rappels 1 deplacements chimiques des composes organiques

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RAPPELS 1 DEPLACEMENTS CHIMIQUES DES COMPOSES ORGANIQUES 1. Le déplacement chimique 1.1. Blindage nucléaire Dans un atome ou une molécule, le champ Beff réellement subit par un noyau diffère légèrement du champ externe B0 (champ subit par un noyau isolé, dépourvu de ses électrons). Dans un atome le champ magnétique externe B0 induit des courants électroniques (diamagnétisme) qui eux‐mêmes génèrent un champ magnétique supplémentaire dans la direction opposée à B0. Ainsi le champ Beff ressenti par le noyau est légèrement différent du champ B0 . Le noyau est donc « blindé » par les électrons qui l’environnent, du champ B0. Le champ magnétique induit B’ est proportionnel à B0 et 10‐4 à 10‐5 plus faible. Ainsi, le champ effectif Beff ressenti par le noyau de l’atome peut être écrit : 1
 est la constante d’écran du noyau. En solution,  est un nombre sans dimension, dont les valeurs sont typiquement de l’ordre de 10‐5 et 10‐4. Pour les noyaux d’atomes constituant une molécule, des effets similaires sont observés sauf que le mouvement des électrons est plus complexe que pour un atome isolé et que les champs induits peuvent s’ajouter ou s’opposer au champ externe. Cependant l’effet est toujours décrit comme un blindage magnétique du noyau. La taille et le signe de la constante d’écran sont déterminés par la structure électronique moléculaire au voisinage du noyau : les constantes  sont des constantes moléculaires. Par conséquent, la fréquence de résonance du noyau i dans une molécule devient caractéristique de son environnement 2
1
C’est l’effet le déplacement chimique. 1.2. Mesure du déplacement chimique Pratiquement, le déplacement chimique est mesuré par une différence de fréquence entre le noyau étudié et le noyau d’une substance de référence par l’intermédiaire d’un paramètre sans dimension «  » : 1/15
10 i : fréquence de résonance du noyau i
ref : fréquence de résonance du noyau dans le composé de référence
i est une quantité sans dimension. Le facteur 106 est introduit pour simplifier les valeurs numériques et i est donné en partie par million ou ppm. En remplaçant les fréquences de résonance par leur expression en fonction des constantes d’écran, le déplacement chimique s’écrit 10
ceci montre que le déplacement chimique est une mesure relative de la constante d’écran, indépendante du champ B0. Pour 1H et 13C, le composé de référence utilisé est le tétraméthylsilane Si(CH3)4. 1.3. Notion d’équivalence chimique : Deux ou plusieurs noyaux magnétiques sont dits chimiquement équivalents lorsqu’ils ont le même environnement chimique. Ils ont alors la même constante d’écran électronique et la même fréquence de résonance (ils sont dits isochrones). Par conséquent, des noyaux reliés par un ou plusieurs éléments de symétrie ou interchangeables par un processus dynamique rapide sont chimiquement équivalents et ne peuvent pas être distingués par RMN. 
