Chapitre 6 : La politique économique

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Chapitre6:Lapolitiqueéconomique
Comme, nous l’avons vu dans le 2nd chapitre, le marché n’arrive pas toujours à
s’autoréguler. De plus, il existe des situations de déséquilibres durables avec, par
exemple, du chômage involontaire. Dans ces conditions, l’Etat va intervenir dans
l’économieafinderégulerlemarchéet/ouaméliorerlasituationéconomique.L’Etatva
doncutilisersesmoyensàtraversdelapolitiqueéconomique.
I.Lapolitiqueéconomique
1.Définition
Lapolitiqueéconomiquereprésentel’ensembledesinterventionséconomiquesdes
pouvoirspublicsvisantàatteindredesobjectifspermettantd’améliorerlasituation
économiqued’unpays.
2.Lesobjectifsdelapolitiqueéconomique
Ilya,généralement,4objectifsquel’onpeutassigneràlapolitiqueéconomique:
- Lastabilitédesprix(tauxd’inflation)
- Lacroissanceéconomique(croissanceduPIB)
- Favoriserlepleinemploi(tauxdechômage)
- L’équilibredeséchangesextérieurs(balancedespaiements)
NicholasKaldor(1908–1986),économisteanglais,areprésentéces4objectifssousla
formed’uncarré,qu’ilaappelélecarrémagique:
Source:http://www.glossaire-international.com
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L’appellation «carré magique» provient de l’idée qu’il est difficile d’obtenir un carré
dans la mesure où la poursuite de l’un de ces 4 objectifs se fait souvent au détriment
d’aumoinsl’undes3autres.
Ainsi,danslecasd’untauxinflationimportant,lespouvoirspublicsvontavoirtendance
àagirsurlestauxdirecteurs125 pouragirsurlademande.Ilsvontdoncavoirtendanceà
l’augmenter. La hausse de ces taux va renchérir le coût de l’accès à l’emprunt (le
montant des intérêts dus sera plus élevé). Cela va donc déprimer la consommation et
l’investissementparemprunt.Deplus,desagentséconomiquesvont,peut-être,préférer
épargnerplutôtqued’investir.Lademandeadresséeauxentreprisesvadoncdiminuer.
Faceàcela,lesentreprisesvontavoirtendanceànepasaugmenterleursprix,voireàles
baisser pour écouler leur production. Cette politique va donc permettre aux pouvoirs
publicsdeluttercontrelahaussedesprix.
Cependant, si la demande adressée aux entreprises baisse, on peut craindre une
destruction d’emplois et donc une hausse du chômage. Cela va donc à l’encontre de
l’objectifdepleinemploi.
On peut, aussi, remarquer qu’il y a un autre effet: le fait d’avoir augmenté les taux
d’intérêtsdirecteurspeutinciterdesdétenteursdecapitauxendevisesétrangèresàles
échanger en monnaie nationale afin de les placer à un meilleur rendement sur le
territoirenational.Cesdétenteursdecapitauxvontdoncallersurlemarchédeschanges
etoffrirleursdevisesétrangèresetdemanderdelamonnaienationale.Laconséquence
estquelamonnaiedupaysvas’apprécier.Celaauradeuxconséquences:
- l‘appréciation de la monnaie nationale permet de rendre moins chers les
produitsimportés126.Onseradoncincitéàimporterdavantage;
- lesexportateursdupaysverrontleprixdeleursproduitsrenchérisàl’étranger
puisqueconvertisendevisesétrangères.
Autotal,lesecondeffetd’unehaussedestauxdirecteursdelaBanquecentrale,estde
détériorerlabalancecommercialedupays.
3.Lapolitiqueconjoncturelleversuslapolitiquestructurelle
Il existe deux types de politiques selon que les pouvoirs publics s’intéressent au court
termeouaumoyen-longterme:
- lapolitiqueconjoncturelledontlebutestd’agirsurlecourtterme,souventpour
soutenirl’activitééconomiqueenpériodedecroissanceatone127ou,aucontraire,
de freiner l’activité économique en période de surchauffe économique128 . La
125 Les taux directeurs de la Banque centrale influencent à la fois le taux d’intérêt des
emprunts contractés par les agents économiques mais aussi le taux d’intérêt de leurs
placements.
