Document issu du site
www.enseignement-et-religions.org – 2013
Éthique et morale
analyse de Gérard Gobry
I. Etymologie
La racine grecque (eth-) évoque uniquement « usage et coutume ».
La racine latine (mor-) a une plus grande ampleur sémantique : d’abord « désir, caprice » ;
puis « us et coutume » en articulation avec la loi ; puis « genre de vie, mœurs, caractère ».
Le sens de « principes, règles » est secondaire ; celui de « rectitude, perfection des
mœurs » n’apparaît qu’au IVème siècle, sous la plume d’Ambroise, évêque de Milan.
II. Dans les dictionnaires usuels
1) Morale : domaine plutôt sociologique, ethnologique.
Sens plutôt relatif et normatif (normes propres à une société, à un groupe)
2) Ethique : domaine plutôt philosophique.
Sens plutôt général, fondamental, neutre.
Tendance contemporaine à généraliser « éthique » dans les nouveaux emplois (« éthique
médicale », avec le sens de « morale » ou de « déontologie » ; « éthique des marchés »,
« éthique sexuelle » ou « sportive »…).
3) Hors dictionnaires : domaine éducatif et religieux.
L’apprentissage par l’exemple.
Plutôt réflexion « sur » les règles, sur le mode « échec et projet ».
4) Distinctions internes :
- les comportements pratiques / les normes théoriques
- règles trouvées au cœur de l’individu / règles transmises et imposées par la société
- analyse de l’intérieur / de l’extérieur du système normatif
- description de la normalité / analyse de ses fondements phénoménologiques
III. Chez les philosophes
Notions collatérales :
- volonté : distinction entre ce qu’on veut, qu’on peut, qu’on applique…
- raison : et ce qui échappe à la raison ?
- valeur : le « vivre » et la « dignité humaine » échappe à la « valeur » (qui est
comparative, évaluative, relative) : ils sont en quelque sort « a-moraux ».
1) Paul Ricoeur : l’éthique comme « visée » ; la morale comme « norme ».
Ethique : ce qu’on estime bon, par convention philosophique.
Morale : ce qui s’impose dans des normes caractérisées.
Une interdépendance entre les deux, avec priorité à l’éthique.
3) Schopenhauer : Ethique : le bon rapport à soi. Morale : le bon rapport aux autres
L’éthique concerne le rapport intime à soi, au sujet (« subjectivité »).
La morale concerne « objectivement » le rapport à la norme : ce qu’il faut faire
(« déontologie »).
La « vie bonne » doit être accomplie par le « sujet éthique » en fonction des règles du
monde.
4) Gilles Deleuze : Immanence et transcendance.
L’éthique concerne l’ « être bien pour soi », selon la puissance « immanente » qui est
l’essence de l’individu.
Différences qualitatives des modes d’existence bons et mauvais.
La morale concerne l’ « être bien pour autrui », selon des valeurs « transcendantes ».
Opposition entre le Bien et le Mal.