Concernant des noyaux ou groupes de noyaux échangeables par opération de symétrie trois types de situations sont considérés en termes d’équivalence chimique Homotopie : Des noyaux (ou groupes de noyaux) sont dits homotopiques s’ils sont échangeables par une rotation. Dans ce cas, ils sont chimiquement équivalents. Exemples : Les 2 H sont homotopiques car échangeables par un axe de rotation C2, sont chimiquement équivalents  ils ont le même déplacement chimique Les 6 H sont chimiquement équivalents car échangeables par un axe de rotation C6  ils ont le même déplacement chimique 2/15
Deux groupes distincts de H chimiquement équivalents interchangeables par un axe C2 : les CH2 a et les CH3 b. Il y a donc deux signaux de déplacements chimiques distincts pour les H de cette molécule. Les deux groupements CH2 sont homotopiques ainsi que les groupements CH3. Enantiotopie : Des noyaux (ou groupes de noyaux) sont dits énantiotopiques s’ils sont interchangeables par une opération de rotation suivie d’une réflexion. Dans ce cas les déplacements chimiques sont identiques. Les 2 H sont énantiotopiques car échangeables par un plan de symétrie plan de la feuille), ils sont chimiquement équivalents  ils ont le même déplacement chimique Diastéréotopie Des noyaux (ou groupes de noyaux) sont dits diastéréotopiques s’ils ne sont pas interchangeables par une opération de symétrie. Dans ce cas, les déplacements chimiques sont différents. H3C H
COOH
HO
aH H b

Les 2 H, Ha et Hb ne sont pas échangeables par opération de symétrie, ils ne sont par conséquents pas chimiquement équivalents. Ce sont des H d’un groupement CH2 diastéréotopiques. Ils donnent par conséquent un signal chacun. Ce cas est particulièrement rencontré pour les H, ou groupements se trouvant à proximité d’un carbone asymétrique Concernant les noyaux chimiquement équivalents car échangeables par processus dynamique, on peut donner l’exemple des 3 H d’un groupement CH3‐ . La rotation du groupement CH3 est trop rapide par rapport à l’échelle de temps de l’expérience RMN. Les 3H sont indistinguables, la RMN ne voit qu’un seul environnement chimique moyen: ils sont par conséquent chimiquement équivalents . H
H
H
3/15
1.4. Origine des déplacements chimiques Un champ magnétique peut induire deux types de courants électroniques dans une molécule : diamagnétique et paramagnétique. Les courants diamagnétique et paramagnétique circulent dans des directions opposées et donnent lieu à des effets de « blindage » et « déblindage », respectivement. La constante d’écran peut donc être écrite comme la somme des contributions diamagnétique et paramagnétique  = d + p avec d >0 et p<0 Les courants diamagnétiques proviennent essentiellement du mouvement des électrons dans les orbitales atomiques ou moléculaires. La taille du courant diamagnétique est déterminée uniquement par la fonction d’onde électronique de l’état fondamental, elle dépend sensiblement de la densité d’électron proche du noyau et fournit la seule contribution à  pour les atomes de couches complètes sphériques. Le blindage diamagnétique est assez facile à calculer pour des atomes et varie fortement avec le nombre d’électrons : 17.8 ppm pour l’hydrogène, 261 ppm pour le carbone, 961 ppm pour le phosphore. Ces valeurs absolues de constantes d’écran diamagnétiques sont néanmoins relativement peu utiles car elles s’avèrent peu précises, même pour des molécules présentant des distributions de charge sphérique, et les écarts observés (théorie‐expérience) sont encore plus grands lorsque l’on considère des distributions de charge non sphériques. La constante de blindage paramagnétique a pour but de corriger ces écarts en tenant compte de la distribution de charge non sphérique. Le terme paramagnétique vient simplement du fait que la constante d’écran correspondante est de signe opposé à celui de la constante diamagnétique. La théorie suggère que p est inversement proportionnelle à E, l’énergie d’excitation électronique moyenne. La constante d’écran est aussi liée à la distance R entre le noyau et les électrons environnants. 1 1
∆
Ainsi plus l’énergie d’excitation électronique est faible, plus la contribution p est grande. Pour l’atome d’hydrogène, même lorsqu’il est lié, E est élevée, ce qui implique que la constante paramagnétique soit faible. En revanche, pour les atomes lourds, et même pour le carbone 13C (bien que celui‐ci ne soit pas particulièrement lourd) la situation est très différente. Ces atomes ont des états excités de faibles énergies, de telle sorte que la constante paramagnétique devient importante. Dans tous les cas, néanmoins, p est toujours plus faible que d, et du coup le blindage résultant est systématiquement positif. Cet aspect est particulièrement important lorsque l’on considère des noyaux tels que 19F ou le 31P. 1.5. Contributions au blindage nucléaire D’après la section précédente, calculer les déplacements chimiques à partir du premier principe reste assez complexe. Les déplacements chimiques sont extrêmement sensibles à de subtils changements de densité électronique, quelquefois dans des régions de la molécule relativement éloignées du noyau concerné. Il est alors nécessaire de connaître la fonction d’onde de l’état fondamental et toutes les fonctions d’onde des états excités électroniques d’une molécule avec précision. En réalité, les deux constantes d’écran précédentes (d et p) ne sont pas suffisantes pour expliquer totalement les déplacements chimiques observés. D’autres termes doivent être considérés et la constante d’écran peut être écrite comme la somme de différentes contributions : 4/15
