85
Cancers gynécologiques pelviens
© 2013, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
4
CHAPITRE 4
Hélène Sancho-Garnier
Épidémiologie
descancers
gynécologiques : utérus,
ovaire, vulveet vagin
Dans le monde, environ 2 millions de cancers
gynécologiques apparaissent chaque année, ce qui
représente presque 50 % des cancers féminins. Il
s'agit dans plus d'un million de cas de cancers du
sein, dans 500 000 cas des cancers du col de l'uté-
rus, dans 200 000 cas des cancers du corps de
l'utérus et pour les 200 000 derniers d'autres can-
cers gynécologiques (ovaires, vulve, vagin). Ces
cancers donnent lieu à 850 000 décès, soit 30 %
des décès par cancer chez les femmes, dont plus de
400 000 sont dus aux cancers du sein, 273 000 aux
cancers du col utérin, 50 000 à ceux du corps de
l'utérus et 125 000 aux autres cancers gynécolo-
giques. Ce panorama varie avec le niveau écono-
mique des différents pays, tant en incidence, en
raison de variations dans les facteurs étiologiques,
qu'en mortalité, en raison des différences d'accès
aux soins. Dans les pays à niveau économique
élevé, on retrouve 64 % des décès mondiaux par
cancers du sein et 69 % de ceux par cancers du
corps utérin du fait de leur fréquence dans ces
pays ; pour les autres cancers gynécologiques, la
part de la mortalité mondiale due à ces cancers est
de 48 % et seulement de 7 % pour les cancers du
col de l'utérus dont l'incidence, dans ces pays, est
basse [1]. Ainsi, le 2
e
cancer le plus fréquent chez la
femme est observé dans 90 % des cas dans les pays
à niveau de développement faible où la plupart des
femmes n'ont aucun accès à une prise en charge
préventive par le dépistage, voire à un diagnostic
précoce permettant un traitement curatif.
En Europe même, les cancers du col de l'utérus
présentent des disparités géographiques avec des
taux 1,4 fois plus élevés en Europe de l'Est par rap-
port au reste du continent. Les cancers du corps
de l'utérus ont des taux proches partout ; en
revanche, pour les cancers du sein et des ovaires,
les divergences existent aussi avec des incidences
les plus élevées en Europe du Nord et de l'Ouest,
presque moitié plus basses en Europe de l'Est, et
intermédiaires en Europe du Sud. La mortalité
pour ces diverses localisations suit globalement la
même répartition.
Les taux français métropolitains d'incidence et de
mortalité sont très proches de ceux de l'Europe de
l'Ouest pour le col de l'utérus ; ils sont un peu plus
élevés pour les cancers du sein, et un peu plus bas
pour les cancers du corps utérin et des ovaires,
comme illustré figure4.1 [2].
État du problème en France
métropolitaine
Fréquence
Les cancers gynécologiques (sein, utérus, ovaire,
vagin et vulve) représentent en 2005, en France,
61 % des nouveaux cas de cancers féminins et
29 % de la mortalité des cancers de la femme
(figure4.2).
0002039110.INDD 85 10/26/2013 10:52:51 AM
Partie II. Épidémiologie et prévention
86
Les cancers du sein sont, et de loin, les plus fré-
quents avec, en projection 2009, de l'ordre de
52 000 nouveaux cas et 12 000 décès ; suivent
ensuite, pour l'incidence, les cancers du corps uté-
rin (6 300 cas et 1 880 décès) ; les cancers de
l'ovaire (4 440 cas et 3 120 décès) occupent la
3e place pour l'incidence mais la deuxième pour
les décès et, en 4e position, on trouve les cancers
du col de l'utérus (2 780 cas et 970 décès) [3]. Les
cancers du vagin et de la vulve sont très rares avec
une incidence de l'ordre de 600 à 700 cas par an
(2à 4/100 000) et 300 décès (1,8/100 000) [4].
Le tableau4.1 récapitule l'ensemble des données
de France métropolitaine, estimé en 2005 et par
projection en 2009, et sous forme de nombre de
cas et de taux standardisés sur la population mon-
diale pour permettre la comparaison entre tous
les pays.
partition par âge
La figure4.3 montre que ce sont les cancers du col
de l'utérus qui apparaissent le plus tôt dans la vie
avec un pic vers 4044 ans et une petite remontée,
notée récemment, vers 70 ans.
