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Le bouddhisme est-il une religion ?
Sources:
André BAREAU - © Encyclopædia Universalis 2004, tous droits réservés
Le Larousse des religions (Direction Henri Tincq) Eric Rommeluère
Encyclopédie Wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Bouddha
Philippe Cornu, Dictionnaire encyclopédique du bouddhisme, Seuil, 2001
Sur le net : http://www.buddhaline.net
Avertissement : ces textes n’ont pas la prétention d’expliquer le bouddhisme
dans sa totalité et dans la profondeur de son Essence. Il s’agit d’une simple
approche pour ceux qui souhaitent tenter d’en connaître quelques rudiments.
Pour un abord plus complet voir les sources utilisées. Mais il est évident que
c’est sa pratique qui peut, seule, permettre d’en parler…
PLAN
Le bouddhisme est-il une religion ? ........................................ 1
Les origines............................................................................ 1
Historique............................................................................... 2
Une explication du monde et de la condition humaine. ........... 4
Le Dharma ............................................................................. 5
Le Buddha.............................................................................. 5
La Douleur.............................................................................. 8
La Voie (Marga) qui mène ............................................... 9
à la cessation de la douleur ............................................. 9
La communauté...................................................................... 9
Le bodhisattva...................................................................... 10
Les origines
Le respect que les fidèles laïcs éprouvent envers les moines est mêlé, conformément aux
vieilles croyances indiennes, d'admiration et d'une certaine crainte, dues aux pouvoirs
surhumains attribués aux ascètes et résultant des austérités qu'ils s'infligent, comme de leur
pratique des méditations et des exercices analogues. À l'égard du Bienheureux, ce respect
devient de la vénération, sa sainteté étant jugée très supérieure à celle de ses disciples. Il
s'y ajoute le vif regret laissé par sa disparition, la tristesse de ne plus pouvoir profiter de ses
conseils ni de la protection que ses pouvoirs prodigieux devaient assurer à ses fidèles.
Certes, en « s'éteignant complètement », le Buddha a rompu définitivement toutes relations
avec ce monde et les êtres qui y vivent ; il ne peut donc recevoir ni même connaître les
marques de vénération qui lui sont adressées, ni non plus remercier dûment leurs auteurs.
Celles-ci ne sont pourtant pas vaines, car ce sont toutes de bonnes actions, corporelles,
vocales et aussi mentales, dont la maturation produira tôt ou tard des fruits d'autant plus
agréables et importants que celui qui en est l'objet est un homme d'une sainteté
extraordinaire. Quand le souvenir du Buddha réel se sera estompé dans les brumes du
passé et que la légende aura considérablement magnifié sa personne, cette vénération se
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justifiera davantage encore et deviendra même un véritable culte : dès la fin du IVe siècle
avant J.-C., semble-t-il, les disciples élèveront leur maître au rang suprême, au-dessus des
dieux et des hommes.
Faute de pouvoir être dirigé vers sa personne vivante, présente, le culte rendu au
Bienheureux prend d'abord pour objets concrets les restes de son corps, ou supposés tels,
puis les « tumulus » (stupa) censés contenir ces reliques et les endroits où se seraient
produits les principaux événements de sa vie. Ainsi va-t-on se recueillir devant les arbres ou
les bouquets d'arbres à l'ombre desquels le Buddha serait né, aurait atteint l'Éveil, aurait
prononcé son premier sermon, se serait enfin éteint complètement. De là proviennent deux
caractéristiques majeures de la religion bouddhique : le culte des reliques et les pèlerinages
aux lieux saints. Un peu plus tard, la vénération des fidèles s'adressera, en outre, à des
symboles représentant le Bienheureux, qu'on n'ose encore figurer sous forme humaine pour
des raisons fort obscures : empreintes de pieds, trône, figuier de l'Éveil, tumulus. C'est
seulement vers le début de l'ère chrétienne que l'on commencera à sculpter des statues et
des bas-reliefs du Buddha, dans la région de l'actuelle Kaboul et sous l'influence de la
civilisation hellénistique alors encore vivante en ces lieux.
Quel que soit l'objet représentant ou rappelant à l'esprit la personne du Bienheureux reliques, tumulus, arbre, symbole ou statue -, le culte est partout le même dans ses grandes
lignes. Il comprend d'abord des gestes et attitudes de vénération : salut des deux mains
jointes élevées à la hauteur du front incliné, prosternation, circumambulation en gardant à sa
droite l'objet vénéré. À cela s'ajoutent des offrandes variées : fleurs, notamment de lotus
divers, encens, onguents et poudres parfumés, parasols, bannières, lampes allumées,
parfois aussi boissons et aliments végétaux, le Buddha ayant proscrit tous les sacrifices
d'êtres vivants. Les chants de louanges au Bienheureux, la récitation de poèmes édifiants et
de textes liturgiques exprimant les résolutions et les souhaits des fidèles, l'exécution d'airs
de musique et parfois aussi de danses complètent les manifestations du culte bouddhique.
