CM Histoire Médiévale
12/10/11
I. Histoire générale des croisades en Terre Sainte
Quand Urbain II prêche la croisade en 1095, c’est quelque chose d’inédit. On ne
comprend pas dans quelles conditions cette nouveauté est survenue, même si on a
des doutes. On ne voit pas ce qui a pu pousser le pape à cette nouveauté. On pense à
des éléments liés à la situation en Orient. Depuis 10 ans, l’église grecque a tenté
d’obtenir du secours de la part des chrétiens latins contre les musulmans qui
harcèlent l’Empire Romain d’Orient. Urbain II aurait reçu une délégation de
Constantinople au début de son pontificat. Ce serait à cette occasion que l’idée lui
serait venue.
Il est évident que cette idée a tout de suite pris une dimension différente pour lui.
C’est lié à l’affrontement entre papauté et empire en Occident. Au début de son
pontificat, après la mort de Grégoire VII, Urbain II est en très grande difficulté.
La papauté est en mauvaise posture. L’empereur Henri IV lui fait guerre à cause du
problème des investitures et il a alors le dessus. Urbain II fait face à des antipapes
élus sous l’influence de l’empereur dans la vieille tradition d’influence impériale sur
l’élection du pape.
L’idée est de mobiliser l’ensemble de la chrétienté derrière la papauté autour d’une
urgence sacrée : libérer la terre sainte. On ne sait pas d’où vient cette idée mais elle
est formidable pour légitimer Urbain II. On veut réunir derrière lui les différentes
obédiences de l’Occident latin malgré la contestation de sa légitimité par l’empereur.
Urbain II est enthousiaste pour prêcher la croisade. C’est une tâche nouvelle liée à la
précarité de sa situation politique. Le succès de la croisade parvient à asseoir sa
légitimité et à éliminer les antipapes en sapant leur crédibilité au profit de la sienne.
Quand Urbain II prêche la croisade, Rome est aux mains de l’antipape impérial. Il n’y
a donc pas accès. Il est en fuite sur le territoire de l’ancien royaume de Francie
Occidentale.
Il retourne ce handicap en sa faveur. Il sillonne le Sud de la Francie en galvanisant les
foules derrière lui. Il fixe une tâche sacrée à l’Occident et assure son leadership, sa
position d’autorité éminente. Le contexte économique, social, politique se prête très
bien au projet. Il associe prouesses guerrières et aventures lointaines : ce sont 2
éléments constitutifs de la pensée aristocratique et de l’identité nobiliaire.
Le projet de croisade alimente de manière positive les imaginaires occidentaux ainsi
que la dévotion, le fait d’être au service de Dieu. Or, à une période, le système
féodal est à son apogée, de même que la violence nobiliaire. Depuis pas mal de
temps, l’Occident connaît une croissance économique, lente et cumulée, assez forte
Dans ce contexte, la croisade fait figure d’exutoire et va permettre d’exporter la
violence aristocratique. Ce, au moment où les autorités princières et les royaumes
commencent à se réaffirmer doucement, et où les violences aristocratiques sont de
moins en moins tolérés. On veut les exporter en leur offrant de nouveaux horizons.