Le pic des cancers du corps utérin se situe vers
70ans et celui des cancers de l'ovaire et de la vulve
encore un peu plus tard, vers 75–79 ans. Ainsi,
entre 25 et 45 ans, les cancers du col se situent au
2
e
rang en fréquence, après les cancers du sein
dont l'incidence maximale se situe vers 65 ans.
Répartition géographique
La figure 4.4 montre une incidence plus élevée
pour tous les cancers gycologiques dans le
Nord, cependant encore plus marquée pour les
0
20
40
60
80
100
120
140
160
Europe Est Europe
Nord
Europe Sud Europe
Ouest
France Europe Est Europe
Nord
Europe Sud Europe
Ouest
France
Régions
Taux standardisés monde
Sein Col Corps Ovaire & aut.
Figure 4.1 Incidence et mortalité des cancers gycologiques en Europe (Globocan 2002).
0
50
100
150
200
250
300
Tous cancers Sein Col Corps Ovaire
Localisations
Taux standardisé monde
Inc. 2005 Mort. 2005
Figure 4.2 Incidence et mortalité par cancer chez les femmes en France métropolitaine (2005).
0002039110.INDD 86 10/26/2013 10:52:51 AM
Chapitre 4. Épidémiologie descancers gynécologiques : utérus, ovaire, vulveet vagin
87
4
cancers du col. La sur-incidence s'étend du Nord à
l'Est et au Centre pour les cancers du corps utérin,
alors que la France semble divisée en deux pour
les cancers de l'ovaire dont l'incidence est plus
basse sur l'ensemble des régions Sud. La mortalité
régionale (2005) ne reflète pas l'incidence, ce qui
s'explique en cas de cancer de l'utérus par l'impré-
cision ou la confusion entre col et corps sur les
certificats de décès. Le reste des divergences entre
mortalité et incidence peut s'expliquer par des dif-
férences d'accès aux soins selon les régions. Pour
les cols utérins, il existe cependant toujours une
surmortalité au Nord et à l'Est avec quatre régions
(Nord-Pas-de-Calais, Haute-Normandie, Cham-
pagne-Ardenne et Alsace) dépassant les taux
moyens nationaux de plus de 20 %. Pour l'endo-
mètre, seules deux régions ont des taux supérieurs
de plus de 20 % de la moyenne nationale (Nord-
Pas-de-Calais et Picardie) et une (Bretagne) un
taux inférieur de plus de 20 %. Enfin, pour les
ovaires, trois départements sont au-dessus de
20% du taux national : le Nord-Pas-de-Calais, la
Picardie et la Basse-Normandie.
Évolution temporelle
On notera (figure4.5) que l'incidence comme la
mortalité ont globalement une tendance à la dimi-
nution ; seule diverge un peu l'incidence des can-
cers du corps utérin qui reste en plateau sur la
période 20002005 et présente même une possibi-
lité de légère croissance dans la projection 2009 [3].
Le risque de développer un cancer du col diminue
régulièrement depuis 1980 d'environ 2,9 % par
an ; parallèlement, la mortalité diminue de 4,4 %
par an. Ces diminutions semblent se tasser un peu
depuis les années 1995 et portent essentiellement
sur les classes d'âge après 40 ans. Ainsi, le dépis-
tage individuel qui a été instauré en métropole
depuis les années 19601970, suite à la généralisa-
tion de la contraception médicalisée, a permis
Tableau4.1 Taux (standardisés monde) d'incidence et de mortalité en France métropolitaine :
2005 et projection 2009 [3].
Localisations Col utérin Corps utérin Ovaires
Ane 2005 2009 2005 2009 2005 2009
N o m b r e d e c a s 3 0 4 8 2 7 8 0 5 7 74 6 3 0 0 4 3 75 4 4 4 0
Incidence standardisée monde 7,1 6,4 10,0 10,2 8,1 7,8
Nombre de dés 1 067 970 1 800 1 880 3 180 3 120
Mortalité standardisée monde 1,9 1,7 2,3 2,2 4,6 4,2
0
10
20
30
40
50
60
70
0–19 20–24 25–29 30–34 35–39 40–44 45–49 50–54 55–59 60–64 65–69 70–74 75–79 80–84
taux spécifiques
Localisations: Col Corps Ovaire
Figure 4.3 Incidence des cancers gynécologiques en fonction de l'âge (hormis le sein) en France
métropolitaine (2005).
