Fiche technique : LA CONCURRENCE MONOPOLISTIQUE
Bruno Desormiere et Emmanuelle Beaubatie
Le terme de « concurrence monopolistique », qui semble paradoxal, fut introduit par
Edward Chamberlin dans son ouvrage The Theory of monopolistic Competition (1933).
Cette notion est ambivalente:
- les entreprises en concurrence monopolistique produisent des biens ou services
suffisamment semblables pour qu’il y ait concurrence.
- les biens ou services produits sont suffisamment différents pour que les
entreprises soient « price makers » et non « price takers ».
Le procédé de différenciation du produit est à l’origine de la situation de
« concurrence monopolistique »
L’origine de la concurrence monopolistique, c’est la volonté d’une entreprise de
regagner le prix comme « variable d’action » qu’elle avait perdue dans le système de
concurrence pure et parfaite. En concurrence pure et parfaite, le prix de marché s’impose à
l’entreprise, tandis qu’en situation de monopole, elle « fait » son propre prix.
Pour redevenir « faiseur de prix », l’entreprise différencie son produit afin que, tout en
restant sur le même marché, ce produit soit considéré comme unique par les acheteurs.
Ainsi, les hypothèses propres à la concurrence pure et parfaite doivent être maintenues, à
l’exception de l’homogénéité : les produits deviennent hétérogènes. On parle donc de
« concurrence imparfaite ». Les entreprises jouent donc sur d’autres caractéristiques du
produit que le prix, on dit qu’il s’agit d’une « concurrence hors-prix ».
La différenciation peut avoir lieu sur différents plans :
- l’environnement du produit : services liés à l’achat, conditions de la vente, localisation…
- caractéristiques intrinsèques du produit : esthétique, solidité…
- valeurs véhiculées par le produit : prestige
La recherche de la maximisation du profit en concurrence monopolistique
Plus la différenciation est efficace, moins les biens sont substituables les uns aux
autres, donc plus la demande à l’entreprise est rigide (l’élasticité-prix n’est plus infinie,
comme en concurrence pure et parfaite). L’entreprise dispose donc d’une plus grande marge
de manœuvre sur le prix. En d’autres termes, si l’entreprise augmente le prix du produit
différencié, elle ne perd à court terme que quelques clients, et non la totalité de la clientèle
comme dans le cas de la concurrence pure et parfaite.
Plus la différenciation est efficace, plus la courbe de demande à l’entreprise se rapproche
d’une droite verticale.
Toute entreprise cherche, selon l’hypothèse de rationalité, à maximiser son profit en
produisant la quantité pour laquelle la recette marginale est égale au coût marginal (voir
schéma).
Q
Q
P
P
Courbe de
demande à une
entreprise en
concurrence
pure et parfaite
Courbe de
demande à
une entreprise
en monopole
P*
E2
La recette marginale : c’est le montant reçu pour une unité supplémentaire vendue.
En concurrence pure et parfaite, recette marginale = prix ; et en situation de concurrence
monopolistique, recette marginale < prix (comme en situation de monopole).
Le coût marginal : c’est le coût engendré par la production d’une unité
supplémentaire du produit.
Equilibre en situation de concurrence monopolistique:
Le concurrent monopolistique vend la quantité (Q1) déterminée l’égalité recette marginale /
coût marginal, au prix correspondant sur la courbe de demande (P1). Le prix de vente est
donc supérieur au coût moyen : l’entreprise fait un surprofit. Ces profits attirent d’autres
entreprises et les incite à entrer sur le marché. Ainsi, sur la longue période, la part de
marché diminue. Autrement dit, la
quantité vendue pour le même prix est
moindre. La courbe de demande se
déplace vers la gauche. Les entreprises
entrent sur le marché jusqu’à ce que la
courbe de demande soit tangente à la
courbe de coût moyen : le prix de vente
du produit est égal au coût nécessaire à
sa fabrication. L’entreprise ne fait plus
de surprofit. Il n’y a alors plus d’intérêt
à entrer sur le marché.
Remarque : Pour la quantité à produire choisie par l’entreprise, le prix et le coût
moyen sont supérieurs au coût moyen minimum auquel les biens pourraient être produits.
C’est l’inconvénient de la concurrence monopolistique : on produit moins, et plus cher.
Ainsi, les consommateurs sont prêts à payer plus cher pour des produits nouveaux.
De l’importance du profit dans une situation de concurrence monopolistique : la
théorie de la concurrence schumpétérienne
J. Schumpeter caractérise l’économie par un processus de « destruction créatrice » :
un innovateur prend toujours la place d’un autre dans une concurrence monopolistique. La
diminution de la production en concurrence monopolistique est compensée par les nouvelles
innovations financées par les profits de l’entreprise. Par ces nouvelles innovations,
l’entreprise reste au niveau de ses concurrents.
Q
P
Courbe de recette marginale
Courbe de coût marginal
Courbe de coût moyen
Courbe de demande
E1 équilibre à court terme
Q1
E1
A long
terme…
E2 équilibre
à long terme
Q
P2
Q2
A court terme,
l’équilibre est
semblable à celui
du monopole mais
instable…
Bibliographie :
ABRAHAM-FROIS Gilbert, Economie politique, Economica, édition, 2001,
p.320-325.
ECHAUDEMAISON C-D (sous la direction de), Dictionnaire d’économie et de
sciences sociales, Nathan, 6è édition, 2003, p.99.
GENEREUX Jacques, Economie politique, Tome 2, Microéconomie, Hachette,
éd, 2004, p. 118-121.
SAMUELSON-NORDHAUS, Economie, Economica, 16è éd, 1998, P. 166-167,
172-175.
STIGLITZ, Principe d’économie moderne, 2è éd, 2000, p. 294-313.
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