multiplication du trieb originel.
Dans sa théorie sur l'origine du théâtre grec, Nietzsche défendit que: premièrement il existerait une
extase mystique en l'honneur de Dyonisios, dans lequel toute la polis participait, ensuite l'extase
mystique est devenue une procession, où seulement une minorité chantait et dansait, pendant que la
majorité aurait été réduite au rôle de spectateur, jusqu'à ce que ce finalement la procession soit
confinée au milieu des montagnes. Des flans est né le public, qui assistait à un choeur qui
maintenait la fonction de chanter et danser, pendant qu'un acteur commençait à représenter les
archétypes à partir desquels se dédoublent les infinis conflits de l'Un Originaire. Outre chanter et
danser, le choeur commença à parler, ainsi que de la mimique l'acteur passa à la parole. Le dialogue
surgit quand le skené commença à être partagé avec un autre acteur. L'extase mystique originelle,
semblable à celle des bacchantes, et où dans sa contrepartie masculine les participants
s'habilleraient comme des satires, serait emplie de visions et de sentiments océaniques. Elle
constituait une menace au pouvoir et à la religion olympique officiels. La naissance du théâtre est
apparue comme une domestication partielle. Mais le chant et la danse, exécutés par le choeur vêtu
en satires, alternaient leur fonction comme celle de la parole, soit en direction du public, soit en
direction des acteurs. La musique et la danse se transformant en parole et dialogue, l'extase
originelle cédant à de brefs moments de catharsis et de jouissance esthétique. La naissance du
théâtre commémorerait mythiquement la propre naissance du mot, maintenant l'art sur le terrain
commun entre l' Imaginaire et le Symbolique.
La ligne de pensée établie par Didier-Weil court parallèlement à cette voie. Sa grande contribution
est de développer la question de la pulsion invocante, qui fut seulement esquissée par Lacan. Parce
que si cette pulsion, qui est celle qui amène le sujet à la surface, est la trace unaire, elle est inscrite
premièrement comme une forme musicale. La voix maternelle n'est pas invocante par ce qu'elle dit,
mais par le ton - appelé affection – de ce qu'elle dit. Et l'invoqué ne demeure pas semblable à une
simple réponse - informations ou réflexe -, qui serait seulement une voix, un son, un mouvement
labial mã (qui dans toutes les langues ressemble au mot qui désigne la mère), mais comme une
ouverture totale à l'existence. Ce qui est aussi invoqué est le geste, qui avec la croissance de l´infans
devient la danse, le plaisir de commémorer la légèreté du corps par le rythme. Ou également
l'ivresse dyonisiaque, plaisir que tous les enfants obtiennent en tournant jusqu'à perdre l'équilibre.
Le son originel invoqué, qui avec la croissance de l' infans est décomposé en sons élémentaires et
répété en syllabes, serait l'origine de la langue. La même voie nietzschienne, de la musique au mot.
Mot qui peut se placer dans l'extrémité d'une simple information ou d'un non-dit - le mot vide, sans
affection, sans transfert -, ou aller jusqu'à l'autre extrémité, la lecture littéraire, dont le noyau est la
poésie - le mot complet, qui réunit image et sens, catharsis et insight.
Il y a un substrat du mythe judaïque dans la pensée de Didier-Weil. Au début il y avait le Verbe (ou
le Logos, comme il a été traduit dans la Septante), cela n'a pas été un mot, d'autant moins une
signification, mais le signifiant le plus pur de tous, capable d'inscrire une trace dans le Rien, d'en
invoquer la lumière et tout mouvement qui se montre en elle. Le verbe (avec une minuscule) est
seulement venu bien après, avec la division du sujet, déjà assiégé par le verbal, qui dissimule aussi
bien que dévoile. Bien que Didier-Weil explique clairement les racines de ses idées par rapport au
judaïsme, son intervention dans un des derniers séminaires de Lacan (L'insu que sait de l'une bévue
s'aile à mourre) a produit des résultats apparemment opposés aux principes du maître ou d'une
interpretation réductive de la Bible (cela aurait-il été l'intention de Lacan, ou a-t-il créé un monstre
semblable à Frankenstein?): l'inconscient se structure comme un langage, pas saussuriennement
verbal, mais la langue nietzschiennement musicale.
Que la musique soit un langage, il n'y a pas de doute. Hautement sophistiquée, représentée par un
nombre fini de signes graphiques dont la combinatoire est infinie, la vraie musique n'est pas celle de
la chanson de frustration amoureuse (bien que pour que cela elle soit très utile), ni celle qui crée une