Cristiana PAPAHAGI juin 2006 Questionnaire sur les adnominaux spatiaux Introduction Ce questionnaire fait suite et complète le questionnaire sur l’expression du but. Suite aux discussions du 7 avril, ce nouveau questionnaire met l’accent sur : a. l’organisation générale du système des marques adnominales spatiales d’une langue ; b. la dynamique historique de ce système, là où il est possible de la reconstruire. Le questionnaire est organisé en trois parties : A. une introduction avec rationalisation du questionnaire B. le formulaire du questionnaire lui-même, à remplir et à rendre daté ; C. une annexe qui comprend quelques entrées du Lexique utiles pour le remplissage du questionnaire et les conventions de notation pour les gloses. Le présent questionnaire (introduction et formulaire) comprend deux volets : 1. le système général des adpositions de votre langue : cette partie sera discutée lors de la réunion de Lyon les 3 et 4 juillet. Il serait donc souhaitable que vous y apportiez/envoyiez une première réponse. Le plus simple serait de scanner/photocopier dans une grammaire un tableau ou une liste des adpositions, avec vos commentaires en marge. 2. le fonctionnement en phrase de ces adpositions. Ce deuxième volet est donné ici pour base de départ : il ne s’agit pas d’y répondre pour l’instant, mais plutôt de penser à le modifier/compléter en fonction de votre langue. A. INTRODUCTION ET RATIONALISATION I. Vue d’ensemble et systématique des adnominaux spatiaux Par marques adnominales nous comprenons (cf. les articles de Wälchli 2006 distribués) les adpositions et/ou marques casuelles qui accompagnent un nom pour en faire du point de vue syntaxique un complément de lieu et du point de vue sémantique un site. Dans cette section, il s’agira de considérer le système d’adpositions de trois points de vue : morphologique (point 1 ci-dessous), sémantique (2) et syntaxique (3), et y ajouter ensuite une dimension historique (4) dans la mesure du possible. 1 Cristiana PAPAHAGI juin 2006 1. point de vue morphologique Plusieurs types d’organisation des adnominaux ont été retenus suite au questionnaire « jusque ». Il s’agit donc d’encadrer votre langue dans l’un des types suivants ou, le cas échéant, de signaler si votre langue se comporte différemment. Je rappelle que seuls sont pris en compte les adnominaux qui ont ou peuvent avoir un sens spatial. 1.1. langues à système adpositionnel uniquement (i.e. sans cas, ou sans cas à valeur sémantique : dans ces langues, seules des adpositions peuvent introduire un complément de lieu) : a. système adpositionnel réduit : - à une seule adposition simple et plusieurs constructions complexes (locutions) Ex : cas du tagalog : adposition simple : sa, constructions complexes : sa ilalim ‘dessous’, sa gitna ‘entre’, etc. - à 3-5 adpositions simples et plusieurs constructions complexes/ dérivées : Ex : cas du birman : adpositions simples : ka’ ablatif, ko direction, mha statique ; adpositions dérivées : be? ‘côté’, the? ‘intérieur’ ; adpositions complexes : ka’-ne ablatif+ ‘endroit’, ?a-thi’ ‘jusque’ b. système adpositionnel développé : langues qui possèdent plus de 5 adpositions simples, des adpositions composées et des constructions complexes : cas des langues romanes (exemple : en roumain on a 12 prépositions simples spatiales, 8 prépositions composées et une liste ouverte de locutions). Dans ce cas : - adpositions simples (monosyllabiques) : donner la liste - adpositions composées de deux (ou trois) adpositions simples : donner la liste et signaler si la composition est figée (lexicalisée) ou encore analysable pour le locuteur : Ex: en roumain on a d’un côté des composés comme dintre < de + între (de+entre) qui est analysable (comme en français d’entre) et d’un autre côté des composés inanalysables comme deasupra < de+ad+supra (de+à+dessus = au-dessus de). - locutions : donnez quelques exemples si la liste est ouverte, éventuellement organisés selon le type de construction (voir Annexe pour un exemple). Précisez éventuellement leur origine, si elle est connue, p.ex. en roumain locution în spatele ‘dans le dos de’ provient d’un nom de partie du corps/objet (le dos) plus préposition ‘dans’. 