Celui-ci s'est inspiré très largement du culte rendu aux divinités brahmaniques, lequel copiait
lui-même celui dont les rois étaient l'objet dans l'Inde ancienne.
Historique
NÉ DANS L'INDE il y a vingt-cinq siècles, le bouddhisme s'est répandu peu à peu sur toute
la partie la plus vaste et la plus peuplée de l'Asie, de l'Afghanistan à l'Indonésie et de Ceylan
au Japon. Il y a prospéré pendant fort longtemps et il est encore florissant dans ces deux
derniers pays ainsi qu'en Thaïlande, en Birmanie et en Corée du Sud, comme il l'était
naguère au Tibet, au Cambodge, au Laos et au Vietnam.
Son influence fut et est demeurée profonde sur les hommes et les civilisations de ce
continent, malgré les différences qui les distinguent et qui se manifestent notamment à
travers les arts et les littératures des divers pays où ce mouvement s'est implanté.
Près de 400 millions de personnes au monde se reconnaissent aujourd'hui comme
bouddhistes. La plupart d'entre elles vivent dans les pays asiatiques, entre l'Himalaya, l'Asie
du Sud-Est et l'Extrême-Orient, mais depuis quelques décennies, il est également présent
en Occident. Serait-ce suffisant pour y voir l'une des grandes religions de l'humanité? S'agitil bien, au fond, d'une religion? La question, loin d'être anodine, a longtemps préoccupé les
Occidentaux, qui découvraient dans cette tradition une vision du monde qui possédait certes
des aspects religieux (l'exubérance des rites bouddhiques et les communautés monastiques
ont été relevées par les premiers explorateurs) et qui pourtant ne se référait à aucun Dieu
créateur. Encore plus mystérieuse, son approche de la condition humaine, qui souligne une
« insatisfaction» propre à l'existence, ne pouvait être qu'un pessimisme et une vision nihiliste
de la vie bien éloignés de toute forme de religiosité authentique.
Quelle est la vraie nature du bouddhisme ? Est-ce une religion ou bien une simple
philosophie vécue ? En fait, il est à la fois l'une et l'autre, les parts respectives de ces deux
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composantes variant beaucoup selon les fidèles - moines et laïcs - et étant, de plus,
intimement mêlées dans l'esprit de chacun d'eux. Contrairement à ce que l'on pense
généralement, l'aspect religieux n'est pas apparu tardivement et comme une sorte de
corruption du bouddhisme originel, qui aurait été une pure philosophie. L'étude des
inscriptions de l'empereur Asoka et des textes canoniques prouve que cet aspect religieux
existait dès la fin du IVe siècle avant J.-C. et qu'il n'est pas constitué d'éléments entièrement
étrangers à la doctrine prêchée par le Bienheureux, mais qu'il est l'un des effets les plus
anciens et les plus importants de l'adaptation de celle-ci à la mentalité et à la sensibilité des
fidèles. Le culte bouddhique et tout ce qui s'y rattache sont d'ailleurs inspirés par l'esprit le
plus authentique de cette doctrine. Ils sont, en outre, la source de tous les arts bouddhiques
et d'une grande partie de la littérature du bouddhisme, ce qui est une raison très suffisante
pour ne pas les négliger.
Souvent incompris, le bouddhisme a longtemps passé aux yeux des missionnaires ou des
philosophes pour une aberration. Une bizarrerie d'autant plus étrange que des centaines de
millions de personnes l'ont pratiqué avec ferveur pendant plus de deux millénaires.
Aujourd'hui, le rapport s'est largement inversé: son approche de la spiritualité, qui se
dispense d'un Dieu, attire désormais les sympathies. Et pourtant, le bouddhisme demeure
encore largement mystérieux et méconnu. Il s'implante désormais en Occident, et la
question de son statut resurgit une nouvelle fois.
Dans nombre d'ouvrages, dans les médias, cette tradition asiatique est souvent présentée
comme une philosophie, un art de vivre personnel où toute dimension religieuse paraît
effacée. Les aspects dévotionnels et religieux si visibles en Orient ne seraient, pense-t-on,
que des formes populaires et dégénérées d'un « pur }) bouddhisme. Parfois même, toute
religiosité se voit déniée.
L'aspect philosophique ne saurait être dédaigné pour autant, car il est essentiel. Grâce
surtout au goût très développé des anciens Indiens pour les spéculations abstraites, à
l'entraînement intellectuel de leurs élites et à l'absence de toute autorité définissant et
maintenant une orthodoxie dans le bouddhisme, celui-ci a produit une philosophie dont la
richesse, la diversité et l'audace méritent l'admiration. L'ampleur des vues, la profondeur de
la pensée, qui ne connaît pas de limites à sa liberté, la virtuosité et la rigueur des
raisonnements n'ont pourtant pas d'autre but que d'amener à constater la réalité avec une
froide lucidité, à se détacher du monde trompeur et à avancer résolument sur la « Voie de la
Délivrance ».
