
Pratique des soins
62 Krankenpflege ISoins infirmiers ICure infermieristiche 2/2015
peut vivre des phases de découragement
surtout au début du processus, où il ne
voit que les pertes auxquelles il doit fai-
reface.
Par conséquent, le rôle infirmier va être
de se projeter dans le futur pour le pa-
tient. En effet, il est conseillé à l’infir-
mière, selon les propos des profession-
nels interviewés, d’«être positive et
optimiste», d’avoir «des capacités à se
projeter et à projeter l’autre» et d’être
«capable de tenir des objectifs». Car
finalement, c’est ce qui fait avancer le
patient. Lorsque des objectifs sont posés
avec l’équipe pluridisciplinaire, le pa-
tient lui-même et sa famille,le soignant
accompagne le patient afin de les at-
teindre le plus rapidement possible mais
surtout de manière optimale: le patient
doit apprendre à vivre avec son handi-
cap et donc trouver des stratégies
d’adaptation. L’équipe soignante est là
pour faire l’enseignement de ces tech-
niques: (enseignement thérapeutique).
En effet, en phase aiguë, l’infirmièredoit
«fairepour», suppléer la personne dans
ses activités de la vie quotidienne. En-
suite elle doit pouvoir évaluer ses capa-
cités et ses ressources,démarrer l’ensei-
gnement pour finalement n’êtrelà qu’en
tant qu’accompagnant et «laisser faire»
le patient.
Le processus de résilience
Dans notretravail, nous nous sommes
interrogés sur la nature de la résilience:
est-elle un processus ou pas? Serait-elle
plutôt une aptitude propre à certaines
personnes? Selon Cyrulnik (2012)[5] la ré-
Pluridisciplinarité
informelle
La place de l’infirmière
Au début de notre travail, nous nous
sommes longuement demandé si nous
devions approfondir le rôle ou la place
de l’infirmière. En effet, en réadapta-
tion, il est rare d’entendre parler des
infirmières et infirmiers. Ceux qui sont
vraiment considérés comme «les hé-
ros» sont les physiothérapeutes et ergo-
thérapeutes.
Si le physiothérapeute est clairement
plus reconnu dans les processus de
réadaptation, c’est vraisemblablement
parce qu’il s’occupe de rendre l’auto-
nomie aux personnes handicapées,
alors que l’infirmière rappelle souvent
la notion de dépendance dans les soins
prodigués.
La majeure partie de la collaboration
interdisciplinairese fait de manièrein-
formelle.«Tous les soignants sont tou-
joursen train de communiquer et ça
n’apparaît nulle part: ce n’est pas une
réunion, pas un compte rendu, il n’y a
pas de PV mais ça se passe tout le
temps.Il s’agit de la pluridisciplinarité»
a relevé un des infirmiers interviewés.
Deux types de rôle infirmier peuvent
émerger selon la conception que les
professionnels ont du travail en équipe
pluridisciplinaire.La première concep-
tion du rôle infirmier place l’infirmière
dans le rôle de pivot au sein de l’équi-
pe tandis que la seconde conception
est centrée sur le patient. Le rôle infir-
mier est donc celui d’un collaborateur
de l’équipe de réadaptation si la con-
ception du travail est réellement pluri-
disciplinaire.
Dans ce type de situation, le patient pas-
se par tout un processus psychique qui
l’amène jusqu’à l’acceptation. Celui-ci
est divisé en plusieurs étapes décrites
par Elisabeth Kübler-Ross (1989)[3]:le
déni, la colère, le marchandage, la dé-
pression et l’acceptation. Nous pouvons
poser l’hypothèse que le processus de
deuil est proportionnel à la gravité de la
situation. En effet, les personnes que
nous avons interviewées ont des sé-
quelles qui n’ont pas complètement
altéré leur autonomie et donc leur vie
quotidienne.
L’annonce: un moment décisif
Une des étapes très importantes et déci-
sives pour le patient est celui de l’an-
nonce du handicap. En effet, c’est un
moment très précis qui vadéterminer la
manière dont le patient va investir le
processus de réadaptation. Dans son ou-
vrage «S’asseoir pour parler», Robert
Buckman (2001)[4] précise que l’annonce
doit être faite en deux temps qui sont le
constat et la reformulation. La première
partie est faite par le médecin tandis que
la reformulation incombe souvent à
l’infirmière. Il est conseillé lors de l’an-
nonce d’émettre des réserves et de
savoir dire «je ne sais pas». L’annonce
du diagnostic peut donc être considérée
comme un moment-clé du processus de
réadaptation. Robert Buckman dit
d’ailleurs que l’entretien de l’annonce
du handicap est très important pour la
suite de la prise en soin et l’évolution
du patient.
L’enseignement thérapeutique
Un processus de réadaptation peut durer
plus ou moins longtemps, cela peut va-
rier entreplusieurssemaines et plu-
sieursmois.Ce temps peut paraître
extrêmement long pour le patient. Il
sur l’acceptation et l’adaptation qu’en-
gendrele handicap.
Dans notretravail, nous avons choisi
comme définition de référence celle de
ProInfirmis (2013)[2] qui dit que le han-
dicap est «la limitation de longue durée
de la capacité de faireface aux activités
de la vie quotidienne ou de participer à la
vie sociale.Cette limitation est la consé-
quence d’une interaction entre une défi-
cience (physique, mentale, sensorielle et/
ou psychique) et des facteursenvironne-
mentaux (famille, profession, écoles,bâ-
timents,moyens de transports, etc.)».
Marianne Arrellano,infirmière
diplômée, actuellement en formation
Bachelor of Science HES-SO en
sage-femme à Lausanne.
Liliana De Almeida Marques,
infirmière diplômée pratiquant dans
un service de gériatrie à l’Hôpital
des Trois-Chêne à Genève
Cédric Meylan,infirmier diplômé pra-
tiquant dans le service de médecine
àl’Hôpital de Nyon.
Les auteurs ont obtenu le «Prix ASI
Bachelor HEdS 2013», décerné le
19 novembre2013.
Les auteurs
«L’infirmière en réa-
daptation doit avant
tout savoir faire preuve
d’humilité, elle doit
connaître ses capacités
et ses limites.»