1.2. langues à système casuel uniquement : il s’agit de langues où le complément de lieu est marqué par un ou plusieurs cas spécifiques, sans adpositions. Pour l’instant, on n’a pas eu de langue dans cette situation. 1.3. langues à système complexe casuel et adpositionnel : langues qui possèdent des adpositions simples et complexes qui se combinent avec des cas à valeur spatiale et éventuellement avec d’autres éléments. Ex : Cas de l’allemand qui possède un grand nombre d’adpositions simples, dont une partie se combinent avec Accusatif ou Datif (en alternance significative : accusatif de la direction vs. datif de l’état). Par ailleurs, ces adpositions apparaissent aussi comme des préfixes verbaux, seules ou combinées avec des directionnels. 2 Cristiana PAPAHAGI juin 2006 Question annexe : Prière de signaler si un adnominal peut également avoir d’autres emplois (comme préfixe verbal, adverbe, etc.), pour qu’il soit pris en compte dans les questionnaires qui porteront sur la zone verbale. Question annexe : Si votre langue se trouve dans la situation 1.3, prière également de signaler le rapport qui existe entre cas et adposition. Idéalement, il paraît y avoir deux possibilités seulement : a. les cas expriment des relations de base (état/déplacement, séparation/contact, etc.) et les adpositions affinent ces relations. Il s’agit alors d’un cas de distribution sémantique des informations état/mouvement (et son orientation) sur le cas et forme du site sur l’adposition Ex : en latin, le cas ablatif exprime la source d’un mouvement, seul ou avec des adpositions : ex + Abl. note la sortie d’une intériorité, alors que ab + Abl. note la perte d’un contact, le départ ; ex et ab précisent donc la relation exprimée par le cas seul). b. les cas expriment divers types de relations et de sites. C’est donc un cas de conflation sémantique entre information état/mouvement et forme du site. Ex : en hongrois, un cas spatial exprime l’idée de but, de source ou d’état et une forme grossière de site (intériorité, surface, contact) : -ba/-be illatif, -bol/-böl élatif, etc. Les adpositions ( ?) hongroises expriment, elles, des relations complexes comme près de, devant, etc. 2. point de vue sémantique 2.1. Le but est de voir quelle est la distribution des adnominaux (adpositions simples et complexes, cas) entre éléments statiques, dynamiques (qui expriment la trajectoire) ou neutres Ex : le français n’a pas de préposition statique, il a des prépositions dynamiques (de, vers, jusqu’à...) et des prépositions neutres, ie qui sont soit dynamiques soit statiques selon le contexte, et notamment selon le verbe : à, en, dans, sur... : statiques - dynamiques de, depuis, dès, à partir de par, parmi, à travers le long de vers, en direction de jusque+à, en, dans... neutres à en, dans sur/sous devant/derrière etc. 2.2 Les points de la trajectoire : Voir ci-dessous la granularité « idéale » des points de la trajectoire présentée lors de la séance d’avril, avec exemple du français : Question : veuillez remplir le tableau avec les adnominaux de votre langue : 3 Cristiana PAPAHAGI juin 2006 Ex : Granularité sémantique (3x3) composé en direction de initial vers pour - médian - - initial de - final (à, en, dans, sur...) (au-dessus de...) médian (par) à travers initial depuis à partir de final - jusque+à, en... médian - - final par rapport à un repère Traj. par rapport à un site combinée avec un site Ex français simple de la direction de Les paranthèses signalent