La communauté juive de Sens Des randonneurs du RJIF faisant des randonnées dans la région de Sens ont contacté Monsieur Paul CHARBIT ancien président de la communauté juive de Sens. Celui-ci s'est immédiatement proposé de leur faire découvrir le Sens juif. Après une brève introduction où Mr Charbit s'est présenté, il a emmené tout le petit groupe au travers des rues de Sens. Enseignant, né à Tlemcen en Algérie, rapatrié en France et affecté au lycée de Villeneuve d'Yonne, petit bourg situé à quelque kms de Sens où il fit la plus grande partie de sa carrière avant de demander à être muté à Sens même pour que ses enfants puissent entrer au lycée. Actuellement à la retraite, fan d'histoire, il s'est spécialisé dans l'histoire des Juifs à Sens. Ayant accès aux archives de la ville de Sens, il a pu ainsi découvrir de nombreux documents sur ce passé juif de la ville. Les Juifs à Sens Sens a eu une communauté juive florissante pendant près de cinq siècles, du début du dixième siècle au début du quatorzième siècle, où les Juifs furent expulsés de France. De nombreux Juifs d'Europe de l'Est et de Palestine s'installent en Bourgogne et en Champagne en raison de la culture de la vigne. Les communautés de Reims, de Troyes (avec Rachi) et de Sens rivalisent et leurs yechivot sont des centres importants de recherche talmudique. A Sens, l'un des plus éminents rabbins est Samson ben Abraham (1150-1230) qui écrivit de nombreux tossafot. Sens au Moyen-Âge est un important archevêché, qui a sous ses ordres les évêchés de Chartres, d'Auxerre, d'Orléans, de Meaux, de Troyes et même de Paris. Les Juifs verront leur condition varier en fonction des archevêques de la ville. Parmi ceux-ci, Gauthier de Cornut fera beaucoup pour protéger les Juifs contre les agissements du roi de France. Samson ben Abraham et Gauthier de Cornut s'estimaient et l'archevêque faisait appel au rabbin pour éclaircir certains paragraphes de la Bible. Puis jusqu'à la révolution, aucun Juifs n'habitera Sens. Après certains Juifs d'origine ashkénaze s'installeront à Sens mais sans créer une réelle communauté. Ce n'est qu'en 1963, avec l'arrivée des Juifs d'Afrique du Nord que se crée une petite communauté juive à Sens. Sous l'impulsion de Monsieur Abraham Layani, cette communauté va s'organiser et une petite synagogue sera ouverte dans deux pièces gracieusement prêtées par la municipalité. La communauté comptera jusqu'à 35 familles en comptant Sens et les environs, mais suite aux départs des enfants, au vieillissement des familles, il ne reste plus que 25 familles, avec beaucoup de gens âgés. Monsieur Charbit s'est amèrement plaint qu'il n'arrive plus à réunir un miniane pour les chabbats et la synagogue ne se remplit plus qu'à Yom-Kippour. Ayant fait appel au consistoire afin d'être aidé et pour réactiver la communauté, on leur a envoyé un jeune rabbin loubavitch qui par son intransigeance a plutôt exaspéré la communauté. La visite de l'ancien quartier juif Il ne reste plus rien de l'ancien quartier juif de Sens, à l'exception du nom de deux rues: "rue de la grande Juiverie" et "rue de la petite Juiverie". On ne trouve plus aucune inscription en hébreu. Au Moyen-Âge, le terme juiverie n'avait pas le sens péjoratif qu'il a connu par la suite. Il indiquait seulement le lieu où habitaient les Juifs. Les termes "petite" et "grande" semble provenir de la largeur de la rue à l'époque, bien que certains historiens réfèrent à "grande Juiverie" comme là où habitaient les Juifs riches et "petite Juiverie", là où habitaient les Juifs pauvres. L'ancienne synagogue était située au 20 rue de l'Epée, mais le bâtiment en bois, non entretenu après l'expulsion des Juifs a du s'écrouler ou brûler pendant un des incendies qui ont ravagés Sens à la fin du Moyen-Âge. Actuellement, à son emplacement se trouve une maison à pan de bois. Curieusement, en se fiant à des écrits d'un historien de Sens du XIXe siècle, démentis depuis lors, et qui indiquait que l'ancienne synagogue devait se trouver rue actuellement dénommée rue Nonat-Fillemin, la municipalité à fait apposer sous le nom de cette rue la plaque: "Ancienne rue de la synagogue". Or c'est dans cette rue que se trouve par hasard la nouvelle synagogue. L'erreur de cet historien, spécialiste de Sens, semble provenir d'un document du MoyenÂge émanant d'un prêtre qui se plaignait auprès de la municipalité du bruit que faisaient les Juifs en priant et qui empêchait les chrétiens de prier dans son église. Or le bruit provenait d'une des tours de la ville où les Juifs avaient l'habitude de se réfugier en cas de danger. Cette tour s'est écroulée quelques années plus tard, suivie peu de temps après par l'affaissement de l'église. La "Maison d'Abraham" est une vieille maison du XVIe siècle à colombage, qui malgré son nom n'a rien à voir avec la vie juive passée ou présente de Sens. Cette magnifique maison possède un poteau cornier sculpté représentant un arbre de Jessé, représentant l'ascendance du Christ jusqu'au roi David, avec la représentation de huit rois d'Israël. Le nom d'Abraham vient d'une légende populaire voulant faire remonter l'ascendance du Christ jusqu'à Abraham… La nouvelle synagogue Portant le nom d'Abraham Layani, qui fut le fondateur et le président de la communauté de Sens des années 1960, jusqu'aux années 1980, elle est située 14 rue de la Grande Juiverie, avec entrée par la rue Nonat-Fillemin. Le bâtiment massif est l'ancien hall au sel, transformée par la suite en collège pour jeunes filles. Après le transfert de celui-ci, la municipalité a offert les locaux à différentes associations (artistiques, sportives, de bienfaisance et d'autres), dont deux pièces au rez-de-chaussée à l'Association cultuelle israélite de Sens et de l'Yonne. La première pièce sert de centre communautaire, et la seconde a été aménagée en synagogue. Tous les aménagements ont été entièrement offerts par des membres de la communauté. Un Sefer Torah a été acheté en Israël et offert par un des fidèles. La synagogue possède deux autres Sefer Torah, qui doivent être restaurés, mais ne le sont pas faute de moyens financiers. . Monsieur Charbit nous faisant l'honneur de nous présenter sa petite synagogue L'Arche Sainte ouverte avec les Sefer Torah. Plaque commémorative à la mémoire de Mr Layani fondateur de la Communauté de Sens Actuellement, Mr Charbit se dépense énormément pour préparer l'office de Yom Kippour. Il sait que pour cet office il y aura miniane avec les "Juifs de Kippour" qui ne viennent qu'une fois par an à la synagogue. Mais pour les autre fêtes, Roch Hachana; Soukkhot, .. il n'est plus sûr de rien. Combien de petites communautés sont hélas dans ce cas et risquent de disparaître?