
Ces baisses parallèles des taux d’épargne et
d’investissement devraient continuer à moyen terme,
dans l’hypothèse où le processus de rééquilibrage du
modèle de croissance se poursuit. Les excédents
courants pourraient donc se maintenir à un niveau
relativement stable, autour de 3% du PIB, dans les
prochaines années.
Pour 2015, toutefois, la réduction du taux
d’investissement s’annonce particulièrement
prononcée, et l’excédent courant devrait augmenter
pour s’établir entre 3,5% et 4% du PIB sur l’ensemble
de l’année (contre 2,1% en 2014). Ces évolutions sont
moins le signe d’un rééquilibrage contrôlé et orchestré
par les autorités, que celui d’une sévère aggravation
de la correction à la baisse de l’investissement après
plusieurs années de surinvestissement et
d’endettement excessif. Le récent recul de
l’investissement a, en effet, principalement touché les
secteurs souffrant de capacités de production
excédentaires et/ou très dépendants du crédit, tels que
les activités minières, métallurgiques et immobilières
(cf. graphique 2).
Echanges commerciaux : des évolutions dictées par
l’environnement international et des facteurs internes
Après cinq années d’augmentation spectaculaire,
l’excédent de la balance commerciale chinoise s’est
contracté de 30% pendant la crise de 2009 pour s’établir
à USD 250 milliards, ou 4,9% du PIB (cf. graphique 3). Il
est resté relativement stable en valeur en 2010-2011 (et
en légère baisse en pourcentage du PIB), puis est
reparti à la hausse depuis 2012, mais les ressorts de
cette progression ne sont plus les mêmes que ceux qui
prévalaient pendant la période d’avant-crise.
Sur la période 2004-2008, l’expansion de la base
d’exportations, accompagnée d’une accélération plus
modérée de la croissance des importations, a permis
une hausse rapide des excédents commerciaux alors
même que les termes de l'échange se dégradaient
(augmentation rapide des prix à l'importation,
partiellement compensée par celle des prix à
l'exportation). Inversement, depuis 2012, la hausse des
excédents commerciaux dérive principalement de
l’amélioration des termes de l'échange liée à la chute
des prix à l'importation, alors que la progression des
volumes de biens échangés a fortement fléchi (cf.
graphiques 4 & 5). Simultanément, la composition des
échanges extérieurs a évolué.
Les raisons de ces évolutions sont à la fois
externes et internes. Premièrement, l’environnement
mondial a changé (cf. graphique 6). La croissance
des échanges commerciaux internationaux s’est
essoufflée entre la période des cinq années
précédant la crise de 2009 et la période 2012-2014,
ce qui a pesé sur la progression des volumes
d’exportations (et donc d’importations) de
marchandises de la Chine. Ses exportations n’ont ainsi
augmenté que de 7,6% par an en moyenne sur la
seconde période, contre 20% au cours de la première.
Dans cet environnement externe beaucoup moins
porteur, les prix des matières premières sont restés
orientés à la baisse depuis 2012, profitant largement
aux prix à l’importation chinois. Les matières
premières (hydrocarbures, produits miniers et
agricoles) ont en effet un poids considérable dans les
importations du pays puisqu’elles représentaient un
tiers du total en 2014 (ou 44% des importations
"ordinaires", qui excluent les biens importés pour
l’assemblage et la réexportation), contre 22% en 2005.
Deuxièmement, l’évolution du commerce extérieur
souligne certaines transformations du modèle de
croissance chinois, tant du point de vue de la demande
que de celui de l’offre. D’une part, le ralentissement
marqué de l’investissement a aggravé l’affaiblissement
de la progression des volumes d'importations, passée
de 13,6% par an en moyenne en 2004-2008 à 7,8% en
2012-2014. Cette dynamique a elle-même constitué un
facteur clé de la tendance baissière des prix mondiaux
des matières premières, étant donné le poids de la
Chine dans la demande mondiale3. Volumes et prix des
importations chinoises sont donc corrélés. D’autre part,
la hausse des prix à l’exportation de la Chine a limité
l’augmentation de ses parts de marché. L’industrie a
toutefois su faire évoluer son offre pour s’adapter à la
perte de compétitivité prix (cf. infra).
Les tendances observées depuis 2012 se sont
accentuées en 2015. L’excédent commercial s’est
encore élargi, atteignant USD 118 milliards au T1 2015
contre USD 40 milliards sur la même période en 2014.
La Chine a bénéficié d’un choc positif sur les termes de
l’échange grâce à la chute des prix des matières
premières alors que les volumes d’importations ont
continué de fléchir sur fond de ralentissement de la
demande interne. La performance des exportations est
quant à elle restée médiocre en raison d’une demande
mondiale toujours faible et de l’appréciation du yuan en
termes effectifs.
Juillet-Août 2015 Conjoncture 23