2ème raison : un certain nombre de biens et de services échappent au marché. A partir de deux critères,
on peut distinguer différents types de biens et de services :
Le critère d’exclusion : peut-on ou non exclure une personne de l’usage du bien ? L’accès à l’air
est accessible à tout le monde ; l’accès au pétrole est réservé à celui qui a payé une concession
d’exploitation ; la jouissance d’un paysage est donnée à tous tant qu’il ne s’agit pas d’un parc
naturel fermé…
Le critère de rivalité : la consommation du bien ou du service interdit-elle la consommation par un
autre ? le fait de respirer n’interdit pas à un autre de le faire ; une route peut être utilisée par
plusieurs personnes à la fois tant qu’il n’y a pas encombrement ; une pomme ne peut être
consommée deux fois…
Rivalité (ou divisibilité)
Non rivalité (ou indivisibilité)
Biens privés = Pétrole, terre, mine,
automobile, vêtement,…
Biens de club = Parc naturel payant,
garderie, pêche réglementée, piste de
ski, domaine de chasse, …
Biens communs (ou biens libres) =
ressources en poissons, usage de la
forêt domaniale, climat, terrain
communal…
Biens (ou services) collectifs purs =
Couche d’ozone, oxygène, éclairage
public, connaissances,…
Un bien collectif pur : Paul A. Samuelson a défini en 1954 un bien collectif par deux critères: on
ne peut exclure personne de son usage, et l'usage par un individu n'empêche pas celui d'un
autre. Les exemples les plus souvent donnés sont celui du phare ou celui de l'éclairage sur la
voie publique. La couche d'ozone est également un bien collectif pur. Elle a pour effet d'absorber
la plus grande partie du rayonnement solaire ultraviolet, qui est dangereux pour les organismes
vivants et joue donc un rôle protecteur pour les êtres vivants. Elle n’appartient à personne et
bénéficie à tous. Ses services ne peuvent donc être vendus et aucun bénéficiaire n’est prêt à en
payer un prix éventuel. Le marché est donc inopérant pour la protéger.
Un bien commun : il est caractérisé par la rivalité et la non-exclusion. La pêche en haute mer est
accessible à tous les bateaux (non exclusion) mais les poissons pêchés par un bateau ne
peuvent être capturés par les autres bateaux (rivalité). Le climat a aussi la nature d’un « bien
commun », en ce sens qu’il n’est pas exclusif puisque sa dégradation touche, bien que de
manière différenciée, tous les habitants de la planète, et qu’il est rival dans la mesure où ses
dérèglements sont la résultante de l’accumulation de gaz à effet de serre, elle-même fruit des
actions individuelles. Or, selon Garrett Harding, lorsqu'une ressource est en libre accès, chaque
utilisateur est conduit spontanément à y puiser sans limite, poussant à sa disparition. C’est la
« tragédie des communs » (1968). Si les pêcheurs ne sont pas spontanément poussés à la
coopération pour sauvegarder la ressource, ils ont tous tendance à se comporter en « passagers
clandestins » en bénéficiant de la ressource sans en payer le prix de sa disparition.
Un bien de club ou bien mixte : dans ce cas, un droit de propriété a été donné à l’usage de la
ressource dont la consommation est collective. Le droit de propriété est un droit exclusif et
absolu d’utiliser le bien approprié (usus), d’en percevoir les revenus induits (fructus), d’en
disposer totalement et de le transmettre (abusus), ce qui permet de faire payer un péage ou un
droit de passage qui ne correspond pas au prix du marché concurrentiel puisqu’il s’agit d’un prix
de monopole. En donnant ce droit de propriété, on évite le gaspillage de la ressource. C’est le
cas d’une réserve naturelle qui doit être entretenue pour continuer à attirer les touristes. Mais,
dans ce cas, tout nouveau visiteur a un coût marginal nul ce qui empêche la fixation d’un prix de
marché.
Cependant, le fait que le marché ne permet pas de répartir de façon optimale une partie des ressources
naturelles entre les différents agents économiques ne signifie pas que c’est toujours à l’Etat de s’en charger.
Jean-Marie Harribey introduit une troisième dimension dans la distinction des biens à partir du critère
public/privé :
Un bien collectif pur n’est pas forcément un bien public, c’est-à-dire offert gratuitement par une
administration publique. Ainsi, une fondation privée qui gère un parc naturel ouvert à tous, offre
un bien collectif, qui n’est pas pour autant un bien public.