Qu'en est-il exactement? Dans sa récente analyse de la mondialisation du bouddhisme, le
sociologue Raphaël Liogier propose une définition élargie du concept de religion. Par
religion, celui-ci entend un système cohérent d'explication du monde et de la condition
humaine orientée (il s'agit de la dimension téléologique ou sotériologique des religions:
l'homme possède une destinée ou peut recevoir la promesse d'un salut). Cet ensemble
explicatif se double d'un système de valeurs qui s'exprime dans le vécu propre de chaque
individu, mais également sous des formes sociales et institutionnelles. Cette approche
élargie fait du bouddhisme une religion à part entière, souligne-t-il.
Comme celle de toutes les religions, l'étude sérieuse du bouddhisme exige une excellente
connaissance des peuples qui s'y sont convertis, de leur civilisation, de leur histoire, des
pays qu'ils habitent et des langues qu'ils parlent ou ont parlées jadis et dans lesquelles ont
été rédigés les innombrables ouvrages de la littérature bouddhique. Quoique l'étude du
bouddhisme utilise des méthodes analogues, dans leur ensemble, à celles qu'appliquent les
historiens des autres religions, la grande diversité de ces peuples, de tout ce qui les
concerne et des formes prises par le bouddhisme rend cette étude particulièrement difficile.
Par exemple, il n'est pas rare qu'on doive comparer avec minutie un texte sanskrit ou pali
avec les traductions chinoises, tibétaines, japonaises, voire koutchéennes, qui en ont été
faites, et avec des versions en ces diverses langues de textes parallèles au premier. Les
grandes différences qui séparent, en outre, le bouddhisme de la spiritualité occidentale
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rendent souvent nécessaire d'acquérir sur place, et non pas seulement dans les livres, une
connaissance directe des façons dont il est compris, senti et vécu par ses fidèles.
Une explication du monde et de la condition humaine.
Le bouddhisme propose une analyse des mécanismes qui conditionnent à la fois l'individu et
le monde tel qu'il lui apparaît. Cette compréhension est présentée comme complète et
définitive. Celui que l'on appelle le Bouddha «< l'Éveillé" en sanskrit) est un simple Indien qui
a sans doute vécu au V' siècle avant J.-c. dans le Nord de l'Inde. Il n'a jamais revendiqué
une quelconque révélation divine. Et pourtant, il ne s'agit pas de n'importe quel homme: par
un long processus qui s'est étendu sur un nombre incalculable de vies (la transmigration de
vie en vie est l'un des fondements de la pensée indienne), il a achevé, en cette vie, la
compréhension totale et définitive du dharma, les lois mystérieuses et impersonnelles qui
régissent l'univers. Ce savoir en fait un être singulier doué de sciences mystiques: il a
notamment vu une à une toutes ses existences passées et il comprend intimement
l'existence de chaque être humain. Ce savoir ne relève pas d'un exercice intellectuel. Il est le
fruit d'une expérience intérieure unique. Le premier sermon que le Bouddha délivre à
Sarnath, près de Bénarès, après son expérience d'éveil, ne se limite pas à la seule
explication de ces lois. Il propose un chemin de salvation, celui qui permet de se libérer des
illusions qui sont au cœur des conditionnements humains. Il enseigne des méthodes et des
vertus afin que l'homme puisse se délivrer des liens qui l'entraînent et l'enchaînent tout au
long de ses vies successives. I.’explication se double d'une promesse, car, dit le Bouddha,
chacun peut se libérer.
Un système de valeurs personnelles et communautaires La « sur-humanité» du Bouddha le
distingue de l'homme ordinaire qui, lui, vit dans l'égarement. La relation au Bouddha ne peut
dès lors qu'être empreinte de confiance, de foi et de dévotion. Pour chaque bouddhiste, il
s'agira, sinon de refaite pour lui-même le parcours du Bouddha, du moins de comprendre et
d'incarner les vérités qu'il a annoncées. Une institution s'avère nécessaire. Celle-ci garantit
l'authenticité de la tradition et permet la continuité avec le message originel. Ce sera une
forme originale de communauté édifiée par le Bouddha lui-même de son vivant: la sangha,
composé d'une double communauté, l'une de fidèles laïques, hommes et femmes, l'autre de
moines et de moniales. L’engagement personnel se vit au sein d'un engagement
communautaire.
Le Bouddha, « l'Éveillé », le dharma, l'enseignement, la sangha, la communauté : chaque
école se définira par rapport à cette triade fondamentale. Qu'est-ce qu'un bouddha et quelle
est la nature de son éveil ? Quelles sont les lois qui régissent l'univers ? Quelles sont les formes de la communauté religieuse? Au fil des siècles, les réponses aboutiront à des
traditions parfois fort différentes les unes des autres. Elles révèrent pourtant toutes ces
«trois joyaux» (le terme traditionnel pour désigner le Bouddha, le dharma, et la sangha), ces
trois piliers du bouddhisme, qui sont sans cesse pensés et médités, hier comme aujourd'hui.