 =  d local
+ p local
+ groupements voisins
+ autres
Les deux premières contributions proviennent des électrons à proximité immédiate du noyau. Le troisième terme tient compte d’effets diamagnétiques et paramagnétiques provenant de groupements voisins. La partie finale inclut des effets liés à la présence de champ électrique moléculaire, liaison hydrogène, solvant, électrons non appariés. 1.5.1.Déplacements diamagnétiques locaux Les contributions au déplacement chimique des courants diamagnétiques dépendent fortement de la densité électronique autour du noyau : plus la densité électronique est grande, plus le blindage est important et le déplacement chimique est faible. Cette densité va dépendre fortement des effets inductifs donneur ou attracteur des substituants liés directement au noyau considéré, mais aussi des effets mésomères dans le cas de protons de systèmes conjugués. 1.5.2.Déplacements paramagnétiques locaux Les déplacements chimiques 13C de benzènes monosubstitués fourni un bon exemple de la dépendance de p en <R‐3>. Le carbone para est déblindé par un groupement électroattracteur mésomère et blindé par un groupement électro donneur. Bien que la tendance soit la même que celle observée pour le 1H dans ces composés, l’effet est d’origine paramagnétique plutôt que diamagnétique. Les groupements électro donneurs délocalisent leurs paires d’électrons dans le cycle et augmentent la densité électronique sur les carbones en position ortho et para. La répulsion électronique augmentée provoque l’expansion des orbitales autour de ces atomes, diminuant <R‐3> et par conséquent la valeur de . Ceci explique pourquoi le domaine de déplacement chimique des protons est aussi petit comparé à ceux des autres noyaux (env.15 ppm pour 1H ; 220 ppm pour 13C ; 300 ppm pour 19F ; 500 ppm 31P). Les courants locaux diamagnétiques et paramagnétiques apportent de modestes contributions au blindage 1H à cause des faibles densités électroniques et des fortes énergies d’excitation associées aux atomes d’hydrogènes. En effet, les déplacements chimiques 1H sont plus souvent fortement influencés par les courants diamagnétiques et paramagnétiques induits par les groupes d’atomes voisins comme nous allons le voir par la suite. 1.5.3.Effets des groupements voisins (Anisotropie de susceptibilité magnétique, courant d’anneaux) Les liaisons chimiques sont généralement magnétiquement anisotropes. Cela signifie qu’elles possèdent des susceptibilités magnétiques différentes suivant la direction du repère cartésien considérée. De ce fait, les moments magnétiques induits par le champ magnétique externe B0 ne sont pas égaux dans les différentes directions, et l’écran effectif ressenti par un noyau dépend de sa position géométrique par rapport au reste de la molécule. Pour les groupes caractérisés par une distribution de charge symétrique, la modélisation des phénomènes observés est relativement simple. Dans ce cas, on peut définir deux susceptibilités magnétiques: l’une perpendiculaire ( ) et l’autre parallèle ( ) à l’axe de la liaison chimique covalente. En traitant, le moment magnétique induit dans le champ comme un point de dipôle et en tenant compte que les molécules en solution se réorientent, la relation permettant dans ce cas d’exprimer la constante d’écran moyenne est: 5/15
1
3 4
1
3
Cette équation relie la contribution moyenne au blindage d’un noyau donné (
) à : ‐ la distance r entre le centre du dipole (noté Z) et le noyau impliqué (ex : rA ou rB) ‐ l’angle  entre la ligne joignant ce centre Z au noyau observé (HA ou HB) par rapport à l’axe A, direction du moment magnétique induit. Cette équation nous permet de remarquer deux points fondamentaux : ‐ dépend uniquement de la géométrie et des susceptibilités magnétiques, et non pas du noyau observé. Par conséquent l’amplitude de l’effet considéré est le même quelque soit le noyau, à savoir par exemple le proton et le carbone. ‐ peut s’annuler lorsque l’angle  devient égal à 54.7°. De ce fait, on peut définir un double cône le long des groupes magnétiquement anisotropes séparant les contributions positives et négatives au blindage. A la surface du cône, nous avons = 0. Un exemple classique d’un groupe magnétiquement anisotrope est l’acétylène. La figure ci‐dessous représente le