pays abritant ce massif forestier qui les considèrent, chacun dans les limites de ses frontières,
comme étant une richesse nationale. Evidemment, de nos jours, il est tentant d’appliquer à la
protection de l’environnement une notion ayant une résonance générale voire métajuridique
,
mais surtout faussement rassurante dans la mesure où elle connote l’idée de communauté et
d’implication de tous dans la responsabilité de la protection aussi bien que dans le droit de
jouissance. Les critères politiques de souveraineté ou économiques et financiers seraient
relativisés et déterminés par une exigence écologique supérieure parce que concernant l’humanité
toute entière
. Aussi, est-ce naturellement que l’on a suggéré dans divers forums réunis dans le
cadre de la préparation de la CNUED que les forêts reçoivent cette qualification juridique et par
suite, soient élevées à la catégorie d’un bien supranational, échappant à l’emprise de leurs
légitimes propriétaires qui n’en deviendraient alors que des gardiens, certes privilégiés, mais dans
l’intérêt de tous
. De toute façon, des formulations ambiguës telles que celles qui déclarent que
« les forêts tropicales humides sont de plus en plus considérées comme un bien environnemental
mondial à cause de leur biodiversité et de leur impact possible sur le climat »
cachent à peine,
comme le relève Maurice Kamto, cette idée de patrimonialisation des ressources forestières au
profit de l’humanité, en particulier celles des pays en développement, puisque toutes les forêts
tropicales humides y sont situées
.
S’agissant de la notion de « patrimoine commun » appliquée aux forêts du Bassin du
Congo, les pays qui les abritent la considèrent comme un moyen pour les pays développés
d’avoir un accès libre à leurs ressources et de continuer sous un nouveau label leur exploitation. Il
est à noter que cette controverse se déroule essentiellement sur le terrain politique alors que l’idée
de patrimonialisation d’une ressource est par dessus tout une question juridique puisqu’elle
implique une opération de qualification qui ne peut se faire qu’à travers la détermination de la
des ressources pour l’humanité : le droit de la mer, Colloque de La Haye, 29-31 octobre 1991, Martinus Nijhoff
Publishers, 1978, pp. 125-126.
Lire avec fruit l’approche morale de la notion de patrimoine commun de l’humanité faite par Henri Sanson, « Le
droit de l’humanité à une Maison-Terre habitable », in L’avenir du droit international de l’environnement, colloque
de La Haye, 12-14 novembre 1984, Martinus Nijhoff Publishers, 1985, p. 443.
Voir E. Le Roy, « Le patrimoine commun, notion juridique en évolution », in E. Le Roy, A. Karsenty, A. Bertrand,
La sécurisation foncière en Afrique. Pour une gestion viable des ressources renouvelables, Karthala, Paris, 1996, p.
53.
Voir Maurice Kamto, « ‘Les forêts, patrimoine commun de l’humanité’ et droit international », in M. Prieur et S.
Doumbe-Bille (dir), Droit, forêts et développement durable, Actes des 1ères journées scientifiques du Réseau « Droit
de l’Environnement » de l’AUPELF-UREF à Limoges, France, 7-8 novembre 1994, p.79.
« Forest Policy : An Approch paper », Banque Mondiale, 25 octobre 1990.
M. Kamto, Op. cit., pp. 79-80