La vocation missionnaire du bouddhisme remonte à ses origines, la « Voie de la
Délivrance » découverte par le Buddha devant être montrée à tous les hommes, quels que
soient leur race, leur sexe, leur groupe social. Cette propagation des enseignements du
Bienheureux se fit presque toujours avec beaucoup de tolérance et de souplesse, en
s'adaptant aux croyances, aux sentiments et aux coutumes des gens auxquels elle
s'adressait, dans toute la mesure où cela n'était pas incompatible avec les principes, moraux
et autres, du bouddhisme. Cette adaptation était largement facilitée par l'absence d'une
autorité supérieure qui, comme la papauté, définirait et imposerait une orthodoxie. C'est
pourquoi il existe tant de diversité entre les multiples formes prises par le bouddhisme au
cours de sa longue histoire dans les pays, si dissemblables à tant d'égards, où il a prospéré.
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Le Dharma
Faute d'équivalents dans nos langues, plusieurs termes du vocabulaire bouddhique résistent
à une traduction satisfaisante. Souvent les traducteurs préfèrent conserver le terme original
indien. On pense à karma (la forme au singulier, karman, serait plus correcte), nirvâna,
presque passés dans le langage courant. Celui de dharma est peut-être l'un des plus
difficiles à rendre, d'autant qu'il possède une multiplicité de sens dans la littérature
bouddhique. Le terme de dharma est pourtant l'un des maîtres mots de cette tradition. Pour
tout Indien d'hier ou d'aujourd'hui, le dharma (d'une racine dhr « soutenir ),) désigne l'ordre
du monde au sens le plus large, qu'il soit social ou cosmique. Le bouddhisme reprend le
terme dans plusieurs acceptions. Déjà, selon l'expression consacrée, le Bouddha enseigne
le dharma, que l'on pourrait traduire ici par « enseignement, loi, doctrine, méthode ». Le
dharma s'entend au sens d'une vérité: le Bouddha a découvert les lois et les principes qui
régissent les processus existentiels et mentaux. Les ayant pénétrés, il propose une méthode
de libération intérieure.
Ce dharma possède donc une double dimension à la fois explicative - c'est un enseignement
- et normative - c'est une méthode. Et s'il faut trouver un équivalent du terme de « religion »,
c'est bien celui de dharma qui viendra à l'esprit de tout bouddhiste. Mais le mot a également
d'autres significations. L’un d'eux est celui d'« éléments» au sens où, dans l'analyse
bouddhique, chaque phénomène est réductible à des éléments fondamentaux nommés les
dharmas. Dans cette acception, le terme est parfois traduit par « chose» ou par
« existence ».
En mythologie le Dharma est personnifié. Il est dit avoir une démarche subtile. On appelle
svadharma le devoir propre de chacun, qui est en fait la disposition naturelle dans laquelle il
se trouve et qu'il doit suivre. Par exemple c'est le devoir propre du guerrier de combattre,
comme le proclame Krsna dans la Bhagavad Gita. La notion est très importante, car elle a
gardé une grande influence dans beaucoup de milieux professionnels traditionnels.
L'honneur de l'individu et celui de son groupe sont attachés à la fidélité à leur devoir propre.
En cas de défaillance, ils peuvent perdre tout droit à leur rang et à leur métier.
En outre, les noms de dharma en sanskrit et dhamma en pâli ont été consacrés comme
désignations de la « loi » bouddhique, dite aussi saddharma, « bonne loi » ou « vraie loi »,
exprimée par l'enseignement du Buddha et consistant dans l'exposé de la vraie disposition
des choses d'où découlent les principes du salut. À côté du Dharma, les textes bouddhiques
connaissent les dharma qui sont les dispositions particulières des choses, c'est-à-dire les
phénomènes, mais aussi parfois les dispositions psychologiques, phénomènes mentaux en
lesquels consistent d'ailleurs toutes les réalités pour les philosophes bouddhistes professant
que le monde n'est que représentations.
Dans les édits célèbres en prâkrit du roi Asoka (IIIe siècle av. J.-C.), le dhamma est le Bon
Ordre dans la société et la morale et non pas seulement le Bon Ordre bouddhique, bien
qu'Asoka ait été converti au bouddhisme. La victoire du Bon Ordre prime toute autre dans
l'esprit du roi. Un édit bilingue (gréco-araméen) d'Asoka trouvé en Afghanistan traduit
dhamma en grec par piété et en araméen par vérité. Le roi faisait donc appel pour assurer le
Bon Ordre aux notions révérées dans les milieux auxquels il s'adressait et non à une forme
confessionnelle particulière. Dans l'esprit d'Asoka, le dhamma reste d'ailleurs lié à l'ordre
cosmique. C'est selon les données de l'astronomie brahmanique de son temps qu'il a calculé
la durée d'une pérégrination religieuse bouddhique qu'il a effectuée.