que l’élément n’est pas spécifique. Si tel est le cas dans votre langue, prière de le préciser. Nota : voir le Lexique dans l’Annexe pour la notion de « repère » 3. point de vue syntaxique Cette section vise à relever le fonctionnement syntaxique des adnominaux par rapport au mot déterminé et de là, à répondre à la question suivante : est-ce qu’il y a une différence de fonctionnement syntaxique entre les adnominaux qui expriment la trajectoire et les autres, statiques ou neutres ? Ex. dans les langues romanes : A la suite de Ruwet (1968) et à partir des résultats du premier questionnaire, j’ai proposé la distinction suivante : les adnominaux neutres ou statiques sont des éléments primaires, dont le rôle est de construire un site (i.e. ils donnent une forme conceptuelle à un objet) ; dans les termes de Ruwet, toute adposition neutre (dans, sur, sous, en...) est réductible à à + une forme d’objet. Par contre, les adnominaux qui expriment la trajectoire sont des éléments secondaires, qui s’appliquent sur un site déjà construit, explicitement (comme en roumain : de la scoalã ‘de à école’) ou implicitement (comme en français : de [*à ] l’école). Cette différence entre les adnominaux neutres/statiques et dynamiques est visible surtout dans la combinaison avec les adverbes de lieu (substituts ou non) et parfois avec les noms de 4 Cristiana PAPAHAGI juin 2006 localisation : ici remplace un Gprép comme dans ma chambre, sur la table et il contient donc conceptuellement une adposition statique. En conséquence, ici ne peut pas être accompagné d’une adposition *dans ici, *sur ici, sauf par une adposition qui exprime la trajectoire : d’ici, par ici, jusqu’ici. Plusieurs types de mots déterminés ont été pris en compte : a. un nom d’objet comme table, arbre, etc. Dans ce cas, les adnominaux spatiaux le déterminent-ils directement ou non ? Tous ou certains seulement ? Ex : en roumain, toute préposition neutre peut accompagner un tel nom : pe masã ‘sur la table’, sub masã ‘sous la table’, la masã ‘à table’, mais les prépositions initiale, médiane et finale doivent être suivies d’une préposition neutre : de pe masã ‘de sur la table = de la table’ et non pas *de masã ‘de la table’. Question annexe: Si plusieurs adnominaux déterminent un seul nom, prière de préciser si cette situation est obligatoire (comme en roumain) ou seulement possible (comme en français de sous la table). On considère également comme deux adnominaux une adposition et un cas comme en allemand auf dem Tisch ‘sur la[D] table’, si le cas a un sens spatial. b. des lieux comme Paris, maison (chez soi), terre, etc. Ex : Dans certaines langues, comme le latin, certains lieux sont considérés comme typiques (Roma ‘Rome, la ville’, rus ‘à la campagne’, domus ‘à la maison’, etc.). Ces noms peuvent avoir un comportement distinct de a. en ceci qu’ils ne nécessitent pas de préposition ; ils sont toujours interprétés comme un lieu. Par contre, ils prennent toujours un cas pour signaler leur position sur la trajectoire : eo rus, eo Romam ‘je vais à la campagne, je vais à Rome’ avec accusatif de la direction. Question: Dans votre langue, existe-t-il des noms qui nécessitent soit moins de détermination spatiale que les autres noms (comme en latin) soit pas du tout de détermination (i.e. ni cas, ni adposition) pour fonctionner comme des compléments de lieu ? c. des noms de localisation qui désignent des Régions (voir annexe) : le devant, l’intérieur, le long. Ils possèdent certaines des caractéristiques d’un nom (par exemple, dans les langues IE, ils prennent un complément du nom comme tout autre nom : le dessus de la table = le fils de mon père), mais pas toujours toutes les caractéristiques (par exemple, en roumain un tel nom ne peut pas apparaître en fonction sujet ou objet, mais en français si : le dessus de la table est sale). Ces noms sont la principale source de création d’adpositions (par grammaticalisation). Question : Pour mesurer leur degré de grammaticalisation : est-ce que des noms comme la surface, l’intérieur, le bord, etc. doivent prendre une adposition ou un cas spatial pour fonctionner comme complément de lieu ? 