Module 2 : De la Conception à la Naissance - Item 31
Professeur Henri PLAUCHU
Service de Génétique - Hôtel-Dieu et UFR R.Laennec
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Problèmes posés par les MALADIES GENETIQUES à propos :
d'une maladie chromosomique : la TRISOMIE 21 ; d'une
maladie génétique : la MUCOVISCIDOSE ; d'une maladie
d'instabilité : le SYNDROME D'X FRAGILE.
Introduction
"Les problèmes posés par les maladies génétiques" se définissent ainsi :
Maladies constitutionnelles dues à une anomalie du matériel génétique, que ce soit à
l'échelon d'un chromosome (aberration chromosomique) ou d'un gène nucléaire
(mutation d'un gène hérité selon les lois de Mendel) ou d'un autre élément
fonctionnel génétique (gène mitochondrial, empreinte génomique parentale, gène
régulateur, mutation en mosaïque, disomie uniparentale, facteur épigénétique).
Maladies chroniques orphelines de traitement (la thérapie génique), de diagnostic
(dépendant de l'identification des gènes et des mutations), de connaissances
(maladies rares, de fréquence inférieure à 1/2000 et nombreuses : 8000 items
listés dans le dictionnaire de Mc Kusick débuté en 1966 par le NIH (National
Institut of Health) et mise à jour sous la forme de OMIM [On line Mendelian
Inheritance in Man] alors que les traités de Médecine Interne ne rassemblent que
1000 items de pathologies "non héréditaires").
En fait, en dehors de la traumatologie, de la toxicologie et des maladies
professionnelles, il n'y a guère de pathologies qui ne soient au moins
multifactorielles, impliquant des facteurs génétiques dont la multiplicité ou la
participation rendent la transmission familiale non déchiffrable (notion de terrain
allergique, asthmatique, etc.). Les maladies bactériennes et virales liées à des micro
organismes extérieurs mettent en jeu des aptitudes de défenses innées, non
spécifiques et acquises spécifiques (dont les défauts constituent des troubles
immunitaires génétiques).
Le "A propos" décidé par la Commission "pédagogique" nationale se limite à trois
exemples dont le choix, restreint à l'extrême, est réducteur, déséquilibré (les maladies
autosomiques dominantes ne sont pas représentées à côté des deux autres causes
mendéliennes : la récessivité autosomique et l'hérédité liée au sexe).
Aussi, "les problèmes posés par les maladies génétiques" seront évoqués
indépendamment des pathologies choisies dans l'item 31, d'ailleurs déjà au programme
du cours de génétique clinique du deuxième cycle, succédant aux notions fondamentales
du premier cycle et réalisé en D1 ou P2 ou D2 selon les facultés.
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1. Une maladie chromosomique : la Trisomie 21
A - Définition
Une aberration chromosomique concerne une modification de nombre ou de structure de la
garniture chromosomique de l'homme euploïde, 46,XX ou 46,XY. Les modifications de nombre
(aneusomies) atteignent 1 chromosome en moins : monosomie, viable pour les gonosomes 45,X ; en
plus : trisomie 21 (la plus viable et donc la plus fréquente 1 naissance/700). La trisomie des
grands chromosomes conduit à une mort embryonnaire précoce (absence de nidation, œuf clair,
fausse couche du 1er trimestre).
Si c'est un fragment de chromosome seulement qui est impliqué, on parlera de délétion (5p-,
maladie du cri du chat due à une monosomie partielle du chromosome 5) ou de duplication
(trisomie partielle). Il existe une infinie variété de tels remaniements (la tétrasomie 12p à
l'origine du syndrome de Pallister-Killian est un exemple).
Si l'anomalie porte sur l'excès de l'ensemble de la garniture haploïde (aneuploïdie), il s'agira
d'une triploïdie (69, XXX ou XXY ou XYY), viable en mosaïque.).