Le Buddha
Les écritures bouddhistes qui évoquent la vie et le caractère de Bouddha, parlent de :
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Son éducation achevée et sa formation dans les domaines appropriés à un guerrier
aristocrate, tels que les arts martiaux, la gestion des domaines agricoles, et la littérature,
mais également une compréhension profonde des idées religieuses et philosophiques de sa
culture et de son temps. Siddhârta Gautama était un homme sportif, compétent en arts
martiaux tels que la lutte et le tir à l'arc, qui pouvait parcourir des kilomètres et camper dans
la nature sauvage
Son enseignant idéal, qui trouve toujours la métaphore appropriée, et qui adapte à la
perfection son message à son auditoire, quel qu'il soit
Son courage et sa sérénité en toutes circonstances, aussi bien lors d'une discussion
religieuse, que face à un prince parricide, ou à un meurtrier. Il fait cependant preuve
d'exaspération lorsque des moines déforment ses enseignements
Sa modération dans tous les appétits corporels. Il connaîtra le célibat de l'âge de vingt-neuf
ans jusqu'à sa mort. Il sera également indifférent à la faim et aux rigueurs du climat.
On donne le titre de Buddha, celui qui s'est « éveillé » à la Vérité, à un sage de l'Inde
antique qui enseigna une méthode destinée à découvrir la réalité cachée derrière les
apparences et à se libérer définitivement des illusions, des passions et de la douleur
inhérente à toute forme d'existence.
Le titre de Bouddha (en sanskrit buddha, « éveillé », participe passé passif de racine
sanskrite budh-, « s'éveiller »), désigne une personne ayant réalisé l'éveil, ayant atteint le
nirvana, l'autre rive, notamment de par sa sagesse.
Plusieurs types de Bouddhas sont distingués et plusieurs Bouddhas sont décrits ; le plus
connu demeure le fondateur du bouddhisme, Siddharta Gautama, considéré comme un
Bouddha pur et parfait.
Toutes les écoles s'accordent à distinguer trois types de Bouddhas.
Est śrāvaka-buddha (sanskrit ; pāli sāvaka-buddha), auditeur, celui qui a atteint le
nirvana grâce à l'enseignement d'un Bouddha : voir quatre êtres nobles.
Est prateykabuddha (sanskrit, pāli pacekka-buddha), Bouddha solitaire, celui qui a
trouvé la voie par lui-même mais qui n'a pas les capacités de libérer d'autres êtres.
Est samyaksambuddha (sanskrit, pāli sammāmsam-buddha ) , Bouddha pur et
parfait, celui qui a atteint l'éveil en trouvant la voie par lui-même, et qui a les
capacités d'enseigner le dharma. Atteindre cet éveil parfait demande de suivre la
carrière de bodhisattva.
Le terme de Bouddha désigne le plus souvent celui qui a atteint samyaksambodhi, l'éveil
« pur et parfait ». Il s'agit du statut du « Bouddha historique », Sakyamuni, mais d'autres
samyaksambuddha sont reconnus et vénérés.
Pour lui, comme pour presque tous les Indiens, chaque mort est suivie d'une renaissance,
mais il croit, en outre, que celle-ci est causée par le désir et déterminée par la valeur morale
des actes précédemment accomplis
Celui qui veut briser la chaîne sans fin des existences successives et goûter alors la
béatitude de l'« Extinction » (nirvana) doit observer rigoureusement les règles de la morale et
pratiquer assidûment diverses méthodes psychiques permettant, les unes de connaître
clairement la Vérité, les autres d'épuiser progressivement les passions et de développer la
sérénité.
Une telle discipline ne peut être suivie que par des ascètes ayant renoncé à tous les plaisirs
ou biens de ce monde et menant en communauté une vie austère. Celle-ci est réglée dans
ses moindres détails par un code monastique dont les multiples articles ont été fixés par le
Buddha pour assurer le bon ordre de la communauté des moines et permettre à chacun de
ceux-ci d'avancer correctement sur la longue et rude Voie de la Délivrance.
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Bien qu'elle ait été niée autrefois, l'historicité du Buddha ne l'est plus aujourd'hui. On
s'accorde, en outre, sur divers points importants de sa biographie, au moins provisoirement ;
certains indianistes proposent toutefois d'abaisser d'un siècle les dates acceptées par les
autres. Les écritures bouddhistes concernant sa vie mélangent métaphysique et légende.
Certains épisodes, tel celui où il apaise un éléphant furieux que son cousin Devadatta aurait
lâché sur lui pour le tuer et le remplacer à la tête de la communauté des moines, peuvent
être acceptables pour le lecteur matérialiste ; d'autres, comme ses conversations avec les
dieux ou sa téléportation instantanée au Sri Lanka, ne le sont pas.
