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Jihad Y. Kahil Page 2 sur 10 4/18/17
forme n’est pas divisible en parties, chaque fragment qui en subsiste continue à participer de
l’unité rompue, et donc à la suggérer dans la mesure ou il la contient encore en puissance. La
reconstitution, impossible en tant que reprise du processus créateur, reste donc concevable, et
même pleinement justifiée, si on la comprend comme un acte d’intérprétation critique, destiné
à rétablir une continuité formelle interrompue, dans la mesure où, celle-ci reste latente dans
l’œuvre mutilée, et où la reconstitution rend a la structure esthétique la clareté de lecture
qu’elle avait perdue.
Le problème des lacunes
Il est aujourd’hui évident, pour la compréhension moderne de l’art, que l’extériorisation par
l’artiste de l’image intérieure qui s’élabore en lui n’est pas la copie de cette image, mais une
phase décisive de son élaboration : de sorte qu’il n’y a pas, en peinture ou en sculpture,
d’exécution qui ne soit en même temps formulation de l’image. (B. Croce, Estetica, Bari 1950,
C. Brandi, Carmine o della Pittura, Florence, 1947). Or, la démarche créatrice étant par
essence unique, irréproduisible – en toute rigueur, même par l’artiste lui-même qui, ou se
copierait, ou ferait une œuvre nouvelle -, toute reprise du processus est donc impossible en
raison de sa nature même.
Il semblerait à première vue qu’il faille en conclure à l’impossibilité, et renoncer toute
tentative de reconstitution des parties manquantes d’une œuvre mutilée. Ce serait cependant
éluder et résoudre le problème que les lacunes continuent a poser, et qui exige une solution
conforme à l’esthétique nouvelle.
Temps adéquat de l’intervention de la restauration
Le temps mis par l’œuvre d’art pour arriver à nous après son émanation de son créateur, est
nécessaire pour sa maturité, si on peut le dire. Nous avons besoin de cet espace, de cette
distance qui nous sépare de l’œuvre pour pouvoir juger clairement. Car l’œuvre contemporaine
s’est amalgamée avec nos sentiments et avec notre conscience objective. C’est dans la
troisième phase de la vie de l’œuvre que notre intervention sera justifiée.
Problèmes de la restauration d’après l’instance historique
Tout oeuvre d’art du passé a son contexte historique d’où elle émane. Quand les documents
historiques qui la font remonter à une époque, à une région, à un peuple, à une personne, sont
perdus, nous sommes en présence des problèmes de l’instance historique. Le manque de cette
documentation empêche toute intervention de restauration.
Problèmes de la restauration d’après l’instance esthétique
Pour pouvoir apprécier les valeurs figuratives et esthétiques basées sur la philologie et la
tradition, un niveau culturel doit être assuré par celui qui prend la charge de la restauration. Ce
sont ces valeurs qui imprègnent l’œuvre de ses qualités pittoresque et de beauté. L’instance
esthétique comprend les normes de valorisation de l’œuvre selon un standard élevé. La
reconnaissance de ces valeurs est subjective et elle ne peut pas être généralisée.