N°2 Avril 2004 DÉCODAGE Prévention des Infections du Site Opératoire, Préparation Cutanée de l’Opéré : État Actuel des Connaissances ➢ Dr Hélène Ittah-Desmeulles, Spécialisé en Santé Publique et Hygiène Hospitalière Service de Santé Publique, Hôpital de la Pitié Salpêtrière - Paris. I. INTRODUCTION E n France, l’incidence des infections de site opératoire (ISO) est de 1,93% toute chirurgie confondue et de 2,9 % en chirurgie urologique en 2000. Cette incidence varie selon le type d’intervention, elle est de 0,9% pour la chirurgie des organes génitaux masculins , de 3,5% pour la chirurgie de l’appareil urinaire, de 4,7 %, pour la chirurgie de la prostate et de 4,9% pour la chirurgie du rein et du bassinet. II. MODES DE CONTAMINATION ET FACTEURS DE RISQUES L’infection nosocomiale peut se propager de manière endogène ou exogène. Dans les infections d’origine “endogène” le malade s’infecte avec ses propres germes, à la faveur d’un acte invasif et/ou en raison d’une fragilité particulière. Dans les infections d’origine “exogène” les sources de contamination sont multiples. Il peut s’agir d’infections croisées, transmises d’un malade à l’autre par les mains ou les instruments de travail du personnel médical ou paramédical (c’est le mode de transmission le plus fréquent parmi les infections d’origine exogène) ; d’infections provoquées par les germes du personnel ; d’infections liées à la contamination de l’environnement hospitalier (eau, air, matériel, alimentation...). On décrit quatre voies de contamination du site opératoire : la contamination préopératoire (plaie ouverte, souillée...), la contamination per opératoire endogène (flore bactérienne cutanée du patient), la contamination per opératoire exogène (mains, matériels, environnement…), la contamination post opératoire (drains, pansements…). La voie de contamination per opératoire endogène est la plus fréquente. Le risque de développer une infection du site opératoire dépend de facteurs liés au terrain (le patient) et de facteurs liés aux soins chirurgicaux (avant, pendant et après l’intervention). III. PRÉVENTION DES INFECTIONS DU SITE OPÉRATOIRE Les 2 mesures qui a ce jour ce sont montrées les plus efficaces pour la réduction du risque d’infection du site opératoire par contamination endogène per opératoire sont l’antibioprophylaxie et la préparation cutanée de l’opéré. 26 IV. PRÉPARATION CUTANÉE DE L’OPÉRÉ : ETAT ACTUEL DES CONNAISSANCES La peau héberge une flore polymicrobienne pouvant varier de 100 à 1000000 germes/cm2 (Ex.: abdomen-sternum : 100 germes/cm2 , aisselle : 100.000 germes/cm2). Le risque de développer une ISO est étroitement dépendant du degré de contamination bactérienne du site opératoire. La préparation cutanée a pour objectif d’éliminer le plus possible de micro-organismes de la zone opératoire. Elle se définit comme un ensemble d’actes allant de l’hygiène corporelle à l’antisepsie du site : le traitement de la pilosité, la toilette préopératoire, la désinfection du champ opératoire Les taux d’infection du site opératoire les plus bas sont observés chez les patients n’ayant pas eu de dépilation de la zone opératoire. Chez les patients dépilés, les taux d’ISO les plus bas sont observés chez les patients dépilés le jour même avec une crème dépilatoire ou par tonte. La réalisation d’au moins une toilette préopératoire avec un savon antiseptique réduit la flore microbienne au niveau de la zone opératoire mais Prévention des Infections du Site Opératoire, Préparation Cutané de l’Opéré : État Actuel des Connaissances DÉCODAGE Facteurs de risque liés aux patients Facteurs de risque liés aux soins chirurgicaux Certains Age avancé Obésité Score Anesthésique > 3 Infection à distance Séjour préopératoire prolongé Certains Classe de contamination de l’intervention Contamination per-opératoire Absence d’antibioprophylaxie Rasage Absence de préparation cutanée Durée de l’intervention Probables Plus de 3 comorbidités associées Dénutrition – Hypoalbuminémie Diabète Cancer Traitement immunosuppresseur Alcool Tabac l’influence sur les taux d’ISO n’est pas démontrée de façon indiscutable. La désinfection du champ opératoire en salle d’intervention est une étape fondamentale de la prévention. Elle nécessite l’utilisation d’un antiseptique « majeur », c’est-à-dire ayant un effet létal, un large spectre d’activité, une action rapide est prolongée. Selon les données actuelles de la littérature, les antiseptiques en solution alcoolique sont ceux à utiliser prioritairement chaque fois que cela est possible. La détersion réduit la flore microbienne au niveau de la zone opératoire, cette phase paraît indispensable quand il existe une contamination visible du champ opératoire ou que le patient n’a pas bénéficié d’une toilette préopératoire ◆ IV. BIBLIOGRAPHIE • RAISIN. Surveillance des infections du site opératoire en france en 199 et 2000. Institut de Veille Sanitaire. Rapports et Résultats 2003 • Hajjar J. Préparation cutanée de l’opéré. Hygienes 2003 ;XI :393-399 • CDC. Guideline for Prevention of Surgical Site Infection, 1999. Infect Control Hosp Epidemiol 1999;20:250-278. • HISWP. Behaviours and rituals in the operating theatre. J Hosp Infect 2002;51:241-255 N°2 Avril 2004 Probables Procédures multiples Intervention en urgence Technique chirurgicale et expérience de l’opérateur Asepsie peropératoire (air, surfaces) Recommandations pour la préparation cutanée de l’opéré Les recommandations les plus complètes et les plus récentes pour la prévention des infections du site opératoires proviennent de l’Hospital Infection Society Working Party et des Centers of Disease Control. Elles sont classées en 3 catégories : ➟ Catégorie 1A : mesures qui doivent être adoptées dans tous les cas et dont l’efficacité est bien documentée par des études expérimentales ou épidémiologiques. ➟ Catégorie 1B : mesures qui doivent être adoptées dans tous les cas et présentées comme efficaces par les experts et dont l’application est logique même en l’absence de preuves scientifiques. ➟ Catégorie 2 : mesures qui sont applicables dans la plupart des hôpitaux. Elles s’appuient sur de bonnes évidences mais dont le caractère absolu et universel n’est pas toujours établi. ➟ Douche préopératoire avec un savon désinfectant au moins la veille de l’intervention. Cat.1B ➟ Rasage à éviter sauf si les poils représentent une gêne pour l’intervention. Ca.1A ➟ En cas de rasage, celui-ci doit être pratiqué immédiatement avant l’intervention en utilisant une tondeuse électrique (de préférence au rasoir ou crème dépilatoire). Cat. 1A ➟ Un temps de nettoyage et de rinçage (détersion) de la zone opératoire doit précéder le temps de désinfection cutanée. Cat. 1B ➟ Utilisation d’un désinfectant cutané validé (par exemple chlorhexidine ou iodophores.) Ca. 1B ➟ La désinfection du site opératoire se fait du centre vers la périphérie en cercles concentriques et doit être suffisamment étendue pour englober les éventuelles contre incisions, par exemple pour mise en place du drain. Cat. 1B 27