Le futur Buddha naquit vers le milieu du VIe siècle avant l'ère chrétienne dans la petite tribu
des Sakya, dont la principale ville était Kapilavastu, où il passa toute sa jeunesse. Des restes
importants de cette bourgade ont été retrouvés récemment, juste au sud de la frontière indonépalaise, à 225 km en plein nord de Bénarès. Sa famille était de caste guerrière (ksatriya)
et appartenait à la lignée des Gautama. Peu après avoir atteint l'âge adulte, il quitta son
foyer et devint ascète errant, sans doute à la suite d'un deuil cruellement ressenti. Pendant
plusieurs années, il chercha la solution du problème de la douleur et de la mort, qui hantait
son esprit, solution qu'il découvrit soudain, devenant ainsi un « éveillé » (buddha). Quelque
temps plus tard, dans un bois de la banlieue nord de Bénarès (aujourd'hui Sarnath), il
prononça son premier sermon devant cinq ascètes dont il fit ses premiers disciples, fondant
ainsi sa « communauté monastique » (sangha). Il passa le reste de son existence à parcourir
le bassin moyen du Gange en prêchant sa « doctrine » (dharma), opérant de nombreuses
conversions et organisant sa communauté de moines.
Bouddha, sentant sa mort venir, demandera à son disciple Ananda de lui préparer un lit
entre deux arbres sala (Shorea robusta). Il décédera ainsi à Kusinara (Kusinagar en Inde,
dans l'actuel Uttar Pradesh) à l'âge de quatre-vingt ans. Le forgeron Chunda lui offrira son
dernier repas, un sūkaramaddavam. La traduction correcte de ce terme est inconnue.
Sukara signifie porc et maddavam quelque chose comme délice. Ce repas pourrait être à
l'origine de sa mort. Le végétarisme est un idéal pour les bouddhistes. Les moines et les
nonnes sont encouragés à accepter toutes les offres de nourriture qui leur sont faites, à
moins qu'ils ne suspectent qu'un animal a été spécialement tué pour les alimenter.
Il mourut fort âgé, à Kusinagara (aujourd'hui Kasia, à 175 km au nord-ouest de Patna), où il
avait fait halte au cours d'un long voyage à pied, vers 480 avant J.-C. Il entra alors dans
l'insondable et définitive paix de l'« Extinction complète » (parinirvana).
La datation de cet événement fondateur est controversée. On s'accorde de nos jours à le
dater en - 368, soit cent ans avant le sacre d'Asoka (estimation proche de la chronologie
courte de Sanghabhadra conservée par les Japonais, qui donne - 383), plutôt qu'en - 486
(selon la chronologie longue corrigée de la tradition cinghalaise, la plus répandue, qui fait
naître le Bouddha en - 566) ou qu'en - 543/- 544 (selon la chronologie longue en vigueur en
Birmanie
Les derniers mots du Bouddha seront : "L'impermanence est la loi universelle. Travaillez à
votre propre salut".
Dipankara est l'un des nombreux bouddhas du passé. C'est durant son ère que le futur
Siddhartha Gautama prononça le vœu de devenir bouddha dans le futur ; Dipankara lui
assura qu'il le serait. Leur rencontre est un thème iconographique souvent traité dans le
bouddhisme d'Asie centrale.
Bhaisajyaguru est un autre bouddha du passé dont l'aide est sollicitée pour lutter contre les
maladies et les calamités. Il est parfois appelé bouddha médecin.
Maitreya est parfois appelé le bouddha du futur : tant le mahayana que le hinayana le
considèrent comme le prochain Bouddha. La prophétie de Maitreya décrit la venue du futur
bouddha. Il naîtra dans une famille brahmane, alors que Siddhartha Gautama était de la
caste militaire et fonctionnaire kshatrya.
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Amitābha ou Amida (japonais) est un bouddha ignoré du courant hinayana. Il règne sur le
« paradis occidental de la Terre pure ». La récitation de son nom est une pratique importante
de l'école dite de la Terre Pure dont il est la déité principale ; certaines branches considèrent
même que cet exercice suffit à donner accès à son paradis. Il a aussi sa place dans le
bouddhisme vajrayana comme l'un des cinq bouddhas de méditation
Akshobhya est l'un des cinq bouddhas de sagesse du vajrayana, productions de l'adibuddha
représentant les aspects de la conscience de l’illumination (dhyani). Il est placé par
convention à l’Est, à l’opposé d’Amitabha. Sa couleur est le bleu et sa monture l'éléphant. Sa
parèdre (shakti) est Locana . Comme les autres bouddhas de dhyani, il a plusieurs
émanations (formes).
Vairocana ou Maha Vairocana "Grand soleil" ou "Grande lumière" (sanscrit), Daïnitchi Nyoraï
en japonais, Dari Rulai en chinois, Namnang en tibétain, est le bouddha central du groupe
des cinq bouddhas de méditation du bouddhisme tibétain et du bouddhisme Shingon ; dans
ce dernier courant, il est l'adibouddha primordial. Il joue aussi un rôle important dans les
écoles mahayana chinoises et japonaises Tiantai-Tendaï et Huayan-Kegon où il est le
dharmakaya.
Habituellement considéré comme un bodhisattva, Samantabhadra est l'adibouddha
primordial du courant nyingmapa du bouddhisme tibétain.
Vajradhara est l'adibouddha primordial dans de nombreuses traditions du bouddhisme
tibétain.
