Médias et entreprise
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des goûts du public en puisant dans une offre pléthorique sans devoir acquérir les droits des programmes
retenus. En perdant la gestion de leurs espaces publicitaires, ils réduisent d’autant le périmètre
économique de leur entreprise et abandonnent toute ambition de maîtrise de leur développement.
Les enjeux financiers ne pèsent pas de la même façon sur les médias en fonction de leur statut.
Pour les médias publics, la ressource publique récurrente et planifiée permet de travailler à moyen et long
termes, dans l’idéal sous la forme de contrats d’objectifs avec l’Etat, alors que le recours systématique à
des moyens exceptionnels pour pallier un sous financement structurel donne aux gouvernants un réel
pouvoir d’ingérence. Les ressources du marché (publicité, partenariats) doivent être envisagées dans le
contexte global du mandat et des grands équilibres du marché : acceptabilité, pratiques des concurrents,
autres options (abonnements), etc.
Pour les médias privés, le financement par de riches mécènes peut poser des problèmes éthiques. La
suspicion, même non fondée peut ternir l’image du média aux yeux du public. Cette pression se combine
avec un contexte concurrentiel de plus en plus agressif dans des pays où le paysage médiatique global
s’ouvre rapidement.
L’expertise internationale peut accompagner la réflexion stratégique des entreprises médias qui sont
amenées à rester attentives et actives pour optimiser leurs ressources existantes ainsi que pour travailler
au développement de nouvelles recettes.
En télévision, et dans une moindre mesure en radio, cela passe par exemple par :
• la valorisation des grilles (et une connaissance objective de la concurrence) pour proposer aux
annonceurs des espaces plus rémunérateurs que les longs tunnels publicitaires qui font fuir le public
• l’élaboration des contenus autour de partenariats structurants (financement d’une case, d’une
émission, d’un concept)
• le renforcement de l’image d’un média par la couverture (directe ou éditorialisée) de grandes
compétitions sportives mondiales (Coupe du monde de football, Jeux Olympiques, etc.) ou locales
(nationales et régionales).
Les médias de proximité, parfois encore très informels, sont le maillage le plus fin pour toucher les
populations mais leur économie est par nature fragile. Pour travailler à leur pérennisation, il semble
préférable de les ancrer dans leur environnement à travers des financements construits avec des
partenaires locaux qui partagent la même proximité, plutôt que de les rendre dépendants des seuls
financements de bailleurs internationaux ou d’ONG qui les utilisent ponctuellement comme supports de
communication. De tels effets d’aubaine doivent être saisis pour investir et structurer le média mais ne
peuvent remplacer les financements durables sous peine de condamner un tissu d’acteurs à la fin d’une
campagne ou d’un programme.
De façon générale, le financement des médias doit être une préoccupation structurante au même titre
que la ligne éditoriale. Comme pour toutes les entreprises, une bonne idée ne suffit pas pour faire vivre
une entreprise. L’expertise internationale ne doit pas imposer un modèle de financement qui fonctionne
ailleurs mais aider les médias du Sud à inventer leur modèle économique dans un environnement qui leur
est propre.
3/ Les médias, démultiplicateurs puissants de l’économie de leur pays
La problématique du financement doit être analysée dans le contexte plus global du marché du (ou des)
pays où l’entreprise opère. Les médias sont en effet, selon le sens même de leur étymologie latine, des
intermédiaires entre des acteurs de la société et leur public. Plus l’économie nationale est dynamique,
plus les médias peuvent élargir leur assiette de financement. Loin d’être seulement des acteurs passifs
qui profitent de leur environnement, les médias contribuent au développement de leur pays en permettant
à plusieurs secteurs de démultiplier leur impact économique grâce à leur exposition médiatique.
La presse écrite, dans un premier temps, puis la radio, la télévision et aujourd’hui les médias en ligne ont
tous contribué à renforcer l’impact des acteurs économiques qui fournissent des contenus attendus par le
(série ou films américains) ou bon marché (séries brésiliennes ou mexicaines). Après négociation avec des annonceurs, les
sociétés de bartering proposent aux chaînes de programmer certaines de leurs meilleures cases sans risque ni bénéfice financier.