B - Manifestations cliniques = problèmes diagnostiques
Un grand nombre de gènes pouvant être absents ou en triple exemplaire (le chromosome 21 en
possède environ 250), le retentissement clinique est actuellement non prévisible pour une
fraction de chromosomes. Seules les anomalies fréquentes ont conduit à la description d'un
ensemble de signes "habituels" (trisomies 21, 18, 13, etc). Comme pour les maladies mendéliennes,
la même anomalie génétique ne donne pas toujours le même phénotype complet.
Il faut donc penser à la Trisomie 21 devant la convergence de signes d'appel cliniques identifiés.
Les conditions de l'indication du caryotype seront alors réalisées et celui-ci sera le seul moyen
de confirmer absolument le diagnostic. Les problèmes diagnostiques (que n'illustre pas le choix
de la Trisomie 21) se posent pour les petites anomalies chromosomiques qui ne sont pas
identifiées sur les techniques classiques du caryotype (microdélétions).
Beaucoup de caryotypes peuvent revenir "négatifs" sans pour autant écarter une délétion (sub-
télomérique souvent, car il y a de nombreux nes dans les extrémités des chromosomes). Seules
les nouvelles techniques de FISH (hybridation fluorescente in situ) de painting chromosome
spécifique ou de CGH (Hybridation Génomique Complémentaire) sont efficaces, si le laboratoire
du CHU a pu les développer (transfert de recherche vers le diagnostic sur mesure).
L'aspect clinique évoluant avec l'âge, les critères cliniques changeront selon qu'il s'agit de
reconnaître un "alzeihmer" chez un adulte de 50 ans avec trisomie 21, un retard mental chez un
handicapé adulte à reclasser, un problème cutané, dentaire, oculaire (cataracte) chez un
adolescent, un aspect d'hypothyroïdie chez un enfant, une leucémie lymphoïde chez un
nourrisson, un ensemble dysmorphique chez un nouveau-né, une atrésie duodénale ou une
cardiopathie malformative (canal atrio-ventriculaire dans 50 % des atteintes cardiaques) chez un
fœtus.
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C - Les problèmes de la prise en charge d'un sujet atteint d'une trisomie 21
Dépendance du statut juridique : dès la naissance, le sujet trisomique est protégé par son
statut de personne humaine. Le médecin alors consulté doit connaître les difficultés
médicales de chaque étape de la vie et avoir le souci du développement moteur et intellectuel,
pour la prise en charge médicale et éducationnelle. Les parents ont de plus en charge l'avenir
relationnel, sociétal et professionnel de leur enfant dont la pendance sera "un poids" à vie.
Les adultes trisomiques 21 (espérance de vie > 50 ans) les plus indépendants pourront vivre
en foyer d'accueil et travailler en CAT (Centre d'Aide par le Travail).
L'évolution du comportement sociétal vis à vis du handicap (génétique ou non) sans solution
thérapeutique mais diagnostiquable in utero, a suivi l'ouverture de l'interruption volontaire
de grossesse. Ce rejet du sujet handicapé c'est installé derrière le souci de soulager les
futurs parents de cette terrible épreuve. Le diagnostic prénatal (DPN) par amniocentèse à
15 - 17 semaines ou par ponction de villosités choriales à 11 - 12 semaines, n'est cependant
pas la panacée, mais une solution temporaire d'évitement pour les femmes à risque (plus de
38 ans ou avec un enfant porteur d'une aberration chromosomique). L'arrivée d'une thérapie
génétique devrait en rendre caduque la pratique. Mais dans quel avenir ?
L'utilisation entre la 14e et la 17e semaine (arrêté du 27/01/1997) du dosage des marqueurs
sériques (HCG, alphafoetoprotéine, oetriol) rend possible une évaluation du risque de
Trisomie 21. Cependant, cette évaluation est incomplète et 30 % des Trisomies 21 échappent
à cette alerte dont le seuil est fixé à un risque de 1/250. En deçà, il n'y a pas lieu de réaliser
un caryotype, sans pour autant que le risque soit nul. Au-delà, l'amniocentèse, seule voie du
diagnostic pour la pratique du caryotype, ne révélera une Trisomie 21 que chez 1 % des mères
ponctionnées. Autant de fausses couches auront lieu à cause de l'amniocentèse, sans révéler
de T21. Cette possibilité de dépistage de risque, puis de diagnostic, devrait être expliquée
par le médecin déclarant la grossesse, et décidée individuellement par chaque couple. Elle est
malheureusement banalisée voir même imposée par les médecins "les plus poltrons". Cette
systématisation devient alors une démarche eugénique au niveau de la société.