La Douleur
Tout est douleur : la naissance, la vieillesse, la maladie, la mort, le chagrin, les tourments,
l'union avec ce que l'on déteste, la séparation d'avec ce que l'on aime, le fait de ne pas
obtenir ce que l'on désire. Nul être n'échappe à la douleur, même pas les innombrables
dieux, dont l'existence pleine de bonheur et extrêmement longue aura, elle aussi, une fin.
La douleur a pour origine la « soif », c'est-à-dire le désir, qui s'attache au plaisir et
accompagne toute existence ; elle mène à renaître pour goûter encore des voluptés
trompeuses. Cette soif est elle-même produite par un enchaînement de causes dont la
première est l'ignorance, plus précisément l'ignorance de cette réalité que le Buddha a
découverte et qu'il révèle à ses disciples.
La soif et l'ignorance engendrent les trois « racines du mal », qui sont la convoitise, la haine
et l'erreur, d'où naissent à leur tour les vices, les passions et les opinions fausses. Tous
ceux-ci poussent l'être à agir et à se laisser ainsi entraîner par le mécanisme de la rétribution
des actes. Tout « acte » (karman), bon ou mauvais, corporel, vocal ou seulement mental, s'il
résulte d'une décision prise en pleine connaissance de cause, produit de lui-même,
automatiquement et inexorablement, un « fruit » (phala) qui « mûrit » peu à peu et retombe
tôt ou tard sur son auteur sous la forme d'une récompense ou d'un châtiment correspondant
à cet acte en nature et en importance. Cette « maturation » (vipaka) de l'acte est plus ou
moins longue, mais, comme sa durée dépasse souvent celle d'une vie humaine, elle oblige
l'auteur à renaître pour recevoir sa rétribution.
La cessation de la douleur, c'est la cessation de la soif, donc celle des trois racines du mal,
convoitise, haine et erreur, leur « extinction » (nirvana) totale, leur complet épuisement. Elle
est atteinte ici-bas par les saints bouddhiques du degré le plus élevé, et à plus forte raison
par le Buddha lui-même, qui continuent à vivre dans un état de sérénité imperturbable,
définitivement à l'abri de la douleur, de la crainte, du doute. Lorsqu'ils meurent, ils ne
renaissent plus nulle part et personne ne peut définir l'état de béatitude éternelle qu'ils
atteignent au moment de leur « extinction complète ».
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La Voie (Marga) qui mène
à la cessation de la douleur
La Voie de la Délivrance est la « Sainte Voie aux huit membres » : opinion correcte, intention
correcte, parole correcte, activité corporelle correcte, moyens d'existence corrects, effort
correct, attention correcte et concentration mentale correcte. Chacun de ces « membres »
doit être visé au moyen de diverses méthodes, dont la première est une bonne conduite
morale consistant dans l'abstention rigoureuse de toute mauvaise action, à commencer par
le meurtre, le vol, la luxure, le mensonge et la consommation des boissons enivrantes.
Les autres méthodes visent à vaincre l'ignorance par l'examen approfondi des réalités et à
supprimer les passions par l'apaisement de l'esprit. Elles comprennent toutes sortes
d'exercices psychiques dont les principaux appartiennent au type des « méditations »
(dhyana) et qui doivent être pratiqués longuement chaque jour. En concentrant la pensée sur
certaines idées ou images, et en l'y fixant, on parvient peu à peu à transformer l'esprit, à se
convaincre de la vérité des différents articles de la doctrine, à se débarrasser des illusions,
des opinions fausses et des vains raisonnements, à développer les vertus salutaires, à faire
disparaître les mauvaises habitudes nées des passions, à déraciner celles-ci et à goûter
enfin une parfaite sérénité, au-delà du plaisir et de la douleur, de la joie et de la tristesse, en
demeurant complètement indifférent aux vicissitudes de ce monde. Bien que parfois
empiriques et même empruntés aux ascètes indiens adeptes d'un pré-yoga, ces exercices
ne sont pas pour autant irrationnels et inefficaces. Ils s'apparentent aux exercices spirituels
des religieux chrétiens et à certaines méthodes de la psychiatrie moderne.
Les vrais disciples du Buddha doivent donc, comme leur maître, quitter leur foyer pour
mener la vie austère d'ascète errant, de moine « mendiant » (bhiksu), et se plier aux
nombreuses règles fixées par le Bienheureux. Ainsi leur progression sur la Voie de la
Délivrance s'effectuera dans les meilleures conditions.
La communauté
Le Bienheureux proscrit les austérités inutiles, tortures et mutilations que s'infligent certains
ascètes indiens, mais il impose à ses disciples une existence fort rude. Leurs cheveux et leur
barbe entièrement rasés, leurs vêtements faits de haillons ramassés dans les ordures ou les
charniers, teints en ocre jaune et cousus ensemble, les moines mendient le peu de
nourriture dont ils ont besoin, ne prennent qu'un seul repas par jour, avant midi, et dorment
au pied des arbres ou dans des cavernes. Ils doivent voyager sans cesse, à pied, d'un
village à un autre, pendant les trois quarts de l'année, pour répandre la doctrine salvatrice du
Buddha. Ils ne doivent pas omettre pour autant de se livrer chaque jour, durant de longues
heures et fort avant dans la nuit, en des endroits retirés et calmes, aux exercices psychiques
qui ont pour but de les conduire à la Délivrance.