double cône d’anisotropie et les signes des contributions à la constante d’écran. Les deux hydrogènes sont placés sur l’axe moléculaire dans la région du signe positif, et sont donc davantage blindés. De ce fait le signal du proton dans le spectre est relativement haut (2.88 ppm). Sur la base de la distribution électronique simplement, on aurait dû s’attendre à une valeur légèrement plus faible que celle observée pour les protons de l’éthylène, qui résonnent à 5.28 ppm. Bien que la distribution de la densité électronique dans les double liaisons CC et CO ne soit plus symétrique, des cônes d’anisotropie ont aussi été calculés pour ces groupes. Ainsi, l’anisotropie de la fonction carbonyle explique qualitativement pourquoi les aldéhydes résonnent à champ si faible (9 – 10 ppm) : ces portons étant effet dans la zone du cône qui est caractérisée par une contribution négative au blindage. 6/15
Liaison double CC
Liaison CO
Un autre exemple est celui des cycloalcanes, présentant une conformation stérique rigide, qui donne lieu à des différences de déplacements chimiques comprises entre 0.1 et 0.7 ppm pour les protons axiaux et équatoriaux ; les protons axiaux étant plus blindés que les protons équatoriaux. On peut voir dans les exemples précédemment traités que, pour toutes les molécules, à l’exception de l’acétylène, les régions ayant un écran négatif se trouvent le long de la direction de l’axe de la liaison. L’effet d’anisotropie est indépendant du noyau observé. Les déplacements occasionnés pour les protons et les carbones sont donc de même amplitude. On les considère de l’ordre de quelques ppm. Cependant, puisque la gamme totale de déplacement chimique est plus importante en spectroscopie 13C que 1H, la fraction que l’on peut attribuer à l’anisotropie magnétique est plus faible (mais non négligeable).  Courants d’anneaux Le signal 1H des protons d’un noyau benzénique résonne à 7.27 ppm, tandis que celui de l’éthylène résonne à 5.28 ppm. On observe assez généralement que les protons des arènes sont moins blindés que ceux des alcènes. Cet effet peut être expliqué en considérant un courant d’anneau induit, qui se met en place dès lors que la molécule qui possède des électrons  délocalisés est placée dans un champ magnétique. Ce courant d’anneau génère à son tour un champ magnétique supplémentaire, dont les lignes de champ au centre du noyau aromatique sont dans la direction opposée au champ magnétique appliqué. Ceci conduit de nouveau à des régions de blindage plus ou moins important au niveau de la molécule. Les atomes d’hydrogène directement attachés au noyau sont situés dans une zone où les lignes de champ augmentent la valeur du champ magnétique, c'est‐à‐dire dans la région de plus faible blindage. Le courant d’anneau est plus fort lorsque le plan du noyau aromatique est perpendiculaire au champ magnétique. En revanche, il est nul lorsque l’un de ces axes plan est parallèle au champ magnétique B0. Expérimentalement, on mesure toujours des valeurs moyennes, puisque les molécules sont en mouvement rapide en solution. A noter que ceci n’est qu’un modèle, qui a été proposé pour expliquer les données expérimentales (à savoir les valeurs de déplacement chimique observées). Ce modèle est illustré par de nombreux cas réels, à tel point qu’il a même été proposé pour définir l’aromaticité d’un composé. 7/15
Dans les systèmes larges insaturés pour lesquels les électrons  satisfont à la règle de Hückel, on obtient des effets similaires qui indiquent l’existence d’un courant d’anneau. Exemples : Les CH2 liés au cycle sont déblindés car à l’extérieur de la zone de blindage liée au courant d’anneau. En revanche, les CH2 au dessus du cycle ont une valeur inhabituellement basse (0.8 ppm) liée à leur position dans la zone de blindage du courant d’anneau. Ici la tendance est la même les H à l’extérieur du cycle sont déblindés par l’effet du courant de cycle alors que ceux à l’intérieur sont fortement blindés. L’effet est d’autant plus marqué que le nombre d’électrons dans le système  est important (ici 18 électrons ) En RMN du 13C, le courant d’anneau est moins important puisqu’il contribue peu au blindage total (quelques pourcents). Pour le benzène, cela peut s’expliquer de manière très simpliste en considérant le fait que les atomes de carbones se trouvent sur la boucle de courant, là où le champ induit est exactement égal à zéro. 1.5.4.Autres contributions au blindage nucléaire  Effet du champ électrique d’un groupement Dans une molécule contenant des groupements polaires tels que des fonctions carbonyles ou nitro, il existe un champ électrique intramoléculaire. Ce champ influence la distribution de la densité de charge dans la molécule et de ce fait le blindage magnétique des noyaux. De ce point de vue, les variations de déplacements chimiques des résonances 1H et 13C qui ont lieu lors de la protonation d’une amine sont aussi le résultat des effets de champ électrique. 
