Etude du transport de phonons et de la dissipation thermique

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Etude du transport de phonons et de la dissipation thermique dans du silicium à
l’échelle nanométrique
T. Thu Trang NGHIÊM
Université Paris Sud 11
Laboratoire IEF – UMR 8622 CNRS
15, rue Georges Clemenceau
91405 Orsay Cedex
J. SAINT-MARTIN
P. DOLFFUS
Email : [email protected]
Résumé
Ce travail étudie la génération des différents modes de
phonons (optiques et acoustiques) par des électrons dans le
silicium de type n. En utilisant une méthode Monte Carlo
particulaire, nous avons utilisé une description analytique
quadratique des relations de dispersions pour les électrons et
les phonons. En traitant les interactions électron-phonon
intravallées et intervallées selon les règles de sélection, nous
avons obtenu les cartographies de phonons générés au cours
d’une simulation. Les spectres de phonons émis/absorbés en
fonction de l’énergie permettent des études électrothermiques
microscopiques dans le silicium. Ensuite, nous proposons une
résolution déterministe des équations du transport des
phonons hors équilibres pour extraire la température locale
dans un barreau de silicium.
1.
Introduction
La miniaturisation des circuits intégrés vers l’échelle
nanométrique demande des niveaux d’intégrations
énormes : des centaines millions de transistors doivent
déjà être assemblés sur la surface d’une puce de quelques
centimètres carrés. La réduction de la longueur de canal
afin d’augmenter la densité d'intégration favorise les
pertes thermiques et donc les échauffements locaux. De
plus, il est plus difficile de dissiper la chaleur et la plupart
des nouveaux matériaux introduits ont une conductivité
thermique plus faible que le silicium massif [1]. Ce
phénomène d’échauffement implique l’interaction
d’électrons (courant) avec des phonons (chaleur) dans le
matériau.
Dans le silicium, l’interaction électron-phonon n’est
pas uniforme énergétiquement, ni spatialement [2], et les
phonons générés sont largement liées au transport
thermique : les phonons optiques ont une faible vitesse de
groupe et contribuent peu à la conductivité thermique qui
est dominée par le transport des phonons acoustiques. Les
dimensions des dispositifs à l’échelle nanométrique sont
comparables à la fois au libre parcours moyen des
électrons et des phonons, i.e., environ 5-10 nm et 200-300
nm, respectivement, dans le silicium massif à température
ambiante [3,4]. Donc, les conditions balistiques dominent
le transport de phonons et également d’électrons à de
telles longueurs.
Une modélisation numérique précise du transport
thermique à l’échelle nanométrique est très importante
pour la physique fondamentale et également pour
l’ingénierie des nanodispositifs. Il faut modéliser les
interactions des électrons, en particulier avec les
vibrations du réseau (phonons). La méthode Monte Carlo
(MC) qui est utilisée ici, est considérée comme
l’approximation la plus rigoureuse pour simuler le
transport semi-classique des porteurs dans les
semiconducteurs. Ensuite, nous nous concentrons sur le
transport de phonons dans les dispositifs submicrométriques, qui caractérise les propriétés thermiques
du matériau. Nous proposons de résoudre l’équation de
Boltzmann des phonons (BPTE) hors équilibre à partir
d’une distribution non-uniforme de phonons [5] qui sera
présentée dans la section suivante, dans l’approximation
du temps de relaxation (RTA).
2.
Simulation MC de génération de
chaleur dans le silicium
2.1
Implémentation
Les aspects généraux de la méthode MC pour le
transport de charge électronique dans les semiconducteurs
ont déjà été bien décrits [3,6]. En résolvant la BTE, MC
fournit une description précise des mécanismes de
transport, y compris les collisions subies par les porteurs
de charge (interaction avec les phonons, les impuretés,
interfaces rugueuses…). Ce travail utilise les bandes
d’énergie d’électrons analytiques et non-paraboliques
avec un paramètre non-parabolique α (α = 0.5 eV- 1 à
température ambiante). Les six vallées de bandes de
conductions ellipsoïdales et équivalentes énergétiquement
de silicium sont incluses. La relation de dispersion
d’électrons d'énergie Ek et le vecteur d’onde k est
ℏ2  k 2 k 2 
Ek (1 + α Ek ) =  t + l  (1),
2  mt ml 
Où kt, kl sont les projections des vecteurs d’onde sur
l’axe transverse et longitudinal le long du l’axe ∆ dans la
zone de Brillouin ; mt, ml sont les masses effectives