5 Cristiana PAPAHAGI juin 2006 Ex : en français dans/de la direction de présente une préposition simple (dans, de) devant le nom ; par contre, en allemand Richtung Norden ‘direction nord’ n’a pas d’autre préposition, le nom Richtung fonctionne comme une préposition ; le mot allemand est plus grammaticalisé que le mot français. d. des adverbes. Trois types d’adverbes ont été pris en compte : : i. adverbes démonstratifs (celui-ci, celui-là) : sont-ils accompagnés par un ou plusieurs adnominaux pour exprimer un lieu ? Ex : statique : –Dans quelle bibliothèque as-tu mis les livres d’histoire ? – Dans celle-ci, dans celle du bureau. dynamique : -De quelle maison est-il sorti ? – De celle-là. ii. adverbes de lieu substituts (ici, là-bas), ou interrogatifs spatiaux (où ?), ou autres adverbes de lieu (roum. sus/jos ‘en haut/en bas) : ces adverbes, là où ils existent, sont réservés à l’expression de l’espace et donc ne prennent pas d’adposition/cas. On peut dire qu’un tel adverbe, en tant que substitut de Gprép, contient déjà une préposition : Ex : en français : Il est ici. Il va là-bas. *Il est dans ici. *Il va à là-bas. Toutefois, ils s’accompagnent d’un adnominal dynamique : Il vient de là-bas. Question : Si un tel adverbe existe dans votre langue, quels adnominaux peuvent l’accompagner et lesquels non ? iii. des adverbes de lieu du type de l’angl. home, du roum. acasã ‘à la maison, chez soi’, du norv. hjem/hjemme ‘à la maison, chez soi’ qui sont des Gprép lexicalisés. Ex : en anglais : I’m going to that house./ I’m going Ø home. Question : Est-ce qu’un tel adverbe, s’il existe, prend des adnominaux, et si oui, lesquels ? 4. dimension historique 1. Le premier but de cette section est de construire une typologie des grammaticalisations qui ont donné naissance aux adnominaux. 2. Le deuxième but (à discuter lors de la réunion des 3-4 juillet) est d’offrir une typologie plus générale des évolutions historiques des systèmes adnominaux. Point de départ : Les adnominaux sont généralement considérés comme des éléments récents dans les langues, provenant d’autres catégories, par voie de grammaticalisation. Il existe à l’heure actuelle quelques modèles de ‘clines of grammaticalization’ assez fiables (dont celui de Svorou 1993 est le plus complet) concernant les adpositions statiques/neutres. Il en existe beaucoup moins pour les adpositions ou cas qui expriment la trajectoire. 6 Cristiana PAPAHAGI juin 2006 Modèle d’évolution sémantique des adpositions depuis des noms (Svorou 1993 : 90) : partie du corps animal partie du corps humain partie relationnelle d’un objet localisation dans le voisinage d’une partie d’un objet forme de relief Modèle d’évolution morphosyntaxique (Svorou 1993 : 101) : construction génitive Nom adposition affixe 0 adverbe Question : Veuillez, en remplissant 2.1., mentionner aussi l’origine de chaque terme, adposition ou cas, si vous la connaissez, en précisant si le mot à l’origine de l’adposition est encore vivant dans la langue. Essayez également si possible de projeter le modèle de grammaticalisation cidessus sur un ou deux cas de votre langue, pour vérification. Je précise qu’un autre questionnaire sera sans doute élaboré pour les langues dont la diachronie est bien documentée (français, anglais, polonais, etc.), pour essayer de répondre au point 2 ci-dessus. 