Interactions intermoléculaires : liaisons hydrogène et effets de solvant Liaison hydrogène : Les protons attachés à un oxygène par l’intermédiaire d’une liaison hydrogène ont des blindages particulièrement faibles, avec des déplacements chimiques qui sont souvent de l’ordre de 10 ppm. Cependant, la valeur exacte du déplacement chimique considéré ne peut pas être spécifiée, puisque les fréquences des signaux dépendent de la température et de la concentration. Les protons reliés à un atome d’oxygène dans les énols ont des blindages extrêmement faibles. Par exemple, pour l’acétylacétone dans sa forme énol dans un solvant comme le chloroforme, le signal des protons OH résonne vers 15.5 ppm. 15.5 ppm
H
O
O
8/15
Effets de solvants : Si la substance dissoute interagit avec le solvant, ceci conduit à une variation des déplacements chimiques des signaux de cette substance. De tels effets sont facilement détectables lorsque l’on analyse une substance dans un solvant non polaire (comme par exemple le CCl4), dans un solvant polaire (DMSO), et un solvant magnétiquement anisotrope comme le benzène. Néanmoins, il n’est pas possible de généraliser (c'est‐à‐dire que cela ne fonctionne pas toujours). Sur la base de tels effets, les solvants peuvent être utilisés pour attribuer les signaux de la substance dissoute. 
Effets isotopiques Remplacer un carbone 12 par un carbone 13 ne conduit qu’à une faible variation du déplacement chimique proton. Les effets sont en revanche plus importants pour les spectres 13C des molécules deutériées. Exemple : C(C6H6)= 128.53 et C(C6D6)= 128.00 De manière générale, le remplacement d’un isotope léger par un isotope plus lourd conduit une augmentation du blindage. Pour résumer RMN 1H : Les déplacements chimiques proton sont déterminés principalement par le terme de blindage diamagnétique (terme de blindage paramagnétique = faible correction uniquement). Le nombre et la nature des substituants, l’anisotropie magnétique des groupements voisins, les courants d’anneaux, les effets de champ électrique, les liaisons hydrogène, et les interactions intermoléculaires avec les solvants et les agents de complexation, influencent le blindage de manière spécifique. RMN 13C : Les positions des résonances pour le carbone et les noyaux plus lourds sont déterminées principalement par la constante de blindage paramagnétique. Les effets intra et intermoléculaires, exprimés en ppm, sont de même amplitude qu’en RMN proton, et de ce fait d’importance plus faible compte tenu de la large gamme de déplacement chimique impliquée pour ces noyaux. 2. Déplacements chimiques 1H et 13C des molécules organiques Quelle relation existe‐t‐il entre les déplacements chimiques et la structure des molécules ? On a vu qu’il était pratiquement impossible de calculer de manière totalement fiable les déplacements chimiques de noyaux donnés. De ce fait, le spectroscopiste doit travailler de manière empirique en utilisant des règles et des tables qui regroupent les valeurs de déplacements chimiques pour des classes de composés. La gamme de déplacement chimique du proton couvre grossièrement 10 ppm, tandis que celle du carbone s’étend sur plus de 200 ppm. Une conséquence directe de cela est que, pour une même largeur de raie, on peut s’attendre à une meilleure résolution dans le spectre carbone 13C que dans le spectre 1H. Dans les deux cas, la référence de déplacement chimique est le TMS (tétraméthylsilane). Il est important de remarquer que, compte tenu de la méthode avec laquelle les spectres 13C sont enregistrés, la seule information qu’ils permettent généralement d’obtenir est le déplacement chimique (pas de couplage scalaire). Cela signifie que dans la majorité des cas (sauf pour une molécule symétrique) chaque carbone est associé à un signal donné. 9/15