transverse et longitudinale et valent 0.9163m0 et
0.1905m0, respectivement [7]. L’utilisation analytique
représente une bonne description du transport d’électrons
aux énergies faibles jusqu'à 1 eV approximativement.
Dans cette étude, nous traitons toutes les interactions
électron-phonon inélastiquement, donc les électrons
échangent exactement leur énergie avec le réseau cristallin
(corresponds à l’absorption ou l’émission d’un phonon)
après chaque collision. Il existe deux types de collisions
électroniques : les intravallées et les intervallées.
Dans le code MC traditionnel, les interactions
intravallées sont traitées avec un seul type de phonon
acoustique. Cette simplification est construite en
regroupant la branche acoustique longitudinale (LA) et
celle de branche transverse (TA) en un seul mode sans
dispersion avec une seule vitesse de groupe. A l’inverse,
nous considérons LA et TA séparément. Chaque branche
des dispersions de phonon (inclut les deux modes
optiques) est considérée avec l’approximation isotrope
w = w0 + vs q + cq 2 (2)
2.2
Où ω est la fréquence de phonon et q est le vecteur
d’onde [8]. Les paramètres sont représentés dans le
tableau suivant et les dispersions sont tracées dans la
figure 1.
LA
TA
LO
TO
ω0
(1013 rad/s)
0.00
0.00
9.88
10.20
vs
(105 cm/s)
9.01
5.23
0.00
-2.57
des bandes électroniques sont situés en k0=0.85K[110] max,
les deux processus impliquent un changement de k à
l’extérieur du zone de Brillouin. Ces processus sont alors
les processus Umpklapps. En tenant compte les vecteurs
du processus Umklapp Kg = (2Π/a)<200> et Kf =
(2Π/a)<111>, on obtient les vecteurs de phonon Qg =
(2Π/a)<0.3 0 0 > et Qf = (2Π/a)<0.145 0.145 1> [9]. Ces
deux vecteurs sont représentés approximativement dans la
figure 1.
Parmi les potentiels de déformations intervallées très
divers présents dans la littérature [10-14], nous avons
choisi les potentiels suivants :
+ Le type intravallées : D = 6.6 eV pour les deux
modes acoustiques.
+ Le type intervallées : D1 = 3 eV pour f-TA
(correspond à l’énergie de 21.9 meV), g-TA (11.4 meV)
et g-LA (18.8 meV), D0 = 3.4x108 eV/cm pour f-LA (46.3
meV), f-TO (59.1 meV) et g-TO (63.2 meV) [7].
c
(10-3 cm2/s)
-2.00
-2.26
-1.60
1.11
Spectres de phonons générés
Nous avons simulé un barreau de silicium de dopage
1017 cm-3 sous différents champs électriques à 300K. Le
nombre net de phonons est la différence entre les phonons
émis et les phonons absorbés. Ce nombre dépend
évidemment du champ électrique (voir les figures 2 et 3).
Table 1. Coefficients de dispersion de phonons.
Figure 2. Spectre en énergie du taux de nombre net de
phonon généré par électrons sous un champ électrique de 5
kV/cm.
Figure 1. Relation de dispersion des phonons en
direction [100] dans le silicium.
Si les vecteurs d’ondes initiales et finales des électrons
sont dans la même vallée (procès intravallée), le
changement ∆k est très petit devant le vecteur réciproque
Kmax. Ce changement produit un phonon à un faible
vecteur d’onde et également à une faible énergie [9], c.à.d.
un phonon acoustique.
En raison de localisation des minimums des bandes de
conduction dans la zone de Brillouin, il existe deux types
de transitions intervallées : transition entre une vallée sur
un axe à un autre axe (processus f) et l’autre entre les deux
vallées sur un seul axe (processus g). Puisque le minima
Les pics dans ces figures correspondent aux énergies
selon les règles de sélection. Les élargissements sont dus
aux énergies cinétiques des électrons. En plus, la
magnitude relative de ces pics dépend encore du choix de
l’ensemble des potentiels de déformation. Ces spectres
sont cohérents avec les spectres obtenus par E.Pop et al.
[2].
A partir des taux de génération, nous avons pu calculer
les énergies de dissipation pour chaque type de phonons
(voir figure 4). En utilisant cet ensemble de potentiels de
déformation, on peut constater que les électrons perdent
leurs énergies principalement aux modes LA et TO. De
plus, à l’équilibre, la somme des quatre dissipations
correspond bien à la chaleur dissipée par l’effet Joule - le
produit scalaire entre la densité de courant et le champ
électrique J.E.
Où ν p − p est la fréquence d’interaction entre les
phonons, Vg(q) est la vitesse de groupe.
En remplaçant, ces termes dans l’équation de transport
∂N Vg  ∂N 
− q∇ r  u
 = ν pe NTe − N + ν pp NTe − N (6)
∂t
3
 ∂ℏω 
(
)
(
)
Et en utilisant l’approximation de temps de relaxation
n − n0
 ∂n 
=
 
