Partie II
Relativite restreinte
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Introduction
Nous d¶ecrirons dans ce chapitre la th¶eoriedelarelativite restreinte, essentiellement telle qu'elle fut
formulee par Einstein. Initialement, l'objet de la relativitetait de reconcilier l'¶electromagn¶etisme et
la cin¶ematique : comme nous avons vu dans l'introduction µacecours,larelativite Galil¶eenne n'est pas
directement compatible avec l'¶electromagnetisme tel qu'il fut formule par Maxwell. C'est essentielle-
ment sur l'application µal'electromagn¶etisme de la relativit¶erestreintequeporteracechapitre. En
revanche, il faut bien voir que la relativit¶e restreinte s'applique dans un beaucoup plus large domaine.
Elle joue en particulier un r^ole central pour la physique des particules et la physique des accel¶erateurs.
Elle est aussi essentielle en astronomie, beaucoup de sources de rayonnement cosmiques impliquant
des d¶eplacements µa des vitesse proches de celle de la lumiµere.
Ce chapitre comportera deux ¶etapes essentielles. Aprµes un bref rappel de la relativite galil¶eenne,
nous constaterons les di±cult¶esqueposel'immersiondel'electromagn¶etisme dans cette relativit¶e
et donc dans la cin¶ematique classique. Nous montrerons en particulier l'incompatibilit¶egravede
l'¶electromagetisme avec la loi ordinaire de composition des vitesses. Nous postulerons donc un
nouveau principe de relativit¶e, imposant µa toutes les lois de la physique, y compris l'¶electromagetisme,
d'^etre invariantes dans un changement de r¶eferentiel galil¶een. Lavitessedelalumiµere devenant
ind¶ependante du r¶eferentiel, la loi de composition des vitesses et l'ensemble de la cin¶ematique sont
condamees. Il nous faudra donc d'abord detruire la cinematique et la dynamique3newtoniennes
telles que nous les connaissons maintenant.
Il nous faudra formuler une nouvelle transformation des coordonees et du temps decrivant les
changements de r¶eferentiels, la transformation de Lorentz. Nous verrons en e®et, par quelques argu-
ments trµes simples, qu'un des postulats de base de la m¶ecanique classique, l'universalite du temps et
de la simultaeite, doit ^etre abandonn¶e. On mesure peut ^etre assez mal aujourd'hui µaquelpointla
emarche d'Einstein fut audacieuse, remettant en cause les postulats les plus intuitifs de la m¶ecanique.
La phase conceptuellement la plus di±cile de notre travail, qui fera l'objet du premier chapitre, sera
alors terminee.
Le deuxiµeme chapitre, beaucoup plus math¶ematique que physique, sera consacra l'introduction
de notations tensorielles, bien adapt¶ees µa l'espace{temps µaquatredimensionsdelarelativite. Nous
introduirons en particulier des conventions de notations trµes puissantes, dues µa Einstein, qui permettent
d'¶ecrire de maniµerecompacteeablelesexpressionsparfoiscomplexesauxquellesconduisentles
calculs relativistes. Ces notations s'avµerent indispensables pour aborder la relativitegenerale, theorie
eometriquedelagravitation.
Nous formulerons, au chapitre suivant, les lois de la nouvelle dynamique. Nous ecrirons en par-
ticulier, dans une approche lagrangienne, le lagrangien d'une particule libre et nous en d¶eduirons
l'expression de la quantitedemouvementrelativiste. Nousdemontrerons en passant la formule la plus
elµebre de l'histoire de la physique (nous laissons au lecteur le soin de deviner laquelle). Nous don-
nerons ¶egalement la forme relativiste du principe fondamental de la dynamique que nous ne pourrons
guµere exploiter sans une forme explicite des forces, au moins de la force de Lorentz. Nous n'explorerons
donc pas trµes en etailscettepartiedelarelativite qui se conclura par une brµeve description de la
3Rappelons que la cinematique d¶ecrit les mouvement ind¶ependamment de leurs causes et que la dynamique permet
de prevoir le mouvement si on en conna^³t les causes.
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theorie relativiste des collisions, d'une grande importance en physique des particules.