2.1. Alcanes et cycloalcanes 2.1.1.RMN 1H ALCANES. L’influence la plus grande pour le déplacement chimique des alcanes provient de la présence et de la nature des substituants. On peut notamment remarquer l’influence de l’électronégativité du substituant. Ce genre d’effets est généralement considéré en termes d’effets inducteurs. Exemple : déplacements chimiques des H d’un groupement méthyle pour différents substituants X (EX : électronégativités du substituant) Cet effet est additif et décroit avec la distance entre les substituants. Exemple : CH2Cl2
CHCl3
CH3Cl 3.05 5.33 7.26 (ppm) CH3CH2Cl CH3CH2 CH2Cl CH3Cl 3.05 1.42 1.04 (ppm) De nombreuses règles empiriques sont disponibles pour estimer les valeurs de déplacements chimiques. On en mentionnera que deux ici :  Pour un substituant donné X, les protons CH3 sont généralement plus fortement blindés que les CH2, eux‐mêmes plus fortement blindés que les CH. (CH3)2CHCl CH3CH2Cl CH3Cl 4.13 3.51 3.05 (ppm) 
Pour les protons des groupes CH2 avec 2 substituants X et Y (X‐CH2‐Y), le déplacement chimique peut être estimé en utilisant la règle de Shoolery, 0.23
avec Sx et Sy constantes de blindage effectives regroupées pour certains substituants dans le tableau suivant : 10/15
Substituant ‐CH3 ‐CF3 ‐CR=CR’R’’ ‐COOR ‐COR ‐CONH2 ‐C6H5 S
0.47
1.14 1.32 1.55 1.70 1.70 1.83 Substituant
‐NRR’
‐I ‐Br ‐OR ‐Cl ‐OH ‐OCOR S
1.57 1.82 2.33 2.36 2.53 2.56 3.13 CYCLOALCANES. Dans les cycloalcanes, les déplacements chimiques dépendent de la taille de l’anneau, de la mobilité conformationnelle, et de l’encombrement stérique. 2.1.2.RMN 13C ALCANES. A la différence des spectres 1H des alcanes, qui montrent le plus souvent des signaux très larges dans la zone 0.8‐2.0 ppm ; les spectres 13C des alcanes s’étendent entre 0 et 60 ppm. Dans les alcanes, les substituants ont des effets considérables sur les valeurs de déplacements chimiques. Le déplacement chimique d’un carbone donné dépend du nombre de carbones voisins dans les positions  et, ainsi que du degré de ramification. Exemple : Déplacements chimques 13C des dérivés propane XCH2‐CH2‐CH3 X H CH3 NH2 OH NO2 F Cl Br I
(C) 16.1
24.9 44.6 64.9 77.4 85.2 46.7 35.4 9 (C) 16.3
24.9 27.4 26.9 21.2 23.6 26.0 26.1 26.8 (C) 16.1 13.1 11.5 11.8 10.8 9.2 11.5 12.5 15.2 On distingue trois types d’effets , et . L’effet  augmente avec l’électronégativité du substituant, le fluor peut ainsi induire un déplacement de 70 ppm. Même chose pour le brome et le chlore. Pour l’iode, les choses sont différentes. Dans ce cas, le très grand nombre d’électrons de l’atome d’iode contribue à modifier le terme diamagnétique du carbone 13 qui lui est directement relié : c’est ce que l’on appelle l’effet de l’ « atome lourd », qui augmente dans le cas de substitutions multiples. Ainsi, le signal carbone 13 de la molécule CI4 résonne vers ‐292 ppm, ce qui représente le déplacement chimique 13C le plus important observé pour une molécule non chargée. L’effet  est beaucoup plus faible. C’est toujours un effet déblindant. Cependant, il semble qu’il n’y ait pas de corrélation avec l’électronégativité. L’effet  conduit à un blindage. Une telle augmentation du blindage est observée dans la plupart des alcanes non cycliques, et dépend principalement d’un effet stérique. CYCLOALCANES Le déplacement chimique 13C du cyclopropane est exceptionnellement faible (‐2.8 ppm). En revanche, ceux observés pour les autres cycloalcanes sont du même ordre de grandeur (22‐28 ppm). 11/15