À l'origine, il n'existe aucun culte, le Buddha et ses saints disciples recevant seulement les
hommages et les offrandes que l'usage oblige à présenter à toutes les personnes
vénérables.
Les moindres détails de l'existence des moines, jusqu'aux dimensions des vêtements et des
huttes, la façon de manger et de marcher, sont réglés avec précision par le Bienheureux.
Tous les manquements, même les plus infimes, sont punis selon leur gravité après une
instruction et un jugement conformes à une procédure bien définie, qui pèse soigneusement
la responsabilité de l'accusé.
Ce qui est certain, c'est qu'en dehors des prières adressées au bouddha lui-même, plus ou
moins divinisé dans la suite des temps, ou aux bodhisattvas dans le Grand Véhicule,
l'exercice orant principal du bouddhisme est la méditation, qui n'est nullement méditation sur
les œuvres ou les attributs d'une divinité, mais réalisation du vide intérieur, prélude à
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l'illumination (dans le zen, par exemple), ou concentration de l'esprit pour obtenir la
suppression de la souffrance.
Les moines ne pouvant pratiquer aucune activité productrice de biens matériels ni louer leurs
services pour accomplir un travail profane, leur subsistance dépend entièrement de la bonne
volonté des « fidèles laïcs » (upasaka). Ces derniers doivent observer les principales règles
morales enseignées par le Bienheureux et donner régulièrement aux religieux bouddhiques
la nourriture et les quelques objets dont ceux-ci ont besoin.
Le bodhisattva
Le terme sanskrit bodhisattva désigne des êtres (sattva), humains ou divins, qui ont atteint
l'état d'éveil (bodhi). Ils devraient donc porter logiquement le nom de buddha (« éveillé ») et
être à jamais libérés des contingences existentielles. Le bouddhisme cependant,
spécialement sous sa forme du « Grand Chemin » (Mahayana), enseigne que certains
buddhas suspendent, par compassion pour leurs semblables, leur entrée dans le nirvana et
veillent sur les hommes à la façon des anges gardiens. Ces « êtres d'éveil » sont donc, si
l'on peut dire, des « buddhas en sursis » dont l'action bienfaisante se fait sentir dans le
monde spirituel. À l'inverse, le bouddhisme du « Petit Chemin » (Hinayana, ou Theravada)
rejette la notion de bodhisattva et professe que le sage (arhant) qui est parvenu à l'éveil
devient automatiquement un buddha.
Cette controverse a fait penser que le Mahayana avait altéré la doctrine proprement
bouddhique en y introduisant des éléments hindous : les bodhisattvas ne jouent-ils pas en
effet un rôle comparable à celui des dieux brahmaniques ou de leur avatars ? On observera
cependant que le canon en pali, langue dans laquelle sont rédigés les textes les plus
importants du Hinayana, n'ignore pas le concept de bodhisattva. Quoi qu'il en soit, il est
certain que celui-ci n'a cessé de s'enrichir dans le bouddhisme du Mahayana et qu'il a pris
une grande extension dans les formes tibétaines et chinoises, donc aussi japonaises, de ce
mouvement.
Le bouddhisme tantrique enfin est allé jusqu'à doter ces personnages d'une shakti (sakti)
c'est-à-dire d'une « puissance » personnifiée sous la forme d'une femme avec laquelle le
bodhisattva s'unit. À ce stade de développement, le bouddhisme ressemble effectivement
beaucoup au brahmanisme et il fut souvent « récupéré » par celui-ci ; ce fut le cas, par
exemple, au Bengale et en Assam, où les bouddhistes se fondirent dans la masse hindoue à
partir du Xe siècle.
Parmi les plus importants bodhisattvas, qui firent l'objet d'un culte constant dans le
bouddhisme du Nord (Mahayana), on peut citer Amitabha (« Lumière immortelle »),
Avalokitesvara (« le Seigneur qui surveille »), Vairocana (« Celui qui diffuse la lumière »),
Mañjusri (« le Sage »). Les fidèles leur adressent des prières et attendent d'eux des grâces
précises : ainsi, Mañjusri développe l'intelligence et donne la connaissance, Amitabha sauve
de l'enfer. Enfin, les bouddhistes du Mahayana, semblables en cela aux hindous, attendent
la venue d'un dernier bodhisattva ; de même que Kalkin viendra, selon la tradition
brahmanique, accomplir un tri et séparer les justes des méchants à la fin du cycle cosmique,
le bodhisattva Maitreya descendra du Ciel, où il attend son heure, pour sauver ceux qui
méritent de l'être.
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