(Pamphylie et Cilicie) et dans la steppe centrale où elle provient d'une reconquête récente du sol. Nettement parasitaire dans l'Est, elle
joue en revanche en Anatolie occidentale et centrale un rôle pilote du point de vue technique. C'est essentiellement dans le cadre de
ces grandes exploitations de l'Ouest et du Centre que s'est développée la mécanisation.
Agriculture céréalière du plateau et cultures spécialisées des marges
L'agriculture du plateau reste fondée essentiellement sur les céréales d'hiver, blé et orge (environ 16 et 4 millions de tonnes en 1968).
Le seigle et le millet s'y mêlent dans les hautes terres de Cappadoce et de l'Anatolie de l'Est. Cette production céréalière a connu un
important développement, ayant à peu près quintuplé pour le blé et doublé pour l'orge depuis la période antérieure à la Seconde
Guerre mondiale. Mais cette progression a été obtenue essentiellement par l'accroissement des surfaces cultivées, tandis que les
rendements restaient stables ou même parfois décroissaient en raison de la colonisation de terres de plus en plus arides. L'extrême
variabilité de la récolte, en liaison avec celle des pluies, fait peser une lourde hypothèque sur la balance économique du pays,
exportateur de céréales ou déficitaire selon les années. C'est seulement dans la région nord-ouest du plateau, où tombent des pluies
de printemps appréciables, que les cultures dérobées dans la jachère (légumineuses) prennent une certaine importance. Les cultures
industrielles y sont traditionnellement réduites : rose à parfum dans certains bassins pisidiens ; pavot à opium, caractéristique du
centre-ouest du plateau, dans la zone de transition du climat méditerranéen, mais que la difficulté de contrôler le trafic de drogue a
conduit à interdire depuis plusieurs années. Plus remarquable est une culture récente, celle de la betterave à sucre (en Thrace, dans la
région d'Eskisehir, autour du moyen Kizil Irmak et en haute Anatolie orientale) qui amorce, en rotation avec le blé, et avec l'apport
d'engrais chimiques, un système de culture beaucoup plus stable que la monoculture céréalière et qui paraît être la solution de l'avenir.
L'élevage extensif du petit bétail (55 millions de têtes, dont 3,5 millions de chèvres à poil fin, dites chèvres d'Angora), reste important
sur tout le plateau mais destructeur, et il devrait être reconverti sur des bases fourragères liées au développement de l'irrigation.
À cette agriculture céréalière du plateau s'opposent les cultures commerciales et de plantations pratiquées sur les marges
périphériques de climat subtropical. Elles n'y occupent pas d'ailleurs, et loin de là, la totalité du sol. Les céréales couvrent encore de 60
à 70 % de la terre cultivée dans ces régions littorales : blé et orge dans les plaines égéennes et méditerranéennes ; maïs dans les
régions pontiques ; riz un peu partout. Quant à la distribution géographique des cultures spéculatives, elle s'est faite en fonction de
facteurs humains, en liaison avec les étapes historiques de la mise en valeur des plaines basses et de la pénétration du commerce
européen depuis la fin du xviiie siècle. Les cultures arbustives méditerranéennes traditionnelles, olivier et figuier, sont essentiellement
concentrées sur la façade égéenne, la plus anciennement ouverte aux marchés extérieurs. C'est également là, notamment sur les
côtes thraces, que se trouve le grand domaine de la vigne, qui produit surtout des raisins frais et secs mais également du vin ; depuis
le départ des Grecs, la vinification est un monopole d'État. La vigne déborde aussi largement sur le plateau, dans les anciennes
régions chrétiennes (Cappadoce, Anti-Taurus). En outre, le tabac provient, pour plus de la moitié, de la région de Smyrne, pour un
quart, des bassins de la région de la mer de Marmara (plaine de Brousse) et, pour le reste, de la région de Samsun (deltas du Kizil
Irmak et du Yeşil Irmak) sur la mer Noire. Dans l'est de la façade pontique enfin, d'Ordu à Giresun et à Trébizonde, de grandes
plantations de noisetiers ont été peu à peu créées dès la seconde moitié du xixe siècle ; la Turquie est, en effet, le premier producteur
mondial de noisettes, fruits que favorise, sous ce climat humide qui rend difficile le séchage, leur conservation en coques. Une
deuxième série de cultures, de développement plus récent, correspond à la volonté d'utiliser les possibilités climatiques particulières de
ces franges subtropicales : le coton, dont l'essor remonte aux années quarante, dans les plaines cilicienne et pamphylienne plus que
sur la façade égéenne où la place était déjà prise ; les agrumes sur les côtes méditerranéennes ; le bananier à l'extrême sud de la
courbe de celles-ci ; depuis 1935, enfin, le théier, sur la côte pontique de Trébizonde à la frontière soviétique, qui est destiné à la
consommation nationale (le thé a supplanté aujourd'hui le café comme boisson populaire), et qui donne même lieu, depuis 1965, à une
exportation. Dans l'Anatolie subaride du Sud-Est, le pistachier a connu ces dernières décennies une expansion spectaculaire autour de
Gaziantep.