Pour un cours centresurl'electromagnetisme, nous consacrerons en e®et l'essentiel de nos ef-
forts au dernier chapitre de cette partie. Nous chercherons µa y construire une theorie non triviale
d'interaction entre particules transmise par un champ. Nous postulerons des formes simples pour
le lagrangien d'interaction et pour le lagrangien d¶ecrivant ce champ et nous ¶ecrirons les ¶equations
de Lagrange correspondantes. Nous constaterons sans deplaisir que la structure de cette teorie de
champestcelledel'electromagnetisme. Nous aurons donc montraquelpointl'electromagn¶etisme
de Maxwell s'adapte naturellement au cadre relativiste. Nous en pro¯terons pour examiner quelques
probemes simples d'¶electromagn¶etisme, du mouvement de particules relativistes dans des champs
imposes aux bilans d'energie{impulsion pour le champ lui m^eme. Nous montrerons ainsi que cette
approche complµetement relativiste, outre son ¶el¶egance, permet de deriver des lois importantes qui ne
sont accessibles qu'au prix de calculs lourds en ¶electromagnetisme \classique".
Chapitre 1
Cinematique relativiste
La premiµere ¶etape est donc de comprendre les incompatibilites entre ¶electromagnetisme et cinematique
classique, et de refonder une cinematique tout µa fait nouvelle. Nous allons commencer par quelques
trµes brefs rappels de cin¶ematique galil¶eenne ou newtonienne.
1.1 Rappels de relativitegalileenne
1.1.1 Transformation de Galil¶ee
Il est trµes intuitif que le mouvement d'un point depende de l'observateur. Pour utiliser un vocabulaire
ferroviaire1, le passager de train a une vitesse faible ou nulle par rapport µa celle du contr^oleur, alors
qu'il a une vitesse ¶elevee par rapport au garde barriµere.
La notion centrale de la cinematique (classique ou relativiste) est celle de eferentiel.Unreferentiel,
c'est un ensemble d'observateurs, immobiles les uns par rapport aux autres. Ces observateurs peu-
vent constater le passage du mobile µa leur position. La connaissance de la position des observateurs
conceres permet alors de determiner la trajectoire du mobile. On peut bien s^ur convenir d'un repµere
(cart¶esien, orthonormal) pour reperer ces positions au moyen de trois coordonnees. Les observateurs
sont de plus munis d'horloges qui leur permettent de noter l'instant auquel le mobile passe en face
d'eux, le mouvement ¶etant alors complµetement d¶etermie par la trajectoire et la loi horaire. Ces hor-
loges peuvent ^etre constiteesden'importequelphenomµenephysiqueperiodique, su±samment rapide
µal'echelle du mouvement pour en donner une description temporelle convenable. Nous supposerons
que toutes les horloges de tous les observateurs d'un m^eme referentiel sont synchronisees (indiquent
la m^eme valeur au m^eme instant). Cette synchronisation ne pose aucune di±cult¶eencinematique
classique, puisque temps et espace sont complµetement decouples. Il su±t, par exemple, que tous les
observateurs se retrouvent en un m^emepointpourfairelezero de leurs horloges µa un moment com-
mun. Certes, ces pr¶ecautions pour la de¯nition du temps paraissent superf¶etatoires en cin¶ematique
classique. Nous verrons, en revanche, qu'elles sont trµes importantes en cin¶ematique relativiste.
Un mouvement dans un r¶ef¶erentiel Rest alors d¶e¯ni par les trois fonctions x(t);y(t);z(t)repre-
sentantlapositionenfonctiondutempscommundesobservateurs. Lem^eme mouvement serait
ecrit dans un autre ref¶erentiel R0, en mouvement par rapport µaR, par trois autres fonctions du
temps commun des observateurs de R0:x0(t0);y
0(t0);z0(t0). En mecanique classique, on admet sans
restrictions l'identit¶edestemps(µa une synchronisation prµes) des observateurs de Ret de R02.Il
1Les papiers originaux sur la relativite emploient souvent des exp¶eriences de pensee utilisant des trains et des gares,
parfois m^eme des tunnels. C'est sans doute li¶eausuccµes grandissant des transports ferroviaires au debut du siµecle et µa
leur importance sociologique. Pour c¶eder µa la tradition, nous emploierons ce genre de vocabulaire dans ce cours, bien
que les e®ets relativistes soient complµetement n¶egligeables, m^eme avec les trains les plus modernes.
2Cette hypothµese ¶etait dejµa faite explicitement par Newton dans ses Principia.S'ilenavaittoutµa fait reconnu
l'importance, il n'avait guµere de doutes sur sa validit¶e.
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