0002039110.INDD 87 10/26/2013 10:52:51 AM
Partie II. Épidémiologie et prévention
88
d'obtenir une diminution globale de l'incidence
des cancers épidermoïdes du col utérin de l'ordre
de 45 % en 20 ans. Seule celle des adénocarci-
nomes (9 à 10 % des cancers du col) est restée
stable en France alors qu'elle augmentait dans cer-
tains pays comme en Suède, au Royaume-Uni ou
au Canada. Aux États-Unis, chez les Cauca-
siennes, les adénocarcinomes représentent près de
20 % des cancers du col [4]. De façon moins
importante et plus récente (1995), l'incidence et la
mortalité par cancer de l'ovaire décroissent égale-
ment.
Figure 4.4 partition géographique des cancers gynécologiques (col, endomètre et ovaire) en
France métropolitaine 19801985 (d'aps [3]).
0002039110.INDD 88 10/26/2013 10:52:53 AM
Chapitre 4. Épidémiologie descancers gynécologiques : utérus, ovaire, vulveet vagin
89
4
Survie
La survie relative à 5 ans (c'est-à-dire corrigée par la
mortalité liée aux autres causes de décès ajustées à la
tranche dge) est très variable pour ces localisa-
tions. En Europe, l'étude EUROCARE 4 a estimé la
survie relative à 5 ans pour les cancers diagnosti-
qués en 1995–1999. Les taux les meilleurs sont ceux
des cancers du corps utérin avec 78,6 % [intervalle
de confiance à 95 % (IC95 %) : ± 0,3] ; viennent
ensuite les cancers du col avec un taux de 66,6 %
(IC95% : ± 0,35), ceux de la vulve et du vagin avec
58,2% (IC95% : ± 0,8) et en dernier ceux des ovaires
avec une survie à 5 ans de 41,8% (IC95 % : ± 0,3) [4].
Pour la France métropolitaine [5], ces taux sont
légèrement au-dessous de la moyenne européenne
pour le corps utérin 75,6 % (IC95 % : ± 1,35), pour
la vulve et le vagin 48,8 % (IC95 % : ± 3,75) et pour
les ovaires 40,7 % (IC95 % : ± 1,5), et au-dessus de
la moyenne européenne pour le col avec 69,6 %
(IC95 % : ± 1,6).
Situation différente dans
lesdépartements d'outre-mer
D'une part, les données d'incidence ne sont
connues que pour la Martinique qui a développé
un registre de population depuis les anes 1990 ;
d'autre part, les facteurs de risque ont des préva-
lences différentes et les acs aux soins sont
variables ; enfin, les données de mortalité sont
encore de qualité insuffisante.
Le taux d'incidence (standardisée monde) de ces
cancers en Martinique pour les années 1998–2002
[3] est pour le col de l'utérus nettement plus élevé
qu'en métropole avec un taux de 16,9/100 000 et un
pic tardif à 65–74 ans, et plus bas pour le corps uté-
rin (6,2/100 000) avec également un pic vers 65–74
ans, et pour les ovaires (5,9/100 000) avec un maxi-
mum après 75 ans. Les tendances chronologiques
depuis les années 1990 montrent pour le col une
diminution de 24,8 à 16,9/100 000, suite à la mise
en place d'un programme de dépistage organisé.
Pour le corps utérin, on observe une légère ten-
dance à la hausse (de 5,8 à 6,2/100 000) depuis une
dizaine d'années et pour les cancers des ovaires
une légère diminution apparaît depuis également
une dizaine d'années (de 6,5 à 5,9/100 000), mais
étant donné la faiblesse des effectifs, ces modifica-
tions restent dans le cadre de variations aléatoires.
La mortalité a été étude [3] pour La Martinique,
la Guadeloupe et la Réunion. Le tableau4.2 illustre
les variations de taux entre les trois îles, traduisant
des incidences probablement différentes mais
aussi des variations de prise en charge et de qualité
de données, comme le montre, par exemple, le
taux des cancers de l'utérus non spécifs col ou
corps, dont il est vraisemblable qu'il s'agisse en
majorité de col utérin.
14,9
6,4
10,4 10,2
8,9
7,8
5,4
1,7
2,6 2,2
5,6
4,2
Années 1980-2009*
* projections
Taux standardisés monde
Inc. Col Inc. Corps Inc. Ovaire Mort.Col Mort.Corps Mort.Ovaire
Figure 4.5 Tendances temporelles de l'incidence et de la mortalité par cancers de l'utérus et des
ovaires en France métropolitaine 1980–2009* (* : projections).
0002039110.INDD 89 10/26/2013 10:52:53 AM
1 / 15 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !