Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal

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République du Sénégal
**************
Un Peuple – Un But – Une foi
*************
AGENCE NATIONALE DE LA STATISTIQUE ET DE LA DEMOGRAPHIE
Direction des Statistiques Economiques et de la Comptabilité Nationale
Les causes du déficit structurel du
compte courant du Sénégal
Par
SY Demba* & SY Hamat+
Octobre 2013
*+ Ingénieurs Statisticiens Economistes à l’ANSD.
M. Mamadou Ngalgou KANE, Ingénieur Statisticien Economiste, Chef du Bureau de la Comptabilité Nationale à
l’ANSD, a encadré la conduite de l’étude. Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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Résumé
L’objectif principal de cette étude est d’examiner les facteurs à l’origine des déficits
du compte courant du Sénégal depuis 1980 et de proposer des mesures de politique
économique idoines pour limiter les dérapages du solde du compte courant. Sur des
données macroéconomiques annuelles du Sénégal allant de 1980 à 2010, est
appliquée la méthodologie de cointégration de Pesaran et al. (2001) qui repose sur
le modèle ARDL. Le cadre théorique de base est l’approche intertemporelle du
compte courant développée par Buiter, Obstfeld et Sachs(1981). Les résultats de
l’investigation menée mettent en évidence l’existence d’une relation de
cointégration entre le solde du compte courant, le taux de change, le taux
d’importation, le gap d’investissement, et le solde budgétaire. Ainsi, il apparait que
le taux de change, celui d’importation et le solde du compte courant retardé
expliquent les déficits à long terme tandis qu’à court terme, les taux de change et
d’importation et aussi le gap d’investissement en sont les principaux responsables.
En vertu de ces résultats, l’étude recommande trois moyens pour stabiliser voire
réduire les déficits du compte courant du Sénégal à savoir : une politique de
rééquilibrage de la balance commerciale, des mesures concernant le change et
enfin un relèvement du taux d’épargne, respectivement par ordre d’importance. Mots clés : Sénégal, Compte courant, ARDL Cointégration Pesaran, Approche Intertemporelle
Classification JEL : C41, F32 , F41.
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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Sommaire
INTRODUCTION .................................................................................................................................. 3 1. REVUE DE LITTERATURE ......................................................................................................... 6 1.1 Revue théorique ........................................................................................................................ 6 1.1.1 Le modèle Mundell-Fleming .................................................................................................... 6 1.1.2 L’approche intertemporelle du compte courant ........................................................................ 9 1.2
2. Revue empirique ..................................................................................................................... 14 FAITS STYLISES .......................................................................................................................... 19 2.1 Notion de solde du compte courant .............................................................................................. 19 2.2 Evolution du solde du compte courant depuis 1980. ..................................................................... 21 2.3 Décomposition du compte courant ............................................................................................... 26 2.4 Critères de convergence de la zone franc concernant le compte courant ....................................... 27 2.5 Déficits jumeaux ........................................................................................................................... 28 2.6 Termes de l’échange et compétitivité ............................................................................................. 30 2. 7 Régime de change et soutenabilité du compte courant .................................................................. 30 2.8 L'environnement institutionnel et la soutenabilité du compte courant ........................................... 31 2.9 Analyse des relations entre le solde courant et certaines variables macroéconomiques par le biais
d’un réseau bayésien ........................................................................................................................... 32 3. METHODOLOGIE ET DONNEES ......................................................................................... 36 4. RESULTATS DE L’ESTIMATION .............................................................................................. 41 CONCLUSION ..................................................................................................................................... 51 Références Bibliographiques ................................................................................................................... 54 Page | 2
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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INTRODUCTION
L
a question des déséquilibres de compte courant est l’une des plus grandes
préoccupations de la macroéconomie internationale surtout depuis le début
des années 2000 avec les déficits importants de compte courant des Etats–
Unis. Le compte courant est, en fait, une partie de la balance des paiements. Cette
dernière enregistre l’ensemble des opérations entre une économie nationale et le
reste du monde sur une période d’un an, en général. Le compte courant regroupe
les opérations portant sur les biens, les services, les flux de revenus et les transferts
courants entre l’économie nationale et le reste du monde. L’importance du solde
du compte courant vient du fait qu’il constitue le canal par lequel transitent les
chocs extérieurs affectant l’économie nationale. Son évolution à court terme reflète
la conjoncture à la fois de l’économie nationale et de l’extérieur ; à long terme, elle
renseigne sur la compétitivité du pays. Aussi, l’évolution à court et moyen terme du
solde du compte courant est-elle suivie de prés par les observateurs économiques et
les décideurs en matière de politique économique. A ce sujet, l’un des huit critères
de convergence de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA)
plafonne le déficit du solde du compte courant (hors transferts officiels) à 5% du
PIB nominal.
L’examen de l’évolution du solde du compte courant du Sénégal sur une période
de trente ans (1980-2010) permet de se rendre compte de l’ampleur et de la
persistance des déséquilibres. En effet, il révèle un déficit chronique. Mais, cette
situation déficitaire du compte courant du Sénégal n’est pas un fait isolé au vu de
celle des autres pays de l’UEMOA et de celle des pays en développement en
général. Toutefois, un aspect particulier demeure car, non seulement le compte
courant est structurellement déficitaire mais le déficit s’est accru rapidement
notamment à partir de 2002 où il se situait à 7,7% du PIB pour atteindre en
2008, 14,6% du PIB, soit le niveau le plus élevé depuis 1985. Sur la période 20032010, le déficit moyen par jour est évalué à 1,3 Milliard de Francs Cfa.
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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Par ailleurs, un déficit de compte courant temporaire et relativement faible est
couramment observé dans les économies en développement comme celles
avancées. Toutefois un déficit durable et croissant est source d’inquiétudes. En
effet, un creusement continu du déficit courant entraine d’année en année une
accumulation importante de dette extérieure qui peut mener à une dévaluation en
régime de change fixe1. Un tel phénomène peut également entrainer une défiance
des investisseurs étrangers et constitué ainsi un handicap pour les capacités futures
d’emprunt. Il apparait alors, que l’un des principaux indicateurs de l’imminence
d’une crise au plan macroéconomique est bien un déficit élevé du compte courant.
De ce fait, l’aggravation récente du déficit du compte courant du Sénégal constitue
une préoccupation de première importance à laquelle les économistes et décideurs
sénégalais en matière de politique économique doivent accorder suffisamment
d’attention d’autant plus que cette question apparait très peu étudiée.
Il semble opportun donc de chercher à comprendre les facteurs sous-jacents à cette
situation de déficits importants et persistants du compte courant et surtout de
l’expliquer.
Pourquoi le Sénégal a un problème de déficit de compte courant ? Quelle est la
nature de ce phénomène : phénomène de court terme ou de long terme ? Quelles
actions entreprendre pour limiter les dérapages du déficit du compte courant par
rapport au seuil défini par l’UEMOA ?
Ces quelques interrogations mériteraient des réponses précises afin de pouvoir
résoudre le problème lancinant des déficits de compte courant du Sénégal.
L’investigation proposée vise principalement à apporter un éclairage sur les facteurs
à l’origine du déficit du compte courant du Sénégal pour donner aux autorités
gouvernementales des informations en vue de prendre les mesures appropriées en
2 : Cf. FISHER (1988) Page | 4
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termes de politique économique pour remédier aux déficits importants et durables
du compte courant du Sénégal.
De façon spécifique, l’étude vise à :
i.
détecter les variables clés permettant d’expliquer les déficits structurels du
compte courant du Sénégal ;
ii.
montrer les effets à court et à long terme de ces variables sur le déficit du
compte courant ;
iii.
formuler des mesures de politiques économiques et commerciales visant
à réduire ces déficits et tendre vers le niveau idéal fixé par l’UEMOA.
Afin de mener à bien cette investigation, le document est organisé en quatre
sections. La première porte sur la revue de la littérature théorique et empirique sur
les déterminants des déficits de compte courant. La deuxième section présente les
faits stylisés du solde du compte courant. La méthodologie de l’étude et les données
utilisées sont décrites dans la troisième section. Enfin, les résultats des estimations
économétriques et leurs interprétations sont abordées dans la quatrième partie. La
conclusion
synthétise
les
principaux
résultats
obtenus
et
fournit
les
recommandations de politiques économiques.
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1. REVUE DE LITTERATURE
1.1 Revue théorique
Une panoplie de modèles théoriques permet d’expliquer les tendances du
compte courant. Parmi ceux-ci, il est intéressant de présenter deux approches
explicatives à savoir le modèle Mundell-Fleming et l’approche intertemporelle. Le
choix de ces deux modèles est pertinent dans la mesure où ils permettent de
prendre en compte aussi bien les aspects statiques que dynamiques de l’analyse du
compte courant. Le modèle Mundell-Fleming est un modèle macroéconomique
d’inspiration keynésienne, tandis que l’approche intertemporelle est basée sur des
fondements microéconomiques. L’approche intertemporelle, réagissant à la théorie
keynésienne, permet d’apprécier les divergences analytiques du compte courant.
1.1.1 Le modèle Mundell-Fleming
R. Mundell (1963) et M. Fleming (1962) se basent sur la théorie keynésienne
traditionnelle pour élaborer un modèle dont l’objectif est d’expliquer à court terme
aussi bien les déséquilibres internes qu’externes de l’économie. Leur modèle permet
également de faire des simulations sous forme de chocs budgétaire ou monétaire
afin de voir leurs impacts sur le solde du compte courant. L’élaboration de
politiques budgétaire ou monétaire est une approche pour un retour à l’équilibre.
Comme toute théorie, celle de Mundell et Fleming émet un certain nombre
d’hypothèses.
 Les hypothèses du modèle
Les hypothèses formulées dans le modèle Mundell-Fleming sont les suivantes :
H1 : le modèle s’applique à une petite économie ouverte sur l’extérieur. Par petite, il
faut comprendre que le taux d’intérêt est exogène (donné). Autrement dit, la taille
de l'économie considérée ne lui permet pas d’influer sur la conjoncture
internationale. L’économie est dépendante de l’extérieur.
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H2 : comme dans le modèle IS-LM, l’économie connaît une situation de sousemploi.
H3 : les prix sont rigides, ce qui implique qu’il ne peut y avoir d’inflation. Les taux
d’intérêt et de change nominaux sont donc égaux à leurs valeurs réelles.
H4 : outre les prix, les instruments de politique économique (taux d’intérêt et
dépenses publiques), les variables étrangères et le taux de change réel en régime fixe
sont également exogènes.
H5 : en changes flexibles, le taux de change devient endogène et les réserves de
changes exogènes.
H6 : le taux de change est à l’incertain : une variation positive du taux de change
correspond à une dépréciation.
H7 : le modèle suppose que les capitaux sont suffisamment mobiles pour que la
valeur de la monnaie soit influencée par les flux de capitaux provoqués par une
variation des taux d’intérêts.
H8 : les biens sont imparfaitement substituables.
H9 : le compte courant est défini dans ce modèle comme la somme de la position
nette de la balance commerciale et des revenus nets d’intérêts liés aux flux de biens
et services.
H10 : le modèle considère trois marchés à savoir le marché des biens et services,
celui de la monnaie et celui des changes. Les différents équations et équilibres sont
expliqués dans l’encadré ci-après.
H11 : l’équilibre général sera atteint lorsque les trois marchés sont simultanément
en équilibre. Le quatrième marché (marché du travail) sera en équilibre d’après la loi
de Walras.
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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 Les Equations du modèle
Le modèle considère trois marchés à savoir le marché des biens et services, celui de
la monnaie et celui des changes. Les différents équations et équilibres sont
expliqués dans l’encadré suivant :
1) Equations du modèle
Y = C0 + C(Y) + I(r) + G + B(Y,E)
Y= Revenu ; C :Comsommation ; I: Investissement
G: Dépenses gouvernementales;
B = Compte courant primaire
M = O+R
O =Offre de monnaie exogène; MS : Offre de monnaie
Md = L(Y)+L(i)
R= Stock de réserves de changes utilisées
S
s
d
M =M
BP = B(Y,E)+K(r - r* )
K= Flux de capitaux entrants
2) Equilibre des trois marchés
IS:
y = a 0 +a1y - a 2r + g + a3e - a 4 y ;
IS = Equilibre sur le marchés des Biens et Services
LM: O +R = 1y - 2r
LM = Equilibre sur le marché de la monnaie
BP = (a3e - a4 y) + k0 (r - r*)
BP = Equilibre de la balance des op.non mon.
e :taux de change
r: taux d'intérêt domestique; r* :taux d'intérêt étranger.
R: Variation des réserves de changes
L’équilibre général est atteint lorsque les trois marchés sont simultanément en
équilibre. L’étude du compte courant sera faite à travers deux types de chocs qui
sont la politique monétaire restrictive et la politique budgétaire expansive.
1.1.1. Analyse des chocs monétaires et budgétaires en changes flexibles
1.1.1.1. Choc budgétaire expansionniste
Les conclusions du modèle de Mundell-Fleming montrent qu’en changes flexibles,
la politique budgétaire est inefficace. En effet, la hausse des dépenses publiques
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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provoque naturellement un accroissement de la production et des taux d’intérêt,
par respectivement une relance de l’activité économique et une augmentation de la
demande de monnaie pour motifs d’épargne et de spéculation. L’augmentation du
taux d’intérêt aura comme conséquence une expansion des capitaux dans le pays
domestique où le taux rémunérateur est le plus élevé. Le taux de change pour cette
économie va ainsi s’apprécier suite à cet afflux de capitaux. La rigidité des prix va
au fur et à mesure influer négativement sur la compétitivité et il va s’en suivre une
baisse du solde de la balance commerciale, par conséquent le solde du compte
courant va se détériorer.
1.1.1.2. Choc monétaire récessif
Une politique monétaire restrictive entraine une baisse de la masse monétaire et
une augmentation des taux d’intérêt. Comme dans le cas de la politique budgétaire
expansionniste, on assiste à une appréciation de la monnaie de l’économie
domestique. A moyen terme, cette situation entraine une baisse de la compétitivité
prix des produits domestiques et une détérioration du solde commercial, et par
conséquent du solde courant. Ainsi, la conclusion fondamentale de Mundell et
Fleming est qu’en régime de changes flottants, la politique monétaire est efficace
tandis qu’en régime de changes fixes, le taux de change ne pourrait jouer aucun
rôle d’ajustement.
Ce modèle de Mundell-Fleming dérivé de la macroéconomie keynésienne présente
l’avantage d’être réaliste à court terme, raison pour laquelle il est très utilisé pour
évaluer l’impact des politiques économiques. Cependant, il présente quelques
faiblesses notamment l’absence de fondements microéconomiques et l’impossibilité
d’une analyse de la dynamique de long terme.
1.1.2 L’approche intertemporelle du compte courant
L’approche intertemporelle du compte courant (CC) remet en question le modèle
de Mundell-Fleming. Cette approche remonte au début des années 1980 à partir
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des travaux de Buiter (1981), Obstfeld et Sachs(1981), Svenson et Razin (1983)
principalement. Elle considère le solde du CC dans une perspective épargne investissement. Elle modélise le CC comme un outil de lissage de la consommation
des agents économiques en présence de chocs temporaires affectant leurs revenus.
En effet, étant donné que les décisions d’épargne et d’investissement sont basées
sur des facteurs intertemporels tels que le cycle de vie, les rendements escomptés
des projets d’investissement,... le compte courant est de ce fait un phénomène
intertemporel. L’approche intertemporelle est basée sur des fondements
microéconomiques explicites et permet de traiter de problèmes importants en
économie internationale (déficits extérieurs, endettement,…).
Selon cette approche, les fluctuations du CC sont expliquées par les déviations du
revenu national par rapport à son niveau de long terme ou permanent. Ceci s’écrit :
CC
F YN
YN ∗
(1)
Avec : CC : compte courant à la période t
YN :Produit Net
YN ∗ : Produit Net de long terme.
Et la production nette se définit comme la différence entre la production et
l’investissement(I) et les dépenses publiques (G).
YN=Y - I - G
L’équation (1) peut être réécrite en remplaçant YN par chacune de ses
composantes. Ainsi, on a :
CC
F Y
Y∗ , I
I∗ , G
G∗ )]
(2)
Où Y ∗ , I ∗ , G∗ sont les niveaux permanents des variables correspondantes.
Ce résultat s’obtient en partant des hypothèses suivantes :
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1)
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le cadre d'analyse est celui d’une petite économie ouverte avec un agent
représentatif vivant indéfiniment et qui maximise sa fonction d’utilité sous
contrainte budgétaire ;
2)
l’économie commence à la date t=0 avec des avoirs extérieurs nets B0 . Bt
constitue le niveau des avoirs extérieurs nets à la date t.
3)
le modèle comporte deux économies: le pays domestique et le reste du
monde ;
4)
l’environnement est certain, le modèle est déterministe ;
5)
le taux d’intérêt mondial r est exogène au pays domestique. Il est en fait le
seul prix du modèle qui détermine à la fois le rendement d’un placement et le coût
d’opportunité de la consommation présente, autrement dit le prix relatif de la
consommation future en termes de consommation présente.
6)
l’économie est sans monnaie. Il ne s’agira pas de choc monétaire mais d’un
choc de demande faisant naturellement varier les taux d’intérêts.
Le programme du consommateur représentatif s’écrit :










U =   tu (C t )
M ax
C t , B t  1 
sc :
t= 0
B t  1  (1  r ) B t  Y t  C t  I t  G t
 Avec  = facteur d’escompte psychologique ( 0    1 )
Plus   0 , plus le consommateur est impatient de consommer aujourd’hui par
rapport au futur.
 La fonction d’utilité u (Ct )
est strictement croissante et strictement
concave : ( u '  0 et u"  0 )
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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En réécrivant la contrainte budgétaire, il vient :
Bt 1  Bt  r * Bt  Yt  Ct  It  Gt ; ce qui peut s’écrire encore par identification :
CCt 
r * ft  X t  M t ;
De la contrainte budgétaire, l’expression suivante est déduite :
Ct  (1  r ) Bt  Yt  I t  Gt  Bt 1 En substituant Ct par son l’expression, le problème de maximisation devient :

Max
U=   t u ((1  r ) Bt  Yt  I t  Gt  Bt 1 )
t=0
B 
t 1
Ensuite la condition de premier ordre2 du programme de maximisation est écrite,
l’Equation d’Euler3 s’en déduit.
En outre en adoptant une fonction d’utilité de type
 
1
1 r
C t = C t 1 :
u (Ct ) = log(Ct )
et en posant
, le résultat suivant est obtenu :
cette égalité implique un lissage parfait de la consommation.
T
 1 
B
 0;
En utilisant la condition de transversalité : lim 
1  r  t  T 1
T   
Cette condition impose que la valeur actualisée des avoirs nets sur l’extérieur en fin
de période converge vers zéro. Ainsi sur un horizon infini, l’économie utilise
exactement les ressources dont elle dispose, ni plus ni moins. La condition de
transversalité traduit donc la saturation de la contrainte budgétaire intertemporelle.
Elle se justifie d’une part par le fait que les prêteurs ne permettront pas à l’agent de
rembourser ses dettes par de nouveaux emprunts (Non-Ponzi game) et d’autre part
par le fait que le pays ne renonce pas à jamais à des possibilités de consommation.
U t
   t u ' (Ct )   t+1 (1  r )u ' (Ct 1 )  0 ; Bt 1
2
3
Du nom du mathématicien suisse Leonhard Euler (1707-1783), c’est une condition d’optimalité
nécessaire mais non suffisante. Elle s’écrit dans ce cas-ci : u ' (Ct )   (1  r )u ' (Ct 1 ) ; Page | 12
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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Et en définissant le niveau permanent d’une variable X t comme suit :
X t* 
r
1 r


i0
t
 1 
 1  r  X ti


Alors il peut être écrit :
c  rB  (Y *
t
t
t i
 I*
t i
 G*
t i
)
Puisque c t = c t  1 , alors :


i0

1 r
 1 
 1 
c
c
ct ;


 ti
 
t 
r
1 r 
i0  1  r 
i
i
D’où :
i
r  1 
ct  rBt 
  (Yt i  It i  Gt i )
1  r i 0  1  r 
La consommation n’est pas seulement fonction du revenu courant.
Et avec l’expression identité du compte courant :
CCt  r * Bt  Yt  Ct  I t  Gt
En utilisant aussi la dernière expression de c t , le résultat suivant est obtenu :
i
r   1 
CCt  Yt  I t  Gt 

 (Yt  i  I t  i  Gt  i )
1 r 
i 0  1  r 
C C t  ( Y t  Y t * )  ( I t  I t* )  ( G t  G t* )
ou encore :
(* )
L’équation (*) ci-dessus montre que le CC est le reflet des chocs qui affectent le
revenu, l’investissement et les dépenses publiques. Ainsi, une production supérieure
au niveau permanent améliore le solde courant. Par contre, une baisse de la
production entraine une détérioration du solde courant correspondant à un lissage
de la consommation par le recours à l’endettement extérieur. Ce mécanisme associe
à une production (revenu) fluctuante une consommation stable (permanente) grâce
à un lissage de la consommation par le recours aux mécanismes d’endettement
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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extérieur qui permet d’absorber les fluctuations du revenu. En outre, la déviation de
l’investissement par rapport à son niveau désiré affecte également le compte
courant. Par exemple, un accroissement de l’investissement au dessus du niveau de
long terme crée un gap entre l’investissement et l’épargne domestique. Ces
investissements excédentaires sont alors financés par l’épargne extérieure; d’où une
détérioration du compte courant. Les dépenses publiques influent également sur le
compte courant. En effet, une hausse des dépenses publiques par rapport à leur
niveau permanent a le même impact qu’un accroissement de l’investissement.
Toutefois l’approche intertemporelle fait l’objet de virulentes critiques en raison de
l’hypothèse de flexibilité des prix qui constituent un de ses soubassements. Ainsi,
elle est irréaliste à court terme mais possède de bonnes propriétés à long terme.
1.2 Revue empirique
Les premiers travaux empiriques abordant la problématique des déficits de compte
courant ont porté sur ceux des pays développés plutôt que sur ceux des pays en
développement (PED), probablement en raison du manque de données fiables au
niveau de ces derniers. Ce n’est qu’à partir de la fin des années 1970 que de
nombreuses études ont été consacrées aux comptes courants des PED à la suite des
difficultés de croissance économique, des chocs pétroliers, de la détérioration des
termes de l’échange et des problèmes d’endettement auxquels la grande majorité de
ces pays étaient confrontés. L’un des travaux pionniers sur les déficits de compte
courant des PED est celui de Khan et Knight.

Khan et Knight (1983), dans leur étude de l’évolution du compte courant
sur 32 pays non exportateurs de pétrole sur la période 1973-1980, ont utilisé une
estimation par les moindres carrés ordinaires. Ils concluent que la détérioration du
compte courant des PED, est le fait de facteurs aussi bien internes qu’externes. Les
facteurs internes concernent le solde budgétaire, la dette publique, le taux de
change, alors que les facteurs externes sont le taux d’intérêt étranger, les termes de
l’échange et le taux de croissance des pays développés.
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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A la suite de Khan et Knight, d’autres auteurs ont apporté leur contribution à la
compréhension des fluctuations du compte courant dans les PED. Parmi eux,
Raynault (1989), dans une étude menée sur cinq pays d’Afrique, a conclu que les
facteurs externes sont à l’origine des problèmes de compte courant sauf pour le
Zaïre (actuelle République Démocratique du Congo).
 Y. Javid, M. Javid et U. Arif ont réalisé une étude sur les effets de la politique
budgétaire sur le compte courant du Pakistan pour la période 1960-2009. Les
auteurs, par un modèle VAR structurel, ont examiné les interactions dynamiques
entre la politique budgétaire, le compte courant et d’autres variables
macroéconomiques qui sont la production, le taux de change et le taux d’intérêt.
Les résultats ont montré qu’une politique budgétaire expansionniste améliore le
solde du compte courant et déprécie le taux de change.
 Une autre analyse du déficit du compte courant, basée sur l’équilibre
macroéconomique global, a été réalisée pour le cas de la Nouvelle Zélande. K. Kim
et al (2001) se sont intéressés à cette étude, suite à une persistance du déficit du
compte courant depuis les années 70. Des données trimestrielles, couvrant la
période 1982:2 à 1999:3 et comprenant les dépenses de consommation finale
privée, la FBCF et les variations de stocks, les dépenses de consommation finale
des administrations publiques, le PIB et le solde du compte courant, ont été
utilisées. Il est ressorti des résultats de l'étude que, malgré le déficit courant du pays
durant les années 90, ses mouvements ont été en conformité avec sa contrainte
budgétaire intertemporelle et donc sa condition formelle de solvabilité extérieure a
été satisfaite. Le solde du compte courant prédit par le modèle d’optimisation
intertemporelle simple utilisé dans cet article reflète de manière satisfaisante les
directions réelles et les points tournants de la composante lissage de la
consommation du compte courant.

Par ailleurs, A.F.M KAMRUL HASSAN (2010) a réalisé une étude sur les
déterminants du compte courant du Bengladesh. Les variables utilisées comme
déterminants du déficit du commerce extérieur, utilisé comme proxy du déficit du
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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compte courant, comprennent le solde budgétaire, l'épargne intérieure, la
croissance du revenu intérieur, la croissance des revenus étrangers, le taux d'intérêt
extérieur, les termes de l'échange, les exportations et le taux de change réel. La
période couverte par cette étude est 1976-2003 et la méthodologie utilisée est un
modèle à correction d’erreur. Les principaux résultats ont révélé que les variables
explicatives importantes dans la détermination du déficit du compte courant sont le
taux d’intérêt extérieur, les termes de l’échange et les exportations rapportées au
PIB. Le taux d’intérêt extérieur et les exportations rapportées au PIB ont un impact
négatif alors que les termes de l’échange sont corrélés positivement au déficit du
compte courant. Cependant, le résultat le plus remarquable est qu’aucun indicateur
économique interne n’a d’impacts significatifs sur le déficit du compte courant et
que tous les facteurs explicatifs sont liés à des variables économiques externes.
 Chinn et Ito (2007, 2008) ont également cherché à expliquer les
retournements du compte courant des pays émergents d'Asie depuis 1997. Ils ont
employé le modèle de Chinn et Prasad (2003) et y ont introduit les variables
développement financier et environnement légal qui affectent l’épargne,
l’investissement et la croissance. Ils ont abouti au fait que le développement
financier et l’environnement légal ont un rôle significatif dans l’explication des flux
de capitaux de l’Asie. Leurs résultats suggèrent en outre que le déficit
d’opportunités d’investissement explique mieux les améliorations notées dans les
comptes courants des pays émergents d’Asie plutôt que l’excès d’épargne.
 J. DUASA (2007) a cherché à expliquer les déterminants de la balance
commerciale de la Malaisie. Il a utilisé une approche de cointégration de Pesaran et
al (2001) avec le modèle Autoregressif distributed lag (ARDL). Ensuite il a effectué une
décomposition de la variance et simulé les fonctions de réponses impulsionnelles.
Avec cette approche, il a mis en évidence une relation de long terme entre le
revenu, l’offre de monnaie et la balance commerciale. Toutefois, il n'a pas trouvé de
relation de long terme entre le solde de la balance commerciale et le taux de change.
Page | 16
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
 Waliullah et al (2010), empruntant le pas à J. DUASA, examine les
déterminants du solde de la balance commerciale du Pakistan en utilisant la même
méthodologie dans le cas du Pakistan. Ils montrent que le revenu et l’offre de
monnaie exercent une influence forte sur le solde de la balance commerciale à long
terme. Le taux de change peut aider à améliorer le solde de la balance commerciale
mais son effet est plus faible que ceux du revenu et de la monnaie.
 Recep TARI et al (2011), dans leur étude sur les déficits jumeaux en Turquie,
ont voulu montrer les relations de causalité qui existent entre ces deux grandeurs
économiques. Pour ce faire, ils ont appliqué le modèle VAR et les séries mensuelles
vont de janvier 2006 à février 2011. Les résultats ont montré que les relations de
causalité du déficit budgétaire au déficit courant étaient significatives uniquement
pour le long terme. Inversement, les liens de causalité du déficit courant au déficit
budgétaire sont des relations de court terme.
 Le cas de la Bulgarie présente des résultats différents pour ce qui est des
relations de court terme. En effet, G. T. GANCHEV (2010) a étudié les liens de
causalité entre les déficits courant et budgétaire en utilisant, comme les précédents,
le modèle VAR. Les tests de causalité de Granger ont confirmé, conformément au
« New Cambridge School », que le déficit budgétaire a un impact significatif sur le
déficit du compte courant. Cependant, à court terme, les résultats ont montré que
de gros surplus budgétaires s’associent avec de gros déficits du compte courant, ce
qui est contraire à l’hypothèse des « déficits jumeaux ». A long terme, les déficits
budgétaires causent les déficits du compte courant.
 Pour ce qui concerne le Sénégal, très peu d’études se sont attachées à la
recherche des déterminants de son compte courant. Diop et Fame (2007) ont
cherché, à partir d’un VAR structurel et d’un modèle d’équilibre général de
dynamique stochastique (DSGE), les variables explicatives de la dynamique du
compte courant au Sénégal. Les résultats de leur étude, portant sur la période allant
de 1980 à 2004, ont révélé que les chocs domestiques, notamment les chocs
permanents sont le principal facteur responsable de la variabilité du compte courant
Page | 17
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
du Sénégal selon l’approche VAR structurel. Le modèle d’équilibre général
stochastique, quant à lui, a permis de montrer que les chocs technologiques et de
taux d’intérêt mondial contribuent majoritairement à l’explication des fluctuations
du compte courant.
 Par ailleurs, SY D. (2010) a cherché les déterminants de la dynamique du
compte courant du Sénégal avec une approche vectorielle à correction d'erreur
(VEC) et un modèle markovien à changement de régime. Son investigation a
permis d’une part d’estimer les probabilités de changement de régime du solde du
compte courant ( transitions entre régime de déficit élevé et régime de déficit faible
et vice versa) et de l’autre d’aboutir au résultat selon lequel le revenu et
l’investissement affectent négativement le solde du compte courant à long terme
alors qu’à court terme l’offre de monnaie détériore le solde du compte courant. Le
solde budgétaire a un effet positif sur le solde du compte courant mais cet effet se
révèle non significatif.
Il ressort de cette revue empirique que la plupart des études récentes qui ont porté
sur les déficits de compte courant des pays en développement ou émergents ont
utilisé la méthodologie soit VAR, soit VEC ou encore ARDL. Les facteurs
influençant le solde du compte courant varient d’un pays à un autre et sont internes
et/ou externes à l’économie considérée.
Page | 18
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
2. FAITS STYLISES
2.1 Notion de solde du compte courant
Pour aborder une question aussi importante que les causes des déficits du compte
courant, il convient au préalable de préciser les contours du terme clé, à savoir le
compte courant. Le compte courant est le premier compte de la balance des
paiements. Cette dernière est « un état statistique où sont systématiquement
résumées, pour une période donnée, les transactions sur biens, services et revenus
d’une économie avec le reste du monde »45. D’un point de vue comptable, le
compte courant est égal à la somme des soldes des balances des biens, des services,
des revenus et des transferts courants.
Schéma 1 : Composition de la balance courante
La balance courante regroupe donc la balance commerciale (les biens) et la balance
des invisibles (services, revenus et transferts courants).
Un solde négatif de la balance courante (déficit) indique que l’économie nationale
s’endette auprès du reste du monde alors qu’un solde positif (excédent) traduit que
l’économie nationale prête à l’étranger. Ainsi, le solde du compte courant reflète
bien les variations en avoirs extérieurs nets de l’économie nationale.
5
Cf. FMI, Manuel de la balance des paiements, 1993. Page | 19
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
Encadré 1 : La balance des paiements
La balance des paiements est un état statistique qui retrace sous forme comptable l’ensemble des
flux d’actifs réels, financiers et monétaires entre les résidents d’un pays et les non résidents au
cours d’une période donnée, en générale l’année. On y trouve la variation des avoirs et des dettes
d’un pays au cours de la période considérée, et non le stock ou montant des ces avoirs et dettes.
L’enregistrement des opérations au niveau de la balance des paiements se fait conformément aux
principes de la comptabilité en partie double : partie crédit (signe +) et partie débit (signe -).
Toute opération entre le pays résident et le reste du monde donne lieu à deux inscriptions de
même montant et de signe contraire. Quelle que soit leur nature, les flux de résident à non
résident s’inscrivent en crédit alors ceux de non résident à résident sont enregistrés en débit.
Les opérations entre les résidents et les non résidents d’un pays sont regroupés par types d’actifs
concernés et éventuellement par type d’agents concernés. Pour chaque groupes d’opérations, le
pays résident présente un excédent ou un déficit, reflet des désajustements internes et traduction
de déséquilibres mondiaux. D’après le Manuel de la balance des paiements, (1993), 5e édition, du Fonds
monétaire international, l’ensemble des flux réels et financiers entre résidents et non résidents est
réparti en trois comptes : le compte des transactions courantes, le compte de capital et le compte
financier.
 Le compte des transactions courantes (compte courant)
Ce premier compte regroupe quatre types de transactions :
-
-
-
biens (exportations et importations de marchandises. Le solde de ce poste (différence
entre exportations et importations de marchandises) est appelé solde commercial,
indicateur du commerce extérieur;
services (transports, tourisme, services financiers, etc.). Le solde de ce poste augmenté
du solde commercial est appelé solde des biens et services ;
revenus ( rémunérations de salariés versés par des employeurs non résidents à leurs
salariés résidents et inversement, revenus d’investissement c’est-à-dire les intérêts et
dividendes reçus et versés par les résidents) ;
transferts courants (contrepartie comptable des dons faits ou reçus par les résidents).
Le solde de ce compte ou solde des opérations courantes est égal à la différence entre les crédits
des opérations courantes ( marchandises, services, revenus et transfert s courants) et les débits des
opérations courantes. Il est égal à la capacité de financement (ou au besoin de financement) de la
nation.
 Le compte de capital
Ce compte ne concerne pas les mouvements de capitaux mais les transferts en capital i.e. la
contrepartie comptable des remises de dette ou annulation de créances ainsi que les achats ou
ventes d’actifs non financiers ( brevets).
 Le compte financier
Il regroupe l’ensemble des mouvements de capitaux c’est-à-dire tous les flux liés aux avoirs et
engagements financiers. Il concerne les investissements directs, les investissements de portefeuille,
les autres investissements, les produits financiers dérivés et les avoirs de réserve.
Le solde de la balance globale est égal au cumul du solde du compte courant, du solde du compte
capital et du solde des flux financiers hormis ceux du secteur bancaire et de la banque centrale. Le
complément de ce solde est la création monétaire induite par l’extérieur : il est appelé financement
Page | 20
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
2.2 Evolution du solde du compte courant depuis 1980.
du Graphique 1 ci-après, révèle un déficit permanent du compte
courant hors transferts officiels (Scc) sur la période 1980-2011. Ce déficit
représente en moyenne 10,1% du PIB annuellement sur cette période, soit 259
Milliards de F. CFA. L’évolution du déficit du compte courant du Sénégal depuis
1980 permet d’identifier des phases distinctes. D’abord de 1980 à 1994, la tendance
est à la réduction continue du déficit, ensuite de 1994 à 2000, une stabilité, voire
une légère amélioration du solde courant a été enregistrée. Puis un, un creusement
rapide du déficit extérieur courant a caractérisé la période 2001-2008. Enfin, un
redressement de la balance courante a été noté lors entre 2009 et 2011. . L’examen
1980
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Graphique1 : Evolution du solde du compte courant 0
0,00%
‐100
‐5,05%
‐200
‐5,00%
‐322,317
‐300
‐10,00%
‐400
SCC en valeurs (Mds F CFA)
SCC (hors tf)en % PIB
Scc/PIB
‐500
‐15,00%
‐600
‐700
‐800
‐20,00%
‐20,11%
‐900
Milliards de F CFA
‐876,195
‐25,00% % du PIB
Source : Données de la Comptabilité Nationale, ANSD

Quelques statistiques descriptives du solde du compte courant. 10
Series: SCC__HORS_TOF_EN___PIB
Sample 1980 2011
Observations 32
8
6
4
Mean
Median
Maximum
Minimum
Std. Dev.
Skewness
Kurtosis
-0.100971
-0.089556
-0.050502
-0.201071
0.034727
-1.099643
3.548182
Jarque-Bera
Probability
6.849810
0.032552
2
0
-0.20
-0.15
-0.10
-0.05
Page | 21
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
Pour comprendre ces fluctuations du déficit du solde compte, il est nécessaire de
prendre en compte les différents chocs ayant frappé l’économie sénégalaise ainsi
que les politiques économiques qui ont été menées depuis les années 1970.
Il convient de rappeler que le Sénégal entretient des relations commerciales avec
l’extérieur depuis son accession à l’indépendance en 1960. Le flux de ses échanges
avec l’extérieur n’a cessé de croître depuis. Ses principales exportations portent sur
des produits miniers, halieutiques et agricoles tandis que ses importations sont
constituées majoritairement de biens alimentaires, de produits pétroliers et de biens
d’équipement.
Les vagues de sécheresse successives dans les années 1970, combinées aux
fluctuations importantes des cours des matières premières ainsi qu’aux chocs
pétroliers, ont fortement perturbé les équilibres macroéconomiques du Sénégal. En
effet, les sécheresses ont lourdement affecté les rendements de la production
agricole notamment ceux de l’arachide qui sont passés de 120kg/ha durant les
années « 70 » contre une moyenne de 904kg/ha les années antérieures. En outre,
avec l’arrêt par la France des garantis des prix des produits de base, l’économie
arachidière fut plongée dans une récession. Les déficits du solde commercial se
sont amplifiés, passant de 26% du PIB à 41%6 entre 1971 et 1973.
La période 1974-1975 a été marquée par une amélioration passagère avec la hausse
des cours des produits phosphatiers et arachidiers, induisant une progression des
exportations et un relèvement des termes de l’échange de 96 à 109 (base 100 année
1971). Ce qui contribua à améliorer sensiblement le solde courant de -4% à -3,8%7.
La récolte arachidière atteignait un niveau record en 1977 avec 1 208 000 tonnes,
coïncidant avec un niveau élevé des cours mondiaux. Les exportations de produits
6
7
Cf. KASSE M. (1990) World Bank ADI 2010. Page | 22
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
halieutiques enregistrèrent également une nette progression. Il en a résulté une
amélioration du CC qui est passé de -4,1% à -2,9%8 entre 1976 et 1977.
Cependant, durant les années 1978-1979, un retournement de la conjoncture est
noté sous l’effet de la baisse drastique des cours des produits de base, combinée à
de mauvaises récoltes. Ce qui a entrainé un recul de 4% du PIB en 1978. A cela
s’est ajouté la baisse des exportations des produits arachidiers et un
renchérissement de la facture pétrolière (deuxième choc pétrolier). De ce fait, une
forte détérioration du déficit du compte courant a été enregistrée, passant de 2,9%
du PIB en 1977 à 9,1% du PIB en 1978.
Face à la dégradation du compte courant mais aussi des finances publiques, le
Sénégal, avec l’appui des institutions de Bretton Woods, met en place un
programme de stabilisation à court terme (1978-1979) visant à réduire de manière
conséquente les déficits publics et de balance des paiements.
Les résultats furent décevants sur le plan des échanges extérieurs. En fait, le déficit
de CC était de 8,2% du PIB en 1979.
Avec l’échec du programme de stabilisation, un
Plan à moyen terme de
Redressement Economique et Financier (PREF 1980-1985), visant la restauration
des grands équilibres macro-financiers, a été adopté.
Ce programme devait favoriser une limitation de la dette extérieure, à travers un
financement de l’investissement par l’épargne intérieure mobilisée. Le PREF
préconisait des mesures de libéralisation des marchés des biens et services (riz,
sucre et farine notamment) et du travail. Il visait également une réduction des
importations de produits alimentaires de 12% à fin 1985. Des mesures
protectionnistes furent aussi prises avec la hausse de 15% des droits de douanes.
8
aidtransparency.org (2008) , « Analyse de l’évolution des politiques macroéconomiques du Sénégal de 1980 à nos jours » Page | 23
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
Cependant, au niveau du compte extérieur, les résultats obtenus n’étaient pas
satisfaisants. En effet, le déficit du CC s’élevait à 16,6% du PIB en 1983 et à 14,6%
en 1985. Le déficit s’est certes réduit sur la période, mais est resté élevé. En résumé,
le PREF n’a pas répondu aux attentes concernant les déséquilibres extérieurs.
En conséquence, l’Etat du Sénégal a entrepris avec la Banque Mondiale et le FMI
un Programme d’Ajustement à Moyen et Long Terme (PAMLT) sur la période
allant de 1985 à 1992. Les objectifs du PAMLT étaient la restauration des équilibres
financiers interne et externe, l’ajustement de l’offre à la demande et la stimulation
de l’épargne intérieure. Pour atteindre ces objectifs, les autorités sénégalaises
devaient prendre un certain nombre de mesures de restructuration et d’orientation
de politique économique. Ainsi, elles devaient remédier à la crise de liquidité qui
paralysait le système bancaire et qui avait pour cause la gestion laxiste des crédits
dans les banques. En effet, l’Etat avait accumulé des arriérés vis-à-vis du secteur
bancaire et les banques elles mêmes avaient octroyé un volume important de crédits
non performants. La restructuration du secteur bancaire s’est faite dans un cadre
sous régional mais aussi avec le concours de la Banque mondiale. Elle consista en la
liquidation des banques les plus touchées et la réduction de la part de l’Etat dans les
autres banques susceptibles d’être sauvées.
En outre, l’Etat a mis en œuvre des politiques sectorielles (agriculture, industrie,
etc.), en particulier une politique de libéralisation dans les secteurs agricoles et
industriels (privatisation de plusieurs firmes d’Etat jugées non stratégiques telles
que SODEFITEX, HLM, SOTRAC, etc.)
Les résultats du PAMLT, en ce qui concerne le compte courant, étaient
appréciables : le déficit du compte courant s’est réduit, en passant de 14,6% du PIB
en 1985 à 8,9% en 1990. Il est important de souligner qu’à partir de 1987, il y’ a eu
la baisse du cours du Dollar U.S. et des cours mondiaux du pétrole, du riz (produits
d’importations dont le Sénégal reste fortement tributaire pour son alimentation et
son énergie) et autres. Toutefois, les résultats du PAMLT demeurent contrastés.
Page | 24
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
Durant l’année 1993, à la suite de l’accumulation d’importants arriérés aussi bien
intérieurs qu’extérieurs, l’Etat du Sénégal a adopté, au mois de septembre, un plan
d’urgence de redressement de la situation des finances publiques. Ce plan visait à
rationnaliser les dépenses de fonctionnement.
Toutefois, ce plan d’austérité budgétaire a eu un impact négatif sur la croissance
économique qui s’est établi à 1,3% en 1993. Pendant ce temps, le compte courant
s’est légèrement dégradé (de 8,7% à 9,8%) par rapport à 1992.
Dans ce contexte de déséquilibres extérieurs et publics persistants et importants en
vigueur au Sénégal et dans la plupart les pays de l’UEMOA, la dévaluation est
décidée lors de conférence des chefs d’Etat des pays de la Zone Franc, tenue à
Dakar en janvier 1994, en présence de représentants de la France et du FMI.
Cette dévaluation fut accompagnée au Sénégal d’un ensemble de réformes
économiques visant à améliorer la compétitivité de l’économie et instaurer les
conditions d’une croissance soutenue. Il s’agit de politique budgétaire restrictive,
d’un approfondissement des politiques structurelles et le développement du secteur
privé. Ainsi, sur la période 1993-1998, le CC s’est amélioré, passant de 9,8% du PIB
en 1993 à 7,6% en 1998. L’ajustement de change est le principal facteur explicatif
de cette évolution. En effet, d’une part, les dépenses d’importations ont plus que
doublé entre 1993 et 1998 (de 472 à 1017 milliards) du fait du renchérissement des
prix des bien et services importés alors que, d’autre part, les exportations ont
pratiquement triplé passant de 326 milliards à 822 milliards. Ce qui traduit une
progression plus rapide des exportations que des importations. Toutefois, le solde
commercial s’est creusé passant -99 milliards à -184 milliards entre 1993 et 1998.
De 1999 à 2001, l’effet de la dévaluation s’est estompé avec une évolution en « V »
caractérisée par un du déficit moyen du compte courant sur cette période est de
7,7%.
La période 2002-2008 est scandée par une tendance de creusement du compte
courant qui s’est confirmée et accentuée avec une dégradation rapide et importante.
Page | 25
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
En l’espace de sept ans, le déficit a presque doublé passant de 7,7% du PIB en 2002
à 14,6% du PIB en 2008. Le contexte international de la période est marqué par la
hausse du prix du pétrole à partir de 2003 et une hausse des prix des produits
alimentaires, notamment en 2007 et 2008. De plus, une appréciation sensible et
continue de l’Euro9 face non seulement au Dollar (US) mais aussi à de nombreuses
autres devises (Yen, Livre,…) a été notée. En outre, la crise financière, qui est
d’abord apparue aux Etats-Unis en 2007, en liaison avec celle des « subprimes », s’est
progressivement muée en crise économique mondiale. Au niveau national, la
croissance qui avait atteint des niveaux appréciables entre 2003 et 2005, a décliné à
partir de 2006, sous l’effet des difficultés de grandes entreprises telles que les
Industries Chimiques du Sénégal (ICS) et la Société Africaine de Raffinage (SAR) et
de la vulnérabilité par rapport aux aléas climatiques (pluviométrie).
Entre 2009 et 2010, la baisse importante du déficit du compte courant coïncide
avec la mise en place de la Grande Offensive Agricole pour la Nourriture et
l’Abondance (GOANA) et du Plan de retour vers l’agriculture (REVA), qui sont
des mesures de politiques agricoles visant, entre autres, à accroitre la production
agricole, en particulier celle des céréales afin de réduire la dépendance vis-à-vis de
l’extérieur. En 2010, la facture des importations de riz s’est réduite de prés de
moitié (300 milliards de FCFA). Cela a contribué à améliorer le solde commercial et
par ricochet le solde du compte courant. En outre, durant cette même période, une
baisse des tensions sur les prix des biens alimentaires et du baril du pétrole a été
enregistrée. De même,
l’Euro s’est déprécié légèrement face au Dollar
(US),…Ainsi en 2010, le Sénégal a quasiment respecté le critère de convergence
concernant le solde du compte courant (-5.05%).
2.3 Décomposition du compte courant
Les transactions enregistrées au niveau du compte courant peuvent être regroupées
en trois grandes catégories distinctes d’opérations : biens et services, revenus de
9
En 2008, l’Euro a atteint son niveau record par rapport au Dollar américain (1,66) Page | 26
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
placement et du travail et enfin transferts courants. Ainsi il est distingué trois
soldes (un pour chaque catégorie d’opérations): le solde des opérations sur biens et
services (solde de la balance commerciale au sens large), le solde des opérations sur
revenus (revenus nets) et le solde des transferts courants . Le graphique 2, ci-après,
présente la l’évolution du solde du compte courant ainsi ses sous soldes, sur la
période 2000-2010.
En milliards de F CFA
Graphique 2 : Evolution solde du compte courant et de ses soldes composants(1993‐2010), 754,4
800
600
400
200
0
‐200
‐400
‐600
‐800
‐1 000
‐1 200
‐1 400
‐1 600
‐1 800
‐843,7
‐1 577
REVENUS NETS
TRANSACTIONS COURANTES TRANSFERTS COURANTS
SOLDE Biens & Services
Linéaire (TRANSACTIONS COURANTES )
Source : Calculs des auteurs, données ANSD, septembre 2011 La balance des biens et services, structurellement déficitaire, a les mêmes tendances
que la balance courante. Elle constitue donc le compte qui guide la trajectoire du
déficit du compte courant. Celui-ci est atténué par les transferts courants qui ont
enregistré une tendance haussière pour la quasi-totalité de la période. Le solde des
revenus de facteurs est relativement faible. Toutefois, il est constamment déficitaire
au cours de la période considérée. Ce qui contribue à aggraver le déficit du compte
courant.
2.4 Critères de convergence de la zone franc concernant le compte
courant
Les pays africains de la zone franc ont connu une période de forte croissance de
1995 à 1998, à la suite de la dévaluation du FCFA en 1994. Ils ont entamé, en 1999,
Page | 27
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
une phase de consolidation de leur potentiel de croissance. Ainsi, un processus de
surveillance multilatérale a été préconisé dans toute la zone en vue de préserver les
acquis. Les Etats membres de l’UEMOA sont ainsi tenus de respecter des critères
de convergence parmi lesquels le déficit des paiements courants hors dons rapporté
au PIB nominal qui ne doit pas dépasser 5%. Le non-respect n'entraîne pas la
formulation de recommandations du Conseil des Ministres à l'égard de l'État
concerné mais il a vocation à le respecter à moyen terme. Le graphique suivant
présente l’évolution de SCC du Sénégal par rapport à ce critère.
Graphique 3 : Evolution récente du Solde du compte courant hors to (en % du Pib) . 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010
0,00%
‐1,00%
‐2,00%
‐3,00%
‐4,00%
‐5,00%
‐6,00%
‐7,00%
‐8,00%
‐9,00%
‐10,00%
‐11,00%
‐12,00%
‐13,00%
‐14,00%
‐15,00%
‐16,00%
‐5%
‐5,05%
SCC (hors tf)en % PIB
Critère Uemoa
Source : ANSD, comptes nationaux, nov. 2012
La tendance générale du niveau solde du compte courant hors transferts officiels
du Sénégal au regard du seuil fixé par l’UEMOA pour ce solde, est le dérapage.
Toutefois entre 2009 et 2010, l’indicateur qui est sensiblement égale au solde du
compte courant (en % du PIB), s’est fortement approché de la norme de -5%,
l’atteignant presque en 2010. En revanche, un éloignement de l’indicateur au-dessus
du plafond communautaire est noté en 2011.
2.5 Déficits jumeaux
Durant les années 1980, les USA ont plongé dans les déficits de la balance
commerciale et du budget de façon simultanée. C’est ainsi que le phénomène de
Page | 28
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
déficits jumeaux est apparu et des économistes se sont intéressés aux liens qui
pouvaient exister entre ces deux agrégats macroéconomiques. L’analyse des déficits
jumeaux fut d’autant plus intéressante qu’en 2002, après le constat d’un déficit
budgétaire aux USA, ce pays replongea dans le déficit commercial. Ces « twins
deficits », présence simultanée des deux déficits, dans le cadre du Sénégal seront
analysés à travers le graphique suivant et l’objectif sera de voir si les déficits sont
réellement jumeaux ou évoluent dans le même sens.
Graphique 4 : Solde du compte courant et solde budgétaire (2001‐2011) en % du PIB 4,0%
2,0% 1,1%
0,0%
‐2,0%
1,7%
0,5%
‐1,8%
‐4,0%
‐6,4%
‐7,7%
‐8,0%
‐8,1%
‐10,0% ‐8,7%
‐6,0%
‐12,0%
‐14,0%
‐16,0%
SCC (hors transferts officiels) en % du PIB
0,6%
‐0,3%
‐2,3% ‐2,2% ‐3,0%
‐4,4%
‐7,9%
‐9,0%
‐9,8%
‐12,6%
‐4,0% ‐5,1%
‐4,7%
‐7,1%
‐8,0%
soldbudg
‐14,6%
Source : Données ANSD, nov. 2012
L’examen graphique permet de relever qu’exceptée l’année 2002, où le solde
budgétaire est excédentaire, les deux soldes enregistrent des déficits sur toute la
période 2000 à 2011. Cependant, il est à noter que le déficit courant est plus
prononcé que le déficit public, aussi bien en termes de montants qu’en termes de
taux de croissance. En outre, l’hypothèse d’existence de déficits jumeaux ne semble
être plausible que sur les périodes 2003-2006 et 2009-2011.La période 2007-2008
est caractérisée par un recul du déficit budgétaire face à un creusement du déficit du
compte courant.
Page | 29
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
2.6 Termes de l’échange et compétitivité
Les termes de l’échange, en commerce international, représentent le rapport entre
l’indice des prix des exportations et l’indice des prix des importations. Ils se
dégradent lorsque, par rapport à une année de base, une même quantité de biens
exportés ne permet d’acheter qu’une quantité moindre de produits importés. Les
termes de l’échange mesurent donc « le pouvoir d’achat des exportations ». Le
graphique suivant fait état des indices des prix des exportations et ceux des
importations ainsi que les termes de l’échange.
Graphique5 : Evolution récente des termes de l’échange et ses déterminants
200,0
180,0
160,0
140,0
120,0
100,0
80,0
60,0
40,0
20,0
0,0
Indice des prix à l'importation (C. nat)
Indice des prix à l'exportation (C. nat)
Termes de l'échange (C. nat)
20002001200220032004200520062007200820092010
Source : Données ANSD, sept 2011
Les termes de l’échange de l’économie sénégalaise sont en croissante dégradation
sur la période considérée. Cette situation est due à l’évolution des prix des biens
importés (pétrole, riz, biens d’équipements,…) plus rapide que celle des prix des
biens exportés (phosphates, poissons, …).
2. 7 Régime de change et soutenabilité du compte courant
Les politiques économiques des Etats, en fonction du régime de change en vigueur,
ont pour fonction principale de booster la croissance, mais aussi de la stabiliser. Le
choix du régime de change est, de ce fait, crucial pour assurer la stabilité et la
compétitivité de l’économie. Dans le cas du taux de change fixe qui est le régime
partagé par le Sénégal avec les pays membres de l’UEMOA, les relations
internationales produisent des résultats plus certains. En effet, les investissements
Page | 30
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
national et direct étranger deviennent plus probants en termes de productivité ;
l’objectif de stabilité est donc, en principe, assuré dans un régime de change fixe.
Cependant, deux inconvénients subsistent et conditionnent l’atteinte de cet objectif.
Premièrement, le phénomène de choc asymétrique entre les économies de la zone
UEMOA entrave la stabilité. Ainsi, le taux de change fixe n’est réellement efficace
en termes de stabilité que lorsque la communauté constitue une zone monétaire
optimale qui se caractérise par le fait que la flexibilité des prix et la mobilité des
facteurs suffisent pour contrer les dysfonctionnements (induits par les chocs
asymétriques), sans qu’il y ait lieu de recourir à un ajustement du taux de change
nominal.
L’euro a enregistré, à la fin des années 2000, une appréciation, par rapport au dollar
US. Ce qui, en principe, se traduit par une perte de compétitivité des produits
d’exportation des pays de l’UEMOA (en particulier du Sénégal), du fait de
l’arrimage du FCFA à la monnaie européenne. Toutefois, dans son rapport de
consultation au titre de l’article IV de juin 2010, le FMI a estimé que cette
appréciation de l’euro n’a induit qu’une appréciation modérée des taux de change
effectif nominal et réel et que ce dernier était proche de son niveau d’équilibre.
2.8 L'environnement institutionnel et la soutenabilité du compte
courant
En plus de la stabilité macro-économique qui est une condition nécessaire mais non
suffisante de croissance économique, la stabilité juridique et institutionnelle
constitue également un déterminant clé de compétitivité et de soutenabilité du
compte courant. En effet, les niveaux de productivité ont tendance à augmenter du
fait de la confiance des investisseurs et de la réduction des risques et des
incertitudes que peuvent provoquer l’instabilité politique et sociale. Des mesures
importantes ont été adoptées au Sénégal, ces dernières années (2008 et 2009), afin
d’assainir l’environnement juridique et réglementaire des affaires. Selon l’édition
2011 du rapport « Doing Business » de la Banque Mondiale, les investissements sont
freinés par les coûts et délais nécessaires au paiement des impôts, la durée et les
Page | 31
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
coûts élevés d’enregistrement de la propriété, le faible niveau de protection des
investisseurs. La perception de la corruption par les dirigeants d’entreprise reste
également élevée. Ce rapport classe le Sénégal 152ème sur 183 pays, avec un gain de
deux places au niveau des indicateurs « octroi de permis de construire » et
« fermeture d’entreprise » et une place pour la « création d’entreprise » et le
« paiement d’impôts ».
2.9 Analyse des relations entre le solde courant et certaines
variables macroéconomiques par le biais d’un réseau bayésien
Un réseau bayésien10 est un modèle probabiliste graphique permettant d’acquérir,
de capitaliser et d’exploiter des connaissances. Il a deux composantes principales :
- un graphe causal dans lequel les nœuds représentent des variables aléatoires
et les arcs reliant ces dernières sont rattachés à des probabilités
conditionnelles (le graphe est donc orienté). Le graphe est acyclique, il ne
contient pas de boucles. Les arcs représentent des relations entre les
variables. Ce graphe est la représentation qualitative de la connaissance.
- un ensemble de distribution de probabilités qui sont les paramètres du réseau
(représentation quantitative de la connaissance).
Il sert à représenter la connaissance, à découvrir cette connaissance en analysant
les données (apprentissage). L’intérêt du réseau bayésien est de tenir compte
simultanément de la connaissance a priori et de l’expérience contenue dans les
données.
Une fois le réseau construit, il permet de diagnostiquer (des effets sont observés et
l’objectif est de déduire la répartition de la probabilité sur les causes possibles),
d’analyser les données pour prendre une décision.
Il est utilisé dans le cadre de cette étude les réseaux bayésiens pour illustrer les
relations causales existant entre le solde du compte courant (cc) et quelques
variables susceptibles de l’influencer en vertu de la revue de littérature. Avec le
10
Un encadré sur les réseaux bayésiens est placé à la page 34. Page | 32
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
logiciel
R,
la
structure
du
réseau
obtenu
est
ANSD - 2013
présentée
ci-après
Score: -266.6131
Relscore: 1
save
invgap
tdep
pibgap
tchge
cc
tech
solbud
Ce réseau a le score le plus élevé parmi tous les réseaux qui ont été essayés durant la
recherche. Les résultats montrent que le solde du compte courant (cc) dépend
directement de 5 variables : solde budgétaire (soldbudg), l’écart entre le pib et son
niveau de long terme (pibgap), l’écart entre l’investissement et son niveau de long
terme (invgap), le taux de dépendance (tdep) et le taux de change (tchge). L’épargne
nationale (save) et les termes de l'échange (tech) quant à eux, affectent le compte
courant indirectement.
Etant donnés soldbudg, pibgap, tdep, et tchge, le compte courant (cc) est
contidionnellement indépendant des autres variables. D’après le réseau bayésien, le
solde du compte courant est déterminé par les variables soldbudg, pibgap, tdep, et
tchge.
Page | 33
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
Encadré 2 : Réseaux bayésiens
1.
La notion de Réseaux bayésiens (RB):
Les RB sont une technique de Data mining (fouille des données), très en vogue dans le monde des entreprises.
Combinant statistique et intelligence artificielle,, les réseaux bayésiens permettent d'analyser de grandes quantités
de données pour en extraire des connaissances utiles à la prise de décision, contrôler ou prévoir le comportement
d'un système, diagnostiquer les causes d'un phénomène, etc. Ils constituent un langage graphique et une
méthodologie, simples et corrects, pour exprimer pratiquement ce de quoi on est certain ou incertain. Ils
reposent sur la formule de Bayes reliant des probabilités conditionnelles avec des probabilités jointes. Un réseau
bayésien est donc un modèle probabiliste graphique permettant d’acquérir, de capitaliser et d’exploiter des
connaissances.
La structure de ce type de réseau est simple : un graphe dans lequel les nœuds représentent des variables
aléatoires, et les arcs (le graphe est donc orienté) reliant ces dernières sont rattachés à des probabilités
conditionnelles.
2.
Utilité :
Un réseau bayesien sert:
 à représenter la connaissance que l'on a d'un système (technique, informatique, économique,
biologique, sociologique, etc.)
 à découvrir cette connaissance en analysant des données (apprentissage).
Adaptés à la prise en compte de l’incertitude, ils peuvent aussi bien être décrits manuellement par les experts du
domaine que générés automatiquement par apprentissage.
Une fois le réseau construit, il permet de:
 diagnostiquer : des effets sont observés et on peut en déduire la répartition de probabilité sur les
causes possibles,
 simuler (le comportement du système) : il s'agit du chemin inverse, on renseigne les variables d'entrées
(causes) pour observer la répartition de probabilité résultante sur les effets,
 analyser des données,
 prendre des décisions,
 contrôler le système, etc.
NB: En 2004, le MIT a classé les réseaux bayésiens au quatrième rang des dix premières technologies
appelées à révolutionner le monde industriel dans les années à venir.
La mise en œuvre pratique d’un réseau bayésien peut se faire à l’aide de logiciels spécifiques tels que Bayesia,
Bayes Net Toolbox, Hugin, Netica , Elvira ou encore R avec le package deal.
Pour plus d’informations voir l’ouvrage Réseaux bayésiens, Naïm Patrick et al, 2007, Eyrolles.
Page | 34
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
Par ailleurs, la matrice de corrélation met en évidence les corrélations linéaires
existant entre le solde du compte courant et les variables explicatives. Il ressort de
l’analyse de cette matrice que c’est le taux de dépendance, le solde budgétaire et le
taux de change qui sont les plus corrélées avec le solde du compte courant.
Matrice de corrélation
| scc soldbudg txchge txdep termech tcer pibrgap invnatgap ep | scc | 1.0000 soldbudg | 0.5464* 1.0000 txchge | 0.5235* 0.4150* 1.0000 txdep | ‐0.6062* ‐0.4577* 0.1291 1.0000 termech | 0.3533 0.4506* ‐0.1781 ‐0.7962* 1.0000 tcer | ‐0.1619 0.0183 ‐0.7627* ‐0.5596* 0.6332* 1.0000 pibrgap| ‐0.3570* ‐0.4192* ‐0.4350* 0.2089 ‐0.1135 0.3736* 1.0000 invnatgap| ‐0.3374 ‐0.0241 0.3515 0.5334* ‐0.4747* ‐0.4224* ‐0.0871 1.0000 ep | 0.3955* 0.2939 0.7757* 0.3393 ‐0.4760* ‐0.8195* ‐0.2283 0.3654* 1.0000 (*) : significatif au seuil de 5%
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
3. METHODOLOGIE ET DONNEES
3.1 Méthodologie
Dans cette étude, il est question de détecter les facteurs responsables du déficit du
compte courant du Sénégal. Pour cela, il est recherché une relation de court et long
terme entre le solde du compte courant et les variables explicatives tirées de
l’approche intertemporelle du compte courant mais aussi des études empiriques.
Pour examiner les relations entre le solde du compte courant (SCC) et ces variables,
l’étude recours à l’approche de cointégration basée sur les modèles autorégressif à
retard échelonné (ARDL : Auto Regressive Distributed Lag) développée par
Pesaran et Shin (1995, 1999), Pesaran et al. (1996), et Pesaran (1997). En effet, les
approches de cointégration traditionnelles (Engle et Granger (1987), Johansen
(1988)) pour déterminer l’existence d’une relation de long terme entre des variables
présentent de sérieuses limites : nécessité de disposer de séries intégrées du même
ordre I(0) ou I(1) et manquent de puissance face à des échantillons de petite taille.
L’approche de cointégration proposée par Pesaran, Shin et Smith et basée sur le
modèle ARDL, permet de pallier ces limites. Cette approche permet de tester des
relations de long terme entre des variables I(0) et I(1) et fournit des estimations
robustes pour les relations de long terme et de court terme pour des échantillons de
petite taille en l’occurrence moins de 80 observations (Narayan, 2005). Un autre
intérêt est que le modèle ARDL distingue la variable endogène des variables
explicatives. La seule exigence est que la variable expliquée doit être I(1) et les
explicatives I(0) ou I(1). Par ailleurs, cette approche a été utilisée dans plusieurs
études empiriques (Esso (2009), Narayan et Peng (2007). Le modèle ARDL peut
prendre un nombre élevé de retards pour capter le processus de génération du
modèle (Hall et Wickens, 1993 ; Pesaran et al., 2000). Aussi, un modèle à correction
d’erreur (ECM) dynamique peut être obtenu à partir du modèle ARDL à travers
une simple transformation linéaire qui permet de faire de l’inférence sur les
estimations de long terme selon Banerjee et al. (1993). Par ailleurs, le modèle
ARDL ne requiert pas de tests de stationnarité préalables. Toutefois, il est essentiel
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
de s’assurer qu’aucune des variables n’est intégrée d’un ordre élevé I(2) par
exemple.
C’est ainsi qu’il est postulé la spécification ARDL suivante :
 SCC t  c 0  c1 * SCC t 1  c 2 * Txchget 1  c3 * Soldbudg t 1  c 4 * Invnatgap t 1  c5 * txdep t 1
p
p
p
i0
i0
 c 6 * Trend    i *  ( SCC t  i )    i1 *  (Txchget  i )    i2 *  ( Soldbudg t  i ) 
i 1
p

i0
p
3
i
*  ( Invnatgap t  i )    i4 *  ( tximp t  i )   t .
(ARDL)
i0
Avec :
-
t : terme d’erreur, t N (0,  2 I n ) .
- SCC : Solde du compte courant exprimé en % du PIB réel.
- Txchge : taux de change nominal du Dollar américain en Franc CFA.
- Soldbudg : solde budgétaire de base en % du Pib réel (variable incluse dans
le modèle en raison des études empiriques).
- Invnatgap : écart entre l’investissement national et son niveau de long terme
ou permanent. Le niveau de long de cette variable a été obtenu grâce au filtre
Hodrick-Prescott.
- Txdep : taux d’importation de l’économie ou taux de dépendance (variable
incluse dans le modèle d’après les études empiriques).
-
ci ; i  1, 2,..., 6 ,  j , j  1,.., p et  is , s  1,..., 4 et i  1,..., p sont les coefficients du
modèle
-
p : est le retard optimal du modèle déterminé par minimisation des critères
d’Akaike (AIC) et de Schwarz Bayes (SBC).
-
 : opérateur de différence.
NB : Le choix des variables explicatives du modèle ARDL retenu sera expliqué plus
loin.
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
Le modèle ARDL se compose de deux parties : la première partie, combinaison
linéaire des variables en niveau décalées, montre la dynamique de long terme ; la
seconde, combinaison linéaire de variables différenciées retardées, représente la
dynamique de court terme.
La stratégie du test de cointégration selon l’approche de Pesaran et al (2001)
comprend deux étapes :
1) détermination du retard optimal à l’aide des critères d’information Akaike
Information Criterion (AIC) et le Schwarz Bayesian Criterion (SBC). Le SBC
permet de sélectionner le retard le plus petit possible alors que le AIC
permet de choisir le retard le plus élevé possible. Par ailleurs, chaque variable
explicative entrant dans le modèle ARDL doit avoir un retard maximal
inférieur à p.
2) examen de toutes les combinaisons possibles pour les retards de chaque
variable afin de déterminer le modèle ARDL optimal pour ensuite tester la
cointégration.
En fait, le modèle ARDL effectue (p+1)k régressions pour obtenir le retard optimal
pour chaque variable avec p : le retard maximal , k : le nombre de variables dans
l’équation.
Le test de cointégration selon l’approche de Pesaran et al (2001) dans les modèles
ARDL consiste à tester la nullité conjointe des coefficients des variables en niveau
et retardées du modèle. En fait, l’hypothèse nulle du test de cointégration (Wald
test) s’écrit :
H 0 : c1  c2  c3  c4  c5  0 ; (Pas de relation de cointégration)
Si l’hypothèse nulle est rejetée, alors il y’a une relation de long terme entre les
variables, sinon il n’y a aucune relation de long terme entre les variables. La
statistique du test F-stat ou statistique de Wald suit une distribution non standard
qui dépend du caractère non stationnaire des variables régresseurs, du nombre de
Page | 38
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
variables dans le modèle ARDL, de la présence ou non d’une constante et d’une
tendance ainsi que de la taille de l’échantillon. Deux valeurs critiques sont générées
avec plusieurs cas et différents seuils : la première correspondant au cas où toutes
les variables du modèle sont I(1) : CV-I(1) qui représente la borne supérieure ;
la seconde correspond au cas où toutes les variables du modèles sont I(0) : CVI(0) qui est la borne inférieure. (d’où le nom de « bound testing approach
cointegration » ou « approche de test de cointégration par les bornes »).
Alors la règle de décision pour le test de cointégration est la suivante :
 Si F-stat > CV-I(1), alors l’hypothèse nulle est rejetée et donc il y’a
cointégration.
 Si par contre F-stat < CV-I(0), alors l’hypothèse nulle de non
cointégration est acceptée.
 Si la F-stat est incomprise entre les deux (2) valeurs critiques, rien ne peut
être conclu.
Dans le cas où il existe une relation de long terme entre les variables
(cointégration), le modèle de long terme s’écrit :
p
p
p
p
p
i 1
i0
i0
i 0
i 0
SCCt   1    i SCCt  i    i soldbudg t  i    i txchget  i    i invnatgapt  i    i txdept  i   t
Par ailleurs, signalons que les coefficients de long terme peuvent être calculés en
utilisant la méthode préconisée par Barden (1989), citée par Esso (2009). En fait, le
coefficient de long terme pour une variable explicative est obtenu en affectant un
signe négatif au rapport du coefficient de cette variable explicative retardée d’une
période par celui de la variable dépendante retardée aussi d’une période dans le
modèle ARDL. Les relations de long terme s’écrivent comme suit par cette
méthode :
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
SC C t  v 0  v1 * S C C t 1  v 2 * T xchge t 1  v 3 * Sold budg t 1  v 4 * Invnatg ap t 1
 v 5 * txd ep t 1   t
Et les coefficients de long terme sont donc :
v0  
c0
c1
et
vi  
ci
p o u r i  2 , ..., 5
c1
Une fois que la relation de long terme est mise en évidence et validée, il est possible
alors d’estimer le modèle à correction d’erreur (ECM), qui indique la vitesse
d’ajustement vers l’équilibre de long terme, après une perturbation de court terme.
L’équation du modèle à correction d’erreur est la suivante :
p
p
p
i 1
i0
i0
 SCCt   1   1 ( ECM ) t 1    i SCCt  i    i soldbudg t  i    i  pibrgapt i 
p
  invnatgapt i    txdept i  
i0
p
i
i0
i
t
3.2DonnéesUtilisées
Les variables retenues ont été définies ci-avant. Les données proviennent de
l’ANSD et de la DPEE. Le tableau ci-après donne une description sommaire de ces
variables.
Variable Nbre Obs. Moyenne Ecart‐Type 31 ‐0,1019781
0,0346273 ‐0,2010707
txchge 31 453,1289
146,747
211
733,3 tximp 31 0,3839414
0,068506
0,2895604
0,5242935 invnatgap 31 4,88E‐11
0,0204045 ‐0,0374837
0,045728 pibrgap 31 5,54E‐07
soldbudg 31 ‐0,0105693
ep 31 0,1256666
0,053235
0,0209119
0,1942463 termech 31 94,45365
9,424302
74,5124
112,0646 tcer 31 121,3064
25,17661
99,67736
173,6925 Scc (en % du PIB) 74,09853
Min Max ‐0,061069 ‐136,8296
128,4476 0,0259656 ‐0,0867366
0,0261631 Page | 40
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
ANSD - 2013
4. RESULTATS DE L’ESTIMATION
Dans le cas présent, les tests de stationnarité ADF, Philips-Perron et KPSS
effectués sur la variable expliquée et les sept (7) variables explicatives sélectionnées
ont donné les résultats convergents consignés dans le tableau ci-après :
Variables
Ordre
d'intégration
Scc
I(1)
Epnat Invnatgap Pibrgap Soldbudg Termech Txdep Txchge
I(1)
I(0)
I(0)
I(0)
I(1)
I(1)
I(1)
Avec :
- epnat : épargne nationale ;
- termech : termes de l’échanges de l’économie sénégalaise;
- txchge : taux de change moyen annuel du dollar américain, par rapport au
franc CFA.
Un fait marquant ressort de ces tests de racine unitaire : la variable expliquée (Scc)
est I(1) alors que les explicatives sont soit I(0), soit I(1). Ainsi, le modèle ARDL est
bien approprié pour cette étude.
En raison des corrélations existantes entre l’épargne nationale et le gap
d’investissement d’une part, et entre les termes de l’échange, le taux de dépendance
et le taux de change d’autre part, et pour éviter les problèmes de multicolinéarité,
les variables termes de l’échange et épargne nationale ont été exclues de la
modélisation.
L’estimation du modèle ARDL optimal au vu des critères est l’ARDL (2, 2, 2, 2, 2).
(retard optimal : p=2, retard maximal recommandé par Pesaran et al (1999) pour
des données annuelles). La statistique du test de cointégration est F-stat = 25,37 et
les valeurs critiques simulées par Narayan et al. (2005) pour k= 5, n= 30
et
modèle avec trend et constante sont : CV-I(0) =5,35 et CV-I(1)=7,24
On a bien : F-stat > CV-I(1). L’hypothèse nulle du test est alors rejetée.
En résumé:
Page | 41
Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
Modèle ADRL Retard P 2 F‐stat 25,37 CV‐I(0) H0: Pas de cointégration CV‐I(1) 5,35 ANSD - 2013
7,24 Rejet Calculs des auteurs, Données de l’ANSD
En conclusion, il existe une relation de long terme entre les variables.
L’estimation du modèle ARDL (2,2,2,2,2) est contenue dans le tableau ci-après
Variable SCC(‐1) TXCHGE(‐1) SOLDBUDG(‐1) INVNATGAP(‐1) TXDEP(‐1) trend Constante DSCC(‐1) DSCC(‐2) DTXCHGE DTXCHGE(‐1) DTXCHGE(‐2) DSOLDBUDG DSOLDBUDG(‐1) DSOLDBUDG(‐2) DINVNATGAP DINVNATGAP(‐1) DTXDEP DTXDEP(‐1) R‐carré R‐carré ajusté Coefficient Ecart‐type t‐Statistic P‐value ‐2,3216***
0,0002***
0,0174
‐1,2403***
‐0,6582***
0,0054***
‐0,1424***
0,6373**
0,3561**
0,0002***
0,0001**
0,0001**
0,4246**
0,4153*
0,4381**
‐0,4452***
0,4170**
‐0,2935***
0,2043***
0,961
0,884
0,26 0,00 0,35 0,31 0,08 0,00 0,03 0,18 0,10 0,00 0,00 0,00 0,14 0,23 0,13 0,09 0,16 0,04 0,04 AIC SIC ‐8,77 5,43 0,05 ‐3,98 ‐8,36 7,97 ‐4,86 3,55 3,40 5,64 3,45 2,52 3,11 1,82 3,29 ‐5,06 2,64 ‐7,13 5,02 0,00 0,00 0,96 0,00 0,00 0,00 0,00 0,01 0,01 0,00 0,01 0,03 0,01 0,10 0,01 0,00 0,03 0,00 0,00 ‐6,9120 ‐6,0080 F‐stat 12,4226
Prob(F‐stat) 0,0003 Source : Calculs des auteurs ***, (**), (*): significatif à 1%, (5%), (10%).
Le R-carré de 0,96 montre que 96% des variations du solde du compte courant
sont expliquées par les fluctuations des variables significatives du modèle. A
l’exception de SOLDBUDG(-1), toutes les variables sont significatifs.
NB : La variable taux de change effectif réel du Sénégal a été utilisé à la place du
taux de change nominal pour évaluer les liens de long terme existant entre cette
variable, le solde du compte courant, le gap d’investissement, le solde budgétaire et
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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le taux d’importation. Le résultat du test de cointégration de Pesaran n’a pas été
concluant en d’autres termes aucune relation de long terme n’est trouvée.
 Estimation de la relation de long terme
L’estimation de la relation de long terme comportant l’ensemble des variables
explicatives a permis de mettre en évidence la non significativité de certaines
d’entre elles. C’est ainsi qu’il a été procédé à une ré-estimation excluant toutes les
variables explicatives non significatives. Les résultats sont présentés dans le tableau
ci-dessous.
scc scc(‐1) txchge txdep Coef. t‐stat P>|t| bStdX 0,3644*** 0,0001*** 3,124 4,284 0,004 0,000 ‐5,758 ‐1,729 ‐0,305*** soldbudg ‐0,3074* bStdY Coef. Std SDofX 0,0125 10,6281
0,0159 0,0033 0,3652 0,465 0,0344 142,0854 0,000 ‐0,0213 ‐8,9018
‐0,6203 0,0697 0,096 ‐0,0068 ‐8,9667
‐0,1986 0,0222 F( 4, 26) 300,5 Prob > F 0,0000 R‐carré 0,9788 R‐carré ajusté 0,9756 Source : Calculs des auteurs ;***,* : significatif à 1 %, 10%. La colonne Coef. du tableau indique pour chaque régresseur l’estimation de son
coefficient. Le coefficient d’une variable explicative indique de combien varie scc
suite à un changement de valeur d’une unité de la variable explicative, étant donné
que toutes les autres variables explicatives sont restées constantes.
Dans les colonnes t-stat et P>|t| figurent le t-ratio et sa p-value.
Afin de pouvoir comparer les forces relatives des différentes variables, il est estimé
les coefficients normalisés de régression. Ces coefficients sont ceux qui auraient été
obtenus si toutes les variables dans la régression avaient été normalisées,
standardisées. Ils sont mesurés en termes d’écart-type et non d’unités des variables,
et de ce fait peuvent être comparés les uns aux autres. Dans le tableau du modèle
de long terme, les coefficients normalisés de régression sont contenus dans la
colonne Coef Std.
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La colonne bStdX donne le changement d’unité de scc à la suite d’un changement
d’écart-type d’une unité pour une variable explicative. La colonne bStdY donne le
changement d’écart-type de scc suite à une variation d’une unité de l’explicative. La
colonne SDofX donne l’écart-type de chaque variable explicative dans le modèle.
Les résultats de l’équation de long terme indiquent que le solde du compte courant
retardé mesuré par SCC(-1), dont le coefficient de SCC(-1) est positif et significatif,
est un déterminant important du solde du compte courant. Cette variable permet
de cerner l’inertie dans la dynamique du compte courant. Il indique la persistance
du déficit antérieur dans le déficit courant du SCC. Ainsi, le coefficient de
persistance du déficit du compte courant est de 0,36 soit alors 36% du déficit
antérieur du solde du compte courant qui se reflète sur le niveau courant du déficit
du SCC. Par ailleurs, le taux de dépendance, mesuré par le taux d’importation, a un
impact négatif et significatif sur le solde du compte courant. Un accroissement du
taux d’importation d’un point détériore le solde du compte courant de 0,31 point.
En effet, un taux d’importation en croissance est synonyme d’un solde commercial
qui se creuse et donc d’un déficit du compte courant qui se dégrade également. Par
ailleurs, l’appréciation du Franc CFA par rapport au Dollar, d’une unité détériore le
compte courant de 0,0001. S’agissant du solde budgétaire, il a un impact négatif sur
le solde du compte courant mais l’impact n’est pas pour autant significatif au seuil
de 5%. Cela est en contradiction avec la théorie des déficits jumeaux.
La comparaison des effets des différentes variables explicatives se fait à l’aide de la
colonne Coef. Std ou encore de la colonne bStdX. L’examen de ces deux colonnes
permet de ranger par ordre décroissant d’importance les variables affectant le solde
du compte courant à long terme:
 le taux d’importation ou de dépendance (txdep) : l’accroissement d’écarttype de un (1) détériore le scc de 0,0213 point ;
 le taux de change (txchge) : la réduction d’écart-type du taux de change de
un (1) entraine une détérioration du scc de 0,0159 point ;
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 le solde budgétaire : l’accroissement de son écart-type de un (1) détériore le
scc de 0,007 point.
Le résidu du modèle de long terme est par ailleurs stationnaire : t-stat < CV
Résultat test ADF sur le résidu de long terme
Test ADF sur le résidu de long terme t‐Stat T‐stat Augmented Dickey‐Fuller Valeurs critiques de McKinnon (1991) seuil 5% ‐4,77 ‐4,72 Source : Calculs des auteurs  Modèle de court terme
En procédant de manière analogue à l’estimation de la relation de long terme, les
résultats de la relation de court terme sont résumés dans le tableau ci-dessous :
dscc Coef. t‐stat P>|t| bStdX bStdY Coef Std. SDofX ecm(‐1) ‐0,587*** ‐3,18 0,004 ‐0,0082
‐26,551
‐0,3714 0,0140
dtxchge 0,00015** 3,61 0,001 0,0103 0,0067
0,4649 70,7979
dtxdep ‐0,301*** ‐4,80 0,000 ‐0,0140 ‐13,6062
‐0,6322 0,0465
‐1,99 0,058 ‐0,0065 ‐12,4606
‐0,2936 0,0236
dinvnatgap ‐0,2755* F( 4,25) 13,90 R‐carré 0,6899 Prob > F 0,0000 R‐carré ajusté 0,6403 Source : Calculs des auteurs, NB: ***,**,* : significatif à 1%, 5%, 10%
Par la suite, une série de tests économétriques est effectuée sur le résidu afin de
valider le modèle. Il s’agit des tests de normalité (Jarque-Bera), d’absence de
corrélation sérielle d’ordre 12 (LM-test de Breusch-Godfrey), d’homocédasticité
de White (White-test) et enfin de stabilité des coefficients (CUSUM test).
Test de normalité de Jarque‐Bera F‐stat_JB=0,94 P‐value=0,62 Test de corrélation sérielle LM test p=12 F‐stat_LM=0,99
P‐value=0,52 Homocédasticité: White test F‐stat_W =2,42 P‐value=0,064 Page | 45
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Test de stabilité des coefficients
15
10
5
0
-5
-10
-15
90
92
94
96
98
CUSUM
00
02
04
06
08
10
5% Significance
Le test CUSUM permet de détecter les instabilités structurelles. La courbe ne coupe
pas le corridor donc le modèle est structurellement stable.
Le modèle passe avec succès chacun de ces tests (cf. tableaux ci-avant). Il est alors
possible d’interpréter les résultats.
Les résultats du modèle de court terme présentés montrent que le coefficient de
correction d’erreur ECM(-1) est négatif et significatif à 1%. Le coefficient de -0,587
indique une vitesse très élevée de convergence vers l’équilibre de long terme. Cela
traduit que les déviations à court terme de l’équilibre de long terme du solde du
compte courant se corrigent à 58,7% par an par effet de feedback.
Le modèle de court terme donne quasiment des résultats similaires à celui de long
terme : coefficient identique pour le taux change et son niveau retardé (0,0001) ; le
taux de dépendance quant à lui a un impact légèrement plus important à long terme
(-0,305) contre (-0,301) à court terme.
Les colonnes bStdX et Coef. Std du tableau de l’équation de court terme
permettent de comparer les forces relatives des coefficients. Il en ressort que c’est
le taux d’importation, le taux de change et le gap d’investissement,
respectivement qui, ont les influences les plus fortes sur dscc.
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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Les principaux résultats de l’estimation peuvent être résumés comme suit. D’abord,
une relation de cointégration a été mise en évidence entre le solde du compte
courant, le taux d’importation, le taux de change, le solde budgétaire et le gap
d’investissement. Il s’est révélé que trois principaux facteurs sont à l’origine des
déficits du compte courant : il s’agit du taux d’importation, du taux de change et du
gap d’investissement. Le taux d’importation affecte négativement le solde du
compte courant aussi bien à long terme qu’à court terme avec un impact plus
important à long terme. Quant au taux de change (Dollar U.S. en termes de
Francs CFA), il a des impacts positifs d’égale intensité à court et long terme sur le
solde du compte courant. Ainsi, une appréciation du Franc CFA par rapport au
Dollar U.S. induit une dégradation du solde du compte courant. Enfin, le gap
d’investissement national, par rapport à son niveau de long terme, affecte
négativement le solde du compte courant à court terme. Cela est conforme aux
conclusions de l’approche intertemporelle du compte courant.
Par ailleurs, il est à signaler la persistance relativement importante du déficit du
compte courant cernée à travers la forte significativité du solde du compte courant
retardé (SCC(-1)) : coefficient de persistance de 0,36. Dans le même registre, la
vitesse d’ajustement à court terme du solde du compte courant vers le sentier
d’équilibre de long terme est très rapide (58,7%).
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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A partir de l’estimation d’un VAR11, il est réalisé une décomposition de la variance
et une simulation de réponses impulsionnelles afin d’analyser la dynamique des
interactions et la force des relations causales entre les variables du système.
Les résultats sont les suivants
 Décomposition de la variance du solde du compte courant (SCC)
Période Ecart‐type SCC TXDEP TXCHGE SOLDBUDG INVNATGAP
1 0,020 100
0
0
2 0,023 96,444
0,197
2,423
3 0,025 89,073
0,276
4,383
4 0,026 85,278
0,261
5,580
5 0,026 83,578
0,501
5,896
10 0,027 79,154
3,885
5,625
11 0,027 78,487
4,517
5,583
12 0,027 77,931
5,061
5,546
15 0,028 76,835
6,169
5,496
Cholesky Ordering: INVNATGAP SOLDBUDG TXDEP TXCHGE SCC 0 0,012 1,619 1,894 1,831 2,113 2,154 2,200 2,303 0
0,924
4,649
6,987
8,193
9,223
9,259
9,262
9,198
Les résultats montrent que la variance de l’erreur de prévision du solde du compte
courant (SCC) est expliquée à 100%, de façon instantanée, par ses propres
innovations. A court terme (entre 2éme et 4éme année), les variations du solde du
compte courant dépendent en outre des variations des innovations du taux de
change (TXCHGE) entre 2 et 6%, et de celles du gap d’investissement (INVNATGAP)
entre 1 et 7%. A long terme (>12ans), les contributions des innovations du taux
d’importation (TXDEP), du taux de change (TXCHGE) du solde budgétaire
(SOLDBUDG) et du gap d’investissement (INVNATGAP) croissent progressivement
et se stabilisent autour de, 6%, 5%, 2% et 9%, respectivement.
11
L’estimation du SVEC n’a pas abouti du fait que la matrice est singulière. Alors la méthode utilisée par J. DUASA
(2007) a été adoptée pour la décomposition de la variance et la simulation des réponses impulsionnelles. En simulant
les réponses impulsionnelles et en décomposant la variance, il est noté que les innovations contemporaines du VAR
peuvent être corrélées. Ce qui induit une difficulté à identifier, voire isoler l’effet d’un choc d’une variable sur une
autre. La factorisation de Cholesky qui orthogonalise les innovations (Sims, (1980)) est utilisée pour résoudre ce
problème d’identification. Cette stratégie requiert une spécification au préalable de l’ordre de causalité des variables.
Sims (1980) suggère de ranger les variables par ordre d’exogénéité décroissante. Page | 48
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 Analyse des réponses impulsionnelles
Response to Cholesky One S.D. Innovations ± 2 S.E.
Response of DSCC to DTXDEP
Response of DSCC to DTXCHGE
.03
.03
.02
.02
.01
.01
.00
.00
-.01
-.01
-.02
-.02
-.03
-.03
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
1
2
Response of DSCC to DSOLDBUDG
3
4
5
6
7
8
9
10
9
10
Response of DSCC to DSCC
.03
.03
.02
.02
.01
.01
.00
.00
-.01
-.01
-.02
-.02
-.03
-.03
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
1
2
3
4
5
6
7
8
Response of DSCC to DINVNATGAP
.03
.02
.01
.00
-.01
-.02
-.03
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Les résultats graphiques ci-dessus montrent que tous les chocs sur les variables
explicatives retenues ont un impact transitoire sur le solde du compte courant
(SCC), mais pas toujours significatif.
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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D’abord, un choc sur le taux de dépendance dégrade instantanément le compte
courant. L’impact se réduit progressivement et s’annule même à la deuxième année.
Au-delà, il devient non significatif.
Le choc sur le taux de change a un impact positif significatif et instantané sur le
SCC. L’impact diminue progressivement puis devient non significatif peu avant la
deuxième année.
Les impacts des chocs du solde budgétaire et du gap d’investissement se révèlent
non significatifs.
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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CONCLUSION
La présente étude a cherché à identifier les causes des déficits du compte courant
du Sénégal afin de proposer des mesures de politiques économiques appropriées
pour les atténuer significativement. A cet effet, l’approche intertemporelle du
compte courant, combinée à l’approche de cointégration de Pesaran et al(2001), a
été appliquée sur des données macroéconomiques annuelles de l’économie
sénégalaise couvrant la période 1980-2010.
Il est ressorti de l’étude que les déficits importants et structurels du compte courant
du Sénégal s’expliquent par l’élargissement du différentiel commercial entre le
Sénégal et le reste du monde (taux d’importation trop élevé), une appréciation du
Franc CFA par rapport au Dollar (compétitivité change) et enfin un dynamisme de
l’investissement par rapport à la faiblesse de l’épargne.
Ces résultats ont des implications de politique économique qui mériteraient d’être
soulignées. En premier lieu, les déficits du compte courant du Sénégal pourraient
être jugulés à travers une politique de rééquilibrage de la balance commerciale,
des mesures concernant le change et enfin un relèvement du taux d’épargne,
respectivement par ordre d’importance.
A moyen terme, la réduction ou même la stabilisation du déficit du compte courant
nécessite un rééquilibrage de la balance commerciale en raison du ratio élevé
Importations/Exportations. Ces dix dernières années, ce ratio s’est porté 1,7. Ainsi,
l’ajustement de la balance commerciale pourrait se faire à travers un ralentissement
des importations. A cet effet, les mesures visant la réduction des importations
passeraient par un soutien à la production intérieure notamment en biens
alimentaires (riz, maïs, lait, entre autres) qui sont massivement importés alors que le
pays dispose des ressources (terres cultivables, potentiel en irrigation,…) pour
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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accroître significativement ces productions. La production12 locale de biens et
services devrait être améliorée quantitativement et qualitativement, en s’appuyant
sur : un renforcement des capacités d’offre des acteurs nationaux (quantité et
diversité de la production) ; une meilleure maîtrise des importations (suivi de
l’évolution des offres au niveau des sources d’approvisionnement) et une
promotion de la mise aux normes des produits locaux (démarche qualité,
certification : alignement aux standards internationaux et autres spécifications
techniques). Parallèlement à cette politique d’appui à la production domestique de
biens alimentaires, une promotion de la consommation de ces produits
s’imposerait pour « orienter » les préférences des consommateurs sénégalais vers
ces produits locaux. En outre, la maîtrise des importations en produits pétroliers
passerait par la diversification des sources d’énergie. Ainsi, les alternatives au
pétrole pourraient être l’hydroélectricité, l’éolienne, le charbon, les biocarburants…
L’impact de cette politique de réduction des importations sur le déficit du compte
courant pourrait être plus important si elle est combinée à une politique de
promotion des exportations sénégalaises.
La mobilisation de l’épargne intérieure, afin de financer les investissements dans
les secteurs porteurs, devrait se faire à travers, un relèvement des taux créditeurs,
une extension du système financier décentralisé vers les milieux ruraux et le
secteur l’informel. Dans ce sens, la création des conditions favorables à
l’investissement de même que l’adaptation des services financiers aux besoins des
différents acteurs doivent être poursuivies : amélioration de l’environnement des
affaires, accroissement des infrastructures de qualité,…
Concernant le change, aucune mesure ne peut être prise par les autorités
nationales sénégalaises, de manière individuelle, étant donné que la politique
monétaire et de change est commune avec les autres pays de l’UEMOA et gérée
par la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Il serait
pourtant important pour le Sénégal et les pays de l’UEMOA, de migrer vers un
Cf. rapport sur les politiques d’amélioration du solde compte courant du Sénégal, comité interministériel sur le
compte courant, 2010.
12
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Les causes du déficit structurel du compte courant du Sénégal
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régime de parité fixe avec bandes de fluctuations. En effet, l’appréciation continue
de l’Euro par rapport au Dollar depuis 2003, se répercute de façon mécanique sur
le niveau du franc CFA en raison de l’arrimage de ce dernier à l’Euro. Ce qui
contribue grandement à l’appréciation du franc CFA et ainsi à la baisse de
compétitivité-change des pays de la zone Franc par rapport au reste du monde.
Toutefois, les bornes de la bande de fluctuation, la nature de l’encrage (nominale ou
réelle) restent des questions entières.
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