biais de nos services), de communication, de publication, de
représentation publique, d’affichage ou de distribution publique desdits contenus»
12
.
Ici, Google nous affirme que ce qui est à nous reste à nous mais peut aussi être utilisé
par Google ou un tiers travaillant avec le géant de la publicité en ligne. Il est difficile,
pour le simple internaute, de savoir tout ce que cela implique et ce qu’il adviendra de
ses contenus, mais aussi quels sont les contenus concernés et qui sont les « toutes
personnes travaillant avec Google ».
Autre extrait quelque peu tendancieux :
« Si votre Compte Google est géré par un administrateur de domaine (par exemple, s’il
s’agit d’un compte Google Apps), l’administrateur de domaine ainsi que tout sous-
traitant assurant des services d’aide utilisateur pour votre organisation, auront accès
aux données de votre Compte Google (y compris, notamment, votre adresse e-mail).
Votre administrateur de domaine est susceptible de pouvoir :
Afficher les statistiques relatives à votre compte, notamment celles concernant
les applications que vous installez ;
Modifier le mot de passe de votre compte ;
Suspendre ou supprimer l’accès à votre compte ;
Accéder aux données conservées dans votre compte et les conserver ;
10
http://www.google.be/intl/fr/policies/privacy/
11
http://www.google.be/intl/fr/policies/terms/regional.html
12
Idem
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