126 Si,1€vaut1$etensupposantquej’achèteetimporteunstyloaméricainà2$,ilme
coutera 2€. Cependant, si l’euro prend de la valeur, consécutivement à la hausse des
taux d’intérêts directeurs de la Banque centrale européenne, de sorte que 1€ vaut 2$,
alorslestylomecouteramaintenant1€etnonplus2€.
127 Onparledepolitiquederelance.
128 Onparledepolitiquederigueur.
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-
politique conjoncturelle vise à rétablir les grands équilibres, autrement dit, la
politique conjoncturelle est plutôt contracyclique. Les pouvoirs publics
disposent,ainsi,de:
o Lapolitiquebudgétaire
o Lapolitiquemonétaire.
la politique structurelle dont le but est d’agir sur les structures de l’économie.
Elle vise donc le moyen-long terme. Son but est d’accroitre la croissance
potentielle129du pays. En France, on parle souvent des rigidités du marché du
travail qui empêcheraient les entreprises d’embaucher par peur de ne plus
pouvoir licencier en cas de retournement de la conjoncture. Aussi, certains
économistesappellentàsupprimercesrigidités:modificationducodedutravail
enpermettantauxemployeursetsyndicauxdenégocierentreeuxlesrèglesau
sein de leur entreprise, assouplissement des règles en cas de licenciements
surtout dans le cas des contrats à durée indéterminées… Au total la politique
structurellepeutagirauniveaude:
o L’emploi
o Lasanté
o Lafiscalité
o L’égalitéhomme-femme
o Laconcurrence130 o Lesecteuragricole
o Lesecteurindustriel
o Lesretraites131 II.Lapolitiquebudgétaire
L’Etat, par son budget, va agir sur l’économie en agissant sur ses recettes et ses
dépenses.
a.Politiquederelance
Encasdecroissancefaible,l’Etatpeutdéciderd’agirenaugmentantsesdépenseset/ou
endiminuantsesrecettes.
Lahaussedesesdépenses(publiques)et/oulabaissedesesrecettes(impôtsettaxes)
devraientrelancerl’économieparuneffetmultiplicateur,décritparKeynes.
i.Lemultiplicateurdesdépensespubliques
Sinousreprenonslafonctiondeconsommationkeynésienne:
129 Siunpaysatropderigidités,lesagentséconomiquesn’entreprendrontpas.
130 La récente loi visant à développer les liaisons par autocars en France (loi Macron)
viseàsupprimerlemonopoledelaSNCFsurcertainstrajetsetàrendremoinscherle
transportenFrance.
131 Reculdel’âgedelaretraiteafinderendreviablelesystèmederépartitionpourles
générationsprésentesetfutures.
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C=c×Yd+C0
Ajoutons,àcettefonction,lesdépensesd’investissementsdesentreprises(I0),ainsique
lesdépensesdel’Etat(G0)etconsidéronsquelerevenudisponibledesménages(Yd)est
égalaurevenu(Y)dupaysmoinslesimpôts(T0)132;àsavoir
Yd=Y-T0
alorslademandeglobaleestégaleàl’ensembledesdemandesdesagents:
D=C+I0+G0
Soit:
D=c×(Y–T0)+C0+I0+G0
SionnoteOl’offrealorsl’offreestaussiégaleaurevenudupays:
O=Y
Al’équilibre,l’offreestégaleàlademandesoit:
O=D
Ilvientque:
Y=c×(Y–T0)+C0+I0+G0
SoitenisolantY:
!
Y=!!! C! + I! + G! − c×T! Supposonsquel’EtataugmentesesdépensespubliquesàG! *alorslenouveaurevenude
lanationestégalà:
!
Y*=!!! C! + I! + G!∗ − c×T! En faisant la différence entre le nouveau revenu et l’ancien revenu et en notant cette
différenceΔY(ΔY=Y*-Y),onobtient:
!
ΔY=!!! G!∗ − G! 132 Enconsidérantcesdépensesd’investissementsetlesimpôtscommeautonomes.
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Soit:
!