2.2. Alcènes 2.2.1.RMN 1H Les déplacements chimiques des alcènes s’observent entre 4 et 7.5 ppm. Les effets des substituants peuvent être inducteurs, mésomères ou stériques. 2.2.2.RMN 13C Les signaux 13C des carbones des double‐liaison s’observent entre 100 et 150 ppm. Les déplacements chimiques sont de nouveau très sensibles aux substituants. H
H
1
C
2
C
X
(C1) 123.5
133.4 137.2 137.0 148.2 125.9 115.6 85.2 153.2 145.6 X H CH3 CH=CH2 C6H5 F Cl Br I OCH3 NO2 H
(C1) 123.5
115.9 116.6 113.2 89.0 117.2 122.1 130.3 84.1 122.4 A l’exception des groupements Br, CN, et I, les effets de substituants réduisent le blindage du carbone C1 et augmente celui du carbone C2 par rapport à celui de l’éthylène. La grande influence mise en évidence pour le blindage du carbone C1 peut être expliquée qualitativement par l’effet inducteur du substituant. De plus, on s’attend aussi à un effet mésomère. Le très large effet  obtenu sur le carbone pour X= CH3O peut s’expliquer en considérant les formes mésomères associées. H3 C
O
CH
CH2
H 3C
O
CH
CH2
De nouveau l’iode se comporte de manière particulière, dû une nouvelle fois à l’effet de l’« atome lourd ». 2.3. Les arènes 2.3.1.RMN 1H Dans les composés aromatiques le blindage est principalement donné par un effet mésomère des substituants. De ce fait dans l’aniline les protons dans les positions ortho (6.5 ppm) et para (6.7 ppm) sont plus fortement blindés que ceux en position meta (7.0‐7.2 ppm). Le schéma ci‐dessous illustre cela en montrant les structures mésomères limites. De plus, tous les protons sont plus fortement blindés que ceux du benzène (7.27 ppm). Evidemment le groupement amino augmente la densité électronique dans l’anneau au travers d’un effet +M, plus particulièrement pour les positions ortho et para dans ce cas. Pour le nitrobenzène d’un autre côté, tous les signaux apparaissent à des plus grandes valeurs de  ; les protons sont moins blindés que les protons du benzène, puisque le groupe nitro soustrait les électrons de 12/15
l’anneau (effet –M). Ceux qui sont le plus affectés sont de nouveau les protons en position ortho, avec une valeur de  de 8.17 ppm et les protons para qui résonnent à 7.69 ppm (les protons meta résonnent à 7.53 ppm). Les formes mésomères limites sont de nouveau en accord qualitatif avec ce résultat. Expérimentalement, il a été montré que pour des noyaux aromatiques multi‐substitués, les effets des substituants sont additifs. Ainsi, il est possible de définir empiriquement des valeurs d’incréments que l’on peut ensuite utiliser pour prédire le déplacement chimique d’un proton donné. 2.3.2.RMN 13C Les signaux 13C du benzène, des benzènes substitués et autres composés aromatiques, s’observent dans la zone 120‐140 ppm. L’introduction de substituants étend la gamme de déplacement chimique et les signaux des arènes substitués peuvent s’observer dans une plus large zone spectrale 100‐150 ppm. Puisque les signaux des alcènes se trouvent aussi dans cette zone, l’attribution des signaux carbone 13 n’est pas immédiate. Dans ces composés substitués, les résonances les plus affectées sont celles du carbone directement attaché au substituant, puis les carbones en ortho, et para. Les résonances en méta montrent des effets très faibles. Les déplacements observés dépendent des effets inducteurs et mésomères des substituants. Il faut également considérer les effets stériques et ceux d’anisotropie magnétique. Remarque : Noyaux hétéro‐aromatiques Dans les hétérocycles aromatiques, le blindage des noyaux de l’anneau aromatique est principalement déterminé par l’hétéroatome. La pyridine est un exemple intéressant. Dans ce cas, les signaux des carbones
en  et  sont légèrement plus blindés, qu’en position . Ces observations peuvent s’expliquer de manière qualitative en tenant compte de la densité électronique des formes mésomères limites. 136.0
