Module 2 : De la Conception à la Naissance - Item 31
Professeur Henri PLAUCHU
Service de Génétique - Hôtel-Dieu et UFR R.Laennec
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C - Les problèmes de la prise en charge d'un sujet atteint d'une trisomie 21
Dépendance du statut juridique : dès la naissance, le sujet trisomique est protégé par son
statut de personne humaine. Le médecin alors consulté doit connaître les difficultés
médicales de chaque étape de la vie et avoir le souci du développement moteur et intellectuel,
pour la prise en charge médicale et éducationnelle. Les parents ont de plus en charge l'avenir
relationnel, sociétal et professionnel de leur enfant dont la dépendance sera "un poids" à vie.
Les adultes trisomiques 21 (espérance de vie > 50 ans) les plus indépendants pourront vivre
en foyer d'accueil et travailler en CAT (Centre d'Aide par le Travail).
L'évolution du comportement sociétal vis à vis du handicap (génétique ou non) sans solution
thérapeutique mais diagnostiquable in utero, a suivi l'ouverture de l'interruption volontaire
de grossesse. Ce rejet du sujet handicapé c'est installé derrière le souci de soulager les
futurs parents de cette terrible épreuve. Le diagnostic prénatal (DPN) par amniocentèse à
15 - 17 semaines ou par ponction de villosités choriales à 11 - 12 semaines, n'est cependant
pas la panacée, mais une solution temporaire d'évitement pour les femmes à risque (plus de
38 ans ou avec un enfant porteur d'une aberration chromosomique). L'arrivée d'une thérapie
génétique devrait en rendre caduque la pratique. Mais dans quel avenir ?
L'utilisation entre la 14e et la 17e semaine (arrêté du 27/01/1997) du dosage des marqueurs
sériques (HCG, alphafoetoprotéine, oetriol) rend possible une évaluation du risque de
Trisomie 21. Cependant, cette évaluation est incomplète et 30 % des Trisomies 21 échappent
à cette alerte dont le seuil est fixé à un risque de 1/250. En deçà, il n'y a pas lieu de réaliser
un caryotype, sans pour autant que le risque soit nul. Au-delà, l'amniocentèse, seule voie du
diagnostic pour la pratique du caryotype, ne révélera une Trisomie 21 que chez 1 % des mères
ponctionnées. Autant de fausses couches auront lieu à cause de l'amniocentèse, sans révéler
de T21. Cette possibilité de dépistage de risque, puis de diagnostic, devrait être expliquée
par le médecin déclarant la grossesse, et décidée individuellement par chaque couple. Elle est
malheureusement banalisée voir même imposée par les médecins "les plus poltrons". Cette
systématisation devient alors une démarche eugénique au niveau de la société.
La "dérive" du DPN s'est aussi introduite par le biais de l'échographie de surveillance
obstétricale. Sa pratique relève d'une démarche de DPN et devrait être précédée d'une
information préalable et d'un consentement, selon la loi de bioéthique de 1994 et les arrêtés
qui ont suivi (en 1997). Mais l'échographie à 22 semaines, non obligatoire mais remboursée, a
des possibilités de dépistage de signes d'appel morphologiques de la T21. Utilisée ainsi, elle
permettrait le dépistage d'environ 70 % de T21, par la pratique, remboursée par la CPAM, de
l'amniocentèse (très tardive) sur signes d'appel dûment consignés.
Cependant, la combinaison de ces deux dernières techniques n'aboutit pas à un dépistage complet
de la Trisomie 21. Certains couples, bien informés ne s'y trompent pas : le caractère incomplet de
cette recherche ne les rassure pas et ils réalisent qu'il n'y a pas de grossesse sans risque et qu'il
y a un risque de perdre la grossesse lors de la procédure diagnostique.
La prise en charge de la démarche de DPN suppose que l'on connaisse bien les
retentissements sur le couple de cette décision à prendre. En cas de décision par le couple
d'interrompre la grossesse, le travail de deuil ne peut se faire correctement que si chaque
étape est assumée, donc acceptée sans déni de l'acte, ni transfert sur le corps médical.