âmes, il passe à côté de cet “élan de réconciliation” auquel le Saint Père appelle “tous les catholiques”.
A quelques détails près, on pourrait croire que ce second texte a été écrit dans les années 1980 à l'époque où la célébration de la liturgie traditionnelle n'était
concédée qu'à des conditions strictes et nombreuses, à l'époque où le Pape n'avait pas encore rappelé qu'elle n'avait jamais été interdite et qu'elle était l'une des
deux formes de l'unique rite romain. Cette approche anachronique de la question liturgique est symptomatique d'un clergé qui ne veut pas de la paix liturgique
proposée par le Saint Père et qui souhaite conserver le régime de l'apartheid liturgique avec son lot de restrictions et d'humiliations.
3)La différence de perspective est frappante entre les deux auteurs alors que leur propos est le même: expliquer l'arrivée (timide car, dans les deux cas, il ne
s'agit que d'une messe au mieux mensuelle) de la forme extraordinaire dans une paroisse. Tandis que l'un affirme un droit et expose les modalités d'application
qui lui semblent les plus adaptées, l'autre concède ce qu'il considère comme un privilège et l'assortit donc des restrictions d'usage.
–Le premier prend a priori les demandeurs pour des catholiques comme les autres. Il explique que “les conditions (reconnaissance de la valeur de la forme
ordinaire, sens de l’Église, volonté de communion)” étant réunies “pour recevoir cette demande comme légitime”, décision a été prise de célébrer chaque
dernier dimanche du mois, “avec l’accord de [l'évêque] et sous la responsabilité [du] curé-doyen”. Une communication simple et rassurante puisqu'on comprend
que les détails ont été réglés pour le bien de tous: pour tenir compte “du contexte paroissial et notamment de la diminution importante du nombre de prêtres
en activité”, “deux prêtres assureront ce service en alternance”.
–Le second soupçonne a priori les demandeurs d’être de dangereux «révisionnistes». Il commence par expliquer qu'il “ne saurait être question de la
constitution d’un groupe particulariste se situant en opposition ou même en marge de la communauté, avec une catéchèse ou d’autres services à part” et qu'il
“ne saurait non plus être question de remise en cause des apports du Concile, même sous l’aspect particulier de la réforme liturgique”. Et d’énumérer six points
qui semblent plus des conditions suspensives que des modalités d'application et qui portent tous en eux une menace sourde: la messe n'aura lieu que “quelques
dimanches dans l'année” ; pas de prêtre remplaçant autorisé ; l'éventuel successeur de l'actuel curé ne sera pas tenu de continuer. Bref, le curé en question se
fait législateur odieux (c’est un terme canonique technique qui vise les dispositions restrictives pénales), réduisant la portée d’une législation rien moins que
pontificale. On disait jadis en plaisantant que tout curé est « pape dans sa paroisse » ; poursuivant la plaisanterie l'on pourrait dire de ce curé qu’il est un "
super-pape ", presque un gourou… Avec en prime une vision manichéenne de la paroisse avec " les bons fidèles " à qui l'on ne demande aucune profession de foi ni
n'impose de conditions puisqu'ils sont chez eux et les " mauvais fidèles " – les dhimmis serait on tenté de dire – pour lesquels on empile les conditions, de qui l'on
attend des professions de foi conciliaire et que l'on traite comme des sous-paroissiens tout juste tolérés mais dont on semble espérer qu’ils finiront bien par se
décourager de vouloir passer la porte de l’église.
4)Au sein du peuple de Dieu “s'expriment légitimement des sensibilités différentes qui méritent de faire l'objet d'une égale sollicitude pastorale”: ces paroles
du pape aux évêques de France en visite ad limina le 21septembre dernier concernent évidemment aussi les curés comme nous le confirme, hélas, l'exemple qui
nous intéresse aujourd'hui. Subsistent en effet en 2012, des prêtres pour lesquels le degré de charité pastorale est semblable au degré de chaleur des radiateurs à
thermostat (réglés à peine au-dessus du “hors gel”), et pour lesquels, si toutes les sensibilités sont égales, certaines, comme on dit, sont tout de même moins
égales que les autres.
Mépris délibéré de tout ce qui est traditionnel? Déformation (malformation?) idéologique de type: hors de "l'esprit" VaticanII, point de salut? Lequel adage est
beaucoup plus dictatorial que celui qu’il a rendu périmé: hors de l’Église, point de salut.
Heureusement, cette déformation est souvent liée à une génération de prêtres: celle qui est entrée au séminaire pendant ou juste après le Concile. Or, si elle
est aujourd'hui encore majoritaire dans le clergé des diocèses, elle approche inexorablement de l’âge de la retraite, et il est notoire que les générations qui la
suivent n'ont pas ses œillères. Ces générations montantes, très réduites en nombre hélas!, sont l'espoir du peuple Summorum Pontificum resté dans les paroisses
ou les ayant quittées et qui demande simplement que leurs curés de paroisses les accueillent et les aiment. Un pasteur qui aime ses brebis, est-ce trop
demander?
Sans en dire plus de l’un et de l’autre, précisons que le premier texte, fidèle aux directives de BenoîtXVI, est d'un prêtre né après le concile, tandis que le
second est d'un prêtre qui approche de ses 70ans. Beaucoup estiment qu’il faut encore attendre dix ans pour que la mentalité des paroisses et des pasteurs de
France ait radicalement changé. Nous pensons, pour notre part, que cinq ans suffiront.