La "dérive" du DPN s'est aussi introduite par le biais de l'échographie de surveillance
obstétricale. Sa pratique relève d'une démarche de DPN et devrait être précédée d'une
information préalable et d'un consentement, selon la loi de bioéthique de 1994 et les arrêtés
qui ont suivi (en 1997). Mais l'échographie à 22 semaines, non obligatoire mais remboursée, a
des possibilités de dépistage de signes d'appel morphologiques de la T21. Utilisée ainsi, elle
permettrait le dépistage d'environ 70 % de T21, par la pratique, remboursée par la CPAM, de
l'amniocentèse (très tardive) sur signes d'appel dûment consignés.
Cependant, la combinaison de ces deux dernières techniques n'aboutit pas à un dépistage complet
de la Trisomie 21. Certains couples, bien informés ne s'y trompent pas : le caractère incomplet de
cette recherche ne les rassure pas et ils réalisent qu'il n'y a pas de grossesse sans risque et qu'il
y a un risque de perdre la grossesse lors de la procédure diagnostique.
La prise en charge de la démarche de DPN suppose que l'on connaisse bien les
retentissements sur le couple de cette décision à prendre. En cas de décision par le couple
d'interrompre la grossesse, le travail de deuil ne peut se faire correctement que si chaque
étape est assumée, donc acceptée sans déni de l'acte, ni transfert sur le corps médical.
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2. Une maladie génétique : La Mucoviscidose
A - Définition
Voir enseignement de pédiatrie, à maladie pulmonaire ? digestive ? de la croissance ? stérilité ?
selon les signes cliniques.
B - Problèmes diagnostiques
Un phénotype très variable pour une affection survenant chez un enfant sur 2500 à 3000.
Chaque médecin a une probabilité de plus en plus faible d'en suivre une, et le diagnostic néonatal
"systématique" rend la probabilité d'en faire le diagnostic encore plus faible. Néanmoins, les
formes incomplètes risquent d'échapper à ce maillage et il faut garder ce diagnostic en tête
devant un retard de croissance post natal, une diarrhée chronique par mal absorption ou une
atteinte pulmonaire infectieuse à répétition.
C - Problème de prise en charge
C'est celui de réunir disponibilité et compétence hyper spécialisée pour toutes les familles
concernées (survenue de 300 naissances/an x 20 ans médiane de survie moins les diagnostics par
DPN moins la mortalité précoce = prévalence de 4 à 5000 cas en France). Le ministère de la
Santé, de la Famille et des Personnes Handicapées a créé en France des Centres de Ressources
et de Compétences pour la Mucoviscidose (CRCM). Décidés pour une file active d'au moins 50
malades, les CRCM reçoivent des moyens médicaux pour la continuité des soins, en lien avec les
centres de dépistage néonatal (DNN).
Récemment, la reconnaissance présymptomatique des malades par le dosage sur le test de
Guthrie (sang prélevé sur le nouveau-né à J3 sur papier buvard, adressé par voie postale aux
centre de DNN Régional) a été complété par la recherche de mutation du gène CFTR (Cystic
Fibrosis Transmembrane conductance Regulator). Les homozygotes mutés ou les hétérozygotes
composites (deux allèles mutés différemment) sont ainsi pris en charge en CRC très
précocement. La qualité de vie et le pronostic s'en trouvent améliorés, même si la survie est
limitée autour de 30 ans. Comme beaucoup de maladies mendéliennes, apparemment
monogéniques, des différences phénotypiques importantes dans une même fratrie au génotype
CFTR identique (même mutation) obligent à considérer l'influence de gènes modificateurs. Le
profil global de la maladie serait donc multigénique.