7 Cristiana PAPAHAGI juin 2006 2. FORMULAIRE A REMPLIR Nom : Langue : Date : Questionnaire I (systématique des adnominaux) : 1. Du point de vue morphologique, combien d’adnominaux spatiaux existent dans votre langue et de quel type (cas ou adpositions, simples, composés, locutions) ? (éventuellement copiez un tableau dans une grammaire) 2. Du point de vue sémantique : 2.1.quel type de rapport expriment ces adnominaux : statique, dynamique (trajectoire) ou neutre (fonction du contexte) ? 2.2.quels moments de la trajectoire expriment les adnominaux de votre langue ? Prière de remplir le tableau par les adnominaux de votre langue (si une rubrique n’a pas d’expression, n’oubliez pas de le signaler par un zéro, un tiret, etc.) ; signaler également si votre langue distingue des éléments de la trajectoire qui ne figurent pas sur ce tableau : él. simple él. composé final par rapport à un repère initial médian initial Traj. par rapport à un site final médian initial combinée avec un site final médian 8 Cristiana PAPAHAGI juin 2006 3. Du point de vue syntaxique, est-ce qu’il y a une différence de fonctionnement entre les adnominaux qui expriment la trajectoire et les autres, statiques ou neutres ? 3.1.les adnominaux spatiaux déterminent-ils directement ou non un nom d’objet? Tous ou certains seulement ? 3.2.Dans votre langue, existe-t-il des noms qui nécessitent soit moins de détermination spatiale que les autres noms (comme en latin domus, rus...) soit pas du tout de détermination (i.e. ni cas, ni adposition) pour fonctionner comme des compléments de lieu ? 3.3.est-ce que des noms comme la surface, l’intérieur, le bord, etc. doivent prendre une adposition ou un cas spatial pour fonctionner comme complément de lieu ? 3.4.adverbes : iv. adverbes démonstratifs (celui-ci, celui-là) : sont-ils accompagnés par un ou plusieurs adnominaux pour exprimer un lieu ? Exemple statique : –Dans quelle bibliothèque as-tu mis les livres d’histoire ? – Dans celle-ci, dans celle du bureau. Exemple dynamique : -De quelle maison est-il sorti ? – De celle-là. v. adverbes de lieu substituts (ici, là-bas), ou interrogatifs spatiaux (où ?), ou autres adverbes de lieu (roum. sus/jos ‘en haut/en bas) : quels adnominaux peuvent les accompagner et lesquels non ? vi. des adverbes de lieu du type de l’angl. home : est-ce qu’un tel adverbe, s’il existe, prend des adnominaux, et si oui, lesquels ? 4. Sur le tableau/la liste que vous avez fourni(e) au point 2.2 (adnominaux qui expriment la trajectoire), pouvez-vous préciser l’origine de ces adnominaux, si elle est connue ? 5. Avez-vous des modifications à apporter au premier questionnaire portant sur vers-àjusqu’à ? 9 Cristiana PAPAHAGI juin 2006 3. ANNEXE QUESTIONNAIRE I. Lexique Types d’adpositions : 1. adpositions régime simples : adpositions qui acceptent un nom en construction directe : 1.a. uniquement régime : de, à, par, vers, en... Ces adpositions ne peuvent jamais apparaître sans leur régime (nominal ou là) ; elles peuvent également prendre comme régime le verbe, i.e. peuvent fonctionner comme pré- ou postfixes verbaux : lat. ex-ire, angl. get in. 1.b. régime ou « orphelines » : contre, devant... Adpositions qui ont comme régime un nom ou une anaphore zéro : je l’ai posé contre le mur/ je l’ai posé tout contre. En français, certaines des adpositions sous 1.a. ont des formes spécifiques quand elles ont régime zéro : sur/dessus, sous/dessous, dans/dedans. Cf. aussi en anglais in/inside, out/outside... 