τ , on obtient une équation plus simple
 ∂t  scattering
Figure 3. Spectre en énergie du taux de nombre net de
phonons générés par les électrons sous un champ
électrique de 50 kV/cm.




V g2, s ( q )
∂N
+−
∆ + 1  N s ( q ) = N T ,s ( q )
(7)
1
∂t
 3×

2


q
τ
(
)
s


1
Ou τ =
est les temps de relaxation, s est la
ν pp
polarisation, NT,s est le nombre de phonons de la
polarisation s à la température T à l’équilibre calculé par
(4) et ∆ est l'opérateur Laplacien.
Grâce à la génération de phonons donnée par notre
simulation Monte Carlo électronique, nous avons rajouté
le terme de génération Ne-q dans l’équation (7).


2

∂N  Vg , s ( q )
+ −
∆ + 1 N s ( q ) = N T , s ( q ) + N e − q ( q )
(8).
∂t  3 × 1

2


τ
q
(
)
s


Figure 4. Energie de dissipation en fonction des champs
électriques.
3.
Distribution hors équilibre de phonon
à l’échelle nanométrique
3.1
Equation de Boltzmann hors équilibre
Lorsqu’on est à l’échelle nanométrique dans le
silicium, une solution de l’équation de diffusion de
chaleur, qui prédirait le champ de température n’est
clairement pas physique [15].
La distribution des phonons est souvent décomposée
à l'ordre 1 en un terme isotrope et un terme anisotrope.
Nous considérons ce terme de déviation en fonction de
l’énergie comme suit [5]
∂N (r , q, t )
N ( r , q , t ) = N 0 ( r , q, t ) − u ( q ).q. 0
(3)
∂ℏω
Où N0 est la partie isotrope, donné par la distribution
de Bose-Einstein
1
N 0 ( q , s ) = ℏω ( q )
s
(4),
e k BT − 1
∂N 0 ( r , q , t )
Et u ( q ).q. ∂ℏω
est la petite partie anisotrope. Le
terme u (q ) se présente par l’expression suivante
u (q) =
Vg 1
× × ∇r N0
∂N 0 q
(5),
ν p− p
∂ℏ ω
Dans cette étude, nous considérons le système à l’état
stationnaire. A l’état stationnaire, il n’y a pas de variation
∂N
= 0 , et
de nombre de phonons avec le temps, on a
∂t
l’équation (8) se récrit :




