La Dénomination
les dictionnaires contemporains
3
. Une mise à jour est parfois réalisée, mais de
façon partielle, quand les anciens termes d’adjectif possessif,démonstratif,indéfini et
numéral subsistent tout en étant subsumés par le nouveau terme de déterminant
4
.
Dans un dictionnaire de la langue générale, les noms de catégories lexicales
ne devraient pas être rapportés à un domaine de spécialité particulier (par ex.
« LINGUISTIQUE » ou « GRAMMAIRE ») car leur cas illustre de façon particulière-
ment nette le bien-fondé de la thèse de Z. Harris (1988 : 34 ; 2002 : 8-9) sur le fait
que la métalangue de la linguistique fait partie de la langue
5
. De fait, dans un
dictionnaire comme le Nouveau Petit Robert 2009, les entrées verbe,adjectif,pronom,
adverbe,préposition,interjection ne sont pas rapportées au domaine technique de
la linguistique. Il est naturel qu’il en soit autrement pour l’entrée conjonction. On
est en revanche surpris de voir que l’entrée nom du Nouveau Petit Robert 2009
(qui, sur ce point comme sur la plupart des autres points, reprend l’essentiel de
ce qui figure dans le Grand Robert 1980) spécifie, à côté des emplois non tech-
niques I (nom propre) et II (nom commun), un emploi III rattaché au domaine
GRAMMAIRE, avec deux sous-domaines : III.1 COURANT et III.2 LINGUISTIQUE.
Il est frappant de constater que la définition de l’emploi de spécialité (« mot
lexical qui désigne un individu, une classe ») est à peu près identique à celles
des emplois non techniques (« mot ou groupe de mots servant à désigner un
individu » et « mot servant désigner les êtres, les choses qui appartiennent à une
même catégorie logique »), ce qui témoigne du caractère redondant de l’emploi
III.1. Mais citons maintenant le passage consacré à l’emploi III.2 :
LING. Catégorie utilisée par les grammairiens latins et classiques et reprise par cer-
tains grammairiens modernes, comprenant le nom au sens 1 (nom substantif), l’adjectif
et le pronom (nom adjectif) et parfois certaines formes verbales (noms verbaux : infinitifs,
participes)
Il s’agit effectivement d’emplois techniques du mot nom ; leur caractère
désuet est avoué, et on peut regretter le caractère confus de cette rubrique
du point de vue historique
6
. Tout compte fait, la rubrique III.2 n’est pas plus
3.
Par exemple, le Petit Larousse Illustré 2011 définit l’adjectif, en reprenant d’ailleurs presque mot pour mot
la formulation de Littré, comme étant un « mot variable qui qualifie ou détermine le substantif auquel il est
joint », et spécifie : « adjectif qualificatif, démonstratif, possessif ».
4.
Ainsi, le Dictionnaire Maxipoche 2011 écrit sous l’entrée Déterminant que « les articles, les adjectifs
possessifs, etc. sont des déterminants ». Pour le Nouveau Petit Robert 1996, « le déterminant est un constituant
du groupe nominal (article, adjectif, complément du nom) » et le Robert Micro 2006 donne comme exemples
de déterminants les « articles, adjectifs possessifs, etc. ».
5.
Les langues de spécialité sont considérées par Harris comme étant des sublanguages obéissant, selon
les termes de Swiggers (1999), « à un ensemble de conventions s’inscrivant à l’intérieur des conventions
distributionnelles générales valables pour la langue (ordinaire) qui l’englobe (langue superordonnée) ».
6.
Certes, comme nous l’avons déjà signalé, ce que nous appelons adjectif s’est appelé depuis l’Antiquité
jusqu’à l’époque de Littré nom adjectif (par opposition au nom substantif ) ; mais le pronom n’a généralement
pas été classé dans la catégorie des noms adjectifs. Toutefois, ce que nous appelons déterminants s’est appelé
nom adjectif déterminatif (cf. supra début du § 1.1) et le caractère pronominal des déterminants déictiques ou
anaphoriques avait été déjà relevé par les grammairiens de l’âge classique, ce qui pourrait expliquer que Le
Petit Robert place, dans une généralisation abusive, les pronoms dans la catégorie des noms adjectifs.
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“LF_174” (Col. : RevueLangueFrançaise) — 2012/6/17 — 23:42 — page 80 — #80
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