D - Problèmes de descendance
D.1 - Seules les femmes atteintes de mucoviscidose sont fertiles, mais la grossesse peut retentir
sur la maladie ou l'insuffisance respiratoire constituée peut rendre la grossesse problématique.
Le couple n'aurait aucun risque pour sa descendance si le mari est homozygote sain, ce qu'il n'est
possible de savoir qu'à 80 %. Le couple aura un risque de 1 sur 2 si le mari est hétérozygote pour
CFTR, sa femme étant déjà homozygote, transmettra de toute façon un allèle muté.
D.2 - Les hommes atteints ont une azoospermie sécrétoire par agénésie des canaux déférents.
Ils ne peuvent pas avoir d'enfant qu'après ponction épidydimaire, prélèvement de
Spermatozoïdes et Injection de ceux-ci en Intra Cytoplasmique (ICSI) dans l'ovule à féconder,
prélevé par ailleurs. Lors de cette assistance médicale à la procréation (AMP), l'intervenant
médical est confronté aux mêmes types de risques qu'en D.1. Son action permettra la
transmission de père en fils d'une stérilité génétique masculine.
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E - Problèmes de transmission familiale - La demande de DPN
La performance de la recherche mutationnelle ouvre la possibilité de confirmation
diagnostique et tend à remplacer le test à la sueur dont la fiabilité reste le recours ultime. Si
la mutation F508 est majoritaire (70 %), expliquant 49 % des homozygotes, le reste des
mutations se répartit sur plus de 1000 répertoriées en Juillet 2002. L'identification des
apparentés porteurs n'est donc pas toujours possible lorsque les deux mutations du
proposant ne sont pas identifiées et certains couples apparentés au proposant ne connaîtront
pas leur risque réel et ne pourront pas accéder au DPN. Pour les parents directs, si l'enfant
malade est vivant, l'étude indirecte par les haplotypes permet cependant un diagnostic
prédictif chez le fœtus. Cette démarche demande une organisation et du temps et ne doit
pas attendre le début d'une grossesse pour être lancée.
3. Une maladie d'instabilité : le syndrome d'X fragile
A - Les problèmes à soulever sont multiples comparables à ceux des maladies en
général liées à l'X respectant le principe Mendélien (voir cours de 2e cycle).
La transmission par les femmes saines conductrices, déduite du simple raisonnement, est
déstabilisante et d'annonce difficile. La démarche d'un diagnostic prénatal est plus forte que
pour les autres maladies mendeliennes même sans liaison avec la gravité de la maladie. La
tentation d'écarter systématiquement le sexe le des grossesses est éthiquement non
acceptable. Les techniques précoces de diagnostic de sexe sur prise de sang maternel et le recul
de la date limite de l'IVG non "médicale" font rester le généticien et les laboratoires très
vigilants.
B - l'expression des gènes sur le chromosome X
Elle est très complexe chez la femme. Elle est influencée par l'inactivation d'un des deux
chromosomes X. A contrario, une mutation pathogène sur un gène lié à X pourra modifier
l'inactivation qui ne se fera plus au hasard, mais sur l'X porteur de la mutation. Cela évite alors
toute expression clinique chez la femme conductrice. C'est parfois un moyen diagnostique
complémentaire pour d'autres affections liées à l'X que l'X fragile.
C - Une maladie d'instabilité.
Ce terme désigne un type de mutation : La répétition anormalement exagérée d'un codon normal
habituellement répété de façon limitée, qui va s'hériter de façon mendelienne.
Ce codon est très souvent CAG, la maladie est dominante et neurologique (Chorée de
Huntington, gène IT15) pics normaux à 5 et 17, pathologie à partir de 35-37 répétitions,
gravité et précocité au-delà de 48. L'effet est dominant négatif (plusieurs Ataxies
Spinocérébelleuses).
Le codon CTG est répété plusieurs centaines de fois dans la dystrophie myotonique de
Steinert (de 250 dans les formes frustres à plusieurs milliers dans les formes néonatales
graves).
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