V g2, s ( q )
−
∆ + 1 N s (q )
 3× 1

(9).
2


τ
q
(
)
s


= N T ,s (q ) + N e− q (q ) × τ ( q , s )
Pour les temps de relaxation des phonons LA et TA,
nous avons utilisé les paramètres de Holland [16].
−1
τ NU
= BLω 2T 3 ( LA, Normal + Umklapp )
τ N−1 = BTN ωT 4 (TA, Normal )
0

τ =
 ℏω
2
 BTU ω / sinh  k T
 B

−1
U
(TA,Umklapp pour ω < ω1/ 2 )

 (TA, Umklapp pour ω > ω1/2 )

Ou ω1/2 est la fréquence correspondante à K/Kmax =
0.5, et BL, BTN et BTU sont les constantes qui peuvent être
trouvées dans la réf. [16].
3.2
Distribution de phonon hors équilibre et
température
Dans le régime sub-continuum, nous voyons la
conduction de chaleur par le transport de phonons dans le
dispositif. Le concept de la température n’a pas de
signification dans de telles conditions hors équilibre. Il est
plus utile de considérer la distribution des phonons, qui
est un « champ de phonons » au lieu du « champ de
température » habituel [1]. La distribution de phonon peut
être convertie à un champ de «température équivalente »
en comparant la densité de phonons locales due à la
distribution hors équilibre à celle basée sur la distribution
Bose-Einstein.
Comme dit précédemment, le transport thermique dans
le silicium est provoqué par les phonons acoustiques.
Donc, c’est raisonnable d’approximer la température du
réseau par la « température » caractéristique des phonons
acoustiques.
Ensuite, on va regarder le transport des phonons dans
un barreau du silicium de dopage 1017 cm-3 (section 2.2)
sous deux champs électriques 5kV/cm et 50 kV/cm. Ce
barreau est à 300K. Nous avons placé une source de
phonons (portion de silicium polarisé) au milieu du
barreau.
Pour un champ de 5kV/cm, il n’y a pas beaucoup de
phonons émis par électron. Donc, une déviation de
phonons se présente mais elle est très faible devant la
distribution de phonon selon Bose-Einstein à 300K. On a
alors un « champ de température » de 300K pour LA, TA
et aussi pour les phonons acoustiques en total.
Pour le cas du champ 50 kV/cm, c'est différent. Dans
la figure 3, on voit que le nombre de LA net généré par
électrons est plus faible que celui de TA. La température
de TA reste à 300K. Par contre, le nombre net de phonons
LA générés par électrons est comparable au nombre de
LA à 300K selon la distribution de Bose-Einstein. Au
point de source du champ 50 kV/cm, sa température peut
atteindre 550K (voir figure 5).
Figure 5. Température de LA.
En plus, à chaque température, 70% des phonons sont
TA. Par conséquence, la température du réseau (ensemble
de LA et TA) est augmentée. La somme de la contribution
de LA et de TA donne un point chaud du réseau, de 345K
(voir figure 6). La différence des « températures » dans ce
barreau montre bien l’effet hors équilibre du réseau.
Figure 6. Température du réseau.
4.
Conclusion
Ce travail décrit une simulation Monte Carlo efficace
pour bien comprendre la génération de chaleur. Les
phonons nets générés par les électrons dans le silicium
dépendent à la fois du choix des potentiels de déformation
(propriétés de transport d’électrons) et du champ
électrique appliqué.
Ensuite, nous avons proposé un nouveau modèle pour
déterminer la distribution hors équilibre dans les
semiconducteurs, en particulier le silicium qui utilisse les
résultat du simulateur MC. A partir de cette distribution,
les températures équivalentes sont extraites, ceux qui
montrent l’effet hors équilibre à l’échelle nanométrique.
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