ΔY=!!! Δ G! EnnotantΔ G! = G!∗ − G! .
!!
LemultiplicateurKeynésienquel’onnote!!estégalicià:
ΔY
1
=
ΔG
1−𝑐
!
Etantdonnéquecestcomprisentre0et1,lerapport!!! estsupérieurà1.Ainsisil’Etat
augmentesesdépenses,lerevenuaugmenteradeplusde1.
Prenonsunexempleavecunepropensionmarginaleàconsommerlerevenude0,8133.
!
est égale à 5; autrement dit, le revenu de la nation augmentera 5 fois plus que
!!!
l’augmentationdesdépensesdel’Etat134.
ii.Leslimitesdumultiplicateurkeynésien
Leslimitesdumultiplicateurkeynésiensontnombreuses:
- danslemodèleci-dessus,nousavonsraisonnéencircuitfermé;àsavoirquele
paysn’apasderelationsaveclerestedumonde.Danslaréalité,unepolitiquede
relancerisquederelancerlespaysvoisinsparlecanaldesimportations135;
- dans ce même modèle, nous avons considéré que la propension marginale à
consommerlerevenuétaitde0,8.Or,silesagentséconomiquesdécidentplutôt
d’épargner ce supplément de revenu parce qu’ils anticipent une hausse future
d’impôts136, l’effet de la hausse des dépenses publiques sur le revenu sera très
faible. On prend souvent le cas du Japon dans les années 90; la politique de
133 Unindividuconsomme80%dusupplémentdesonrevenu.
134 Uneautremanièrededécrirelemultiplicateurkeynésiendesdépensespubliquesest
de considérer qu’une dépense publique supplémentaire va générer un revenu
supplémentairepourunindividu.Cedernierconsommeraplus,ildépenseraunepartie
de son revenu (80%, soit c = 0,8), le reste étant épargné. Cela fera un supplément de
revenu pour quelqu’un d’autre qui consommera à son tour une partie de ce revenu
supplémentaire.... Cela fera un revenu pour un autre agent qui… Si le supplément de
revenu était de 10, on aura : ΔY = 10 + 8 + 6,4 + 5,12 ….= 10 + 0,8*10+
0,8*(0,8*10)+0,8*(0,8*(0,8*10))+...Autotal,cettesuitetendvers5,doncΔY=50.
135 CasdelarelanceenFranceen1981.
136 RobertLucas(1937-),économisteaméricain,appartenantàl’écoledesanticipations
rationnellesconsidèrequetouteaugmentationdudéficitbudgétaireconduitlesagents
économiquesàanticiperunehaussefutured’impôtrendant,decefait,inefficacetoute
politiquederelance.
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-
-
relance se traduisait souvent par une épargne supplémentaire d’où un déficit
publicplusimportantcarlesrentréesfiscalesn’augmentaientpas;
ledéficitpublic.EnEurope,lespaysdelazoneeurosesontengagésàavoirdes
déficits publics inférieurs à 3%137. Cela limite les possibilités de politiques de
relanced’autantpluslorsquecespaysontdéjàdesdéficitssupérieursà3%.Une
succession de déficits budgétaires peut conduire à rendre la dette publique138
insoutenable139;
l’effet d’éviction des dépenses publiques que nous avons vu dans le chapitre
consacréàlaredistribution.Unehaussedesdépensespubliquespeutconduireà
l’éviction de la dépense privée par le canal du financement de l’emprunt par
émissiond’obligations.
iii.Lerôledestabilisateurautomatiquedesdépensespubliques
Quand on compare les pays, comme la France, dont les dépenses publiques sont
importantes et les pays, comme les Etats-Unis, dont les dépenses publiques sont plus
faibles140,onconstatequel’évolutionduPIBestmoinschaotiquechezlespremiersque
chez les seconds. Cela tient au fait que les dépenses publiques jouent le rôle
d’amortisseurs.
En période de récession, les dépenses sociales, comme le versement des allocations
chômage, vont permettre aux individus de continuer de consommer. Cela atténue les
effets d’une perte d’emplois alors que dans les pays comme les Etats- Unis, la perte
d’emploi se traduit souvent par l’entrée dans la pauvreté; les impacts négatifs sur la
croissancesontdoncplusfortsauxEtats-Unis.Enpériodedecroissanceéconomique,le
paiementdesimpôtsconduiral’économieàmoinscroitre.