2. adpositions régime complexes : cf. Ilinski 2003, « adjonctions d’une préposition à un syntagme prépositionnel » : V [P1 [P2 [N]]] : les deux adpositions sont en rapport de subordination et la combinaison est libre, on peut avoir diverses variantes de P1 et de P2 : 2.a. sémantiquement significatives : sortir de sous le lit (chaque adposition garde son sens et sa fonction) 2.b. structurellement significatives : le jardin de derrière la maison (la première adposition n’a pas de sens et elle change la fonction du groupe : ici, complément d’un nom) 3. adpositions régime composées : cf. Ilinski 2003 : V [P1P2 [N]] : les adpositions sont en relation de coordination, en général on ne peut pas modifier P1 ou P2, la combinaison est lexicalisée : de par le roi, par devant notaire, par-dessus tout... 4. locutions : la locution (cf. Borillo 2000) a dans son noyau un élément non adpositionnel (nom, verbe, adverbe...) qui est relié au nom au moyen d’une préposition. Tout le groupe noyau+prép fonctionne comme un équivalent de préposition simple. Forme des locutions françaises : 1. Ø N à/de : face à, dos à, vis-à-vis de... 2. dét N de : le long de 3. prép N de : à flanc de, en tête de... 4. prép dét N de : au bout de, au pied de... 5. adv de : près de, hors de... Les locutions sont le résultat d’un processus de grammaticalisation, elles peuvent être plus ou moins figées. Tests proposés (Borillo 2000) pour mesurer le degré de figement : - sauf après en, présence ou absence d’un déterminant sur le N : si le nom n’est pas déterminé, on a une locution - possibilité d’insérer un élément qui modifie N (adjectif qualificatif, expression de quantité, adverbe...) ou de le remplacer par un synonyme - si la P1 est à/en, locution plus figée que si P1 est dans, sur... 10 Cristiana PAPAHAGI - juin 2006 possibilité d’un sens figuré : si la construction a des sens figurés, elle est une locution avec les parties du corps : si le N désigne véritablement une partie du corps (i.e. un objet), il n’acceptera pas à : *l’oiseau est à l’épaule de la statue. S’il fait partie d’une locution, il est accompagné de à/en Origine des noyaux des locutions et des adpositions en général (cf. Svorou 1993) : 1. noms 1.a. de parties du corps humain ou animal (face, dos, flanc...) => régions extérieures 1.b. noms de formes de relief (vallée, sommet...) => régions externes/internes, perlatif ou directionnel (road) 1.c. noms de parties relationnelles d’objets (milieu, bord...) => régions internes ET TERMINATIF pour fin, bout, limite !! 1.d. noms de relations spatiales abstraites (proximité, longueur...) => direction ou région externe 1.e. (cf. De Mulder 2003) : des prépositions composées devenues noms (le dessus, le derrière) => régions internes 2. verbes : 2.a. co-verbes : être => à, en, dans ; aller, atteindre... => allatif ; sortir, quitter... => ablatif ; passer => perlatif ; tomber, descendre => bas ; se tourner, se diriger => vers. 2.b. participes : cf. angl. following. => diverses relations dynamiques (en général, les verbes produisent des adpositions dynamiques et, rarement, des régions internes) Au vu des données recueillies par l’équipe, il faut inclure une troisième origine des adpositions : 3. adverbes modifieurs : 3.a. d’intensité (type même) => jusque 3.b. de durée (type continuellement) => jusque Région : Terme de Svorou (1993) qui l’oppose à objet et à lieu : la région est une zone dans l’espace en relation avec un objet : - région interne : le sommet de la montagne, le bord du tapis - région externe : près de, devant, aux environs de... Correspond à « (nom de) localisation interne/externe » chez Aurnague et Borillo. Repère : Le repère est un lieu, objet, etc. en fonction duquel est orientée la trajectoire. La distinction entre repère et site est le fait qu’un site entretient une relation avec la cible (sur la table = relation de contact et de support, dans la bouteille = relation contenant/contenu), alors qu’un repère non : il peut être atteint ou non : il va vers la rivière ne dit pas si la cible il va ou non atteindre la rivière, s’arrêter à sa limite, y pénétrer ou la traverser. Ex : en ancien et moyen français devers : nous attaquer... devers le pont de Charenton (Commynes). Devers donne la direction de l’attaque, mais on ne sait pas si les attaquants venaient du pont lui-même, de l’autre côté du pont ou seulement de ses environs. Comparer avec ils nous attaquèrent depuis le pont où depuis marque bien le pont lui-même, sa surface, comme site initial, lieu où se trouvaient les attaquants au début. 