NOTIONS FONDAMENTALES
1.1. OBJECTIFS POURSUIVIS
Les transferts thermiques font partie des Sciences de base de l’ingénieur, tant il est vrai
qu’il est peu de domaines industriels où la thermique ne joue un rôle petit ou grand. Au
minimum, l’ingénieur doit donc :
en connaître les principes fondamentaux,
être capable d’évaluer leur importance dans un problème particulier,
dégager les ordres de grandeur par une modélisation simple.
Ce cours d’introduction vise donc l’acquisition des notions minimales, il ne peut suffire à la
formation d’un ingénieur thermicien. Les références bibliographiques sont là pour
approfondir.
Il a été privilégié un mode de présentation qui met en relief les éléments absolument
indispensables à retenir. Ils sont marqués par l’encadrement :
A retenir absolument
Les deux notions fondamentales en transferts thermiques sont la température et la
chaleur. Le langage courant introduit souvent une confusion entre elles. Nos réactions
physiologiques en sont en partie responsables : toucher du bout des doigts une porte en
bois ou sa poignée métallique ne procure pas la même sensation ; la seconde paraît plus
froide alors que toutes deux sont à la même température. Ceci parce que nos organes du
toucher enregistrent le flux thermique qu’ils reçoivent ou cèdent. La poignée semble plus
froide parce que son métal est plus émissif que le bois.
De même, on entend opposer : température à l’ombre et température au soleil. En réalité,
la mesure d'une température d’air ne peut se faire qu’en protégeant la sonde de mesure
des effets du rayonnement donc « à l’ombre ». S’intéresser à la température au soleil sous
entend qu’on souhaite intégrer en une seule mesure les effets de la température et la
chaleur reçue du soleil par rayonnement.
De même, on parle au Canada de température « avec facteur vent » (– 20°C annoncés
comme – 30°C avec facteur vent). Là encore, on effectue, sans le dire explicitement, un
bilan de chaleur tenant compte d’échanges convectifs accrus du fait de la vitesse du vent.
La température caractérise l’état d’un corps ; la chaleur exprime une énergie échangée.
Les notions de température et de chaleur constituent l'objet de ce cours.
2Introduction aux transferts thermiques
1.2. NOTION DE TEMPERATURE
C’est une variable d’état qui, du point de vue de la structure intime de la matière,
caractérise le degré d’agitation de ses particules. Elle résulte donc de la détermination
d’une moyenne et, de ce fait, il est impossible en toute rigueur de définir la température en
un point géométrique.
Les moyens d’observation explorent un domaine fini (de l’ordre du mm3 ou même moins).
Ce domaine très restreint contient encore un nombre de particules suffisant pour que les
considérations statistiques aient un sens. C’est donc toujours la température d’une boule
au voisinage d'un point que l’on mesure, et que l’on désigne par "température en ce point".
Nous dirons qu’à l'instant t la température d’un corps est uniforme si, en cet instant, tous
les appareils de mesure indiquent la même valeur T quelle que soit leur position. Nous
dirons en outre qu’elle est constante si T est indépendante de l’instant d'observation. Si
ces deux conditions ne sont pas réalisées, nous dirons que la température est une
fonction T(x,y,z,t) des coordonnées du repère d’espace-temps. A l’intérieur d’un corps
homogène, on peut donc définir à chaque instant t des surfaces isothermes caractérisées
par T(x,y,z,t) = cte.
L’unité de température est définie officiellement comme suit (J.O. 23/12/75) : "Le Kelvin
(K) est la fraction 1/273,16 de la température thermodynamique du point triple de l'eau. "
On utilise fréquemment la température Celsius définie par la différence T-T0 entre deux
températures thermodynamiques T et T0 avec T0 = 273,15 K. Un intervalle ou une
différence de température peuvent s'exprimer soit en Kelvins, soit en degrés Celsius.
Gradient thermique
La dérivabilité de la fonction T permet de définir en chaque point M et à chaque instant t
un vecteur gradient de température T
r
, normal en M à la surface isotherme1, et dont les
composantes sont en coordonnées cartésiennes :
)
z
T
,
y
T
,
x
T
(
M
T’
θ
TT ’
n
r
isothermes
T
r
On définit également le gradient de température dans une direction ∆,
∆,∆,
∆, T
comme le
produit scalaire
1 Ceci n'est vrai que pour un corps isotrope, voir définition au § 2.1.2
Notions fondamentales 3
θ
.cosT=
nT.T
=
r
r
r
En l'absence de précision, le terme gradient désigne celui dans la direction normale à une
surface.
1.3. NOTION DE CHALEUR
1.3.1. DEFINITIONS
C’est une forme d’énergie au même titre que le travail d'un système de forces au cours
d’un déplacement. On ne peut donc pas parler de la "chaleur d'un corps", ni même de la
"chaleur contenue dans un corps", car la prise en compte d'une quantité de chaleur Q
implique une situation évolutive. Il s’agit forcément d’un échange d’énergie entre
plusieurs corps (ou entre plusieurs domaines d’un même corps) au cours d’un laps de
temps déterminé. L’unité est le Joule [J]. Sa valeur est petite, ce qui fait qu’on a
communément recours au kilo Joule [kJ].
Si, entre deux instants t et t', l'interaction étudiée s’accompagne d'un échange de chaleur
δQ, on appelle flux thermique moyen la quantité δQ/(t-t') et, par un passage à la limite, on
peut définir :
Un flux2 (c’est une puissance) thermique instantanée en Watts [W],
ramenée à l'unité de surface on parle de densité de flux thermique [W/m2]. On
nomme flux-mètre l'appareil de mesure correspondant.