123.5
149.9
N
N
N
N
2.4. Alcynes 2.4.1.RMN 1H La situation particulière de l’acétylène a déjà été décrite. Malheureusement, la région où l’on trouve les déplacements chimiques des protons acétyléniques (2‐3 ppm) se chevauche avec celles d’autres types de 13/15
protons, particulièrement celle des alcanes substitués. Par conséquent un signal de cette région ne fournit en aucun cas une preuve de la présence de protons en proximité d’une triple liaison carbone. Les déplacements chimiques des protons acétyléniques dépendent de l’électronégativité des substituants, de la conjugaison, et des effets de solvants (particulièrement significatifs pour les alcynes). HC
2.36
CH
HC
1.80
CCH3
HC
CC6H5
3.0
2.4.2.RMN 13C En comparant les déplacements chimiques de l’acétylène et de l’éthylène, on remarque que les carbones 13 de l’acétylène sont remarquablement blindés. L’anisotropie magnétique de la liaison triple CC, qui est responsable du blindage important observé pour les protons, est insuffisante pour expliquer le blindage observé pour les carbones. En réalité, il est nécessaire de considérer la constante de blindage paramagnétique puisque c’est elle qui gouverne principalement la valeur du déplacement chimique des atomes de carbone. Puisque que E est plus grand pour l’acétylène que pour l’éthylène, cela signifie que la constante de blindage paramagnétique est plus faible. Cependant, p est une correction négative et de ce fait le carbone dans l’acétylène est plus blindé que celui de l’éthylène. Le même raisonnement s’applique pour les alcynes substitués. Les effets observés sont très importants notamment pour le groupe éthoxy. Pour les alcynes substitués par des halogènes, l’effet de l’atome lourd est bien visible. 2.5. Les composés carbonyliques ou carboxyliques 2.5.1.RMN 1H Les signaux des aldéhydes peuvent facilement être détectés du fait de leur position caractéristique (région 9‐11 ppm). Dès lors que des signaux RMN apparaissent sous la forme de simples multiplets dans cette zone du spectre, on peut immédiatement suspecter la présence d’un aldéhyde. Les effets des substituants dans ce cas sont très faibles. O
O
C
O
C
CH3
CH
C
CH2
H
H
H
9.8
9.5
10.0
C6H5
2.5.2.RMN 13C Les résonances 13C des groupes carbonyles (cétones, aldéhydes) et groupes carboxyliques et de leurs dérivés (esters, anhydrides, amides) s’observent dans une gamme allant de 160 – 200 ppm. Dans la plupart des cas ce sont des atomes quaternaires, qui donnent en général des signaux de très faible intensité du fait de leurs temps de relaxation spin‐réseau très longs. 2.6. Remarques : Protons échangeables OH, NH, SH La position des résonances des protons NH, SH, et OH est sujette à de très larges variations. En effet, ces atomes d’hydrogènes peuvent participer à des liaisons hydrogène et s’échanger (avec des degrés d’acidité bien spécifiques). Leurs déplacements chimiques sont de plus influencés par la concentration, la 14/15
température, le solvant, et les impuretés telles que l’eau par exemple. Par conséquent les déplacements chimiques de ces noyaux ne sont reproductibles que dans des conditions expérimentales très spécifiques. C’est la raison pour laquelle on spécifie le plus souvent une large gamme de valeurs de  pour ces substituants, plutôt que des valeurs précises. Type de composés (H) OH : alcool
Phénol acide énol 1‐5
4‐10 9‐13 10‐17 NH : amine
amide amide (peptide) 1‐5
5‐6.5 7‐10 SH: thiol aliph.
thiol arom. 1‐2.5
3‐4 L’échange H‐D est pour ces protons échangeables un outil très utile pour attribuer les signaux d’un spectre car, après échange avec le deutérium, le signal RMN du spectre proton correspondant doit disparaître. 15/15
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