11 Cristiana PAPAHAGI juin 2006 La distinction correspond à celle de Jackendoff dans notre Lexique (sur le site) entre bounded path et directional path. Polarité verbale : Dans la tradition française (notamment Laur 1991, Guillet et Leclère 1992, Borillo 1998), on considère que les verbes de déplacement possèdent une polarité : ces verbes, employés seuls (i.e. sans complément) focalisent sur un moment/ une phase de la trajectoire : initial, médian ou final. Un verbe est dit polarisé sur la phase initiale par exemple « lorsque la relation locative est vraie pour la phase initiale du déplacement, mais devient fausse dès lors que le déplacement a commencé. » (Borillo 1998 : 42) Exemple : verbes à polarité initiale : partir, sortir, quitter, verbes préfixés dé- (décoller, détacher...) verbes à polarité médiane : passer, longer, traverser... verbes à polarité finale : atteindre, arriver... Borillo (1998) considère aussi certains des verbes de manière de mouvement (silloner, survoler...) comme des verbes médians, surtout les transitifs directs. Les transitifs indirects comme clopiner, glisser, etc. sont considérés comme non polarisés. En combinaison avec des compléments qui expriment eux-mêmes des points sur la trajectoire, deux situations sont en gros possibles : a. soit il y a congruence (même polarité) : sortir de X, passer par X b. soit il n’y a pas de congruence, alors : i. la combinaison est agrammaticale : *Il se dirige du marché. ii. la polarité du complément l’emporte sur celle du verbe : Il est sorti dans le jardin. Cadre scénique : Terme de Sablayrolles (1995). Le cadre scénique désigne le lieu où se déroule une activité, par exemple dans le cas des verbes de mouvement sans déplacement : Les enfants nagent dans la piscine. Le lieu piscine est le « cadre scénique » de l’activité « nager » : les enfants ne dépassent jamais les limites de ce cadre. Ambiguïté du français : le cadre scénique est introduit par les mêmes prépositions neutres que le point final de trajectoire, ce qui donne lieu à des ambiguïtés : Les enfants courent dans le jardin. (point final ou cadre ?) Cette ambiguïté est résolue soit au moyen du TAM verbal (un aspect accompli donne une lecture point final), soit par le déplacement du complément en position détachée en tête de phrase : Dans la piscine, les enfants nagent et s’éclaboussent. (cadre scénique) II. Définitions qui restent à fixer : -Adposition -Cas III. Conventions de notation pour les gloses : Leipzig Glossary sur le site du Max Planck 12 Cristiana PAPAHAGI juin 2006 Références : BORILLO, Andrée (2000) : « Degrés de grammaticalisation : des noms de parties aux prépositions spatiales » in Travaux de linguistique du CERLICO 13, PU Rennes, p. 257-274 DE MULDER, W. (2003): “La préposition au-dessus de, un cas de grammaticalisation?”, Verbum 25(3), p. 291-305. GUILLET, A., C. LECLERE (1992) : La structure des phrases simples en français. 2 Constructions transitives locatives, Genève-Paris, Droz ILINSKI, Kirill (2000) : La syntaxe atypique de la préposition française, thèse Paris IV (O. Soutet), publiée 2003 chez Champion sous le même titre LAUR, Dany (1991) : Sémantique du déplacement et de la localisation en français : une étude des verbes, des prépositions et de leurs relations dans la phrase simple, thèse de doctorat, Université Toulouse-Le Mirail (dir. A. Borillo) LAUR, Dany (1993) : « La relation entre le verbe et la préposition dans la sémantique du déplacement », in Langages 110, p. 67-84 SABLAYROLLES, P. (1995) : La sémantique spatio-temporelle des verbes de mouvement du français, thèse de doctorat, Toulouse Le Mirail SVOROU, Soteria (1993) : The Grammar of Space, J. Benjamins 13