Ils’ensuitquedanslespaysàfortesdépensespubliques,cesdernièresjouentunrôlede
stabilisateurdel’activitééconomique:
- chuteduPIBatténuéeenpériodederécession;
- augmentationduPIBatténuéeenpériodedecroissance.
III.Lapolitiquemonétaire
La politique monétaire vise à contrôler la quantité de monnaie en circulation et sa
vitessedecréation.Eneffet,unecréationmonétairetropimportanterisquededevenir
inflationniste.
137 TraitédeMaastricht.
138 La dette publique représente la somme des engagements financiers encore dus par
un Etat, par les collectivités publiques et par les organismes directement rattachés à
l'Etat. Elle correspond à l’ensemble des déficits publics annuels passés auxquels on
soustraitlesremboursementsréalisésauxprêteurs.
139 LaGrèceestunparfaitexemple.
140 RapportéesauPIB.
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EnEurope,lapolitiquemonétaireestassuréeparlaBanquecentraleeuropéenne(BCE)
qui est une institution indépendante des Etats européens afin de ne pas subir de
pressionspolitiques.
L’objectifuniquedelaBCEestlastabilitédesprixavecunobjectifdetauxd’inflationde
2%paran.
Pour mener à bien sa politique, les Banques centrales disposent de plusieurs
instruments.
a.Lestauxd’intérêtdirecteurs
Letauxdirecteurestletauxd’intérêtaccordéauxbanquesparlaBanquecentralepour
leursopérationsderefinancement.Cetauxreprésenteleprixpayéparlesbanquespour
acheter de la monnaie émise par la BCE; cela dans le but de satisfaire les besoins des
agentséconomiquesetderéglerlessoldesinterbancaires141.
Commenousl’avonsvuaudébutdecechapitre,unehaussedestauxd’intérêtrenchérit
le coût des emprunts. Cela a donc un impact sur l’activité économique même si le but
affichéparcettepolitiquedehausseestdeluttercontrel’inflation.
a.Lesopérationsd’openmarket
Lapolitiqued’openmarketconsistepourlaBanquecentraleàintervenirsurlemarché
monétaire afin d’influencer la valeur de la monnaie comparativement aux devises
étrangères.Ainsi,silaBanquecentraleeuropéenneachètedesdollarsenémettantdes
euros, cela aura pour conséquence de faire baisser la valeur de l’euro par rapport au
dollar.Cettemesurepeutavoirpourobjectifdefavoriserlesexportationseuropéennes
lorsquel’inflationn’estplusunrisque142.
c.Lesréservesobligatoires
Les réserves obligatoires correspondent aux sommes d’argent que les banques
commerciales doivent déposer sur leur compte auprès de la Banque centrale. Ce
montantcorrespondàunpourcentagedescréditsqu’ellesontaccordésàleursclients.Si
la Banque centrale décide d’augmenter ce pourcentage, les banques devront déposer
plusdeliquiditésurleurcompte.Or,cecompten’estpasrémunéré.Siellesnedisposent
pasdesfondsnécessaires,ellesdevrontlesemprunter.Celaauncoût.Ellespourraient
décider de moins prêter pour éviter de recourir à l’emprunt. Si les crédits accordés à
l’économieralentissentoudiminuent,celaréduit,alors,lacréationmonétaireetdoncles
risquesdedérapagesinflationnistes.
141 Pourplusdeprécisions,seréférerauchapitresurlamonnaie.
142 Au début de 2015, le taux d’inflation de la zone euro était proche de 0%. Aussi, la
Banque centrale européenne est intervenue pour faire baisser la valeur de l’euro en
achetant des titres d’Etats détenue par les sociétés financières et en émettant en
contrepartiedelamonnaie.
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d.L’encadrementducrédit
Dans le passé, en France, la Banque de France fixait pour chaque banque un montant
maximaldecréditsànepasdépasseràdistribueràleursclients;toujoursdanslebutde
limiterlespressionsinflationnistes.
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