Documentation historique : Université de Laval – Quebec (http://www.cep-ht.org/www.tlfq.ulaval.ca/axl/amsudant/haiti.htm)
Document 1
À l'origine, l'île était peuplée par les Arawaks (ou Taïnos) et les Caraïbes. Les premiers indigènes avaient nommé leur île, selon le
cas, Ayiti, c'est-à-dire «Terre des hautes montagnes», Quisqueya et Bohio. Lorsque Christophe Colomb aperçut cette île pour la
première fois, l'île d'Ayiti comptait probablement quelques centaines de milliers d'habitants.
Christophe Colomb découvrit l'île en 1492 et la baptisa Española («l'Espagnole») que les cartographes confondront en Hispaniola
(«Petite Espagne»). L'île d'Hispaniola fut organisée en colonie par Bartolomeo Colomb — le frère de Christophe — qui fonda, en
1496, la Nueva Isabela (la «Nouvelle Isabelle», du nom de la reine de Castille), laquelle deviendra plus tard Santo Domingo (Saint-
Domingue, en français). Les Espagnols soumirent les Arawaks et les Caraïbes à des travaux forcés afin d'extraire l'or des mines. En
moins de vingt-cinq ans, les populations autochtones de Santo Domingo furent complètement décimées. Les Espagnols firent alors
venir des Noirs d'Afrique pour remplacer les autochtones. Originaires de diverses ethnies, les esclaves noirs parlaient des langues
africaines diverses. Durant tout le XVIe siècle, Santo Domingo devint la métropole des colonies espagnoles du Nouveau Monde. Dès
que l'île commença à ne plus rapporter de l'or, elle suscita moins d'intérêt pour les Espagnols. Vers 1545, ceux-ci concentrèrent leurs
efforts dans la partie orientale de l'île qui recelait d’or avec abondance.
C'est alors que les Français s'intéressèrent à la partie occidentale de l'île. En dépit des efforts des Espagnols pour repousser les
Français, ceux-ci finirent par occuper la partie ouest de la «Grande Terre». Lors du traité de Ryswick (1697), l'Espagne reconnut à la
France la possession de la partie occidentale de l'île, qui devint alors la colonie de Saint-Domingue (la future Haïti), tandis que
l’Espagne conservait la partie orientale qui était toujours appelée Hispaniola (la future République dominicaine). Dans la partie
française, Saint-Domingue, les Français continuèrent d'importer des esclaves noirs pour travailler dans les plantations de canne à
sucre. Ces derniers avaient développé une langue particulière qui allait devenir le créole.
Document 2
C'est au cours de cette période que fut appliqué le fameux Code noir, une ordonnance de Louis XIV destinée à réglementer le régime
de l’esclavage et précisant les devoirs des maîtres et des esclaves. Bien que ce code ne traitât pas des questions de langue, il
dépouillait l’esclave de toute son identité. En effet, après le baptême catholique obligatoire, l'Africain devenait un Nègre et changeait
de nom, abandonnant ses habitudes vestimentaires et sa langue, puis était marqué au fer rouge et affecté au travail servile.
La colonie de Saint-Domingue devint l'une des colonies les plus riches des Antilles. À la fin du XVIIe siècle, la valeur des
exportations de Saint-Domingue (Haïti) dépassait même celle des États-Unis; cette prospérité reposait sur les cultures commerciales
de sucre et de café pratiquées dans de grandes plantations employant près de 500 000 esclaves noirs et encadrés par 30 000 Blancs. En
1789, à la veille de la Révolution française, la colonie de Saint-Domingue comptait plus de 600 000 esclaves, ce qui était un nombre
nettement supérieur par rapport au nombre des Blancs (moins de 50 000).
La révolte des Noirs débuta dès 1791, alors que plus de 1000 Blancs furent assassinés, et les sucreries et les caféteries, saccagées.
Sous la conduite de leurs chefs — Toussaint-Louverture (dit Toussaint Bréda), Jean-Jacques Dessalines, Henri Christophe et
Alexandre Pétion —, les Noirs menèrent une guerre de libération. Craignant «de voir passer dans des mains ennemies la propriété de
Saint-Domingue», le représentant de la Convention à Paris, le commissaire Santhonax, proclama la liberté des esclaves le 29 août
1793, pour la province du Nord, et le 4 septembre dans la province du Sud. Le 2 février 1794, la Convention confirma cette
déclaration et étendit l'abolition de l'esclavage à toutes les colonies françaises. Toussaint-Louverture se rallia au gouvernement
français, et il fut nommé général de la République et gouverneur de l’île. Mais la menace du rétablissement de l'esclavage par
Napoléon amena Toussaint-Louverture à reprendre les armes contre la France.
En 1801, Toussaint-Louverture prit même possession de la partie orientale de l'île qu'il souhaitait rattacher à Saint-Domingue (Haïti).
En 1802, il fut fait prisonnier par les Français qui l'internèrent au fort de Joux, dans le Jura, où il mourut des rigueurs du climat
(1803). Avec l'aide des Britanniques et des Espagnols, la longue guerre de libération aboutit à la défaite des armées françaises en
novembre 1803. L'indépendance fut proclamée le 1er janvier 1804 et la colonie de Saint-Domingue devint officiellement Haïti
(provenant du mot amérindien Ayiti) la première république noire libre.
Document 3
Le pays fut, dans les faits, gouverné exclusivement par des Mulâtres jusqu'en 1910 et connut une période de prospérité relative. Dès
1906, les compagnies américaines commencèrent à construire des voies ferrées et à exproprier les paysans sans titres de propriété. Les
Américains finirent par occuper militairement Haïti, le 28 juillet 1915. En 1918, tout le pays fut en état d’insurrection. On estime que
la guérilla a fait au moins 15 000 morts. Washington mit alors en place un gouvernement soumis à ses volontés et s’engagea en
contrepartie à fournir à Haïti une aide politique et économique. Au cours de cette période, Les Américains firent adopter trois lois
restreignant la liberté de la presse.
Les Haïtiens conservèrent une forte hostilité envers l'occupant américain qui n'hésitait pas, si la situation semblait l'exiger, à fusiller
des Haïtiens par centaines à la fois. En août 1934, les États-Unis quittèrent Haïti. La fin de l’occupation, ajoutée aux conséquences de
la crise économique mondiale, engendra le retour à l’instabilité et encouragea les velléités dictatoriales des dirigeants locaux.
L'exercice effectif du pouvoir resta entre les mains de l’armée jusqu’en septembre 1957, date à laquelle François Duvalier, dit «Papa
Doc», fut élu président de la République.
Dès le départ, François Duvalier imposa une politique répressive en interdisant les partis d’opposition, en instaurant l’état de siège et
en exigeant du Parlement l’autorisation de gouverner par décrets (31 juillet 1958). Le régime s’appuya sur une milice paramilitaire,
les Volontaires de la sécurité nationale surnommés les «tontons macoutes». Avec cette garde prétorienne personnelle, il neutralisa
l’armée, sema la terreur dans tout le pays et parvint à étouffer toute résistance. Après des rumeurs de complot, il renforça la répression
et, en 1964, il se proclama «président à vie». Il exerça jusqu'à sa mort une implacable dictature (on compta 2000 exécutions pour la
seule année 1967). En janvier 1971, une modification de la Constitution permit à François Duvalier de désigner son fils, Jean-Claude,
comme successeur.
À la mort de Papa Doc, le 21 avril 1971, Jean-Claude Duvalier, 19 ans (d’où son surnom de «Baby Doc»), accéda à la présidence de
la République.