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Les philosophes, comme les économistes, portent, un jour ou l’autre, leur réflexion
sur le sens du mot richesse. En économie, c’est une notion fondamentale qui est
considérée tantôt comme une abondance de biens, tantôt comme une quantité de
biens produite. La richesse est donc à la fois statique (fortune) et dynamique
(production) et elle relève autant de l’action individuelle que de l’action collective.
De la pensée grecque aux économistes contemporains, la richesse est d’abord
assimilée à une production, qu’elle provienne de la nature (production agricole) ou du
travail humain (production de biens et services). Cette vision des choses a fortement
influencé la construction de nos comptabilités nationales, lesquelles, encore
aujourd’hui, à l’exception de quelques pays, ne prennent en considération que la
production des biens et des services qui sont échangés contre rémunération.
Toutefois, cette approche semble insuffisante pour apprécier le bien-être d’une
population car des quantités de services échappent à la comptabilisation nationale.
Pensons un instant à l’ensemble du travail non rémunéré, fourni soit à titre individuel
ou au sein d’associations, dans des domaines divers comme la culture, l’éducation, le
sport et l’entraide sociale. Ce travail fut très longtemps négligé, voire même ignoré,
alors qu’il joue un rôle essentiel pour la vie familiale et la vie en société. Le Produit
Intérieur Brut ne devrait donc pas rester le seul indicateur de notre « croissance
économique » et laisser croire ainsi que la valeur et la réussite d’une société se
résume à sa production de biens matériels vendus sur le marché.
En analysant les activités de la Croix-Rouge fribourgeoise, on constate que certaines
prestations humanitaires et sociales participent directement au PIB de la Suisse alors
que d’autres, non rémunérées et non comptabilisées, créent autant de richesses
utiles au développement économique et social. En se basant sur les recherches en
cours, en Suisse et à l’étranger, l’étude montre comment le travail non rémunéré peut
être considéré en tant que grandeur économique.