1.3.2. ECHANGE DE CHALEUR A TRAVERS UNE SURFACE
Considérons deux domaines D et D’ séparés par une surface S et supposons que D cède
(algébriquement) à D’, un flux thermique Φ (pas forcément constant dans le temps).
La nature des corps D et D’, peut être absolument quelconque ;
par exemple, D peut être un solide et D’ un fluide ; ou bien D et
D’ peuvent être deux parties d'un même milieu et S une surface
fictive tracée dans ce milieu. On définit la densité de flux
thermique à travers S comme S
=Φ
ϕ
.
Au niveau corpusculaire, dire que D et D’, échangent un flux Φ
signifie ceci : les corpuscules de D proches de S traversent
cette surface et communiquent à ceux de D’, des impulsions qui
modifient leur vitesse d'agitation, et vice versa. Le bilan net de ces échanges est ressenti
au plan macroscopique comme une puissance thermique. La Thermodynamique
Statistique permet effectivement le calcul dans un certain nombre de cas.
2. Dans le cours de Thermodynamique, on réserve le mot "flux" à ce qui est transféré par unité de
surface.
D
D’
SdS
4Introduction aux transferts thermiques
1.3.3. UNITES SI ET UNITES PRATIQUES
Avant l'obligation d'utiliser les unités SI, les thermiciens avaient généralisé l'emploi
d'unités dans lesquelles la chaleur s'exprimait en kilocalories (kcal) ou en thermies (1 th
= 1000 kcal), et les intervalles de temps en heures. De plus, on est souvent confronté aux
unités anglo saxonnes. Il est donc indispensable de mentionner les formules de passage :
Energie31 kcal = 4,18 kJ
1 thermie = 1000 kcal = 4180 kJ
1 BTU = 1,055 kJ
1 kWh = 3600 kJ
Puissance 1 kcal/h = 1,16 W
1 BTU/h = 0,2929 W
1 cheval vapeur (horse power) = 0,746 kW
1 BTU.ft-2h-1 = 3,1525 W.m-2
Chaleur spécifique 1 BTU.lb-1°F-1 = 4,184 kJ.kg-1K-1
1 cal.g-1°C-1 = 4,184 kJ.kg-1K-1
Conductivi 1 BTUft-1h-1°F-1 = 1,73 W.m-1K-1
Conductance 1 BTU.ft-2h-1°F-1 = 5,6745 W.m-2.K-1
Température Fahrenheit4 : x °F correspond à (x - 32)/1,8 °C
Celsius : x °C = (x - 273,15) K
Rankine : x °R = (x/1,8) K (même graduation que °F)
Viscosité dynamique 1 Poiseuille = 1 Pa.s = 1 kg.m-1s-1
1 centipoise = 0,001 Pa.s
soit encore 10 centipoise = 0,01 Pa.s = un centième de
Poiseuille
Viscosité cinématique 1 centistockes = 1.10-6 m2s-1
3 Cette formule de conversion bien connue doit rappeler qu'en 1847 James Joule établit l’équivalence
entre le travail et la chaleur en enfermant un moteur dans une enceinte calorifugée emplie d’eau et en
mesurant l’élévation de température.
4 100 °F correspondent à la température intérieure du corps humain : 37,7°C.
Notions fondamentales 5
1.4. EXEMPLES DE RELATIONS TEMPERATURE-CHALEUR
1.4.1. CHAUFFAGE D'UN CORPS HOMOGENE
Si l'on fournit une quantité de chaleur δQ à un corps monophasique homogène de masse
m [kg], on sait que, toute autre grandeur d'état restant constante, sa température s'élève.
Si le corps se trouve initialement à une température uniforme T0 et si on attend que la
température redevienne uniforme, soit Tf = T0 + dT , on peut poser : δQ = mc.dT
c la chaleur massique [J/(kg.K)] qui dépend de l’état du milieu (température, pression, etc.
...), et de la nature de la transformation (volume constant, pression constante, etc...). Pour
les solides et les liquides, la nature de la transformation a peu d'influence. Pour les gaz,
c'est la capacité thermique à pression constante (cp) qui intervient5. Simplification
supplémentaire, la gamme de variation de température est souvent suffisamment faible
pour que les variations correspondantes de c soient négligées, en adoptant au besoin la
valeur correspondant à une température moyenne.
Q = mc.(Tf - T0) pour un fluide ou un liquide
Q = mcp.(Tf - T0) pour un gaz (à pression constante)
1.4.2. INTERACTION ENTRE DEUX CORPS
Si l'on met en présence deux corps à des températures uniformes T1 et T2 sans frottement
entre eux, on constate que leur température6 s’établit au bout d'un temps plus ou moins
long à une valeur commune T, intermédiaire entre T1 et T2.
Ceci signifie que le corps le plus chaud s'est refroidi ; il a donc cédé de la chaleur. Le
corps le plus froid s'est réchauffé ; il en a reçu ; la chaleur passe du corps chaud au corps
froid en l'absence d’intervention extérieure. Ceci est une conséquence du deuxième
principe de la Thermodynamique. En effet, si l’on imagine un système isolé constitué des
deux corps, l’entropie de ce système (somme des entropies des deux corps) ne peut
qu’augmenter :
0
T
dQ
T
dQ
dS dS dS 2
2
1
1
21 +=+=
Or, selon le premier principe de la Thermodynamique, le système étant isolé :
dQ dQ dQ 21 +=
On en déduit donc que
0)T.(TdQ 121
5 Dans le cas d’une phase simple, on peut écrire δQ = Cv.dT + l.dV ou δQ = Cp.dT +η.dp
Cp est la capacité thermique à pression constante et Cv la capacité thermique à volume constant
[J.mole-1.K-1]
6 La température est une grandeur d'état intensive
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